Leur voyage dura trois jours et trois nuits. C'était la première fois que Katt et Stenvald s'aventuraient aussi loin de leur village et tout leur était nouveau : les routes, les paysages verts, les gens qu'iels croisaient parfois et saluaient de la main... Le jour, iels chevauchaient ensemble sur les chemins de terre, s'arrêtant parfois dans un hameau quelconque pour acheter un peu de nourriture et d'eau. La nuit, iels dormaient côte à côte à la belle étoile, bercés par le chant des criquets. Stenvald consultait son prédilivre de temps en temps mais celui-ci ne contenait aucune nouvelle information, pas plus que celui de Katt.

Le troisième jour, iels aperçurent une grande fumée. Iels se précipitèrent et virent une ferme isolée dont l'un des bâtiments était en flammes ! Tout près, un petit groupe essayait d'éteindre le feu en se passant des seaux d'eau d'un puits.

Sans hésiter, Stenvald et Katt s'empressèrent de les aider, se joignant à la chaîne de seaux. Cela leur prit un long moment mais ils parvinrent enfin à éteindre le feu. Alors les fermiers les remercièrent et leur proposèrent de rester un moment.

Il s'agissait d'une famille de cinq personnes : le père, la mère et les trois enfants. L'aîné devait avoir une quinzaine d'années et ses deux petites sœurs, des jumelles, avaient environ dix ans. Le fils leur proposa à boire et Katt ne put s'empêcher de remarquer qu'il la fixait du regard.

- T'as fini de regarder mes pieds ?! lança-t-elle sèchement.

- Excusez mon fils ! protesta le père. Il n'a jamais vu de fille porter de pantalon. Surtout un pantalon qui montre autant de jambe !

- Oh, c'est mon oncle qui m'a élevée après la mort de mes parents, expliqua Katt. Il est gentil mais il n'a pas beaucoup d'argent. Pour les vêtements, je me suis toujours débrouillée avec ce que je trouvais.

C'était vrai. Elle possédait ce pantalon depuis longtemps et n'avait jamais eu la patience de refaire l'ourlet, ce qui faisait qu'il s'effilochait et dévoilait maintenant la moitié de ses mollets. Visiblement perplexe, le père répéta :

- Oui, mais pourquoi montrer autant de jambe ?

- Parce que le tissu coûte cher et que je préfère acheter des trucs plus utiles.

- Oui, mais pourquoi montrer autant de jambe ?

- Hé ! MES YEUX SONT LA !!!

Elle fit signe à Stenvald, qui comprit et s'enquit :

- Karloth, c'est bien dans cette direction ? On aimerait y arriver au plus tôt.

- Oui, mais pourquoi montre-t-elle autant de jambe ?

- Vous savez quoi ? On s'en fout. Viens Katt. Plus vite on sera à Karloth, mieux ça vaudra.

Les deux ami.e.s repartirent aussitôt. Tandis qu'iels s'éloignaient, ils pouvaient encore entendre le père qui continuait de répéter en boucle :

- Pourquoi montrer autant de jambe ?