Chapitre 28




Dans cette obscurité, Alena, dont les mains étaient moites, aurait voulu le fuir ne serait-ce que pour quelques minutes, mais c'était impossible.

Avait-il assisté de loin à l'échange tendu entre elle et Anastasia ?

Il suffisait d'observer son regard pour avoir la réponse. Dur, impénétrable, ses traits ciselés et ses mâchoires volontaires palpitaient dangereusement.

Alena s'avança en inspirant profondément et arriva à sa hauteur en frottant ses mains.

Il passa sa langue contre ses dents inférieures et même si c'était sexy, elle ne put s'empêcher de frémir. Il la prit par le coude pour l'emmener loin du bruit et poussa une porte qui débouchait sur un couloir plus tranquille.

- Où allais-tu comme ça ? L'interrogea-t-il en la piégeant contre le mur.

- Je voulais prendre un peu l'air après qu' Anastasia soit venue me voir comme prévu.

Il posa sa main au-dessus de sa tête.

- Et je t'avais dit quoi à ce propos ? S'enquit-il d'une voix dangereusement basse.

- Tu m'as dit de ne pas l'écouter et Tamara m'a dit exactement la même chose, répondit-elle en rejetant la tête en arrière pour atteindre son regard puissamment sombre. Le boucher de Moscou hein ?

Il dressa un sourcil légèrement amusé.

- Personnellement je n'ai jamais apprécié ce petit surnom qui ne me sied guère.

Ce petit ton légèrement amusé laissait croire qu'il mentait.

- Oh ! Tu préfères Jack l'éventreur ?

Il fit mine de réfléchir puis arrima son regard sur sa bouche.

- Je ne sais pas moy angel, glissa-t-il d'une voix profondément rauque. Tu préfères lequel ?

Alena poussa un soupir en le dévisageant.

- Tu es dangereux, commença-t-elle en soutenant son regard. Seulement j'ai l'impression que j'ignore à quel point.

Ses traits ciselés devinrent plus durs.

- Et tu n'auras jamais à le savoir, conclut-il fermement. Et moi qui pensais qu'elle t'aurait jeté au visage que tu ne serais pas une soumise à la hauteur, voilà que je découvre qu'elle a préféré dresser un portrait de moi peu flatteur.

Agacé, il posa son autre main sur le mur au-dessus de sa tête pour la piéger totalement. Pendant une brève seconde, elle crut retrouver le Sergueï Azarov du premier jour. Dangereux, menaçant et implacable.

- Elle m'a dit que les femmes n'étaient qu'un divertissement pour toi et que seule la mafia compte à tes yeux.

Il poussa un rire sec.

- Anastasia ne sait rien de moi, et elle n'a aucune idée de ce qui compte pour moi ou non.

Il se pencha en avant pour la couvrir d'un regard dangereusement calme.

- Parle-moi Alena, exprime-toi s'il te plaît.

La jeune femme glissa ses mais derrière son dos et les posa contre le mur froid.

- Et si jamais tu te lasses de moi ? Et si sans t'en rendre compte tu as fait une erreur avec moi ?

Comme il s'apprêtait à lui répondre et qu'elle voyait dans ses yeux des lueurs froides, Alena préféra ajouter à la hâte :

- Je sais que ça fait seulement deux semaines et que c'est trop tôt pour se poser ce genre de questions mais je ressens le besoin de savoir où je vais, parce que la dernière fois que je me suis précipitée et que j'ai fait confiance à un homme ça c'est très mal terminé. Maintenant je suis la soumise d'un homme armé jusqu'aux dents et j'adore ça, je me sens bien avec toi et je me sens en sécurité, mais ça m'effraie.

Son visage devenait de plus en plus sombre, mais il resta silencieux pour la laisser finir.

- Tu es l'homme le plus ténébreux, le plus beau que j'ai vu de ma vie, reprit-elle le souffle de plus en plus court. J'ai peur que tout ceci soit trop beau pour être vrai.

- Est-ce que tu as fini de lire le contrat ?

Alena cligna des yeux, déstabilisée par cette réponse qui n'était pas du tout celle qu'elle attendait recevoir.

- Eh bien pas encore non, bredouilla-t-elle les sourcils froncés. Pourquoi ?

- Parce que ta réponse se trouve à l'intérieur, répondit-il d'une voix qui la fit frémir de tout son corps.

Alors il se ferma dans une énigme qui l'obligea à déglutir.

- Tu as raison, ça fait seulement deux semaines, et personne ne peut prédire l'avenir, mais je suis certain d'une chose. Il arrive parfois que l'on soit convaincu qu'on a trouvé la bonne personne et c'est mon cas. Je me trompe rarement Alena. Tu doutes, tu as peur et je sais exactement la raison qui en est la cause.

- Laquelle ?

- L'abandon, lâcha-t-il sans attendre qu'elle soit prête à l'entendre. Tu as peur d'être abandonnée, c'est pour ça que tu crains tant de t'engager et parce que la dernière fois que tu l'as fait, la dernière fois que tu as laissé un homme rentré dans ta vie tu as dû abandonner ta vie pour le fuir.

Alena déglutit pour mieux avaler ce qu'il venait de lui dire et préféra tourner la tête pour fuir son regard porteur d'une vérité.

Il pressa ses doigts sur son menton pour la contraindre à ce qu'elle ne voulait pas.

Le regarder.

- Est-ce que j'ai raison ?

- Je veux me protéger, tout simplement.

- Je vais prendre ça pour un oui.

Elle n'aimait pas parler d'abandon parce que chaque fois ça la ramenait à ce moment où elle avait voulu connaître l'identité de sa mère biologique avant de se résoudre à ne pas le faire. Parfois elle se retenait de lui demander de la rechercher, mais elle se retenait à chaque fois de le dire à voix haute de peur de découvrir ce qu'étais devenue cette femme. Il avait le pouvoir de le faire, elle le savait.

- Est-ce un crime de ne pas vouloir être abandonnée ou ne pas vouloir abandonner quelque chose auquel on tient ? lança-t-elle sèchement.

- Non, répondit-il les traits durs et la voix inquiétante parce qu'elle était calme et basse. Ce n'est pas un crime de ne pas vouloir être abandonnée.

Il se pencha de toute sa hauteur pour se mettre à la sienne afin de plonger son regard dans le sien. Cette fois-ci il était doux et rassurant, lui donnant l'impression que rien ne pourrait lui arriver.

- Je crois que c'est allé trop vite et c'est pour cette raison que ça m'effraie.

- Rien n'est allé vite, dit-il sans jamais lâcher son menton. Je te voulais et je te veux. Ai-je l'air d'un homme qui aime se montrer patient ?

- Non, répondit-elle en soutenant son regard.

Il encadra son visage avec ses mains et plongea son regard dans le sien.

- Alena il faut que tu lises le contrat et tu comprendras que tu n'es ni une erreur ni un divertissement.

Tout doucement, avec une lenteur qui la fit presque frémir, il captura sa bouche avec une tendresse infinie.

Une onde d'émotions la traversa et elle ne sut comment la contrôler.

- Est-ce que tu veux partir ? Lui demanda-t-il en caressant ses joues avec ses pouces.

- Non, murmura-t-elle en se pinçant les lèvres. Je veux rester ici et profiter un peu.

Depuis le début de cette conversation Alena faisait au mieux pour retenir les larmes qui la menaçaient. Des larmes de peur.

Il fallait à tout prix qu'elle évite de penser à cette peur qui voulait la mordre et prendre le dessus.

Il voulait qu'elle lise le contrat et insistait pour qu'elle le fasse.

Pourquoi ?

Que pouvait-il bien comporter qui puisse la rassurer ?

- Va rejoindre Tamara, je te rejoins dans un instant.

Ce n'était pas une invitation, mais un ordre qui lui donna des frissons. Il n'attendit pas qu'elle exécute cet ordre pour s'en aller dans le couloir.

Envahi par une sourde rage, Sergueï ne lâcha pas des yeux Anastasia qui venait de pousser la porte qui menait à la terrasse et la suivit.

- Tu t'approches encore une fois d'elle et je t'expédie à l'autre bout du monde ! Gronda-t-il si fort que le peu de personnes présentes sur la terrasse préféra la quitter.

- Je t'en pris Sergueï, commença-t-elle en russe avec un sourire séduisant aux lèvres. Tu sais tout aussi bien que moi que cette histoire est éphémère et ne durera pas.

- Tu n'es plus rien pour moi Anastasia, arrête de t'épuiser à ce petit jeu car la seule chose que tu finiras par gagner c'est de vivre ton pire cauchemar comme ça a été le cas pour une certaine femme qui selon mes souvenirs est en Serbie maintenant.

- Tu ne peux pas m'expédier où que ce soit ! Moroslav ne te laissera pas faire !

Sergueï se mit à ricaner sombrement.

- Moroslav sait exactement qui tu es Anastasia, et si j'étais toi, je ferais très attention à ce que ça ne soit pas lui qui se charge de toi, dit-il d'une voix basse et machiavélique. Tu laisses entendre que c'est ton nouveau dominant, mais chaque fois que tu en as l'occasion tu montres que tu désespères que je te reprenne. Moroslav se sert de toi tout comme tu te sers de lui.

- Et toi tu te sers de cette jeune femme comme un nouveau jouet que tu exposes un peu partout.

- Fais attention à ce que tu dis, la prévint-il avec un calme menaçant.

Anastasia le fusilla du regard.

- Je ne peux pas croire que ça soit différent avec elle, tout le monde ici te connaît trop bien pour savoir que c'est seulement un bref passage dans ta vie. Tu n'aimes personne sauf toi Sergueï, tu n'aimes pas les femmes, tu les domines tout simplement.

- Reste loin d'Alena, lui conseilla-t-il sur le même ton menaçant. Ceci est mon dernier avertissement.

Sergueï s'éloigna d'elle les mains dans les poches de son pantalon et quitta la terrasse pour retrouver Alena.

Cette fois-ci c'est lui qui avait la crainte qu'elle prenne la fuite poussé par la peur d'être abandonnée encore une fois.

Les dents serrées, il poussa la porte pour regagner la salle principale.

Certes son comportement passé pouvait laisser croire qu'il mettrait bientôt un terme à cette relation, mais ce qu'ils ignoraient tous c'est que tout était différent avec elle.

Il l'avait su au premier regard et plus les jours avançaient plus il ne regrettait pas d'avoir fait d'elle sa femme.

Sa femme.

Ce n'était pas une décision irréfléchie ni même une décision prise égoïstement. Alena ne connaissait pas son passé et ne voulait pas qu'elle se tente à le découvrir. Il la voulait simplement et maintenant il mesurait avec inquiétude qu'elle n'était pas Tamara. Si elle devait se risquer à partir, ça ne serait pas parce que Anastasia la pousserait à le faire. Elle partirait de peur qu'il l'abandonne tout simplement.

Il la trouva du regard, assise sur la banquette, si belle et désirable. Ce qu'il aimait le plus quand il la regardait c'est son sourire qui ne mettait jamais longtemps à illuminer son visage.

- Alena, l'appela-t-il en arrivant à hauteur des banquettes.

Elle leva la tête vers lui, les yeux nettement plus pétillants que lorsqu'il l'avait laissé.

Il tendit sa main, et elle se leva en s'excusant auprès de Tamara et Galina.

Elle glissa sa main dans la sienne.

- Tu veux rentrer ? Lui demanda-t-elle en fronçant les sourcils.

- Oui, j'aimerai rentrer, cette soirée n'a été que le théâtre de mauvaises ondes et je suis plutôt irrité ce soir.

Sans lui laisser le temps de réagir, il l'entraîna dans la foule puis emprunta le couloir qui menait au parking souterrain.

Ce soir rien n'allait comme il l'avait imaginé et dans le fond il s'était attendu à ce qu'elle soit attaquée, mais il n'avait pas prévu non plus que l'homme qu'il cherchait depuis trois semaines ait tué trois personnes au sud de Moscou.

Un traître plus précisément et qui fuyait le clan de Vladimir et qui s'était aventuré sur ses terres en toute impunité.

Un souci dont il se serait passé et qui mettait ses nerfs à vifs.

- Tu as raison, finit-elle par dire quand ils furent dans la voiture. Cette soirée n'était pas non plus celle que j'avais imaginé.

Elle se racla la gorge puis reprit :

- C'est définitif, les femmes dans ton clan ne m'aiment pas beaucoup à part Galina.

- Tu as volé le patron, ne soit pas étonné qu'elles t'en veulent.

Elle esquissa une légère moue.

- Est-ce que ça va mieux ? Lui demanda-t-il en caressant son menton.

- Oui, murmura-t-il d'une voix pas plus haute qu'un léger murmure. Je voudrais rentrer et lire ce fameux contrat.

Sergueï ne laissa rien paraître et plaça sur son visage un masque impassible.

- À quelle page se situe la réponse ?

- Prends le temps de le lire moy angel, glissa-t-il d'une voix énigmatique. Prends tout ton temps.

Il lui décrocha un regard impénétrable puis démarra en se demandant si son premier plan n'était pas le meilleur...pour lui révéler que désormais elle s'appelait Alena Azarov...

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