3. Pas de rencontre, juste une "clope taxée"






BARNABÉ – CHAPITRE TROIS

-       Tu sais que t'es chiant ? Lance Delphine en mangeant des cacahuètes grillées.

On a fouillé toute la maison pour trouver de quoi grignoter. Mais ici, chez les Basquin, c'est la dèche et il ne nous reste plus que quelques sachets d'apéritifs nuls de soirées d'adultes.

-       Tu sais que t'es encore plus chiante que moi ? Répliqué-je en attrapant des pistaches.

Delphine me foudroie du regard alors que nous sommes tous les deux vautrés dans le canapé à regarder le téléshopping. Un faux-mouvement et les coussins bien mis peuvent se retrouver par terre.

-       Alors avec ton Pythagore, tu le pécho quand ? J'ai des fanfics à écrire pour percer sur le net moi, n'oublie pas. Interroge-t-elle dans le plus grand des calmes.

Je lève les yeux au ciel et réponds :

-       Quand j'serai attiré par les gars.

Delphine décoche son maudit sourire « t'es trop con, tu ne sais pas de quoi tu parles » et me frappe l'arrière du crâne.

-       La prochaine fois que tu me lâches avec son frère relou, décide-toi au moins de faire un truc avec son zgeg. J'ai dû rentrer seule quand même alors que je déteste ne pas pouvoir critiquer les vieilles des bus sans toi... Sur ce coup, t'es pitoyable frangin, je t'ai quand même éduqué de façon à ce que tu sois le plus gros fuckboy de la ville.  Gronde-t-elle en se moquant.

Je me frotte la tête puis la nuque et lui lance une pistache dans la face.

-       Excuse-moi le vagin open-bar d'la night. Oh Théo ! Mon dieu Théo ! Lâché-je en prenant une voix aiguë.

S'en suit une habituelle bagarre où elle me fout des coups dans le ventre et que j'lui tire les cheveux. C'est toujours elle qui gagne. Inutile de préciser que je me fais piétiner par cette folle – Delphine a fait des années de krav maga pour buter les mecs louches la nuit qui s'approchent trop d'elle.

Nous avons réparé les dégâts de notre bagarre quotidienne : sachets de cacahuètes renversés, coussins éparpillés par terre et quelques chaises sans dessus dessous.

-       Tu crois qu'on a un problème avec la violence entre frère et sœur ? Interrogé-je sérieusement.

Elle éclate de rire.

-       Tais-toi esclave, range. Je m'ennuie avec toi. Si ça t'arranges, on peut rendre visite à ton Pythagore, et moi à mon bouche-trou. Ordonne ma sœur en attrapant le balai.

J'ai juré dans ma barbe, en frottant mon dos encore douloureux.

-       Dans tous les sens du terme, avec Théo ton bouche-trou, n'est-ce pas Delphine ? Ajouté-je en haussant les sourcils.

Inutile de vous préciser qu'elle m'a défoncé juste après.

*

La soirée date d'il y a deux jours et nous retournons une nouvelle fois dans le quartier du duo de frères insupportables. Delphine est implacable sur le sujet, si j'arrive à pécho ce gars d'ici une semaine, elle me paye tous les paquets de curly du mois à venir. J'ai accepté le deal, tout ça pour des curly qui prouvent que je n'ai pas d'amis.

La vérité c'est que j'ai une bande d'amis, une vraie bande comme dans les films. Avec les personnes qui essayent désespérément de sortir de la friendzone, ceux qui cherchent à coucher entre eux sans raison ou d'autres qui vont sur les toits pour faire des photos Instagram à 300 likes. Mais cette bande d'amis est en vacances et on n'a clairement pas le temps de faire quoi que ce soit ensemble vu que tout le monde est en train skier. Pour les prochaines vacances, tout le monde va également chercher les cloches de pâques sans moi, étant donné que j'crois pas aux cloches mais au fichu lapin trop mignon.

-       Merde. Grogné-je en réalisant à quel point la situation craignait.

Delphine m'a regardée d'un air curieux et j'ai dû lui réexpliquer ce qui s'est passé la veille.

-       Je suis allé à la librairie avec l'autre con. J'ai fait mon ouf et me suis barré quand celui-ci allait me foutre une raclée. Et là j'me jette dans la gueule du loup, j'fais comment, ce gars c'est la pire version de Dora l'exploratrice au monde et j'veux vraiment pas devenir le Babouche aux bottes rouges. Raconté-je en grimaçant.

Ma sœur a haussé les épaules, l'air de rien.

-       Je n'ai pas capté la moitié de tes références, vu que j'ai grandi avec Inspecteur Gadget, Oui oui, Babar et Il était une fois la vie... Mais là je m'éloigne du sujet, au pire des cas tu te casses une nouvelle fois, ce n'est pas compliqué Barnabé. Affirme-t-elle simplement.

Je l'ai suivie dans l'allée et on est monté sans avoir besoin du code – une personne généreuse sortait au moment-même où on entrait. J'ai dégluti quand la porte s'est ouverte et que la tête du Pythagore est apparue dans mon champ de vision.

-       Encore vous. Lâche-t-il mollement.

Delphine a souri, lui a fait la bise sous mon air ébahi. Est-ce qu'elle vient vraiment de faire la bise au gars qui a l'air de détester tout contact humain ? Il l'a laissé entrer et a levé les yeux au ciel en me voyant.

Ce naze m'a fermé la porte au nez.

J'ai froncé les sourcils et ai levé les yeux au ciel également.

Ensuite, j'ai retoqué en espérant qu'il se décide à m'ouvrir. Delphine a mes clefs. De plus, je n'aime pas l'idée qu'elle soit avec deux gars louches dans un même appart'. Je ne m'inquiète pas pour elle mais bien pour eux.

-       C'est qui ? Ah oui c'est vrai le con de service ! Remarque-t-il en ouvrant.

Pythagore est plus grand que moi mais moins musclé. Toutefois, il fait vachement peur pour un gars de mon âge, avec son air d'anarchiste et son regard de la mort qui tue. Il pourrait nous broyer dans sa main si on l'énervait. En tout cas, c'est l'impression qui se dégage de lui. Dommage que je ne l'ai pas ressenti un peu avant de l'énerver.

-       C'est une clope taxée par entrée. Poursuit-il l'air de rien.

Alors là, non merci. Déjà que je combats chaque jour les clodos qui veulent une clope et que le prix du tabac en France pousse plus vite que mes dents, ras le bol.

-       T'es un vrai crevard en fait. Finit Pythagore en se moquant de moi.

J'ai fini par sortir ma clope en me décidant à la lui passer en pensant à ma sœur. Au dernier moment, je me suis dit que j'avais envie de fumer alors je l'ai placé entre mes lèvres en gage de défi. Il s'en fiche royalement et l'a attrapé d'un mouvement brusque.

-       Au vol ! Mais t'es dingue ! M'écrié-je en entrant.

Delphine et son bouche-trou s'embrassent déjà sur le canap', j'ai reculé et ai soupiré.

-       C'est limite du racket ! Menace et violence ! C'est puni par la loi. Me suis-je défendu en le foudroyant du regard.

On ne vole pas une clope de Barnabé Basquin. Ça ne se fait pas, c'est tout.

-       Si t'es pas content, sors, c'est le deal, une clope, une entrée chez moi.

Et il est retourné dans sa chambre – fin si c'est sa chambre. Je me suis installé sur le canapé face à ma sœur et me suis demandé réellement comment un cinglé comme lui pouvait exister.

-       T'as acheté le PQ ce matin, le mioche ? Hurle le grand-frère sûrement à son petit-frère.

Pythagore est sorti, a mis ses chaussures.

-       Non, j'y vais. Ce sera taxé sur ta fiche de paie, fais gaffe looser.

Et il est parti en claquant la porte derrière lui. Delphine m'a fait un clin d'œil comme pour que je le rejoigne. J'ai froncé les sourcils au point de plisser les yeux beaucoup trop fort. Finalement, je suis sorti également avec l'impression terrible d'avoir fait le mauvais choix. J'ai quand même filer une clope pour entrer ici et je ne suis même pas fichu de demander les clefs à ma sœur. Mince, j'suis juste con.

J'ai rattrapé l'autre fou désagréable qui a encore le seum pour hier et ai essayé de lui sourire du mieux que j'ai pu sans qu'il n'ose me défoncer la tronche. Un sourire super malicieux et naturel. Mon plus beau sourire.

-       On n'est VRAIMENT pas parti sur de bonnes bases tous les deux. Je pense qu'on pourrait recommencer.

L'individu louche s'est moqué de moi en riant.

-       Tu veux que je te fasse manger tes morts ou quoi ? Questionne-t-il pince-sans-rire.

Finalement, j'ai laissé tomber. J'ai zieuté sur la station de bus, j'irai chez Valentine pour jouer à la Wii U.

À la station, une quinzaine de minutes plus tard, j'ai croisé le regard d'une jolie fille. Tellement jolie que j'en ai même oublié ma mauvaise humeur. MA rencontre, ça ne peut qu'être elle. Je lui ai souri d'un air dragueur. Elle a baissé les yeux, timide. Adorablement mignonne.

Je me suis levé pour aller l'aborder sauf, qu'au dernier moment, j'ai dû croiser le regard de Pythagore qui revenait chez lui, PQ à la main, penaud sur son chemin. Il m'a vu également et a brandi ma clope sous mes yeux.

Il a tiré une jolie taffe et m'a fait un doigt de loin avec un sourire.

C'est la première fois qu'un sourire me fait cet effet-là. En effet, ce maudit Pythagore vient de me déclarer la guerre. Et elle sera bien plus terrible qu'il ne le croit.

En pensant au pari, j'ai souri, fier de mon idée clichée mais machiavélique. Je vais le rendre fou amoureux de moi.

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