Chapitre 41 pdv Aiden


Elle consent à retourner à l'appartement avec moi mais seulement à contre cœur. La distance qu'elle impose entre nous me brise l'âme. Ses bras sont croisés, hors de ma portée et elle s'écarte d'un bond dès que je m'approche un peu trop d'elle.

Je fais tout pour agréer à ses demandes, même les plus silencieuses. Je fais venir Luke et David pour être sûre qu'elle ne manque de rien. Ils passent une bonne heure avec elle, enfermée dans la chambre, avant que David ne ressorte.

Il vient me trouver immédiatement. Par égard pour Kayla, j'ai tenu mes oreilles de loup à distance de ce qu'ils se sont dit mais ne pas savoir m'est insupportable.

— Elle recommence à avoir de la fièvre, m'indique-t-il soucieux, j'ai réussi à la convaincre de voir un médecin.

Je me lève d'un bond, demandant aussitôt à ce que quelqu'un vienne par l'intermédiaire d'Owen.

— Comment se sent-elle ? questionné-je tout bas.

— Elle est étrangement calme.

Il reste vague, j'ai compris dès le début que son allégeance allait toute entière à Kayla. Il ne peut pas tout me dire ou il la trahirait elle.

— Je pense qu'il vaut mieux que tu restes à distance... indique-t-il tout de même.

Ça on l'avait compris tout seul, grommèle Key blasé. Je passe mes mains sur mon visage en soufflant un bon coup. Il faut que je fasse quelque chose même si je ne sais pas quoi.

— Si elle accepte de prendre mon énergie... proposé-je avec hésitation.

Normalement, cela fait toujours baisser sa température. Ce serait au moins ça pour me rendre utile, même si ça la rend aussi peut-être dans cet état.

David hausse les épaules, ni un oui, ni un non.

— C'est la pleine lune demain, annoncé-je bien qu'il le sache tout autant que moi. Dis-lui bien que je ne serais pas là mais que Key le sera.

Et tu te comporteras bien, avisé-je en prévoyant tout débordement. Je serais un ange, promet-il sarcastique. Fais au moins en sorte qu'elle ne nous déteste pas plus que ce n'est déjà le cas. Elle ne nous déteste pas, Aiden, contredit-il sérieusement. Il lui arrive simplement trop de chose en même temps.

Il faut qu'on retourne voir sa grand-mère pour la convaincre de nous éclairer, indiqué-je. Vu sa réaction, on ne peut guère espérer mieux.

Nous sommes coupés par l'arrivée du docteur qui s'en va au chevet de Kayla. Quelques minutes plus tard, il revient avec un diagnostic qui ne l'inquiète pas. Elle souffre d'après lui de surmenage. Du repos, voici le remède qui lui conviendrait le mieux.

Ses bêtas partent quand Kayla finit par s'endormir. Je parle une dernière fois avec
Luke de ce qui s'est passé au Zoo sans recueillir d'informations supplémentaires. Les responsables du parc ne savent pas comment un loup-garou a pu se trouver dans cet enclos. A l'heure actuelle, des recherches sont engagés pour trouver son identité, sans grande conviction.

Si personne ne l'a cherché pendant toutes ces années, c'est qu'il n'appartenait à aucune meute, pense Key en même temps que moi. Un loup solitaire.

Pendant la soirée, je m'attèle à mon devoir d'Alpha sur le canapé. Les rapports s'empilent après une lecture attentive. Je reste branché sur la chambre et j'entends Kayla se réveiller et se rendormir à plusieurs reprises.

Au fur et à mesure que la nuit avance, l'attraction se fait de plus en plus forte. Je peine à conserver le contrôle de mon corps et je me sens partir dans mon subconscient.

Comme à chaque fois, je suis brutalement expulsé et je me retrouve dans une forêt, seul, pour une journée entière. D'ordinaire, c'est l'occasion de réfléchir posément. Aujourd'hui, pour la première fois de toute ma vie, je regrette d'être un loup.

Point de vue Key :

Aiden est parti. La place m'est entièrement dévoué. Je prends quelques instants pour savourer pleinement ce moment de liberté. C'est à la fois plaisant et déstabilisant d'être ainsi à toutes les pleine Lune. Mais c'est tellement agréable d'être aux commandes ! De pouvoir dire à voix haute tout ce que je souhaite ou de faire un mouvement quand j'en ai envie.

Je suis aux aguets quand Kayla montre les premiers signes de son cauchemar. Je ne prends pas la peine de réfléchir si elle veut ou non de moi près d'elle et je m'élance pour la réveiller.

— Kayla ! appelé-je pour la ramener sur terre.

— Aiden ! répond-elle en ouvrant grand les yeux de terreur.

Je la prends dans mes bras en passant mes mains dans son dos, comme Aiden sait si bien le faire.

— C'est fini, Kayla, rassuré-je, c'est juste un cauchemar...

Elle s'accroche à moi comme si sa vie en dépendait et, même si elle est bouleversée, je savoure autant qu'elle ce contact.

Sa respiration s'apaise au bout d'un temps qui me parait interminable et elle revient lentement jusqu'à moi.

— Key... souffle-t-elle en restant près de moi.

— C'est moi, princesse.

Elle doit avoir bien repris ses esprits si elle est capable de se souvenir que je suis là aujourd'hui. Je m'écarte d'elle afin de lui tendre un verre d'eau qu'elle boit immédiatement avant de revenir contre moi tout aussi vite. Ce n'est qu'à ce moment-là que je me rends compte que sa fièvre n'a toujours pas disparu. Malgré ce que pense Aiden, je viens lui donner mon énergie et l'entends pousser un soupir d'aise contre moi.

— Ça va mieux ? demandé-je en replaçant une mèche de ses cheveux derrière son oreille.

— Tu m'as manqué... souffle-t-elle.

— Moi ? m'étonné-je l'air taquin. Je croyais qu'il n'y avait que Aiden qui comptait ?

— Vous êtes tous les deux importants pour moi... murmure-t-elle en se blottissant davantage.

— Alors pourquoi tu refuses de nous laisser t'approcher quand les choses vont mal ?

Profiter de son état pour la questionner n'est peut-être pas la meilleure des idées mais elle semble disposer à m'écouter, alors autant tout tenter.

— Peut-être parce qu'il m'est difficile de faire comme si je ne savais pas ce que vous pensez réellement de moi... s'attriste-t-elle sans me lâcher.

Je viens relever sa tête pour la regarder dans les yeux. Son regard m'indique qu'elle est toujours perdue par ce qu'elle imagine. Mais la réalité est bien différente.

— Tu ne sais pas tout... Ecoute-moi bien, princesse, je vais te dire quelque chose qu'Aiden ne dira jamais, mais... tu es plus importante que tu ne le penses à nos yeux. Aiden a toujours voulu retrouver l'idéal de paix qu'on a perdu à la mort des loups blanc, c'est plus qu'un rêve, il sait qu'il a le devoir de le faire. On a toujours pensé que notre âme sœur serait une louve capable de nous aider à concrétiser ce but. Mais tu es humaine et ce n'est pas mal ! m'empressé-je d'ajouter en la voyant froncer les sourcils. Aiden pense que c'est exactement ce qu'il fallait, que tu puisses comprendre les humains comme lui comprend les loups. Parce qu'au final, si on veut que les loups soient en paix il faut que les humains le soient aussi, ensemble, en harmonie.

— Et toi qu'est-ce que tu penses ?

— Que les humains sont fragiles. Tu ne bénéficies pas de la même protection que lui, certes tu es plus résistante que l'humain lambda mais tu restes humaine. Nous devons constamment veiller sur toi pour qu'ils ne t'arrivent rien et nombres de nos adversaires rêveraient de te prendre pour cible. Si tu te retrouves blessé de quelques manières que ce soit, ça nous affole, ça nous rend dingue, on commet des erreurs de jugement ...

— Vous devenez faible...

Il confirme d'un signe de tête.

— Mais... tu es aussi notre plus grande force, ajouté-je, t'avoir trouvé ça a tout changé pour nous. Ta seule présence renforce notre position au sein de la meute. Tu es notre miracle. Tu es notre force.

— Mais je reste trop faible...

Sa remarque m'arrache un sourire et je la fais basculer sur le lit, pour me retrouver au-dessus d'elle.

— Tu ne m'as pas bien compris, princesse. Il va vraiment falloir que tu retires ce mot débile de ton vocabulaire. Je ne veux plus jamais l'entendre, c'est compris ?

Elle m'offre une mine boudeuse et je comprends que je vais devoir être plus convaincant.

— Tu es la meilleure de ta classe, plus avancé qu'aucun de tes camarades, tu es la marraine d'un petit garçon adorable dont tu t'occupes comme si c'était le tien. Tu ne te laisses pas faire, même quand il s'agit de moi, tu as du caractère. Mes bêtas ne te connaissent même pas et sont déjà admiratifs de tes actes, tes bêtas font preuves d'une loyauté sans faille à ton égard. D'après Mike, tu as toutes les qualités requises pour être une chasseuse accomplie... Alors, dis-moi, princesse, qu'est-ce qui, là-dedans, est un synonyme de faiblesse ?

Elle pousse un long soupir et je comprends que, si je ne l'ai pas totalement convaincu, je l'ai au moins apaisé, pour aujourd'hui du moins. Je dépose un léger baiser sur le coin de ses lèvres avant de me rallonger à côté d'elle.

— Ça te va si on reste au lit toute la journée ? demande-t-elle d'une petite voix.

— Avec plaisir, tant que je peux rester avec toi.

— Bien sûr, rétorque-t-elle en m'enlaçant de ses bras.

La voir aussi proche de moi me fait grogner de satisfaction ce qui la fait rire.

Elle replonge dans le silence tandis que je savoure pleinement son odeur contre moi. Je pourrais la mordre là, tout de suite, et accomplir le lien. Tout serait tellement plus simple.

— Key ? demande-t-elle timidement.

— Hum ?

— Qu'est-ce qui ne va pas chez moi ?

Instinctivement, je la sers un peu plus contre moi en poursuivant mon transfert d'énergie.

— Je...Je ne sais pas.

— J'allais très bien avant... tout ça, rétorque-t-elle d'une petite voix.

Avant Aiden et moi, semble-t-elle dire.

— Tu ne donnais pas autant d'énergie à Ewen avant, essayé-je de tempérer, tu te contentais de lui en donner par petite touche ici et là. Cela doit forcément affecter ton métabolisme.

— Au point de me faire oublier des choses ? demande-t-elle tourmentée.

— Comment ça ?

— Au zoo... J'étais en train de regarder Hannah et l'instant d'après... J'étais dans l'enclos des loups, révèle-t-elle.

— Et tu ne sais pas comment tu es arrivée là ? questionné-je.

Elle secoue la tête de droite à gauche en se retenant de pleurer.

— Ça t'est déjà arriver avant ?

Elle acquiesce doucement.

— Depuis le lycée, précise-t-elle. A n'importe quel moment de la journée, je me rends compte que je suis juste... ailleurs.

Son état n'aurait jamais dû empirer à ce point-là. Elle a beaucoup trop de symptômes inquiétants.

— Et si... propose-t-elle avec hésitation, et s'il y avait une part de moi qui était... mauvaise ?

Elle hésite sur le mot qu'elle emploie. Mauvaise ? Ma Kayla ? Impossible. Mais c'est aussi comme ça que sa grand-mère l'appelle : un monstre.

— Pourquoi tu dis ça ? m'interrogé-je

— J'ai toujours des pensées horribles, Key. Vraiment horrible. Alors que jamais je ne pourrais faire ça, jamais.

Elle insiste, comme s'il était absolument vital que je comprenne.

— A quoi tu penses, Kayla ?

Ses lèvres se serrent automatiquement et elle secoue encore la tête de droite à gauche, refusant de me le dire.

— C'est trop horrible, souffle-t-elle avant de se blottir silencieusement contre moi.

Je la serre un peu plusdans mes bras avec mille questions que je me retiens de poser. 


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