I. Chapitre 7 fin
« Le Maistre Écuyer se tenait dans la cour des Écuries Ducales. Il avait la mine sombre et le regard déterminé.
- Comme vous le savez, votre formation est terminée. Le Duc a décidé qu'au vu de l'excellence de votre promotion, c'est le Roi lui-même qui vous adoubera.
Un silence de sidération s'abattit dans la cour centrale.
–Les mariages des deux Princesses Royales ont lieu dans une semaine et demie au Château d'Argalh. Demain vous partirez avec vos Chevaliers référents afin d'arriver à temps. En effet vos adoubements ainsi que celui du Prince Héritier Calh auront lieu la veille du double mariage. Après les festivités, les princes Tavhan et Ardhan auront pour mission de parcourir le pays pour sélectionner des pur-sang afin de renouveler les lignées ducales. Les Maisons de Luhr, de Vuhr et de Tuhr pourront regagner leurs domaines. Le Duc vous félicite encore pour la naissance de votre fils Chevalier, et espère que vous saurez lui apporter par votre exemplaire renommée, l'éducation qu'il mérite.
Tous se regardaient sans parler. Le Chevalier de Tuhr la fixait avec désespoir.
–Eléa restera au Château pour me seconder.
La fin du discours de Maître Domkan résonna dans l'air comme un coup de tonnerre !
Rankan jeta un sourire dédaigneux vers elle et entraîna Taran avec lui.
Falan et Shalan lui adressèrent des regards désolés en suivant leur Chevalier référent.
Les deux princes quant à eux, après s'être imaginés parcourant le pays avec « leur » Maistre Écuyer, comprenaient qu'Eléa leur échappait pour un long moment. Mais avant de partir Ardhan s'approcha d'elle et lui murmura à l'oreille.
–Nous serons Chevaliers à notre retour, c'est donc mon cousin et moi-même qui pourrons finir ta formation... Attends-nous bien sagement jolie Eléa, il nous tarde déjà de te retrouver...
Et ils s'éloignèrent en courant, excités par les aventures à venir.
Le Chevalier de Tuhr n'avait toujours pas bougé, figé dans une colère froide, les poings serrés.
Eléa elle, était sonnée. Elle ne comprenait pas. Si elle n'allait pas aux mariages Princiers avec les autres, cela voulait dire qu'elle ne serait pas adoubée cette année ! Elle voulut ouvrir la bouche pour demander des explications mais Maître Domkan parla avant elle.
–Tu m'as beaucoup déçu Eléa, dit-il d'une voix glaciale, et il lança un regard noir au Chevalier derrière elle. Tu t'es attiré la colère du Duc qui refuse de valider ta formation, car il estime que tu n'es pas prête. Je ne peux pas aller contre sa volonté, acheva-t-il d'une voix éteinte.
Puis il se tourna vers l'homme.
–Maître Ghil m'a demandé de vous prier de vous rendre immédiatement dans ses appartements... Vous aussi Chevalier vous m'avez beaucoup déçu. Eléa, Natéa t'attend pour préparer les chevaux pour le départ ! Admonesta-t-il la jeune femme.
Elle lança un regard implorant vers son amant mais n'osa pas désobéir aux ordres du Maistre Écuyer et elle prit la direction des Écuries Provisoires. Maître Domkan se retourna et partit d'un pas lourd vers le bâtiment principal. Sa silhouette s'était voûtée et il semblait avoir vieilli de mille ans...
Arrivée aux Écuries Provisoires, elle s'effondra en pleurant. Il fallut toute la patience de sa jeune amie pour qu'elle arrive à lui parler de la décision injuste du Duc. Natéa ne savait pas quoi faire pour calmer le désespoir de la jeune femme. Elle lui caressa les cheveux en la laissant pleurer sur la fin de leurs rêves...
Pendant ce temps, le Chevalier de Tuhr se présentait devant la porte du Maître Bibliothécaire. Celui-ci lui ouvrit l'air grave et l'entraîna vers son bureau.
–Je suis heureux de voir que vous êtes venu rapidement, sans passer voir le Duc avant...
Les mâchoires et les poings du Chevalier se serrèrent violemment. L'homme reprit prudemment.
–J'étais présent hier soir lors du repas donné en l'honneur de nos élèves, et j'ai pu observer certaines choses qui m'ont, comment dirais-je,... alerté. Et je pense que le Duc les a également vues et qu'il s'est senti obligé d'intervenir. Les princes ne sont que de jeunes loups joueurs, mais il ne faudrait pas qu'ils tombent amoureux trop tôt, et surtout pas de la même jeune femme...
Le Chevalier opina brièvement.
- J'ai également remarqué vos regards sur Eléa...
De Tuhr se raidit à nouveau.
–J'ai pris la liberté de suivre notre jeune amie quand elle a quitté la réception peu après vous...
Ce n'était pas la peine de développer davantage. Le Chevalier avait pâli et ses épaules s'étaient affaissées comme sous un trop lourd fardeau.
- Eléa vous a fait le plus beau cadeau qu'une jeune fille puisse faire à un homme... continua doucement le Maître Bibliothécaire. Remerciez les Dieux pour cela car vous êtes un homme chanceux Chevalier. Mais vous ne pouvez pas lui demander plus. Eléa est jeune, douée, vous ne pouvez pas la condamner à vivre dans l'ombre et dans la crainte que votre secret soit découvert.
–Mais je l'aime ! s'écria de Tuhr, le visage déformé par la douleur.
La voix de Maître Ghil se durcit.
–Vous avez une épouse et surtout un fils désormais ! Voulez-vous lui offrir la guerre en héritage, ou pire le laisser orphelin de père ?! Car c'est ce qui arrivera si vous ne retrouvez pas la raison ! Le Duc ne vous le pardonnera jamais. Il faut l'oublier, reprit-il doucement.
–Mais je ne peux pas ! Je ne veux pas !
–Vous savez que c'est la seule solution pour la sauver elle.
Le Chevalier prit sa tête entre ses mains et s'effondra sur un siège. Maître Ghil s'approcha de lui et l'entendit pleurer tout bas.
–Elle est si belle Maître... Si pleine de vie... Si femme... murmura de Tuhr.
–Je sais Chevalier, je sais... lui répondit l'homme sur le même ton.
–Si je la perds à quoi bon continuer de vivre ?!
–Vivez pour votre fils et remerciez les Dieux d'avoir connu l'amour d'Eléa... »
Extrait de
Le Maistre Ecuyer Royal
Léa Northmann
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