Un truc magique pour prendre de bonnes décisions

Je me suis réveillé dans le lit de Xa, où se trouvait aussi Xa. Je ne ferai aucun commentaire sur la nuit, si ce n'est que la sorcière ne m'a pas appris seulement la magie des serments.

Ce matin était un matin de contes de fées : un rayon de lumière, des insectes qui voletaient, le bruit du torrent.

Xa était déjà debout et m'a demandé fermement de faire de même. J'étais trop vieux pour faire semblant de dormir, et j'ai vu à son air sévère qu'elle allait renverser le lit si je n'en sortais pas.

J'étais plein d'énergie. 

Elle a coupé un fruit énorme et vert, couvert de piquants, qui sentait affreusement mauvais, disons qui sentait comme quelqu'un qui a passé six jours en forêt sans se laver - et qui a bien transpiré. Elle m'en tend une moitié et c'est une épreuve de tenir cette chose sous mon nez.

- « Tu manges. » dit elle autoritairement.

Comme j'étais dans une série de nouvelles expériences, je l'ai goûté. Il avait la texture riche d'une crème aux amandes et d'un fromage raffiné. Mon visage s'est illuminé.

- « C'est bon ! Qu'est-ce que c'est ? 

- J'ai vu la tête que tu as fait tout à l'heure. Tu as douté de ce fruit. 

- Je crois que n'importe qui...

- Et bien tu ne sauras pas ce qu'est ce fruit pour la peine. »

Ma curiosité frustrée l'amusa. Le fruit constituait un excellent petit déjeuner. Le silence et la lumière, les regards, étaient aussi très agréables. Je lui ai avoué que j'allais partir pour Varna. 

Elle a baissé les yeux comme une jeune fille et m'a avoué :

- « Je voudrais t'apprendre quelque chose avant que tu partes. Pour la réparation. Je sais que j'avais dit que je ne t'apprendrai rien d'autre, mais...et puis, je veux que tu restes en vie. Mais promets moi de rester plein de bonté. 

- Personne n'est méchant de son plein gré, disait mon maître.

- Et quand tu reverras ton maître, tu citeras la sagesse de la vieille Xa ?

- Oui, je lui dirai que Xa m'a appris que le désir de voir l'automnale est comme celui de devenir Roi : une plénitude tant qu'il n'est pas satisfait.

- C'est bien reformulé, il va me prendre pour une sage parmi les sages ! 

- Mon maître est une femme. »

Elle plisse les yeux.

- « Je crois que nous aurions bien des choses à nous dire. »

Elle ouvre la porte peinte du souci et m'invite à sortir. Son coin est toujours enchanteur.

- « Je vais t'apprendre la Petite Magie des Signes. »

Voici ce que Xa m'a dit, alors que je prenais des notes dans mon livre de magie, assis sur une pierre :

« La Magie des Signes te donne des indices sur des décisions à prendre en observant des signes. L'esprit des hommes, même stupides, est vaste et immense : il s'étend dans toutes les directions, y compris dans le passé et le futur. Mais il ne retranscrit pas clairement ce qu'il lit - cet esprit et ta conscience ne parlent pas le même langage. Parfois il hurle et tu l'entends à peine : c'est ton intuition. Ton intuition te dit de ne pas traverser cette rivière ? C'est parce que ton esprit a lu dans le futur ce qui allait t'arriver. »

« On peut aller plus loin que l'intuition avec la lecture des signes. Pose ton regard sur un chemin. Il y a mille choses à voir. Mais que vois tu en premier ? Une branche cassée ? Un oiseau qui s'envole ? Une ombre au lointain ? Quelques fleurs coupées ? Ce que tu vas voir a une signification précise. Ton esprit, qui a lu dans l'avenir, regarde pour toi cette chose pour te dire quoi faire. »

« Pour chaque personne, les signes sont différents. Il faudra que tu notes ces signes et que tu en tires les conclusions. Tu vas devoir te connaître toi même. »

« Mais il y a des signes qui sont vrais pour tous. Un fer à cheval ? Bon présage, surtout s'il a sept trous. Une araignée ? Mauvais signe en journée. Des lentilles ou du blé étalé ? Très bon signe. »

« Mais parlons du vol des oiseaux. »

« Le vol des oiseaux est une magie des signes appelée l'Augure. Si un oiseau croise ton chemin et vole de gauche à droite, bon signe. De droite à gauche, mauvais signe. S'il est noir, encore pire. »

- Et s'il se tient face à toi ?

- Alors dépasse le sur la droite. Comme ça, au pire,  il partira sur la droite et ce sera bon signe.  »

J'ai pris note de tout et la résolution de bien écrire les signes dans mon livre. 

Xa indiqua les quatre points cardinaux.

« Maintenant regarde les quatre directions dans lesquelles tu veux partir : la cité Empire de Varna à l'Est. Claveau au Nord. Arance au Sud. Et le Parcoul à l'Ouest. Que te disent les signes ? »

J'ai fait un pas vers l'Est, ma prochaine destination. Varna et ses secrets. L'académie des cinquante, une école de magie parmi les plus puissantes au monde. 

D'un buisson sur ma droite, un nuage de corneilles s'est envolé comme une pluie de flèches, croisant mon chemin de droite à gauche. 

Je me suis retourné vers Xa, furieux :

- « C'est une plaisanterie ?

- Si je ne t'avais pas appris la magie des signes, tu n'aurais rien vu. Combien de fois un oiseau a croisé ton chemin et tu ne l'as pas remarqué ? Et qu'il s'est passé une mauvaise chose ensuite ? »

Au sud et à l'ouest, les bois étaient plongés dans le noir. Mauvais signe.

Au nord, un corbeau picorait le sol.

Je me retourne encore vers Xa :

- « En fait, tu veux que je reste ici. 

- Mmm...voilà que tu commences à manquer d'humilité. Approche toi de lui. »

Je m'avance près du volatile - sur sa droite. Il tourne sa tête vers moi et lâche ce qu'il picorait. Il s'envole sur la droite, croisant mon chemin. Bon signe. Je mets un genou à terre. Le corbeau picorait un cône de pin. En s'envolant, toutes les graines avaient été étalées sur le sol. Très bon signe. C'en était troublant, comme si le destin me faisait une farce.

« Je crois que je vais devoir partir au Nord. Ne serait-ce que pour vérifier que ta magie fonctionne. »

J'ai commencé à faire mon maigre bagage. Xa m'a donné quelques denrées mais m'a privé du fruit qui sentait mauvais (ce dont je n'étais pas trop triste.) 

J'étais sur son seuil et elle m'a tendu quelque chose en cadeau.

C'était un chapeau à larges bords, au sommet pointu. Un vrai chapeau de sorcière. Encore une farce ?

- « Tout le monde va savoir que je suis un magicien. Ce chapeau pointu vient d'un conte de fées ? 

- Il vient d'un pays marécageux du nord ouest où il pleut très souvent.Un pays où les gens sont plein de bonté. Tu n'as pas l'air d'un sorcier. Tu es plutôt élégant avec. »

Le chapeau était léger et bien équilibré. Il donnait de l'ombre. Piquée dans la toile, il y avait la feuille d'automnale, un cœur à trois lobes.

- « La feuille vaut dix chapeaux. Je ne peux pas accepter. 

- Ce chapeau est unique, crois-moi. Et mon enseignement vaut mille feuilles. Laisse-là à ton chapeau, tu as fière allure avec. Et si elle s'envole, pas de regret. Les automnales ont un destin qui nous échappe. 

- Merci, Xa. »

J'enfonce le chapeau au maximum pour ne pas le perdre. Elle se rapproche de moi et s'abrite sous son bord. Son regard est intense.

Je ne dis plus rien, et après un moment, je pars vers le nord. Mais en mon for intérieur, je remercie encore la sorcière. 

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