Chapitre 21
Hier soir, nous avons regardé un film ensemble. C'est Aiden qui a choisi mais je n'ai pas beaucoup écouté. Je n'avais de cesse de repasser en boucle ce qui s'était passé en fin d'après-midi. A rêver de ses mains sur mon corps, plus précisément. C'était épuisant, parce que je n'arrêtai pas de vérifier que ma barrière mentale était en place, qu'il ne pouvait pas savoir ce que je pensais.
C'est fou, je ne pensais pas une seule seconde à ce genre de chose avant. Je ne regardais pas les garçons de l'orphelina, ni les loups de la meute. Ça ne m'intéressait pas le moins du monde. Désormais, maintenant que je sais que je n'y ai pas le droit, ça ne fait que hanter mes pensées. Celle d'Aiden aussi, sans doute, vu la distance qu'il a instaurée entre nous sur le canapé.
Nous avons dormi ensemble, nous aurions été incapable de nous trouver dans deux pièces séparées. Seulement, chacun de nous avait son coin, sans toucher l'autre. Je n'ai pas fait de cauchemar mais j'aurai préféré, au moins, il m'aurait prise dans ses bras.
— Passe une bonne journée à l'école, indique-t-il avant que je ne descende de la voiture. On se voit ce soir.
— A ce soir, répliqué-je l'air aussi enjouée que lui, c'est-à-dire pas du tout.
Je m'arrête avant de sortir, ne voulant pas rester sur une note négative. « Je veux un baiser d'encouragement » quémandé-je au moment d'ouvrir la portière. Je vois son visage se parer d'un petit sourire et je m'approche de lui avec délicatesse. « Un baiser, rien qu'un. » supplié-je. Il m'embrasse. « ou deux » rajoute-t-il en affichant un sourire taquin. Cette fois-ci c'est moi qui l'embrasse. J'aimerai rester la journée dans cette voiture à l'embrasser, à faire plus que l'embrasser mais il m'incite au départ.
Je me dirige vers le lycée en tentant d'atténuer le rouge de mes joues. Je récite mes formules de maths dans ma tête et ça marche tellement bien que je n'entends pas Sarah arriver.
— Prête pour une nouvelle journée ? s'exclame-t-elle en me faisant sursauter.
— Je crois, affirmé-je en récitant plus fort mes formules dans ma tête.
Ne pas y penser, ne pas y penser. Je me concentre sur mes cours durant toute la journée. Je ne dérive que lorsque j'envoie un sms à Aiden, comme promis, pour lui dire que je suis en vie. Il me faut à chaque fois cinq bonnes minutes pour me remettre.
Ce n'est qu'en sortant du lycée à la fin des cours, que je m'autorise à me concentrer uniquement sur Aiden qui n'a pas répondu à mes deux derniers messages. Je trouve une explication à l'instant même où je pénètre dans la voiture.
— Salut, patronne ! clame Justin.
— Où est Aiden ?
— Cache ta joie, s'amuse-t-il, il y a eu une urgence à Naya, il a dû partir en début d'après-midi.
— Pourquoi tu n'es pas avec lui ? tu es son bras droit, fais-je remarquer.
— Parce que tu es encore là, toi, rétorque-t-il comme une évidence.
— Alors qui est avec lui ? Ce n'est pas dangereux ?
— Il a rejoint des bêtas là-bas, de toute façon, il est le seul à avoir l'autorisation de franchir les autres territoires qui se trouvent entre ici et Naya.
— C'est quoi cette urgence ? demandé-je finalement.
— Il t'expliquera.
Je m'énerverai presque de l'attitude de Justin, qui se contente de répondre à mes questions de la façon la plus concise possible sans me donner une once d'information.
— Pourquoi il ne m'a rien dit ? murmuré-je dépitée.
Je préfèrerai que ce soit Aiden qui m'explique tout ça. J'aurai préféré qu'il me dise au revoir, au moins.
— Votre lien ne fonctionne pas à distance et il a pris la forme de son loup pour s'y rendre, il n'a pas eu le temps de t'envoyer un texto mais il dit qu'il t'appellera dès qu'il aura un moment.
— Tu lui parles en ce moment ?
— Yep ! Il demande si tu as passé une bonne journée ? indique-t-il en me retournant un sourire.
— Oui, quand est-ce qu'il pourra m'appeler ?
— Pas tout de suite, répond Justin après avoir transmis l'info. Il a encore pas mal de chose à régler.
— Mais enfin, qu'est-ce qui s'est passé ?
— Ce n'est rien...
— Si ce n'était rien, il pourrait déjà m'appeler, si c'est grave je veux le savoir, c'est ma meute aussi maintenant !
Justin sourit mais ne dit rien de plus. J'attends qu'il transmette mes mots à Aiden en me retenant de grogner de frustration. Je ne peux pas lui parler directement, ni par la pensée, ni par message. Mais j'ai besoin de le voir et de lui parler ! Je veux pouvoir l'aider. J'ai peur que ce soit grave, j'ai peur de ce qui a pu arriver.
— Il t'appellera, indique seulement Justin pour mon plus grand regret.
— Quand ?
— Pas tout de suite, s'amuse Justin. Mais il trouvera le moyen de t'appeler avant que tu n'ailles te coucher, tu peux lui faire confiance là-dessus.
— Il ne rentrera pas ce soir ? m'inquiété-je.
— Non, pas ce soir, m'apprend-il en pesant ses mots. Sans doute pas demain non plus...
Je fronce les sourcils, de plus en plus inquiète. Qu'est-ce qui peut le retenir là-bas si longtemps ?
— Je t'accompagne à la maison, j'ai des choses à prendre dans le bureau d'Aiden et je vais sans doute passer la nuit sur le canapé.
— Je peux rester seule pendant une soirée...
— Non, tu ne peux pas, rétorque-t-il immédiatement. Ordre de l'alpha.
— Et tu fais toujours ce que te dis ton alpha ?
— 99% du temps, oui, les 1% restant c'est quand il me demande d'aller lui chercher un café, là je lui dis qu'il a des jambes.
Il m'arrache un sourire mais un détail ne m'échappe pas.
— Aiden ne boit pas de café, remarqué-je.
— Il a essayé une fois, il m'a tout recraché à la figure, déplore-t-il.
Cette fois, c'est un vrai rire qui sort de ma bouche. Je comprends pourquoi Aiden et lui sont amis et pourquoi il a fait de lui son bras droit. Sans même le connaître réellement, je sais qu'il est fiable et que je peux avoir confiance en lui.
— Comment il était quand il était petit ?
— Un véritable emmerdeur, déclare-t-il trop rapidement pour que je puisse y croire une seule seconde. Non, en vrai, il était égal à lui-même, toujours prêt à aider, souriant, ils faisaient craquer tout le monde, ça c'était emmerdant, pour moi. Non seulement il était le fils de l'alpha, mais en plus toutes les filles lui courraient après. On est devenu ami quand j'ai foutu une patate à quelqu'un qui s'est moqué de lui.
— Donc il était la cervelle et toi les poings ?
— Oh, il pouvait tout aussi bien être les poings, il était largement plus fort que moi. Seulement, il les utilisait uniquement quand les autres étaient en danger, pas pour lui-même. Il se démène à fond pour les autres, pour sa meute et maintenant pour toi.
— Il est du genre à se couper en couper en quatre...
— En quatre ? moi j'aurai plutôt dit en 1000, ça me parait être un chiffre plus raisonnable.
— C'est un super alpha, murmuré-je en souriant.
Il acquiesce en souriant. Nous arrivons à la demeure plus rapidement que ce à quoi je m'attendais.
— Aiden dit qu'il faut t'apprendre à nager, indique Justin en désignant la route du lac.
— Je crois que j'aurai du mal à faire ça sans lui.
Sa présence m'avait rassuré dès les première secondes. Avec Justin ce ne serait pas pareil. Je me dirige d'office vers la maison et Justin me suit.
— Il insiste, rétorque-t-il.
— Moi aussi. Dis-lui que s'il tenait vraiment à ce que j'apprenne à nager, il n'avait qu'à m'emmener avec lui.
— Merci du cadeau ! s'amuse-t-il avant de transmettre. Il t'appellera plus tard.
Ça, j'avais compris. C'est la fin de la transmission télépathique par l'intermédiaire de Justin. Aiden est définitivement partie. Je pousse un soupir désespéré. Le téléphone de Justin choisit cet instant pour sonner. J'espère qu'il s'agit d'Aiden mais Justin me coupe tous mes espoirs.
— C'est ma sœur, je dois répondre, indique-t-il avant de prendre l'appel. Salut, salut ! Oui... Non...Non... Non... J'ai dit non, tu n'as pas le droit, ordre de l'alpha. Tu le sais. Tu la verras plus tard, en même temps que tous les autres membres de la meute... Oui... Je viens demain... Bis !
Il se retourne vers moi, un sourire d'excuse sur le visage.
— Ma sœur tient absolument à te rencontrer, explique-t-il. Elle fait partie des rares qui savent que tu existes mais elle ignore qui tu es. Toi, tu dois la connaître en revanche. Elle est dans ta classe, elle s'appelle Justine.
— Tu es le frère de Justine ? m'étonné-je.
Il hoche la tête en haussant les épaules comme s'il s'excusait déjà de l'éventuel mauvais caractère dont sa sœur avait pu faire preuve.
— Attend, coupé-je, ça veut dire que vos parents vous ont appelé Justin et Justine ? Bonjour l'originalité !
— Ne te moque pas, nos parents en sont très fières, s'amuse-t-il.
— Et tu peux en dire autant ? rétorqué-je en m'installant lourdement sur le canapé.
— Du moment que c'est moi l'ainée, tout me va ! Je reviens, je vais chercher des papiers !
— Fais comme chez toi ! crié-je ironiquement tandis qu'il monte les escaliers.
Je sors mes affaires de cours sans perdre de temps, je veux être parfaitement disponible quand Aiden appellera. Justin ne met pas trop longtemps à redescendre et s'installe au bar de la cuisine.
— Tu vas jouer les baby-sitters longtemps ? demandé-je après avoir fini de relire ma leçon d'histoire.
— Jusqu'à ce qu'il rentre.
— Et Mavis ?
— Quoi Mav ?
— Qui la bordera ce soir ? Qui lui souhaitera bonne nuit ?
— Sa mère, réplique-t-il, et sa tante probablement.
— Elle a plus besoin de toi, que moi de toi, c'est ridicule que tu sois là, je suis prête à parier qu'il y a des loups qui patrouillent tout autour de la maison.
Son silence me donne raison.
— Je ne sortirai pas de la maison, tenté-je, je ferme tout à clef, tu ne vas pas rester ici toute la nuit, c'est insensé !
— C'est un ordre de mon alpha, intervint-il. Je ne peux pas faire autrement.
— En tant que future patronne, je t'ordonne de déguerpir d'ici, et plus vite que ça !
Il ne bouge pas d'un pouce mais m'offre un sourire d'excuse. Je pousse un soupir résigné. Je reprends mon travail. Nous passons une autre heure chacun de notre côté, moi révisant et lui notant des informations les unes après les autres.
— Tu fais des rapports pour Aiden ?
— Yep, il voudra les voir en rentrant.
— C'est les mêmes rapports que Naya lui envoie ?
— Non... contredit-il choqué, les miens sont bien meilleurs !
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