Chapitre 15
La musique battait dans ses tempes de la même façon que les battements de son cœur. Alena avait cédé, et avait passé cette robe bleue à col bateau cintrée près du corps. Avant de la laisser près du bar, Tamara lui avait simplement conseillé d'en profiter et en fin de compte, Alena se laissa surprendre à croire qu'elle avait raison. Depuis qu'elle avait fui, elle avait passé son temps à avoir peur et à craindre la mort. Ce soir elle voulait se persuader qu'elle ne craignait rien. D'ordinaire, Alena n'avait jamais été une femme qui aime faire la fête mais plutôt une bosseuse à la recherche d'une stabilité. En s'approchant jusqu'au comptoir elle fut saisie d'un accès d'angoisse, mais ce n'était pas à cause du monde qui l'entourait. C'était à cause des regards qu'elle sentait sur elle et faisait son possible pour les ignorer.
Depuis qu'elle était partie se changer avec Tamara, elle ne l'avait pas revu, et se demandait où il pouvait être. Le plus terrifiant c'est qu'elle avait l'impression de sentir sa paire d'yeux sur elle. C'était comme une dangereuse caresse qui à tout instant pouvait devenir réelle. À cette pensée, son souffle se coupa parce qu'elle se souvenait tout à coup que minuit était proche. C'était de la folie, et à chaque fois que cette petite voix diabolique lui murmurait de dire oui, elle était saisie d'un cruel manque de confiance en elle, s'imaginant basculer dans ce monde sans savoir si elle serait capable d'y survivre.
Cet homme avait été limpide sur ses intentions et sa détermination lui faisait battre le cœur plus vite et plus fort chaque fois qu'elle y pensait. Cet homme la voulait elle et pas une autre. Au lieu d'en être flattée, Alena était terrifiée.
Terrifiée par elle-même et de ce qu'elle pourrait découvrir sur elle.
Elle avait beau ignorer les signaux, ils étaient tous là, la mettant au défi. Elle ne pouvait plus ignorer les réactions de son corps chaque fois qu'il avait laissé entendre qu'il la voulait tout entière.
Ayant l'impression de suffoquer, Alena commanda un martini qu'elle but un peu trop vite, puis en commanda un autre.
- Vous avez l'intention de le boire plus vite que le premier, glissa une voix derrière elle.
Ça y est...
Alena rompit sa respiration alors qu'elle sentait son torse massif contre son dos, comme un étau qui s'était subtilement refermé sur elle.
Une montée de désir inonda son corps et c'était avec un semblant de force qu'elle se retourna pour affronter le mafieux.
Elle aurait voulu ne jamais le faire.
Ténébreux, il avait troqué sa chemise blanche pour une chemise noire qui se conjuguait parfaitement à sa veste. Maintenant elle avait l'impression qu'il sortait des ténèbres.
Elle capta les effluves de son parfum et en fut déstabilisée. Bien pire. Elle capta son regard qui sans vergogne se dardait sur la robe qu'il avait choisie pour elle. Alena déglutit sous les lueurs sauvages qui dansaient dangereusement dans son regard.
- Vous êtes magnifique, dit-il d'une voix si rauque que même la musique n'était pas parvenue à l'atténuer.
- Merci, s'entendit-elle murmurer sans savoir s'il l'avait entendu.
Les lumières tamisées de la salle rendaient son visage encore plus dangereux que dans la lumière du jour. Les ombres qui se projetaient sur son visage durcissaient ses traits ciselés.
- Essayez de vous détendre.
- Comment voulez-vous que je me détende quand j'ai l'impression d'être observée depuis votre arrivée et même avant ?
Un léger sourire lui monta aux lèvres puis disparut lentement.
- Ils n'ont pas l'habitude de me voir parler à une femme qu'ils ne connaissent pas. Après tout, vous êtes nouvelle ici et un nouveau visage attire toujours l'attention.
Alena mangea l'olive en regardant à sa droite et sa gauche.
- Et maintenant ? Que se passe-t-il ?
- Et moi qui pensais que j'étais le seul à anticiper et programmer mes journées, se moqua gentiment le mafieux en posant sa main sur le comptoir, ce qui diminua considérablement l'espace qui lui restait pour respirer. Pourquoi ne pas tout simplement se détendre et accepter cette soirée comme elle vient ?
- Parce que je vous connais suffisamment pour savoir que vous êtes un grand maître des échecs et qu'il y a toujours un après de préparé. Alors je me demande ce qu'il va se passer dans les dix prochaines minutes ou dans l'heure qui va suivre.
Il prit le verre que venait de lui servir le serveur et posa sa main dans son dos pour la guider à travers la foule de danseurs.
Deux hommes de la sécurité détachèrent un cordon qui menait vers un grand carré réservé à une clientèle plus riche.
- Asseyez-vous et profitez.
Elle se laissa tomber sur la banquette et un sursaut de nervosité la poussa à ramener son verre à ses lèvres, mais ce dernier lui fut arraché des mains.
- Assez pour ce soir, décréta l'homme avec un regard qui exigeait aucune réplique. Du moins assez pour le moment. Je veux que vous ayez toute votre tête quand sonnera minuit.
- À quoi bon puisque vous avez déjà un plan b si je refuse d'être...je ne sais même pas ce que je serais.
- À moi...
- Je ne suis pas un objet, répliqua-t-elle sèchement.
Un éclat sévère couvrit son regard.
- Je n'ai jamais dit une telle chose, dit-il froidement. Ce n'est pas comme ça que je vous considère et ce n'est pas comme ça qu'un dominant considère celle qui accepte d'être à lui.
- Pourquoi vous ne le dites pas ? Pourquoi vous ne dites pas le mot exact.
- Parce que j'essaye de prendre mon temps et de vous préserver, répondit-il aussitôt en se penchant en avant les yeux noirs de colère. Mais si vous le souhaitez je peux vous parler en termes plus explicites.
Elle ne savait pas si c'était l'effet du martini mais Alena se pencha en avant.
- Je veux surtout que vous compreniez à quel point ce n'est pas facile pour moi, commença-t-elle sur un ton qui ne lui ressemblait pas. Je suis partie pour fuir un homme et je pensais que...je ne m'attendais pas à tout ça. J'ai seulement l'impression que je suis un bien que vous voulez vous acquérir parce que personne ne vous dit non.
Plus elle parlait, plus ses yeux devenaient sombres et dangereux. Alena inspira difficilement et reprit.
- Je ne peux pas m'empêcher de penser que dans cinq mois je serais peut-être un nom sur une longue liste et je sais que je suis trop émotionnelle pour supporter qu'un homme se joue de moi comme j'ai pu le laisser faire par le passé. Je...non...je ne peux pas...imaginer être juste...
Sans qu'elle ait le temps de réagir sa main agrippa ses mâchoires et il approcha son visage si proche du sien que ses lèvres furent sur le point de s'effleurer.
- Vous n'êtes pas un divertissement de passage, dit-il entre ses dents serrées. Vous n'êtes pas un caprice, et encore moins un objet.
Le cœur battant à la chamade, Alena sentit ses mâchoires s'engourdir sous la pression de ses doigts.
- Vous êtes la première qui retient à ce point mon attention et je me connais suffisamment pour affirmer avec détermination que c'est vous et pas une autre.
Alena trembla de tout son être.
- Et si jamais...
- Dans cinq mois, vous serez encore à moi et dans sept mois aussi, parce que je le sais au tréfonds de mon âme sombre et diabolique.
Sans le savoir, il venait d'allumer en elle quelque chose qu'elle ne parvenait pas à s'expliquer.
Lentement, il desserra sa prise sur ses mâchoires et glissa sa main sur sa joue pour ensuite la glisser dans ses cheveux.
- Je n'ai jamais rencontré un homme aussi déterminé que vous.
- Vous n'avez encore rien vu, dit-il sans attendre en plaçant sa main sur sa nuque.
Ce contact presque intime lui envoya des frissons, mais cette fois-ci, ils étaient brûlants.
- Je vous propose autre chose.
Alena releva son regard qu'elle venait de baisser.
- Il est 20h30, laissez-moi trois heures.
- Trois heures ? Pourquoi faire ?
- Trois heures dans mon monde et ensuite vous serez libre d'en sortir si vous le voulez, expliqua-t-il en pressant sa paume de main sur sa nuque. Laissez-moi trois heures pour vous montrer à quel point je vous veux et ce qui se passerait si vous étiez à moi.
Alena cessa de respirer car elle était proche d'accepter. Elle baissa les yeux en se mordant l'intérieur de la joue.
Quel risque prenait-elle à accepter ?
Trois heures...seulement trois heures...
- Vous le promettez ? Est-ce là une vraie promesse ?
- Je n'ai qu'une parole et elle fait loi.
Alena exhala un soupir tremblant en le regardant droit dans les yeux.
- D'accord, lâcha-t-elle avant de ne plus pouvoir le dire.
Ce que cette réponse provoqua en lui était si sauvage qu'elle voulut reculer. Le visage dur, ses mâchoires volontaires contractées, quelque chose d'inexplicable venait de changer la couleur de ses yeux, comme si ses pupilles s'étaient brusquement dilatées.
Il termina son verre d'un trait et lui prit la main sans attendre.
Alena le suivit, tétanisée par cette aura de puissance qui émanait de lui à tel point que beaucoup de regards se mirent à converger sur lui et sur elle.
Le mafieux poussa une porte qui menait dans un couloir qu'elle ne connaissait pas encore puis ouvrit une porte. Il l'entraîna à l'intérieur de la pièce qui ressemblait à une salle de repos et prit son visage en coupe.
- À partir de maintenant vous devez me faire confiance, lui dit-il d'une voix sérieuse. Est-ce que vous me faites confiance ?
Alena avait l'impression que toute sa vie reposait sur cette simple question.
À l'instant précis où elle lui répondrait, Alena savait qu'il n'y aurait plus de retour en arrière. Pendant trois heures elle n'allait pas seulement basculer dans son monde.
Elle serait entièrement à lui.
À cette pensée, tout son être se mit à palpiter et elle déclara sans réfléchir plus longtemps :
- Oui.
Il rejeta sa tête en arrière un peu plus, plongeant son regard intense dans le sien.
- Dites-le, ordonna-t-il doucement. Je veux vous l'entendre dire.
- Je vous fais confiance.
Une immense satisfaction inonda son regard métallique.
- Je vais éteindre la lumière, la prévint-il d'une voix rauque. Je veux que vous me laissiez faire.
Alena se mordit la lèvre inférieure en resistant à la tentation de lui poser des questions et elle se retrouva plongée dans le noir.
Aussitôt sa respiration devint quelque peu erratique et une chaleur étouffante l'enveloppa.
Ses mains puissantes se posèrent sur elle, et à ce contact elle ne bougea plus, laissant les ténèbres s'emparer d'elle en restant immobile.
Le cœur battant à la chamade, Alena s'accrochait au parfum épicé du mafieux qui soudain, fit glisser la fermeture de la robe.
Fermant les yeux, elle se raccrocha à la promesse qu'elle venait de sceller et ne posa aucune question.
Elle fut balayée par une indéchiffrable sensation lorsque ses doigts se glissèrent sous les manches courtes de la robe. Sa gorge se serra convulsivement sous l'effet troublant de ce moment jusqu'alors jamais vécu.
Elle sentit la robe tomber à ses pieds et elle faillit pousser un hoquet qu'elle ravala. Les doigts du russe remontèrent jusqu'à ses épaules pour ensuite les faire glisser le long des ses bras. Il les arrêta à la hauteur de ses hanches et elle cessa de respirer, un frisson d'anticipation dans la nuque.
- Tout va bien moy angel.
Ce n'était pas une question mais une affirmation. Les teintes profondes de sa voix laissaient entrevoir à quel point ce moment était tout aussi intense pour lui que pour elle. Alena pouvait entendre les respirations du mafieux se faire plus instables.
Ensuite tout son corps se figea quand elle sentit sa culotte disparaître.
Elle était nue, complètement nue et se savoir plongée dans le noir effaça un peu de sa nervosité.
Contre toute attente il l'aida à enfiler un vêtement lourd et elle devina en humant le parfum qui s'en dégageait qu'il s'agissait de sa veste. Il ferma les boutons et ralluma la lumière.
Alena ne s'était pas trompée. Il s'agissait bien de sa veste qui était dix fois trop grande pour elle et qui par miracle descendait jusqu'à ses genoux.
En-dessous elle ne portait rien, elle était complètement nue et à en juger le regard du mafieux elle comprit que c'est exactement ce qu'il voulait.
Il la dévora d'un regard qu'elle ne sut interpréter tant il était façonné de multiples lueurs.
- Allons-y...
Il enferma sa main dans sa paume chaude et l'emporta avec elle dans un autre couloir qui la rendit nerveuse. Par chance il n'y avait personne et elle se glissa dans la voiture garée dans le parking souterrain avec un soupir de soulagement.
Dès qu'il demarra, elle sut alors que le compte à rebours avait déjà commencé.
Bientôt elle serait dans son antre, entièrement vouée à cet homme et à ce monde qu'il voulait lui faire découvrir.
Un frisson d'excitation l'entraîna dans un tourbillon de pensées auquel il mit fin en lui prenant la main qu'il porta à ses lèvres.
Ensuite il se mit à parler en russe et Alena n'eut pas besoin de le parler pour comprendre qu'il était impatient de la faire sienne...
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