22. Une main tendue vers son cœur



Le cerveau de Taehyung était en ébullition. Cela faisait trois jours qu'il n'avait pas la moindre nouvelle de Jungkook. Trois jours durant lesquels il s'était tordu les méninges à n'en plus finir.

Qui était cet homme ? Pourquoi une telle réaction ? Qu'avait-il bien pu se passer entre eux ? Dans quel état devait être son ami pour qu'il ne réponde ni à ses appels ni à ses messages et loupe la rentrée des classes ?

Assis à son bureau comme chaque soir depuis, les questions affluaient dans son esprit et leur nombre était si grand qu'il ne pourrait les compter même s'il le voulait. Il avait attendu son voisin de table toute la journée, fixant sa chaise vide pendant des heures, mais jamais il n'était venu. Tout cela l'inquiétait. Car s'il savait son cadet peu friand des discussions par téléphone, ce n'était pas dans ses habitudes de sécher les cours.

Pour se rassurer, Taehyung se disait que peut-être Jungkook était tombé malade. Mais au fond de lui, il était certain que ce n'était pas le cas. Et cette certitude s'amplifia le lendemain. Puis le surlendemain, quand il ne vit toujours aucune trace de lui au lycée ni le moindre message sur son portable.

Une semaine entière défila ainsi et son angoisse ne fit que s'étendre, allant même jusqu'à prendre en otage ce pauvre Hyungsik qui n'avait rien demandé à personne.

– Arrête de tourner comme un lion en cage, tu me donnes la nausée.

Taehyung leva les yeux sur son camarade et soupira. Il avait passé sa pause du midi à faire les cent pas dans la cour de l'école et à frapper dans les quelques gravillons qui lui tombaient sous la chaussure.

– J'arrive pas à tenir en place, se morfondit-il.

– J'avais remarqué. Tu devrais peut-être nourrir les petites bêtes qui attendent là depuis des semaines. Ça peut te détendre.

Le grand noiraud pointa du doigt les deux moineaux au pied de l'arbre préféré de Jungkook mais Taehyung grogna, le regard dur. Ce n'était pas le moment de retourner le couteau dans la plaie en lui rappelant que son ami était toujours aux abonnés absents.

En comprenant son erreur, Hyungsik se ratatina sur le banc et pria pour devenir aussi transparent qu'une feuille de papier calque. Kim Taehyung pouvait vraiment faire peur lorsqu'il s'agissait de défendre les siens. C'était le genre de garçon sur qui personne ne miserait de prime abord. Pourtant, tout le monde savait ici qu'il ne valait mieux pas fricoter avec ses instincts protecteurs. Plus d'un avait déjà voulu tester ses limites en approchant son petit favori et s'était cassé les dents.

C'était incroyable comme, en si peu de temps, le nouveau et l'autiste (comme beaucoup les appelaient bêtement) avaient pu nouer des liens aussi forts et aussi solides. Cela avait été le sujet en vogue pendant des mois, car c'était le genre de relation qui dépassait l'entendement de la plupart de ceux qui les croisaient et que la curiosité des adolescents ne connaissait pas de fin. C'était une union hors du commun, dont la nature ne pouvait ni être décrite ni catégorisée.

Pour les avoir souvent observés et côtoyés, Hyungsik avait fini par penser que leur connexion provenait d'une force mystérieuse et invisible qui les poussait sans cesse à s'attirer pour ne pas s'éloigner. L'un n'allait pas sans le deuxième. Taehyung et Jungkook gravitaient l'un autour de l'autre tel un satellite autour de sa planète sans jamais s'arrêter.

– Et si tu allais le voir ? osa-t-il demander après avoir rassemblé son courage.

En l'entendant reprendre la parole, Taehyung s'apprêta à lui jeter des mots bien fleuris au visage, quand il réalisa que la suggestion n'était pour une fois pas si mauvaise que ça. Songeur, il plaça un doigt sous son menton et fit quelques enjambées de plus, avant de finalement se jeter aux bras de son ami pour le serrer contre lui jusqu'à l'étouffement.

– Hyun, t'es un génie !

– Ravi de l'apprendre, grommela le concerné entre deux gémissements rauques. 

𓅪

Se rendre au domicile des Jeon n'était peut-être pas la meilleure idée du siècle, tout compte fait. Maintenant que Taehyung se trouvait devant le portail en bois de la jolie maison dressée à quelques mètres de lui, il hésitait. Une part de lui se disait que Jungkook n'avait pas envie de le voir, ce qui était sans doute le cas vu qu'il n'avait pas une seule fois cherché à le contacter.

Le garçon, brave mais pas si téméraire que ça, ne savait donc pas comment il allait être reçu et avait peur de se prendre une porte au nez. Il se rappelait sans mal ses multiples échecs face à Jungkook. Ce dernier était capable de le mettre K.O. à la seule force d'un mot. Sans parler de son regard qui réduirait n'importe qui au statut de fourmi.

Pour autant, même s'il craignait un rejet, Taehyung ne se laissait jamais vaincre sans au moins s'être battu avant. Jungkook lui manquait atrocement, et il ne pouvait plus supporter de le savoir mal et isolé. Il devait réussir à le joindre d'une manière ou d'une autre, lui montrer qu'il était là pour lui et qu'il ne l'abandonnerait pas. C'était la promesse qu'il lui avait faite, mais ses intentions allaient bien au-delà de ça.

Ragaillardi, il ouvrit le portail et passa le jardin jusqu'au perron de la maison. L'angoisse l'étourdissait mais il ne voulait pas lui céder. Avant de monter les quelques marches, il leva le nez vers la fenêtre de la chambre de son ami, dont les rideaux étaient tirés et ne laissaient entrevoir rien d'autre qu'un brin d'obscurité. Ses sourcils se froncèrent. Jungkook ne pouvait pas dormir à cinq heures de l'après-midi. Sans doute devait-il se trouver dans le salon, ce qui par chance lui permettrait de l'entendre frapper.

Le poing fermé, Taehyung donna trois coups francs sur la porte. Le bruit résonna mais ne s'attarda pas. En silence, il attendit, mais les secondes se succédèrent sans que rien ne se passe. Il cogna une nouvelle fois et attendit encore un peu.

Au bout de cinq minutes, il n'eut pas d'autre choix que de tourner les talons et de s'en aller, déçu.

Personne ne viendrait lui ouvrir aujourd'hui.

𓅪

Le lendemain après les cours, le jeune homme était de retour chez les Jeon, prêt à réitérer sa tentative de voir Jungkook. De la même manière qu'il l'avait fait vingt-quatre heures plus tôt, il cogna à la porte et attendit qu'on lui ouvre. Il attendit, attendit, tourna une fois sur lui-même, nerveux, mais rien ne bougea. Pas même les rideaux qui recouvraient la fenêtre de la chambre.

Résolu à persévérer jusqu'à l'obtention de résultats, il sortit son téléphone et envoya un message à son ami puis attendit encore. Malheureusement pour lui, il devait se rendre à l'évidence qu'aucune réponse ne lui serait délivrée.

Au bout de cinq minutes, il n'eut pas d'autre choix que de tourner les talons et de s'en aller, déçu.

Personne ne viendrait lui ouvrir aujourd'hui non plus.

𓅪

S'il y avait un trait de caractère que l'on pouvait aisément retenir chez Taehyung, c'était bel et bien son obstination. Honte à celui qui penserait qu'il déclarerait forfait après deux défaites. Il était beaucoup plus coriace que ça (utilisez le terme buté si vous voulez), et c'était pour cette exacte raison qu'il était revenu le surlendemain, avec ce même désir de réussir à échanger ne serait-ce qu'un mot avec Jungkook.

Avant de gravir les marches qui menaient à la porte d'entrée, il porta un regard sur la fenêtre toujours masquée par ses rideaux opaques et un soupir lui échappa. Les jours avaient beau passer, le temps était bien la seule chose qui changeait. Il ne se découragea pas, cependant, et frappa trois coups bien audibles comme la veille et l'avant-veille. Puis, il patienta. Il patienta, patienta, tendit l'oreille, à l'affût du moindre bruit annonciateur d'une présence à l'intérieur.

Comme il s'en était douté, il n'y en avait aucun. Absolument aucun. Alors, il fit différemment cette fois et appela.

– Jungkook !

L'écho solitaire de sa voix lui revint et se perdit dans le calme. Il fit quelques pas en arrière, jeta un nouveau regard sur la fenêtre et réessaya.

– Jungkook, je sais que tu es là ! cria-t-il plus fort.

C'était un mensonge, il ne le savait pas vraiment, mais il priait pour que ce soit le cas.

– Kookie, j'aimerais juste te parler. Ou simplement te voir ! Je m'inquiète, tu sais ? Tu ne lis pas mes messages, tu ne viens même pas à l'école. Donne-moi au moins un signe de vie !

Alors que le silence lui répondait, le vent souffla froidement sur ses joues et balaya ses derniers espoirs. Il y avait cru. Il avait sincèrement cru que cette approche marcherait mais ce n'était pas le cas. Face à cet énième insuccès, Taehyung se sentait démuni et profondément inefficace. Sa frustration était telle qu'il pourrait en pleurer. Il ne comprenait pas pourquoi Jungkook s'entêtait à ne pas lui parler. Cela lui faisait mal et le démoralisait.

Résigné à rentrer chez lui, il fit demi-tour, les mains perdues au fond de ses poches, sans remarquer le rideau qui se froissait derrière lui et la silhouette qui le regardait traverser le jardin, un lapin entre les bras.

𓅪

Après la perte de sa motivation liée à sa dernière visite, Taehyung avait laissé filer un jour. Il avait beaucoup réfléchi au fait de revenir ou non, de si cela serait utile ou encore un autre coup d'épée dans l'eau. Il avait passé de nombreuses heures à peser le pour et le contre dans sa tête au lieu de dormir, pour finalement se tourner vers le positivisme et la foi. Il n'avait de toute manière pas d'autre option que celle-là. Rester dans l'ignorance et en suspens lui était impossible. Et puis, il ne pouvait pas passer son temps a fixer une chaise vide. Il avait donc pris une résolution, et pas des moindres.

On était à présent samedi, cela faisait presque deux semaines qu'il n'avait pas eu de nouvelles de Jungkook, et il s'apprêtait à faire une chose qu'il s'était juré de ne faire qu'en cas d'extrême nécessité.

Parler à sa mère.

Taehyung savait pertinemment que cette dernière serait présente à son domicile. À force de venir ici, il avait assimilé sans le vouloir l'emploi du temps des deux adultes (du moins, celui de la femme, car son mari avait souvent des déplacements imprévus).

La perspective de se confronter à madame Jeon ne l'enchantait guère. Elle lui faisait même un peu peur. Non pas qu'il ne s'entendait pas avec elle, leurs rapports étaient beaucoup moins tendus depuis leur conversation nocturne dans la cuisine. Mais pour être honnête, ils n'échangeaient pas énormément tous les deux, seulement quelques futilités lorsqu'ils se croisaient. Il ne pouvait donc s'empêcher de se sentir légèrement culotté de venir à l'improviste chez elle pour discuter de son fils alors qu'il ne connaissait même pas leur situation actuelle.

Pour la famille Jeon, la condition de leur enfant avait toujours été un fardeau, une source de tristesse et de stress. Il était de ce fait très probable que les tensions se soient accentuées à la maison à cause de ce que Jungkook traversait. Taehyung craignait de mettre de l'huile sur le feu. Malgré ça, il ne comptait pas s'arrêter là. Il pouvait bien se faire gronder ou même se faire virer à coup de pied aux fesses si cela lui permettait de savoir au moins comment allait son moineau.

Confiant (en apparence seulement), il prit une dernière longue inspiration et frappa. Pour la première fois depuis ses visites infructueuses, il n'eut pas à attendre longtemps avant d'entendre des pas se rapprocher de la porte d'entrée. Quand celle-ci s'ouvrit devant lui, son instinct de survie manipula son corps et le poussa à adopter une posture fière et grande. Il leva hautement le menton, raidit son dos et ancra ses pieds dans le sol telles les racines d'un vieux chêne, prêt à devoir s'affirmer, à marchander, ou tout simplement à se défendre si l'on tentait de maltraiter son postérieur.

Mais s'il y avait une chose à laquelle il ne s'était en revanche pas préparé, c'était à l'immense soulagement qui apparut sur le visage éreinté de madame Jeon lorsqu'elle le vit.

– Oh, Taehyung, fit-elle, lamentée. Je ne sais plus quoi faire avec lui...

Cet accueil le déconcerta fortement. À vrai dire, c'était surtout le désespoir dans la voix de la mère de Jungkook qui le surprit le plus. C'était comme si, durant tout ce temps, elle avait attendu qu'on vienne lui porter secours ; qu'il vienne lui, plus précisément.

– Madame Jeon, dites-moi ce qu'il se passe, s'il vous plaît, exigea-t-il.

La femme passa ses mains dans ses cheveux décoiffés et soupira d'impuissance. Son corps entier criait au surmenage. Elle semblait complètement dépassée et faisait vraiment peine à voir, avec son teint terne et ses cernes aussi creux qu'un puits.

– Si seulement je le savais, répondit-elle en secouant pauvrement la tête. Jungkook passe son temps enfermé dans sa chambre, il refuse de me parler. Il ne descend même pas pour manger. Ça fait des jours ! J'ai l'impression de le revoir il y a quelques années. C'est un cauchemar...

– Et votre mari ?

– Il n'arrive à rien, lui non plus. Je pensais qu'avec son père, Jungkook s'ouvrirait au moins un peu, mais ce n'est pas le cas. Peut-être que... Peut-être que toi, il acceptera de te voir.

Taehyung se massa la nuque, la mine contrariée.

– Je n'en suis pas si sûr. Il n'accepte déjà pas mes appels, alors...

– Je t'en prie, essaie.

Devant le ton implorant de madame Jeon et l'espoir qui renaissait sur ses traits, Taehyung n'eut pas le cœur à refuser. Il ne l'aurait jamais fait, de toute façon. S'il avait une chance de voir Jungkook, même la plus infime, il la saisirait coûte que coûte. Il hocha alors la tête et fut invité à entrer dans la maison qu'il connaissait à présent sur le bout des doigts.

Sans s'arrêter, ils passèrent le salon puis montèrent à l'étage dans un silence écrasant. Leurs ventres étaient tordus d'appréhension. Ni l'un ni l'autre ne savait comment Jungkook réagirait. Devant la porte close de la chambre, madame Jeon se frotta nerveusement le bras avant de toquer timidement, comme si elle craignait de déranger si elle y mettait plus de force.

Une seconde ou deux s'écoulèrent.

– Jungkook, mon lapin, ton ami est là, finit-elle par annoncer.

Taehyung se rapprocha légèrement pour écouter ce qui se passait de l'autre côté du mur. Durant un instant, il crut percevoir un froissement de draps et il anticipa les bruits de pas de son ami quand il viendrait leur ouvrir. Pourtant, ce ne fut pas ce qu'il entendit ensuite. Car Jungkook n'avait pas bougé. Il ne s'était pas levé, et Taehyung pouvait très facilement l'imaginer au fond de son lit, la tête recouverte de sa couette bleu ciel, à espérer se faire oublier.

– Jungkook, Taehyung est venu pour toi. Tu pourrais au moins... Tu pourrais au moins l'accueillir.

Madame Jeon perdait patience et cela se ressentait à son intonation qui commençait à prendre une teinte plus sévère malgré sa voix tremblante. Son incapacité à faire face à son propre enfant l'avait toujours rendue plus aigrie qu'elle ne l'était réellement. Il était facile de se rappeler toutes les fois où elle s'était montrée brusque avec lui. Ce n'était pas dans ses intentions de l'être, mais elle ne pouvait faire autrement. L'agacement et la déception qu'elle ressentait vis-à-vis d'elle-même la contrôlaient sans qu'elle ne puisse rien y faire.

– Jungkook, ça suffit, maintenant. Sors de cette chambre ! Tu ne devrais même pas pouvoir la verrouiller. On est tous inquiets pour toi. Et Taehyung est-

– Je ne veux pas le voir.

Taehyung sursauta avant de se figer, choqué par le ton tranchant de son ami. Pendant un instant, il se demanda s'il n'avait pas imaginé cette phrase qu'il venait de recevoir comme un coup de poing dans l'estomac. Mais Jungkook renchérit :

– Je ne veux voir personne. Laissez-moi tranquille !

L'ordre était sans appel et son ton montrait bien qu'il serait idiot d'essayer de le contredire. Madame Jeon ne se risqua pas à le faire. Elle savait que lorsque son fils était comme ça, il suffisait d'un rien pour qu'il parte en crise de rage. Les hurlements, les objets renversés, les cheveux qu'il se tirait ; elle était terrorisée à l'idée que tout ça recommence. Elle serra alors fermement les poings pour contenir sa propre fureur, si fort que ses doigts blanchirent. Son nez se plissait comme s'il la picotait. Ses yeux brillaient. En les posant sur son convive, elle lui adressa un regard désolé, ce à quoi il répondit par un secouement de tête. Elle n'y était pour rien. Il comprenait.

Défaite, elle se traîna sans un bruit jusqu'aux escaliers pour retourner au salon, tandis que Taehyung avait décidé de rester seul un moment avant d'aller la rejoindre. Il avait besoin de rassembler ses esprits, mais aussi de calmer les émotions vives qui s'agitaient dans son for intérieur. Son ami allait mal, il le sentait aussi clairement que son pouls battant contre sa gorge. Ces mots si glacés qu'il prononçait, ce n'était pas son cœur mais sa peur qui les lui dictait.

Lorsque Jungkook était effrayé, ses instincts primitifs le poussaient à se terrer comme un animal dans une tanière pour qu'on ne puisse plus l'approcher. C'était un comportement que Taehyung avait appris à reconnaître durant ses longues observations de celui qui n'était encore à l'époque que le garçon aux moineaux pour lui.

Aujourd'hui, il savait mieux que quiconque que ce dernier ne pouvait en réalité pas rester seul. Il n'avait pas besoin que son regard lui soit accessible pour entendre les appels à l'aide qu'il émettait en silence. Il les avait trop de fois entendus pour ça, que ce soit dans la salle de classe, dans les couloirs ou dans la cour du lycée. Alors que d'autres passaient leur chemin en faisant mine de ne pas le remarquer, Taehyung avait fini par comprendre qu'il pouvait à sa manière tendre la main à ce camarade un peu étrange qui ne demandait qu'à être sauvé. Il avait choisi d'être différent des autres, et il ne comptait pas arrêter de l'être. Sa main, il la lui tendrait encore et encore, et répondrait à ses appels autant de fois qu'il le faudrait.

Alors, dans un dernier effort, et avant de le quitter, il appuya son front contre la porte et décida de laisser parler son cœur.

– Kookie, commença-t-il faiblement. Est-ce que tu veux bien au moins m'écouter ?

Il marqua une courte pause pour donner l'opportunité à son ami de se manifester, même s'il savait pertinemment qu'il ne le ferait pas.

– J'ignore complètement ce que tu traverses en ce moment, poursuivit-il alors, mais ce dont je suis sûr, c'est que ce n'est pas bon de tout garder pour soi. Je me doute que tu as peur, même si je ne sais pas de quoi ou de qui. Mais je veux que tu saches que, moi, peu importe ce qui s'est passé, peu importe ce que tu peux croire, je ne te jugerai jamais.

Il se tut une nouvelle fois, mais toujours aucune réponse.

– Tu peux me parler, tu peux me livrer tout ce que tu veux. Je suis de ton côté.

Malgré sa voix qui emplissait le couloir, celui-ci lui semblait profondément vide. Sa gorge le brûlait, sa bouche était devenue sèche. Il avait l'impression de jouer sa vie sur ce discours, ce qui était complètement absurde quand on y pensait. Peut-être était-ce parce qu'il avait une conscience aiguë de l'importance que représentait Jungkook dans son quotidien et que l'idée de le perdre le tétanisait.

Mais il ne le perdrait pas, non. Il se l'interdisait.

– Je te l'ai déjà dit, n'est-ce pas ? reprit-il d'un ton plus assuré. Je serai toujours là. Et pas parce que je te l'ai promis, mais parce que tu comptes pour moi et que moi aussi, j'ai besoin de toi. Alors tu pourras te murer autant que tu le souhaites dans ton silence, je n'abandonnerai pas.

Un faible reniflement traversa le mur, et Taehyung ferma les yeux et soupira de soulagement. Il lui avait bien semblé entendre des bruits de pas, aussi légers que ceux d'une souris. Maintenant qu'il y prêtait attention, il pouvait aussi discerner le son régulier d'une respiration. S'il avait eu des doutes, il n'en avait plus aucun : Jungkook s'était levé et l'écoutait attentivement. 

Une main posée sur la porte juste à côté de sa tête et un doux sourire aux lèvres, il resta quelques secondes sans bouger, profitant de la présence de Jungkook qu'il ressentait malgré la séparation. C'était réconfortant, car même si celui-ci ne disait rien, Taehyung savait qu'il était là, juste là, et cela faisait longtemps qu'il n'avait pas été aussi proche de lui. Cette proximité, il brûlait de la retrouver, sans peine ni cloison. Comme avant, tous les deux, complices au pied de leur arbre et bénis du chant des oiseaux.

Bientôt.

– Je ne te lâcherai pas, Jungkook, murmura-t-il.

Bientôt, il la retrouverait.

Ses paupières se rouvrirent enfin et il s'éloigna lentement.

– Je t'attendrai lundi à l'école. J'espère vraiment que tu viendras.

Cette fois-ci, ce ne fut pas avec de la déception qu'il s'en alla, mais avec l'intime conviction que la chaise inoccupée à côté de la sienne ne le serait plus bien longtemps. 


 𓆩𓆪

Bonjour, comment allez-vous ? J'espère que votre week-end se passe bien. Personnellement, je n'ai que mon dimanche, et un seul jour de congé passe vraiment trop vite... Je suis au moins contente d'avoir pu me réveiller sur un live des garçons. Le Taekook était si mignon 🥰

En parlant de ces deux petits moineaux, je ne peux m'empêcher de repenser au chapitre dernier. Vous m'avez bien fait marrer, avec vos théories et vos airs de mamans lionnes devant l'inconnu que rencontre Jungkook. Certains se rapprochent de la vérité, d'autres en sont loin. À ce jour, une seule personne a réussi à deviner ce qui a pu se passer et l'intrigue n'a donc plus de secret pour elle (je suis toujours aussi choquée qu'elle ait pu tout déceler dans les moindres détails). Je ne dirai rien, cependant. Et elle non plus, j'y compte bien :p

Je vous embrasse et vous dis à bientôt, comme d'habitude ! Prenez soin de vous.

Astëlya

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