Apocalypse
(Le choix des personnages est un pur hasard, à ne pas prendre personnellement), 1983 mots
- GLORIA !
Ce fut le dernier mot qui parvint à mes oreilles avant que la poutre principale du refuge ne s'abatte sur mon corps, me faisant disparaître sous les décombres.
Tout fut flou durant un instant, et je dû lutter pour ne pas perdre connaissance. Cependant, il m'était totalement impossible d'effectuer un mouvement, j'étais ensevelie, et mon corps n'avait pas la force de bouger.
Lorsque l'ouragan qui faisait rage au-dehors acheva ce qu'il restait de la petite maison de bois et de pierre, ma respiration diminua lentement, et je dû clore mes paupières, malgré moi.
Non, je ne peux disparaître maintenant. Il reste tant de chose à rattraper, tant de monde à sauver...
Mais mon destin n'était apparemment pas tel que je le pensais.
L'air rempli à nouveau mes poumons de manière brutale. J'ouvris brusquement les yeux et chancelais durant quelques instants, regardant autour de moi, sans comprendre.
La lumière d'un blanc éclatant agressa ma rétine et ce ne fut qu'au bout de quelques instants que je pu pleinement distinguer l'environnement autour de moi.
Tout autour était blanc, à perte de vue. Des hommes et des femmes, vêtus de longues toges blanches circulaient à ma droite et à ma gauche, portant des cartons où les mots « Rêves Oubliés », « Souvenirs Détruits » ou « Désirs Irréalisables » étaient écrits sur certains.
Les seuls éléments marquants du décor étaient des colonnes de marbres, dont les extrémités étaient dorées, qui s'élevaient en ligne droite à perte de vue.
Et, devant et derrière moi, d'autres hommes et femmes se tenaient les uns derrière les autres, et nous avancions, pas à pas, vers une destination inconnue.
Cependant, contrairement aux personnes qui transportaient les boîtes, nous étions chacun vêtus de manière différente, tous blessés et sales.
L'homme qui était debout derrière moi m'était totalement inconnu. Il portait une chemise et un pantalon de costume. Les verres de ses lunettes étaient fissurés, et ses cheveux étaient emmêlés. Une entaille récente barrait une de ses joues.
Ses yeux ne cillaient pas, et il fixait le vide devant lui.
J'en profitais pour regarder l'état de mon propre corps. Je portais toujours le t-shirt noir à col serré, avec les mots « Urgence Internationale » imprimés en blanc dessus. Mon pantalon brun d'exploratrice était retenu par une large ceinture grise et mes poches étaient pleines de compresses, de pansements, de flacons, et autre matériel de secours. Mes cheveux noirs étaient retenus en chignon, même si de nombreuses mèches s'en échappaient.
Soudainement, l'homme debout devant moi s'agita lentement, regardant autour de lui. Il se retourna, avant de me lancer un coup d'œil interrogateur, puis m'ignora à nouveau.
Il ne m'était pas totalement inconnu, mais en cet instant, je n'aurai su dire qui il était.
- Qu'est ce que vous faites là ? lui demandais-je, en me penchant de côté pour l'apercevoir.
Il mit un certain temps à comprendre que c'était moi qui lui avait adressé la parole.
- Et bien, j'attendais pour une audition, mais il se trouve qu'un tremblement de terre à Los Angeles engendre généralement un tsunami... Me voilà mort je suppose ? ajouta-t-il.
- Pardon ?! répliquais-je avec difficulté.
Cette remarque réussi à attirer suffisamment son attention pour qu'il se retourne complètement vers moi.
- Si vous êtes ici, ajouta-t-il en haussant les sourcils, c'est que vous êtes décédée, mademoiselle.
- C'est absolument impossible, j'étais il y a quelques instants seulement dans un hôpital à Riyadh, et le toit venait de s'effondrer sur...
Il me regarda d'un air entendu.
Ma respiration se fit soudainement très difficile, et les mouvements continus des personnes autour de moi me donnèrent le tournis. Tout était extrêmement flou, et tout mon équilibre avait disparu.
- Hey...
L'homme qui était devant moi dans la file me tenait par les épaules et me fixait de ses grands yeux bleus interrogateurs.
- Vous n'allez pas faire un malaise quand même ? m'interrogea-t-il. Quoiqu'il ne pourra pas vous arrivez bien pire, ici...
- Que faisons-nous ? demandais-je faiblement pour changer rapidement de sujet.
- Je suppose que nous attendons notre tour pour le Jugement de la Balance, répondit-il en regardant devant lui.
- Le Jugement de... quoi ? demandais-je en me frottant le visage.
- Mais vous ne connaissez donc rien à rien ? ajouta-t-il en se retournant subitement. Quand la fin de votre vie arrive, vous passez devant la Balance, qui décide de votre sort futur : Paradis ou Enfer. Seulement, avec l'apocalypse que nous vivons sur Terre, le nombre de décès explose. Voilà pourquoi nous sommes ici, debout, à attendre.
J'hochais simplement la tête, préférant ne rien répondre. Tout cela me paraissait tout de même improbable...
Mon tour devant la Balance arriva finalement au bout d'une éternité. Lorsque l'homme devant moi traversa le rideau qui s'étendait à perte de vue devant nous, je contemplais mes mains pendant longtemps. J'ai essayé de faire le bien durant toute ma vie, aussi courte fusse-t-elle. Mais quelle endroit faut-il espérer obtenir ? Paradis ou Enfer ?
Lorsque le rideau de velours s'écarta de quelques mètres pour me laisser passer, j'avançais sans réfléchir, et sans savoir à quoi m'attendre.
L'autre côté était tout aussi blanc et les piliers s'étendaient toujours jusqu'à l'infini.
Devant moi, un trône de marbre et d'or se tenait au sommet d'une volée de quelques marches.
Un homme était couché dessus. Il avait une jambe par-dessus un des accoudoir, et son bras droit était posé sur le second, soutenant son menton. Il tenait un sceptre dans sa main libre, et une couronne simple mais rayonnante entourait son crâne, reposant au-dessus de ses oreilles. Il portait un simple pantalon de costume et une chemise blanche, mais ses habits et ses cheveux frisés étaient trempés.
Cependant, cet homme, sur ce trône, se nommait Harry Styles. Et c'était une personne que je n'avais jamais réussi à supporter.
- Gloria ? demanda-t-il en regardant le bloc de papier posé sur son accoudoir.
- Serait-ce la blague du millénaire ? demandais-je bouillonnante de rage, en m'avançant pas à pas vers le trône.
- Restez où vous êtes, je vous prie, dit-il calmement en levant les yeux vers moi avec une lenteur extrême.
- Je ne ferai rien de ce que vous me demanderez, répliquais-je du tac au tac. J'atterris ici, avec des milliers d'autres personnes, toutes blessées. J'ignore où je suis, j'ignore ce que j'y fais. Ensuite, un homme devant moi, un fou, commence à m'expliquer que je suis décédée, que je vais passer devant un soi-disant juge et une balance. Pour finalement me retrouver devant vous, alors que je n'ai jamais réussi à vous supporter.
- Je suis désolée, ajoutais-je finalement, alors que je ne l'étais absolument pas.
- Que vous ne m'aimez pas, me fait ni chaud ni froid, répondit-il en tournant les pages du bloc. Et le « fou » qui était devant vous se nomme Brad Pitt. Cependant, je vous le concède, le scandale auquel j'ai eu droit, car son unique but était d'aller en Enfer, était peut-être de trop...
- Je m'en moque, répondis-je avec fureur. Les misères des gens riches ne me concernent en aucun cas. Je veux partir d'ici, ajoutais-je en appuyant sur chaque mot.
- Vous ne pouvez pas, soupira-t-il en chassant une mèche de ses yeux. Je vais peser votre âme, et vous trouverez ensuite votre nouveau foyer et votre nouvelle famille, pour l'éternité.
- Je refuse de mourir, continuais-je en ignorant sa remarque précédente.
- Vous n'êtes pas la première à me le dire, aujourd'hui... ajouta-t-il en faisant tournoyer le sceptre dans sa main. Mais je ne pense pas que vous soyez en position pour discuter.
Je me plantais devant lui, fixant son visage alors qu'il refusait délibérément de me regarder.
- Je n'ai pas besoin d'être assise sur un trône, énonçais-je calmement, pour savoir que ce que je veux est juste et bien. Je n'ai pas besoin de faire partie de la soi-disante élite du monde pour réaliser mes rêves et aider les autres. Je n'ai pas besoin non plus d'être née riche, pour mourir pauvre, ou d'être née pauvre, pour mourir riche. Et ceux qui pensent aujourd'hui faire partie d'une certaine élite, ne sont que des victimes de leur propre insignifiance, que des êtres humains, qui sont nés, et qui vont mourir.
- Que voulez-vous ? demanda-t-il finalement avec lenteur, tout en trouvant mon regard.
- Je veux retourner finir ce que j'ai commencé, chuchotais-je.
- Pour mourir une seconde fois ? L'humanitaire est un monde impitoyable. Lorsque vous en faites trop, on vous juge de riche trop aimable. Si vous n'en faites pas assez, vous n'êtes qu'un égoïste, dit-il en redressant nonchalamment la couronne qui lui tombait sur les yeux.
- Croyez-vous que je l'ignore ? répliquais-je avec difficulté. Savez-vous seulement à quel point il est difficile de supporter la méchanceté des gens ? Uniquement parce que vous tentez de les sauver ? Savez-vous à quel point il est difficile de vouloir continuer à vivre ? Pouvez-vous imaginer à quel point il est destructeur de donner la totalité de son être à des gens qui ne recherchent que la superficialité ?
Il se redressa lentement dans son trône, reposant sa jambe qui passait par-dessus l'accoudoir.
- Savez-vous pourquoi je suis vêtu de cette manière ? Car lorsque je suis décédé, il y a deux ans de cela, au commencement de l'apocalypse sur Terre, le juge de la Balance devait être opulent, couvert de richesse et de gloire.
- Car la Mort frappe tout le monde, ajouta-t-il en chuchotant.
- Mon avenir a toujours été limpide, répondis-je. Mourir pour la cause, mourir en se battant pour la Terre et pour tous les êtres vivants qu'elle porte, sans distinction. Voilà qui est fait. Mais oui, je suis égoïste, car tout n'est pas terminé, et tant qu'il restera quelque chose à sauver, je donnerai ma vie une énième fois. J'ai voulu signer pour sauver le monde, mais je n'ai pas réussi à faire les choses à grande échelle. Et maintenant, je vous demande de m'aider à réparer mon erreur.
- Pour une personne que vous méprisez, vous semblez véritablement avoir besoin de moi, dit-il en se levant lentement du trône et en descendant pas à pas les quelques marches.
Si les conditions n'avaient pas été si extrêmes, je lui aurait volontiers donné une claque pour toutes les années de ma jeunesse où j'avais dû entendre parler de lui.
- Je suis assez intelligente pour ne pas créer des tensions avec les personnes qui peuvent m'apporter ce dont j'ai besoin. Même lorsque je ne les aime pas, ajoutais-je sans broncher.
Il hocha simplement la tête et se dirigea négligemment ver le long rideau.
- Que faites-vous ? demandais-je sans bouger de ma place initiale.
- Et bien vous m'avez convaincu, répondit-il en tournant légèrement la tête de sorte à m'apercevoir. Je vous retourne votre vie, pour le moment du moins.
- Qu'attendez-vous dans ce cas ?
- Oh non, je viens avec vous, dit-il en tenant le rideau ouvert. Je pense que beaucoup d'entre-nous ont des choses à réparer. Et bien que je ne puisse ramener tout le monde à la vie, je peux en empêcher d'autres de mourir précocement. Vous avez raison, la vie est belle, et l'être humain n'a su la préserver. Il n'a pas réussi à le comprendre à temps, mais il n'est jamais trop tard pour donner son âme afin de réparer ses erreurs...
Il me fit signe de passer devant lui, et me suivit de près.
- Simple curiosité, demandais-je en me retournant vers lui pendant que les gens s'écartaient sur son passage, où avez-vous envoyé Brad Pitt ?
Il haussa les épaules en marchant derrière moi de manière désintéressée.
- En Enfer, voyons. Je n'allais tout de même pas lui refuser ça. Je retournerai le chercher, d'ici quelques années, quand il me suppliera de monter au Paradis...
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