Chapitre 7:
Yava ne bougeait plus. Le bruit avait cessé. La queue avait disparu.
Son cœur battait à tout rompre. En plus d'être complètement égaré,il se retrouvait de nouveau à la merci d'une créature qu'il n'arrivait pas à identifier.
Il savait qu'elle était là. Elle le contournait, elle l'épiait,attendant le moment propice pour...
Pour quoi au juste ? Allait-elle lui sauter sauvagement dessus, ou lui donner un coup de dents sournois par derrière ?
L'attente rendait Yava de plus en plus nerveux. Dans une telle obscurité, sa vue perçante ne lui était plus d'aucun secours. Il devait s contenter de tendre l'oreille, à l'affût de tout bruit suspect,et d'attendre une attaque qui ne venait pas.
Peut-être même que la bête n'était pas seule, suivie par toute une meute de ses semblables ?
Dans ce cas, Yava n'avait aucune chance.
Ses mains étaient toutes crispées autour du pommeau de son épée. Ses articulations saillaient sous sa peau tendue et commençaient à le faire sérieusement souffrir.
L'adolescent finissait par faiblir quand l'animal fit son apparition.
Des coussinets noirs et délicats. Un pelage d'un blanc immaculé, qui avait un aspect incroyablement soyeux. Seule, au milieu du poitrail,tranchait une unique tache noire.
Tout dans ce mammifère trahissait la grâce et l'élégance, malgré sa taille plutôt petite.
Le regard de Yava remonta jusqu'à sa face. Une paire de canines pointues dépassaient légèrement de sa gueule aux babines foncées.Une petite truffe frémissait doucement juste en dessous de deux grands yeux vert émeraude aux pupilles verticales.
Sa tête était surmontée de deux oreilles plus grandes que nature qui se terminaient par un plumeau de petits poils blancs.
Sa queue soyeuse était enroulée autour de ses pattes graciles.
Yava était perplexe.
Une si belle créature était-elle capable de lui ôter la vie ?
Se nourrissait-elle de chair humaine ?
D'un air agacé, l'animal remua ses oreilles qui devaient au moins avoir la taille de la moitié de son minois.
Yava sentit une onde glacée traverser ses pensées. Il lui sembla recevoir un violent coup dans l'estomac tant il était stupéfait.
Des lambeaux de mots s'assemblèrent dans son esprit pour former une phrase :
« Eh bien ! Qu'est-ce que tu attends ? »
La petite bête le regarda d'un air entendu. Yava soupira. Depuis quand les animaux étaient-ils télépathes ? Mais bon, après tout ce qu'il lui était arrivé depuis qu'il s'était installé dans les parages, il était prêt à y croire.
- D'accord. Je te suis, murmura t-il.
L'étonnant duo avait regagné un sentier, entièrement recouvert d'une mousse verte et moelleuse qui s'enfonçait à chacun de leurs pas. Le guide de Yava était tout à fait à son aise. Insouciant, il gambadait, de-ci, de-là, sa queue touffue voletant derrière lui telle une plume agitée par le vent.
Au fur et à mesure qu'ils avançaient, la végétation devenait plus luxuriante et extravagante. Les lianes s'entrelaçaient de façon à former des toits presque parfaits au dessus-d'eux. Yava remarqua une petite fleur à la corolle bleue toute simple.
Celle-ci aurait été tout à fait ordinaire si son pistil n'était pas fluorescent, éclairant le chemin devant eux comme une minuscule lanterne.
Ce type de fleurs se multipliaient le long du chemin et bientôt, Yava fut entouré par une myriade de petites étincelles.
Tout cela lui tournait un peu la tête. Il se serait cru au beau milieu d'un rêve.
Pourtant,ce n'était pas le cas, il s'était pincé plusieurs fois, sans résultat. Manifestement, il était bel et bien éveillé !
Il arriva enfin devant un treillage de lianes qui lui barrait le passage.
Il avait l'impression d'avoir cheminé durant des heures, pourtant l'aube n'était pas encore levée.
Son compagnon à quatre-pattes émit un petit bruit discret qui ressemblait à un glapissement.
C'est alors que les lianes se mirent à bouger !
Elles se détachèrent les unes des autres afin de ménager une ouverture convenant à la taille de Yava. Celui ci ne comprenait plus :comment des végétaux pouvaient ils bouger de leur propre chef ?Il ne voyait qu'une seule réponse : une quelconque magie était à l'œuvre... Il savait qu'il aurait du être terrifié, au lieu de quoi il se sentait pourtant parfaitement à son aise !
L'elfe passa dans l'ouverture ménagée par les lianes douées de vie sans même se baisser et écarquilla les yeux.
Il se trouvait au beau milieu d'une vaste prairie à ciel ouvert,entourée de remparts de végétaux tissés. L'herbe ondoyait sous la caresse du vent qui jouait avec les cheveux blonds du jeuneelfe.
Une petite rivière clapotait non loin et rejoignait une étendue d'eau calme où barbotaient des créatures que Yava ne parvint pas à identifier.
Mais le plus impressionnant, était l'arbre qui trônait, majestueux, à une bonne centaine de mètres de là. L'ombre de ses branches atteignait l'endroit où se trouvait Yava.
Il était bien dix fois plus grand que celui où il s'était installé,et totalement recouvert de lierre. Juste au dessus de ses racines gigantesques, le tronc était ouvert en un trou béant aux bords ridés.
Yava était sûr qu'il s'agissait d'une porte. Mais il était impossible que l'arbre eut poussé comme cela, On aurait dit qu'un géant avait planté ses ongles dans l'écorce, tiré pour l'écarter et découvrir ses entrailles.
C'était un spectacle magnifique et terrifiant.
« Viens. »
Yava ne distinguait plus qu'une petit tache blanche aux grandes protubérances soyeuses sur la tête.
Il se mit à courir. L'herbe giflait ses mollets. Il arriva rapidement aux pieds de l'arbre.
Des racines formaient des marches et permettaient d'accéder à l'ouverture qui menait à son cœur, plongé dans l'obscurité la plus profonde.
« Suis-moi. »
Trois bonds prestes, et l'animal disparut dans l'antre sombre.
Yava obéit et y pénétra à son tour, plein d'appréhension et à la fois plus curieux que jamais.
A l'intérieur, tout était d'écorce. Rugueuse, rêche, brunâtre,elle enserrait une pièce aux dimensions modestes. Il y faisait beaucoup moins sombre que Yava ne l'avait imaginé, grâce à la lumière qui filtrait à travers toutes les petites fentes del'écorce. Au centre, sur une natte, étaient disposés un grand bol taillé dans du bois et une petite motte de terre. Il y avait aussiune table, faite d'un roc poli.
Tout était simple et sans luxe superflu.
Soudain,un pied nu apparut au bord d'une ouverture dans l'écorce qu'iln'avait pas remarquée.
Une femme s'avança dans son champ de vision.
Son âge n'était pas distinct. Elle aurait pu avoir dix-huit ans comme trente.
Mais l'éclat de ses yeux vert forêt était plus âgé. Infiniment plus âgé.
Sa peau était légèrement hâlée et ses cheveux châtains descendaient jusqu'à ses omoplates.
Elle portait une robe qui ondoyait jusqu'à ses pieds nus, fabriquée dans une matière inconnue de Yava. L'habit se paraît de reflets que projetait le soleil sur les différentes teintes de vert du vêtement.
Un petit sourire discret releva les commissures des lèvres de la femme.Elle caressa le sommet du crâne blanc du guide de l'elfe. Puis, elle se mit à parler.
Curieusement,sa voix évoquait le murmure de l'eau caressant doucement des rochers.
- Tu as déjà fait la connaissance de Sherrval, n'est-ce pas, jeune elfe ? Ou bien puis-je t'appeler Yava ?
L'intéressé parvint juste à opiner de la tête, muet de surprise. Comment cette parfaite inconnue pouvait-elle connaître son nom ?
- J'imagine que tu ne sais même pas pourquoi tu es ici ? Poursuivit-elle. Et que tu ne sais pas non plus qui je suis ?
Elle attrapa la main de Yava et le guida jusqu'à l'entrée de la cavité, par là où il était entré.
Sa peau était chaude et douce, parfaitement humaine. Elle lui fit contempler le paysage environnant.
- Que vois-tu ?
Dans la prairie verdoyante galopait un troupeau d'herbivores aux cornes démesurées. Leur ramure se terminait par des pics acérés. Des vols d'oiseaux aux plumes de couleurs chatoyantes sillonnaient le ciel. C'étaient les mêmes qui étaient dessinés dans le livre sur la faune et la flore du pays humain !
- Mais...s'écria Yava, n'ont-ils donc pas disparu ?
La femme rit doucement et lui murmura à l'oreille:
- Et tu n'as encore rien vu...
Sur ce, elle sortit de sa poche un bout de bois gravé de glyphes et percé d'un bout à l'autre. Il était accroché à un lacet de cuir.Elle le saisit et le fit tournoyer en l'air. Cela fait, elle s'assit en tailleur dans l'herbe.
- Baisse-toi. Ordonna t-elle à Yava.
Celui-ci obéit et l'imita.
Bientôt,une ombre immense recouvrit la prairie.
- Le voilà qui arrive, ne bouge surtout pas !
L'herbes'aplatit lorsqu'un immense oiseau se posa devant eux.
Il mesurait plus de cinq mètres de haut, et son port de tête était altier.
Ses pattes d'échassier était rouge écarlate et son plumage immaculé à l'exception de ses yeux cerclés de noir. Les extrémités de ses ailes à l'envergure colossale étaient également sombres.
Le grand oiseau arborait fièrement au sommet de sa tête, une houppelande dont les bouts arrondis rougeoyaient comme des charbon sardents.
-Voici le Phénix ! déclara la femme d'un air triomphal.
Puis elle s'avança et tapota les pattes longilignes de ce dernier.
A ce contact, le phénix se baissa jusqu'à ce que ses pattes disparaissent sous l'épais duvet de son ventre.
Sa maîtresse grimpa rapidement sur son dos et s'installa confortablement au milieu des plumes.
- Rejoins-moi ! fit-elle à Yava, en lui tendant la main.
Le jeune elfe s'empressa de l'imiter maladroitement émerveillé autant qu'incrédule.
Lorsqu'ils furent tous deux assis, leur monture déploya ses ailes et se releva d'une secousse.
Puis, elle se mit à courir de plus en plus en vite et finit par décoller.
Le grand volatile s'éleva rapidement et décrivit des cercles concentriques au-dessus de la prairie. Finalement, sur un ordre de la femme mystérieuse, il se posa sur une des branches primaires de l'arbre où Yava avait été accueilli.
Son accompagnatrice se laissa glisser jusqu'à la branche qui était large de plusieurs mètres. Elle disparut derrière un rideau de feuilles.
-Attendez-moi ! s'écria Yava.
Il s'empressa d'écarter les lianes et arriva devant une seconde ouverture dans le tronc de l'arbre géant. Derrière lui, il entendit le Phénix s'envoler, et s'éloigner en poussant un cri rauque.
L'ouverture béante était noire comme un four, et Yava hésitait à s'y engager.
-Où êtes-vous ? cria t-il.
- Par ici ! fit une voix venant de l'intérieur. Tu peux m'appeler Sylva, si tu le souhaites.
Yava se glissa dans le trou et aperçut les yeux de Sylva qui brillaient d'une clarté phosphorescente dans la pénombre.
Soudain, la cavité fut illuminée par des centaines de touffes de mousse lumineuses qui s'étaient greffées sur les parois.
Il découvrit autour de lui sept portes parfaitement identiques, dont celle par laquelle il était entré. Seuls les différenciaient des signes étranges gravés dans le bois, qu'il fut incapable de reconnaître.
- Bienvenue dans la salle des sept portes, dit Sylva d'un air majestueux.
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