Teryel. Même son nom me filait la chair de poule. J'étais certain qu'elle possédait le Livre Cosmique et que c'était par lui qu'elle avait appris comment créer de nouvelles créatures. Elle avait réussi à se l'emparer en faisant des avances à mon père. L'histoire était connue, personne ne l'avait cru si maligne.
Grâce à Corduan, on avait découvert l'identité de ce carnage. Il fallait dorénavant mettre en place un plan au plus vite pour sauver les enfants.

- Pourquoi s'en prend t-elle aux enfants Sylphes ? demanda Aquila.

- Pour vos coeurs, répondit Corduan. Ils sont dotés de particules guérissantes et régénérantes qui vous permettent d'utiliser votre trace. Je ne suis pas sûre encore... Mais je pense qu'elle veut s'en emparer pour régénèrer son propre corps.

- C-comment fait-elle pour... Utiliser le coeur des enfants ? demanda Jenelly.

- Elle les mange, répondit Bellina. C'est le moyen le plus sûre pour intégrer les particules guérissantes à son organisme.

D'abord pâle comme du marbre, Aquila avait manqué de s'étouffer en entendant l'atroce nouvelle. Il sortit rapidement dehors et j'entendis ses poussés d'air et le bruit répugnant du vomi qu'il crachait. Moi aussi ça m'avait retourné mes tripes. Mais ma colère était plus forte, je ne me pardonnerai jamais si aucun de ses enfants ne revenaient vivants.

- Où sont-ils ? lançais-je subitement, déterminé.

J'avais pris de court le père de Nessa. Il avait un peu hésité avant de me dire:

- Sur l'île l'Ombreux, mais elle est quasiment inaccessible à cause du temps qu'il fait. Je pense qu'il faudra attendre au minimum trois soleils avant que la marrée ne descende. En ce moment, elle est rudement violente.

Autrefois lorsque notre satellite passait au dessus de l'île, je la voyais comme une zone privée et inhabitable. On aurait dit un lieu interdit. La marée noire toujours forte autour empêchait quiconque d'y accéder. Mais ce qui nous dissuadait de nous y rendre, c'était les étranges beuglements que l'on pouvait entendre près de la côte. Malgré tout, mon choix était déjà fait.

Aquila m'avait lancé un regard, et d'un commun accord. J'avais compris qu'il m'accompagnerait.

***

J'ai attendu que Nessa s'endorme pour décider à me lever. Ses dernières pensées de la journées ayant été pour ce baiser au bord du lac. Je sentais son esprit se relâcher sereinement. Une liaison unique avait été tissé entre nous. Je savais que je la retrouverai très vite.

- Prêt ? Chuchota Aquila.

J'étais devant la tente de Nessa et malgré moi, je me forçais à ne pas la réveiller. Elle avait des choses à régler de son côté, des problèmes personnels qu'elle refusait à y penser simplement parce qu'elle se préoccupait d'avantage des enlèvements. Mais c'était une affaire à moi et Aquila. Nous avions rassemblés quelques provisions dans le sac d'Aquila, dont un rechange pour moi. Afin d'être discrets, j'avais décidé que Aquila voyagerait sur mon dos sous ma forme sauvage. Andromède brillait trop la nuit, on risquerait d'attirer l'attention trop vite.

Si Nessa faisait tout pour paraître la plus légère possible sur mon dos, Aquila avait clairement pris ses aises ! À deux reprises, je failli flancher et mon pieds se gonflait déjà. J'avais rugi pour lui dire de se redresser, il avait grogné mais il m'avait compris.

- Bon le plan est simple. On trouve le repère des enfants, dit-il d'un ton calme. J'avais pensé qu'Andromède pourrait en prendre cinq sur son dos. Et toi, tu prendrais les trois restants.

Si ils étaient toujours en vie, le plan était envisageable.

- Il faut éviter la lutte, on s'en sortirait pas à deux, reprit-il.

C'était la première fois que nous nous aventurions sur l'île l'Ombreux. Aquila découvrait de plus en plus les côtés obscurs de Catamia, et ça l'avait rendu moins sûr de lui.

- Continue de courir, je vais apaiser ta foulure au pied.

Je sentis aussitôt une lueur dorée caresser ma patte avant. La légère douleur s'était dissipée et me reboosta pour accélérer.

Nous arrivâmes près de la côte du sud-est au lever du jour. La marée était immense, comme d'habitude. Trop puissante pour prétendre se rendre à la nage sur l'île, et trop haute pour
qu'Adromède nous y emmène.

- Il doit y avoir un moyen, si des créatures y vivent c'est soit qu'ils se sont rendus là bas, soit Sierra ne prendrait pas la peine de les créer.

Un nouveau beuglement strident avait jailli au loin. Un homme au martyr en plein transformation ? Un Buffel-Tahal que l'on torturait ? Ce qui était sûre c'est que la bête était terrorisé mais aussi en furie.

Si Nessa était là, elle trouverait un moyen de franchir cet océan impétueux. J'avais senti que son esprit était en train de se réveiller. Qu'aurais-tu fais à sa place Tauri ?

Elle observerait d'abord. L'Elphège était juste au dessus de l'île à moins de trois mille semès de hauteur. J'avais désigné de la tête ma cité qui planait.

- Quoi tu veux rentrer chez toi ? demanda Aquila.

Je devais retourner là haut, c'était le seul moyen pour nous rendre sur l'île.

- Oh, j'ai compris. Ça serait une bonne idée en effet.

J'étais revenu sous ma forme Catams, renversant Aquila en arrière qui n'avait même pas grogné.

Je me saisi du rubis vermeille qui pendait sur mon collier et invoqua ma trace pour transférer une bonne dose de marsolia dans la pierre. Aussitôt, une fine couche bleutée apparu à mes pieds, se dirigeant jusqu'au satellite.

- C'est le pont invisible pour se rendre sur ta terre ? s'émerveilla Aquila.

- On ne doit pas traîner,  dis-je en enfilant mes vêtements. Le satellite va bouger d'ici un quart de soleil. On doit y être avant qu'elle ne soit plus au dessus de l'île.

Nous courrions sur la fine couche de poussière céleste. J'avais oublié à quel point la sensation était incroyable. L'océan se déchaînait sous mes pieds.

- Et tu m'expliques comment on va faire pour redescendre? On se jette dans le vide ?

Le satellite n'était pas rond comme la planète. On aurait plutôt dit une gigantesque île flottante. Il n'y avait pas de centre de gravité comme sur Catamia. C'était la matière rocheuse sous la cité qui provoquait l'attraction au sol.

- Non, j'invoquerai ma trace à nouveau pour nous relier de l'Elphège jusqu'à l'Ombreux.

Il semblait visiblement satisfait de ma réponse.

- C'est du génie, souria t-il. Je t'ai dit que j'étais content de t'avoir comme meilleur ami ?

Oui, et c'était partagé Aquila, pensais-je. Nous courrions à perte d'haleine jusqu'à mon ancien habitat tandis que de l'autre côté de Catamia, Nessa venait de s'apercevoir que nous l'avions laissé.

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L'île L'Ombreux: territoire interdit et impénétrable de Catamia. Les vagues qui l'entourent sont tellement puissantes et imposantes qu'on ne peut y accéder à la nage.

Elphège: nom de la ville maîtresse du satellite qui vole autour de Catamia. Seuls les Griffins y vivent.