Dans la torpeur de l'immensité glacée, le vaisseau fendait l'espace en silence. A sa proue, la cabine de pilotage, les quartiers des officiers, puis au centre, les modules de vie, de loisirs, tournoyaient autour d'un axe central, reproduisant une gravité à 75% des besoins d'une planète terra formable. 

A l'arrière, les réacteurs en fusion projetaient la traînée bleutée que les poètes du vaisseau nomment "sillage marin". L'espace se refermait, au fur et à mesure, sur la percée azur du bâtiment démesuré errant à des milliers d'années lumières de son port d'attache originel.   

A l'abri - étanche - de l'extérieur hostile, les passagers ignoraient le niveau sonore inhumain émanant des vrombissements du moteur. Les multiples couches des alvéoles des compartiments habités, ne laissaient filtrer qu'un sourd bourdonnement intermittent. Dans le cerveau des habitants du navire céleste, la routine sonore passait inaperçue, depuis de nombreuses générations, assimilée à la fréquence cardiaque du vaisseau.