Chapitre 9.

[Près de la route 30 ; Ohio ; nuit]

Temps écoulé depuis le début de l'épidémie : 4 mois et 15 jours.


Au coucher du soleil, les quatre survivants avaient quitté la grande route pour un chemin plus petit menant à quelques maisons. Ils en avaient choisi une de plain-pied et l'avaient fouillé pour être sûr qu'ils étaient seuls avant de s'y installer pour la nuit. Après un repas de soupe de tomate au réchaud, Winnie s'était allongée dans l'immense chambre parentale et s'était endormie en moins d'un quart d'heure. Echo, loyale comme toujours à la plus jeune du groupe, l'avait rapidement rejoins et s'était allongée à ses pieds, ses ronflements légèrement audible jusqu'au salon. Simon avait pris le canapé-lit de la chambre d'ami et s'était lui aussi rapidement plongé dans le sommeil une fois ses médicaments anti-douleurs pris. Cela ne laissait qu'Adam et Sasha, montant la garde au fenêtre du salon.

‒ C'est quoi cette bague ? demanda le jeune homme après de longues heures de silence en pointant du menton le bijou avec lequel elle jouait.

La jeune femme baissa son regard sur le solitaire qu'elle portait autour de son cou. Habituellement il était caché sous son t-shirt mais elle avait pris l'habitude de jouer avec ces derniers temps.

‒ Une bague de fiançailles.

‒ Oh. Euh, tu es... ?

‒ Pas exactement. Mon petit ami voulait me l'offrir mais il en a pas eu l'occasion.

‒ À cause de l'apocalypse ?

‒ Non, il est mort bien avant tout ça.

‒ Je suis désolé Sasha.

‒ Ca va.

Plein de choses terribles s'était déroulé depuis ce moment pourtant les souvenirs de l'enterrement de Reed étaient parfaitement gravés dans sa mémoire. Elle se souvenait avoir assister à la cérémonie comme dans un état second, désirant être là et fuir en même temps. Sasha avait écouté le prêtre et les hommages de ses proches depuis le fond de l'église, camoufler derrière une foule de gens. Elle avait voulu s'éclipser avant que quiconque ne la voit et ne la reconnaisse mais c'était sans compter sur la mère de Reed qui l'avait rattrapé à la sortie et l'avait entrainé dans une étreinte. Son souffle chaud lui murmurait à l'oreille, la remerciant d'être là, lui assurant que Reed aurait été heureux de la voir, qu'il l'aimait toujours, qu'il essayait changer pour elle, pour toutes les deux. Puis, au moment de la relâcher, elle lui avait glissé dans la main une petite boite rouge soigneusement emballée dans un joli papier.

‒ Il lui est arrivé quoi ? Si tu veux bien me raconter.

‒ Overdose. Reed, il prenait des sales trucs pour rester à fond dans les études. C'était un super étudiant, très intelligent, mais il se mettait trop la pression, soupira Sasha, une image du jeune homme durant les périodes d'examen venant à son esprit. Au début on l'a à peine remarquer mais il en prenait de plus en plus et ça a fait l'inverse que ce qu'il voulait. Il a été viré de l'université, il trainait avec des gens bizarres, il devenait désagréable avec tout le monde... quand j'ai rompu avec lui, il n'était plus que l'ombre de lui-même. Je le reconnaissais plus. Je voulais l'aider, vraiment, mais j'étais enceinte et... je devais penser à Amy aussi. Mais je l'aimais. Vraiment.

‒ Je suis vraiment désolé, dit une nouvelle fois Adam.

‒ Ouais... t'y es pour rien.

‒ Quand même.

‒ Merci.

‒ C'était le père de ta fille alors ? Et s'il est... avec qui elle est en ce moment ?

‒ La sœur de Reed. J'espère que mon père et frère les ont retrouvé aussi, ils vivent à New York.

‒ J'espère aussi qu'ils sont tous ensemble. C'est nul d'être séparé.

‒ Et toi, votre famille à Simon et toi ?

‒ Mes parents sont morts au tout début. Mais notre sœur Rachel, on sait pas où elle est. Elle vivait de l'autre côté de la frontière et devait nous rejoindre.

‒ Alors j'espère qu'elle va bien.

‒ Moi aussi.

Après cette discussion, Adam et Sasha se replongèrent dans le silence et montèrent la garde jusqu'à ce que Simon et Winnie viennent les relayer au milieu de la nuit afin qu'ils puissent à leur tour se reposer.

Baillant bruyamment, Sasha s'étira de tout son long et fit craquer son dos avant de s'asseoir sur le canapé du salon où elle s'était effondrée de fatigue la veille.

‒ J'ai les muscles en compote, se plaignit-elle en acceptant l'assiette tendue par Winnie qui lui sourit avec compassion.

‒ Oui mais encore une belle journée à se réveiller vivant, acclama Adam en sortant de la chambre, pratiquant ses propres étirements.

‒ J'aurais quand même bien dormi une heure ou deux de plus. Quelle heure il est ?

‒ Huit heure, répondit l'aîné des frères. Le soleil s'est levé depuis plusieurs heures.

Pendant qu'ils prenaient leur petit déjeuner, il leur indiqua que quelques infectés s'étaient rassemblés et rapprochés de la maison durant la nuit et qu'il faudrait les abattre s'ils voulaient reprendre leur route tranquille. L'homme estimait aussi qu'ils seront à Wooster à la fin de la matinée s'ils avaient une bonne allure. Ca annonçait une bonne journée. Le petit groupe finit son maigre repas, rassembla ses affaires et laissèrent derrière eux la maison. Couteaux et pied de biche en main, ils s'attelèrent à éliminer les infectés les plus proches d'eux.

‒ Putain de rôdeurs, grommela Sasha, rencontrant des difficultés à récupérer son couteau coincé dans un crâne.

Avec son pied maintenant la poitrine du cadavre, elle essaya de créer un point d'appuie pour le retirer mais il semblait coincer dans l'orbite. Le bruit et l'odeur que remuaient la lame alors qu'elle tentait de l'extraire étaient écœurants et lui donnèrent la nausée cependant l'adrénaline dans ses veines la boostait. Sasha entendait un autre de ces monstres se rapprochait d'elle alors qu'elle n'avait toujours pas récupérer son couteau. Trop proche d'elle à son goût, elle se retourna précipitamment et leva ses bras pour le retenir. Ses mâchoires claquaient à quelques centimètres de son visage mais elle luttait afin de le garder à distance. Ses doigts glissaient sur la peau décomposée et des lambeaux se détachaient, rendant sa prise moins sûre. De nulle part, Adam apparût derrière l'épaule de l'infecté et enfonça son pied-de-biche dans son crâne, éclaboussant la jeune femme de sang immonde. Le corps devient soudainement mou et plus lourd alors qu'elle le jeta sur le côté.

‒ Merci.

‒ C'est bon, tu aurais fait pareil pour moi.

Le jeune homme se pencha et tira de toutes ses forces pour arracher le couteau du précédent infecté et le rendre à Sasha.

‒ Le dernier marcheur est mort, appela Simon à quelques mètres d'eux.

‒ Alors en route mauvaise troupe ! s'exclama Winnie, ajustant sa prise sur la laisse de fortune d'Echo et sautillant vers la route 30 juste à côté.


◇ ◇ ◇

[Route 30 ; Wooster, Ohio ; midi]

Temps écoulé depuis le début de l'épidémie : 4 mois et 16 jours.


Sasha enjamba le garde-corps et suivit Simon vers l'entrée de la ville.

‒ On y est, informa-t-il inutilement.

‒ Restons vigilant, la ville est assez grande.

C'était une vision étrange, comme si le temps s'était soudainement arrêté. Des dizaines de véhicules créaient un bouchon vers la sortie de la ville, parfois abandonnées par leurs propriétaires avec leurs portières grandes ouvertes, parfois impliqués dans un petit accrochage. Sasha pouvait voir ici et là des tâches de sang, des membres mutilés, des cadavres qui ne se relèveront jamais... Le vent portait les grognements de nombreux infectés mais très peu était visible actuellement. Soucieuse pour Winnie, elle regarda par-dessus son épaule et grimaça quand elle la vit marcher lentement, les yeux brillants de larmes.

‒ Y a un magasin de climatisation juste là, avec des forgeons, signala Adam en pointant un petit bâtiment sur leur droite. Peut-être qu'on peut en trouver un en état de marche ?

‒ Et y a une supérette juste derrière. J'aimerais qu'on foute le camp de cette ville le plus rapidement possible, on va se séparer, répondit Sasha. Winnie et moi on prend la supérette, et vous le magasin.

Simon revient sur ses pas pour être à leurs hauteurs à tous les trois et hocha la tête après une brève hésitation.

‒ OK mais faites attention à vous, d'accord ? Si c'est trop risqué là-dedans vous faites demi-tour et nous retrouver.

‒ Oui, et vous aussi. On se retrouve dans une heure pour manger.

Après s'être mis d'accord sur le point de rendez-vous -une voiture rouge bien visible sur un parking entre les deux magasins-, ils marchèrent ensemble jusqu'au magasin de climatisation puis les filles se séparèrent et continuèrent leur route. Avec beaucoup de joie, Echo trottina derrière Winnie, reniflant divers tas de déchets en chemin.

‒ On se voit au déjeuner, les salua l'adolescente avec un grand geste de la main.

En l'espace de quelques minutes, elles arrivèrent à la supérette et s'arrêtèrent devant sa façade blanche et rouge. Les vitres des doubles portes d'entrée étaient remplies d'affiches en tout genre : certaines vantaient un produit miracle, d'autres mettaient en avant des promotions exceptionnels, quelques-unes plus rare prévenaient de fêtes organisées dans les alentours. Leurs agencements rendaient pratiquement impossible pour les deux survivantes de voir à l'intérieur mais Sasha essaya tout de même. Elle se colla un maximum à la vitre et forma un pare-soleil avec ses mains. Elle apercevait à peine quelques caisses mais pour ne pas aider le magasin était dans le noir le plus total. Incertaine, la jeune femme tenta d'actionner la poignée mais les portes avaient été verrouillées.

‒ Viens, on va faire le tour et voir s'il y a une entrée latérale.

La porte de service rouillée était tout aussi fermée que les deux autres mais juste à côté se trouvait l'échelle permettant d'accéder au toit. Ne sachant pas trop ce qu'elle pourrait y trouver, Sasha ordonna à Winnie de rester en bas et de monter la garde pendant qu'elle grimpait. Elle lui confia son sac à dos et s'assura que ses armes étaient bien rangées pour qu'elle ne tombe pas. Echo s'agita à ses pieds alors elle lui octroya une caresse et lui intima de rester sage puis elle commença à grimper les barreaux de l'échelle. Le toit était vide, il n'y avait ni accès à l'intérieur, ni affaires laissés à l'abandon par un squatteur. Une main en visière, la jeune femme observa les environs. Du côté de l'autoroute, elle pouvait voir Adam et Simon allaient de voiture en voiture, des petits points de couleur terne dans un paysage encore plus terne. Quant au reste de la ville visible depuis son perchoir, ce n'était pas mieux. Elle pouvait voir des bâtiments délabrés, des cadavres dévorés et éparpillés au milieu de déchets, des petits groupes d'infectés allant d'une rue à l'autre... Sasha ne savait pas ce qui était le pire à voir entre la campagne déserte et la ville désolée. Aucun des deux n'était attirant dans tous les cas. Elle s'empressa de retourner auprès de Winnie et Echo et sentit son cœur s'alléger d'un poids quand elle fut accueilli par un sourire ensoleillée de la part de l'adolescente et des gémissements de joie de la chienne.

‒ Y a rien là-haut, et la ville est remplie de rôdeurs de ce que je vois, soupira Sasha en acceptant l'amour d'Echo et les léchouilles qu'elle lui faisait sur les mains. Vaut mieux laisser tomber et rejoindre les garçons.

‒ Espérons qu'ils ont eu plus de chance que nous.

C'était peine perdu. Les frères n'avaient pas trouvé une seule voiture qui voulait démarré, qui avait de l'essence ou dont les clés avaient été laissé sur le moteur.

‒ Et vous ?

‒ Rien non plus.

‒ Merde, soupira Simon en se frottant le front comme pour éloigner un mal de tête.

‒ Partons d'ici, on pourra retenter notre chance ailleurs.

‒ Montre le chemin, dit distraitement Adam en lui indiquant de passer d'un geste de la main.


◇ ◇ ◇

[Restaurant Dutch Kitchen ; Dalton, Ohio ; début de soirée]

Temps écoulé depuis le début de l'épidémie : 4 mois et 16 jours.


L'odeur qui se dégagea du restaurant quand Adam ouvrit la porte provoqua un haut-le-cœur général. Même Echo chouina et fit un pas en arrière. C'était un mélange entre le renfermé, la poussière et la nourriture pourrie. On pouvait même entendre quelques mouches depuis l'entrée. Alors qu'elle suivait le jeune homme à l'intérieur du bâtiment, Sasha tira légèrement sur la laisse d'Echo pour la faire avancer tandis qu'elle leva sa seconde main pour couvrir son nez.

‒ Pouah, ça schlingue ici ! s'exclama Winnie juste derrière elle.

Avec un gloussement, Sasha jeta un rapide coup d'œil à la jeune fille par-dessus son épaule avant de se reconcentrer sur son étude de l'endroit. Le côté restaurant était bien rangé, comme intouché. Il semblait désert de prime abord. De l'autre côté, un coin magasin avait été organisé et les rayons empêchaient de bien voir alors c'était vers là que le petit groupe se dirigea.

‒ C'est quoi cette odeur immonde ? questionna Simon qui fermait la marche.

‒ De la bouffe gâtée. J'ai vu des vitrines par là-bas avec des tas de bouillies maronnasses et dégeu.

D'un geste vague de la main, la jeune femme pointa vers la partie restaurant du bâtiment et les vitrines contenants ce qui avait été des pâtisseries si elle en croyait les écriteaux. Tout en avançant, elle repéra un angle mort entre une étagère et le mur qui créait un petit renfoncement sombre et caché. Elle lâcha la laisse de la chienne, se sépara brièvement du groupe et alla le vérifier par acquis de conscience mais il semblait trop petit pour camoufler quoique ce soit. Quand elle revient sur ses pas, Sasha fut ravie de voir qu'Echo n'avait pas bougé. C'était un travail de longue haleine, et il y avait parfois des ratés mais la chienne apprenait petit à petit. Elle ne courait plus trop dans tous les sens, aboyait plus rarement et les écouter de plus en plus. Pour encourager ses efforts, la jeune femme s'accroupit et vient lui gratter derrière les oreilles en la félicitant avant de récupérer la laisse et de se relever pour continuer son exploration des lieux.

‒ On va vraiment dormir ici ? Parce que ça pue quand même beaucoup, se plaignit Winnie.

‒ Si c'est vide et assez sécurisé, oui.

‒ Je suis pas sûre d'être d'accord avec ça.

‒ Et tes doléances seront entendues et prises en compte, rétorqua Simon avec un petit rire alors que Sasha roula des yeux, un sourire en coin des lèvres.

Alors que l'homme et l'adolescente débattaient sur la puanteur et la nécessité de dormir ailleurs, les deux autres se concentrèrent sur leur objectif : faire le vide des lieux. Adam atteignit une porte vitrée au fond de la grande salle et tira légèrement le store pour regarder de l'autre côté. Sasha se pencha pour apercevoir quelque chose aussi. On pouvait voir un couloir extérieur et presque collé à lui, les parements composants le mur d'un second bâtiment. Le plus jeune des frères laissa retomber le store et vérifia que le verrou était mis.

‒ On poussera un meuble devant une fois sûr que la voie est libre.

‒ Pourquoi pas maintenant ? demanda Sasha avec un froncement de sourcils.

‒ Pourquoi bloquer une issue de secours ? Et si on doit se précipiter dehors ?

‒ Oh, ouais... j'y avais jamais pensé.

‒ J'ai joué à énormément de jeux de zombie avec mon frère, plaisanta Adam. C'est idiot mais je reproduis des trucs que je faisais dedans ou que j'ai vu dans les films.

‒ C'est pas si bête. J'veux dire, on a jamais fait face à un truc comme ça, pas vrai ? Autant se servir de toutes les ressources à notre disposition pour survivre.

‒ Ouais, c'est vrai.

Ils partagèrent un sourire avant de retourner auprès de Simon et Winnie qui discutaient toujours au milieu des rayons, les mains plus relâchées sur leurs armes que précédemment. Ils leur signalèrent que le rez-de-chaussée était vide mais qu'il fallait encore explorer l'étage.

‒ Tiens prends Echo, ordonna la jeune femme à Winnie en lui tendant la laisse. Vous restez là pendant qu'Adam et moi on monte.

‒ Criez si y a quoique ce soit, ajouta ce dernier.

‒ Pareil pour vous.

‒ A tout de suite.

Les escaliers craquèrent alors qu'ils l'empruntaient lentement, une marche à la fois. À l'étage un long couloir desservait plusieurs pièces dont la plupart était fermée. Celles ouvertes furent les premières à être vérifiées. Une à une, ils les checkèrent avant de passer à celles fermées. Le binôme formait une bonne équipe, communicant correctement les informations et assurant les arrières l'un de l'autre. Le lieu était vide, pas un seul rôdeur n'avait été croisé. Ni même un seul cadavre. Le restaurant était très certainement resté fermé quand les choses avaient tourné au vinaigre dans tout le pays. Rassurés, ils redescendirent et poussèrent immédiatement des meubles devant les accès de sortie pour les bloquer.

‒ Alors ? demanda Simon en se redressant du comptoir sur lequel il était appuyé.

‒ On va dormir ici.

‒ Non ! pleurnicha dramatiquement Winnie.

Elle amena le dos de sa main à son front, ferma ses yeux et un peu trop brusquement se laissa tomber au sol comme une comédienne qui jouait mal l'évanouissement. Echo se précipita vers elle et vient lui lécher le visage avec enthousiasme. L'adolescente ria aux éclats alors qu'elle encerclait le cou de l'animal avec ses bras fins et esquivait la langue baveuse. Un sourire amusé étira les lèvres de Sasha face à la scène.

‒ Y a une salle de repos en haut, avec un canapé, signala Adam. C'est pas grand-chose mais c'est déjà ça.

‒ C'est mieux que rien, rassura son frère en pressant son épaule. Au moins on sera un peu éloigné de l'odeur.

‒ Ouais. Et le magasin, vous avez regardé si y a des trucs intéressants ?

‒ Vite fait. Y a plein de nourritures qui périmeront d'ici plusieurs mois et du soda, on va pouvoir se faire un petit festin ce soir.

‒ C'est un restaurant amish, ajouta Winnie alors qu'elle se redressait tant bien que mal avec Echo qui cherchait à grimper sur ses genoux pour avoir plus de caresses.

‒ Ca m'a rappelé le restaurant dans lequel ma mère travaillait. Il était pas amish mais c'était la même ambiance.

‒ Votre mère, non ? corrigea-t-elle vers l'aîné des frères.

‒ Oh je parlais de ma mère biologique.

‒ Tu as été adopté ? demanda-t-elle stupéfaite.

‒ Oui, euh quand j'étais tout bébé. J'avais même pas un mois.

‒ Et toi Adam, tu l'as été aussi ?

‒ Non, mes parents ont seulement adopté Simon. Notre sœur et moi sommes leurs enfants biologiques.

‒ Et tu as connu ta mère biologique ?

‒ Je l'ai rencontré quand j'avais vingt ans je crois. J'étais à l'université donc c'était dans ces eaux-là. C'est elle qui m'a recherché, je pense qu'elle avait besoin de clôturer un chapitre de sa vie et ça passait par me rencontrer.

‒ Wow...

‒ Tu sais que tu m'as jamais raconté tout ça, indiqua Adam. Maman et papa ont vaguement mentionné que vous vous étiez rencontrés quand j'étais au lycée mais ils ont jamais voulu m'en dire plus.

‒ Elle voulait me parler, m'expliquer pourquoi elle m'avait abandonné. Elle et mon père biologique étaient trop jeunes, sans le sous et pas prêts à élever un enfant.

‒ Oh.

‒ Bon allez, finis le blabla et faisons quelques emplettes, clôtura-t-il sa petite histoire.


◇ ◇ ◇

[Restaurant Dutch Kitchen ; Dalton, Ohio ; aube]

Temps écoulé depuis le début de l'épidémie : 4 mois et 18 jours.


Trop heureux d'être tombé sur un énorme garde-manger rempli d'autres choses que de la nourriture fade ou en conserve, le petit groupe avait décidé de rester une journée de plus pour se reposer et manger à leur faim. Winnie était encore plus hyperactive que d'habitude avec le sucre contenu dans les sodas qu'elle buvait à longueur de journée et avait créer tout un spectacle pour les divertir la veille. Cela faisait longtemps que Sasha n'avait autant ri à gorge déployée. Elle en avait eu des crampes aux abdominaux.

Puis le soir venu, ils s'étaient organisés une petite soirée pyjama dans la salle de repos qui leur servait de dortoir. Des bougies disséminés dans la pièce créaient une ambiance chaleureuse et projetaient des ombres sur les nouveaux amis, leur faisant perdre leurs traits de fatigué et leur rendant leurs visages juvéniles. Winnie et Adam avaient rassemblé une grosse pile de sodas, de bières artisanales, de bonbons et autres cochonneries qu'ils avaient dégusté en se racontant des blagues et des anecdotes sur leur vie avant l'épidémie. L'alcool avait coulé à flot, même pour l'adolescente qui leur avait fait les yeux doux, et ils avaient parlé jusqu'au premières lueurs du matin avant de finir par s'assoupir.

La journée qui arrivait allait être difficile.

Surtout avec un réveil comme ça.

Des coups de feu n'étaient pas le meilleur moyen de sortir du monde des rêves, surtout quand on avait une gueule de bois. Et ça, Sasha ne dirait pas le contraire. Elle grommela quelques mots inintelligibles alors qu'elle roulait sur le flanc et essayait de se blottir plus en boule, ayant l'espoir de se rendormir. Son cerveau embrumé de sommeil n'avait pas encore traité l'information. Quand elle roula, son front cogna le tibia de Simon, avachi de tout son long sur le sol à côté d'elle, et l'amena un peu plus à l'état de conscience. Au prochain coup de feu, elle se redressa brusquement -provoquant une grosse douleur dans son crâne dû au mouvement- et regarda dans le vide, l'oreille tendue. Elle leva une main près de l'épaule de Simon, prête à le secouer si elle n'avait pas été victime d'hallucination auditive. Elle n'en eut cependant pas besoin car, quand un grand fracas résonna en bas, tout le monde fut réveillé.

‒ C'est quoi ce-

Winnie, qui allait commencer à protester vivement contre ce réveil brutal, fut arrêtée par la jeune mère. Cette dernière s'était précipitée vers le canapé où elle s'était couchée et avait plaqué une main sur la bouche de l'adolescente alors qu'elle lui faisait signe de se taire. Pendant qu'elles se regardaient dans le blanc des yeux, des voix en colère s'élevèrent soudainement d'en bas et au milieu d'elle, des cris de douleur. 

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