Chapitre 24.

[Maison de santé ; Algood, Tennessee ; fin de matinée]

Temps écoulé depuis le début de l'épidémie : 1 an, 1 mois et 11 jours ;


Les deux groupes avaient rapidement été formés. Le premier, composé d'Adam, Sasha, Lucas et Echo, irait au garage. Le second, comprenant Kole, Toby et Alec, partirait à la recherche de vivres et d'armes. Cela laissait Simon et Zak pour surveiller leur campement ainsi que les blessés, les enfants et Winnie. La matinée était déjà bien avancée lorsque les deux groupes se mirent en route. Le soleil, haut dans le ciel, baignait la scène d'une lumière éclatante, mais malgré cette luminosité, une tension palpable régnait parmi eux. Chaque pas qu'ils faisaient les éloignait un peu plus de la relative sécurité de leur campement, mais ils savaient qu'ils n'avaient pas le choix.

Le groupe de Sasha avançait prudemment, évitant les routes principales pour minimiser les risques de rencontre avec des rôdeurs ou d'autres survivants potentiellement hostiles. Adam menait la marche, son fusil prêt à être utilisé à la moindre alerte. Echo trottinait à ses côtés, ses oreilles dressées en alerte constante. Lucas, juste derrière, gardait un œil attentif sur les environs, son couteau prêt à servir. La jeune femme, quant à elle, fermait la marche et veillait à ce qu'aucun rôdeur ne les prenne par surprise. Avoir eu l'occasion de profiter d'un abri l'avait rendue trop complaisante. Désormais, dès qu'elle mettait un pied dehors, une sensation de vulnérabilité l'envahissait. Elle devait à nouveau retrouver ses réflexes de survie : scruter chaque recoin, écouter le moindre bruit suspect, et se préparer à réagir au moindre signe de danger. Il ne s'agissait plus d'améliorer leur confort dans leur campement mais plutôt de repartir de zéro.

S'arrêtant dans sa marche, Echo redressa son museau et renifla l'air avant de grogner. Sasha ralentit son propre pas tandis que sa main se resserra sur la crosse de son arme.

‒ Calme Echo, murmura Adam en posant sa main sur la tête de la chienne.

‒ C'est encore loin ? demanda Lucas, scrutant les alentours pour essayer d'apercevoir ce qui l'avait mise en alerte.

‒ À peine un kilomètre je dirais. Si on garde ce rythme, on y sera dans une vingtaine de minutes.

‒ Alors continuons. Ça va Sasha ? ajouta-t-il en lui jetant un coup d'œil.

La jeune femme, jusqu'ici silencieuse, hocha la tête et accéléra son pas pour se tenir au même niveau que lui. Sans un mot, elle lui effleura brièvement le bras du bout des doigts, un geste à la fois furtif et intime. Lucas, captant ce geste, répondit par un sourire chaleureux qui fit battre son cœur un peu plus vite.

Le chemin était jonché de débris et de voitures abandonnées, témoins silencieux de l'exode précipité de leurs occupants. Chaque ruelle, chaque recoin était un potentiel piège. Les quatre survivants progressaient avec prudence, leurs pas résonnant faiblement sur le bitume craquelé. Après ce qui sembla une éternité, ils aperçurent enfin le garage. Il était situé à l'angle d'une petite rue, ses portes fermées mais non verrouillées. Adam s'avança prudemment vers la porte et l'ouvrit lentement. Un grincement sinistre accompagna le mouvement, résonnant dans l'air stagnant. Ils pénétrèrent à l'intérieur, découvrant un espace encombré de vieilles voitures et de pièces détachées. L'odeur d'huile et de métal rouillé emplissait l'air.

‒ On dirait que c'est vide.

‒ Restons sur nos gardes.

Alors que les hommes vérifiaient le bâtiment, Sasha repéra une voiture partiellement couverte d'une bâche. Elle s'approcha, tirant délicatement dessus, et une nuée de poussière s'envola, la forçant à tousser violemment. Le goût amer de la poussière lui piqua la gorge et lui fit monter les larmes aux yeux. Reprenant son souffle et luttant pour ne pas éternuer, elle continua d'ôter la bâche, dévoilant lentement une vieille berline. Chaque mouvement soulevait plus de particules, s'infiltrant dans ses narines et ses poumons.

‒ Ca va ? s'inquiéta Lucas en la rejoignant.

‒ Oui, c'est rien. Juste un peu de poussière, assura la jeune femme avant d'héler Adam. Alors, vous en pensez quoi ? Elle a l'air en bonne état non ?

‒ C'est difficile à dire... après tout si elle est dans ce garage c'est qu'il devait y avoir un problème.

‒ Mmh. Je vais voir si je peux trouver les clés.

Sasha se dirigea vers un bureau à l'arrière qu'elle avait aperçu plutôt, espérant y trouver des clés. Elle fouilla rapidement les tiroirs et finit par mettre la main sur un trousseau de clés marqué du logo du garage.

‒ J'ai trouvé les clés ! s'écria-t-elle en revenant vers les autres.

‒ Super, répondit le plus jeune du groupe. Maintenant, voyons si elle démarre.

Elle s'installa au volant et inséra la clé dans le contact. Après un instant de tension, le moteur rugit.

‒ Ça marche ! s'exclama Lucas avec soulagement.

Cependant, leur joie fut de courte durée. Echo commença à grogner de manière plus insistante, ses oreilles plaquées en arrière. Sasha leva son regard vers l'entrée du garage et aperçut plusieurs silhouettes vacillantes approcher. Le pare-brise poussiéreux l'empêchait de bien voir mais ce n'était pas difficile de comprendre ce qui arrivait sur eux.

‒ Des rôdeurs ! avertit-elle. Fermez la porte, vite !

Adam et Lucas se précipitèrent pour fermer la porte du garage, mais il était trop tard. Les infectés étaient déjà sur eux. Le groupe se retrouva face à une petite horde de créatures décharnées, leurs grognements sinistres emplissant l'air.

‒ On n'a pas le choix, il faut les affronter ! cria Adam en levant son fusil.

Les coups de feu résonnèrent dans le garage, répercutés par les murs de béton, amplifiant leur écho assourdissant. Adam, les traits tendus par la concentration, abattait méthodiquement les rôdeurs les plus proches, ses tirs précis visant les têtes pour maximiser l'efficacité. Les douilles de ses balles tombaient au sol dans un bruit métallique qui ajoutait au brouhaha de la pièce. Lucas, quant à lui, avait attrapé une jante de voiture abandonnée dans un coin du garage. Utilisant la force brute, il fendait les crânes des créatures qui s'approchaient trop près, son souffle court et régulier malgré l'effort. Chaque coup était accompagné d'un craquement sinistre, les corps s'effondrant dans des positions grotesques à ses pieds. Sasha se hissa hors de la voiture, son pistolet à la main. Ses premières balles trouvèrent leurs cibles, abattant deux infectés qui menaçaient ses amis. Echo, fidèle comme toujours, mordait férocement leurs mollets, les déséquilibrant suffisamment pour que la mexicaine puisse les achever plus facilement.

‒ Sasha, fais gaffe ! hurla Lucas en voyant un rôdeur se faufiler derrière elle.

Elle attrapa son couteau et se retourna juste à temps pour le planter dans la tête de la créature, la repoussant d'un coup de pied. Après plusieurs minutes de combat acharné, ils parvinrent enfin à repousser la horde. Le sol du garage était jonché de cadavres de rôdeurs, et l'odeur putride du sang et de la chair en décomposition flottait dans l'air.

‒ C'était moins une, souffla Lucas, essuyant la sueur de son front d'un revers de la main.

Son souffle était court et saccadé, ses épaules se soulevaient et s'abaissaient à un rythme rapide alors qu'il tentait de récupérer. La jeune mère, les mains encore tremblantes de l'effort, s'appuya contre la voiture. Son cœur battait la chamade. La chienne, à ses pieds, haletait bruyamment, son pelage mouillé de sueur et de sang.

‒ Pas de blessé ? questionna Adam depuis sa propre retraite contre un des murs du garage. Si tout le monde va bien, faut qu'on bouge. Pourrait y en avoir d'autres.


◇ ◇ ◇

[Route ; Algood, Tennessee ; début d'après-midi ]

Temps écoulé depuis le début de l'épidémie : 1 an, 1 mois et 11 jours ;


La voiture roulait sur une route craquelée et déserte, l'unique véhicule en mouvement sur des kilomètres à la ronde. Après plus d'un an de ce genre de vision, Sasha devrait être habituée mais la sensation était encore étrange. L'air à l'intérieur de l'habitacle était lourd, imprégné d'une odeur de poussière mélangée à un relent de sueur résiduelle du combat précédent. Dès qu'ils s'étaient éloignés du garage, les vitres avaient été baissé pour laisser entrer une brise fraiche et agréable qui refroidissait leur sueur.

Lucas conduisait avec une concentration intense, ses mains meurtries fermement agrippées au volant, tandis que Sasha le guidait sur le chemin de leur maison temporaire. À l'arrière, Adam somnolait, les paupières fermées et la tempe appuyée contre le montant de la portière. Echo, toujours prête à faire une sieste, était avachie sur lui, respirant profondément. La chienne méritait un répit pour son courage et sa loyauté.

Le paysage défilait. Les bâtiments délabrés se succédaient, vestiges d'une époque révolue. Alors qu'ils traversaient une intersection, la jeune femme aperçut un panneau en bord de route. La peinture était écaillée par endroit, mais les lettres étaient encore lisibles : "Hôpital - 15 km". Son esprit s'agita. Un tel lieu pourrait contenir des fournitures médicales nécessaires au groupe.

‒ Lucas, appela-t-elle, ses yeux fixés sur le panneau qui se rapprochait.

L'homme fredonna une réponse alors qu'il ralentit légèrement pour tourner son regard vers elle.

‒ Regarde là, pointa Sasha. Un hôpital, à quinze kilomètres. Ça vaudrait surement le coup d'y jeter un œil, non ? Avec toutes les blessures qu'on a eues récemment... Gabby aurait besoin de nouveaux matériels.

La voiture dépassa le panneau au moment où Lucas reporta son attention sur la route, réfléchissant à ses mots. La perspective était tentante, mais il connaissait aussi les risques ; elle en était bien consciente aussi.

‒ Tu penses vraiment qu'il y aurait des trucs utilisables là-bas ? Je veux dire, ça fait un an depuis que tout a commencé... tu penses pas que des gens l'auraient déjà pillé ? Et ça c'est si le lieu est pas infesté de rôdeurs.

‒ On ne peut pas savoir sans y aller.

Il réfléchit un instant, son regard se perdant sur la route devant eux, ses pensées pesant les risques et les avantages. Finalement, il hocha la tête, son expression se durcissant avec une résolution nouvelle, et prit le chemin indiqué par les panneaux.

‒ D'accord, on y va. Mais nous restons sur nos gardes. Si l'hôpital est infesté, on se retire immédiatement. Pas de risques inutiles.

Le trajet se déroula en silence, chacun des occupants perdus dans ses pensées. Les arbres bordant la route se faisait de plus en plus denses alors qu'ils quittaient la ville. Leurs feuillages créaient des ombres mouvantes qui dansaient sur le capot de la voiture.

Quelques minutes plus tard, les survivants aperçurent les contours d'un grand bâtiment au loin, partiellement caché par la végétation envahissante. L'hôpital semblait en bon état, relativement intact comparé à d'autres structures qu'ils avaient vues auparavant. Le parking en revanche était en ruines, des voitures abandonnées le jonchant, certaines renversées, d'autres incendiées. Lucas gara la voiture à une distance prudente, coupant le moteur pour écouter. Le silence pesant qui régnait autour du bâtiment était inquiétant, mais il ne semblait y avoir aucun mouvement.

‒ On y est. On y va à pied à partir d'ici.

‒ On reste ensemble et on fait gaffe, ordonna Sasha, ses doigts effleurant le manche de son arme pour se rassurer. Tu te sens prêt Adam ?

‒ Toujours prêt à zigouiller du zombie, marmonna le jeune homme alors qu'il émergeait de sa pseudo sieste.

Après avoir rassembler leurs armes et leurs sacs à dos, le petit groupe descendit du véhicule. La chienne commença immédiatement à renifler tous les débris qui les entouraient. À l'affut, ils avancèrent prudemment et atteignirent l'entrée de l'hôpital sans encombre. Les portes battantes étaient brisées, pendouillant sur leurs charnières. L'intérieur était sombre, l'air lourd de poussière et de moisissure. Les couloirs paraissaient interminables, bordés de chambres abandonnées et de brancards renversés. Chacun de leurs pas résonnait dans l'obscurité, créant une atmosphère oppressante.

‒ On devrait commencer par les étages inférieurs, suggéra Sasha dans un chuchotement. Les pharmacies et les salles de stockage sont souvent au sous-sol.

À l'affut de la moindre ombre mouvante, le petit groupe s'aventura dans le bâtiment, leurs pas précautionneux pour éviter tout bruit superflu. La tension était palpable, chaque craquement ou grincement les faisant sursauter. Les murs, autrefois blancs, étaient maintenant écaillés et couverts de saletés, mais ils portaient encore les inscriptions délavées indiquant les directions à suivre. Après avoir traversé un labyrinthe de couloirs sombres, ils tombèrent sur une porte métallique marquée d'une vieille plaque à moitié arrachée où l'on pouvait encore lire "sous-sol". En descendant, ils vérifièrent chaque porte, chaque coin sombre, prêts à faire face à toute menace.

Arrivés au sous-sol, ils découvrirent que la porte de la pharmacie était entrouverte. Sasha, le cœur battant, s'avança en première, son arme fermement tenue devant elle, prête à tirer au moindre signe de danger. Lucas et Adam la suivaient de près, leurs regards balayant la pièce sombre. La lumière vacillante de leur lampe torche révéla un véritable chaos à l'intérieur : des étagères renversées, des flacons brisés éparpillés sur le sol, mais aussi, miraculeusement, plusieurs boîtes et flacons intacts. L'odeur de désinfectant flottait encore dans l'air, mêlée à celle de la poussière et de l'abandon.

‒ Jackpot, murmura Adam avec un sourire fatigué. Allez, on rassemble tout et on se tire.

Sans perdre de temps, ils se mirent à fouiller méthodiquement les étagères et les tiroirs, leurs mouvements rapides mais précis. Chaque objet trouvé était une petite victoire : des boîtes d'antidouleurs, des antibiotiques encore scellés, des bandages propres, et même quelques seringues stériles.

Soudain, un bruit sourd résonna dans le couloir, suivi de tintements métalliques distincts, comme si un chariot médical avait été renversé, dispersant son contenu sur le sol. Le son résonna à travers les murs du sous-sol, les mettant tous sur le qui-vive. Sasha se figea, levant brusquement la tête en direction de l'entrée, ses doigts se resserrant instinctivement autour de son arme tandis que ses yeux se dirigèrent vers Echo. La chienne se tenait entre elle et la porte, ses oreilles dressées et les babines retroussées en un grognement silencieux.

‒ Qu'est-ce que c'était ? demanda Lucas dans un chuchotement tendu, ses yeux fixés sur la porte.

‒ On dirait qu'on est pas seuls, rétorqua Adam en fourrant une poignée de compresses dans son sac.

‒ Vivant ou mort ?

‒ Aucune idée mais on va pas rester pour le découvrir. Faut qu'on parte avant d'être piéger ici.

Un bref regard d'entente fut échangé avant qu'ils ne commencent à rassembler leurs trouvailles à la hâte. En sortant dans le couloir sombre, un souffle leur chatouilla la nuque et apporta avec lui un murmure inquiétant. Des ombres se dessinèrent, s'approchant lentement, leur démarche traînante trahissant leur nature. Dans la pénombre, leurs silhouettes décharnées se révèlent, sinistres et menaçantes.

‒ Des rôdeurs, chuchota Adam en serrant son arme. On fait quoi ?

‒ On les contourne, répondit Lucas alors qu'il dirigeait Echo devant eux. Pas la peine de les affronter si on peut l'éviter.

Les survivants avancèrent silencieusement, tâchant de rester hors de vue. Les infectés semblaient attirés par un autre bruit plus loin, leur attention détournée. Profitant de cette distraction, ils se dépêchèrent de regagner les escaliers et de remonter vers la sortie. Mais leur chance tourna rapidement. Alors qu'ils atteignirent le seuil du rez-de-chaussée, un rôdeur surgit de l'étage, ses grognements excités alertant les autres. En un instant, le calme précaire se transforma en chaos.

‒ Courez ! cria Sasha.

Adam ne perdit pas de temps, il ouvrit la porte et siffla Echo pour qu'elle le suive alors que Sasha ouvrait le feu sur l'infecté le plus proche. Elle essaya de partir de la cage d'escalier mais un décharné particulièrement agressif lui coupait le chemin. Elle recula, trébucha sur des débris et se rattrapa in extremis au mur. Heureusement, Lucas avait regardé par-dessus son épaule avant de s'éclipser. Il intervient et abattit la créature d'un coup précis dans l'orbite.

‒ Tu vas bien ? demanda-t-il, son visage marqué par la tension et l'inquiétude.

‒ Oui, souffla-t-elle, les muscles brûlants d'effort. On doit continuer Lucas.

Ils se battirent avec acharnement. Le claquement des armes résonnait dans le couloir tandis qu'ils reculaient lentement vers la sortie, le souffle court et les muscles tendus. Chaque pas semblait durer une éternité, les ombres des rôdeurs s'allongeant derrière eux comme des spectres affamés. La jeune femme, les mains tremblantes mais déterminées, déchargea une dernière balle dans le crâne d'un rôdeur qui s'était approché trop près. Enfin, la lumière du jour perça à travers l'obscurité oppressante de l'hôpital. Le soleil éclatant les accueillit à l'extérieur, ses rayons les réchauffant. Echo les attendait avec Adam, aboyant de soulagement à leur vue. Essoufflés, épuisés mais victorieux, ils sprintèrent vers la voiture, le cœur battant encore la chamade, conscients d'avoir échappé de peu encore à une issue fatale.

‒ On a réussi, soupira Adam en se laissant tomber sur le siège arrière, le visage en sueur.

‒ Ouais, on a réussi, répondit Sasha en se laissant aller contre le siège, regardant le dernier de leur groupe prendre place derrière le volant. Allons-y avant que d'autres infectés ne débarquent et nous envahissent.

Alors qu'ils s'éloignaient, la jeune mère jeta un dernier regard vers l'hôpital, se sentant à la fois soulagée et épuisée. Ils avaient pris des risques non prévus aujourd'hui, mais ils avaient aussi obtenu ce dont ils avaient besoin. Le retour vers le campement se fit dans le silence, chacun d'eux ressentait le poids de la fatigue. Sur le chemin pour retourner auprès des leurs, elle sentit Lucas lui jeter un regard.

‒ Tu devrais te reposer un peu, murmura-t-il, sa voix douce dans l'intimité du véhicule.

‒ Et toi alors ? Tu es aussi fatigué que moi. Je peux prendre le relais si tu veux faire une sieste.

‒ Peut-être, mais je préfère te voir te reposer.

Avec un soupir, Sasha décida de ne pas se battre avec lui et ferma ses paupières un instant. Le son régulier du moteur, combiné à la respiration calme de l'homme à côté d'elle l'aidait à apaiser son esprit tourmenté. Elle se sentait étrangement sereine en sa présence. Après un moment, elle sentit la main de Lucas se poser doucement sur la sienne, une simple pression qui la ramena à la réalité. Elle ouvrit les yeux, rencontrant à nouveau son regard, et une chaleur se diffusa en elle, plus douce que tout ce qu'elle avait ressenti depuis des semaines. Elle lui sourit, timide, sentant leur connexion se renforcer.


◇ ◇ ◇

[Maison de santé ; Algood, Tennessee ; fin d'après-midi]

Temps écoulé depuis le début de l'épidémie : 1 an, 1 mois et 11 jours ;


Lucas éteignit le moteur de la voiture et mit le frein à main, le véhicule s'immobilisant dans un léger grincement. Le soleil de fin d'après-midi projetait des ombres allongées sur les murs du centre, conférant à l'endroit une ambiance à la fois paisible et fragile. Sasha prit une profonde inspiration en sortant lentement de la voiture, laissant l'air frais remplir ses poumons. La tension accumulée au cours de leur mission semblait enfin se dissiper, remplacée par un sentiment de sécurité relatif, même si la fatigue pesait encore lourdement sur ses épaules.

La porte d'entrée s'ouvrit soudainement, et Winnie apparut, ses cheveux dorés flottant derrière elle comme une aura lumineuse. Son visage, habituellement rayonnant, était marqué par une anxiété palpable. Dès qu'elle aperçut la jeune mère, elle se précipita vers elle, ses pas résonnant sur le gravier comme des battements de cœur précipités. Sans hésitation, elle se jeta dans ses bras, l'étreignant avec une force presque désespérée. Sasha recula d'un pas sous l'élan de l'adolescente, surprise par l'intensité de son étreinte.

‒ J'ai cru qu'il vous était arrivé un truc ! s'exclama Winnie, sa voix tremblante d'émotion. Vous avez pris une éternité !

Sasha caressa doucement les cheveux de la jeune fille, essayant de la rassurer tout en sentant une pointe de culpabilité percer son cœur. Elle comprenait les peurs de Winnie ; chaque départ contenait une promesse silencieuse de retour, une promesse qui, dans ce monde ravagé, n'était jamais garantie.

‒ On a pas pris tant de temps, tu exagères Winnie, gloussa-t-elle.

‒ Peut-être... mais j'ai compté chaque minute.

Elle recula légèrement, levant les yeux vers elle avec une expression mi-souriante, mi-soucieuse, cherchant dans son regard une assurance que tout allait bien. La plus âgée lui ébouriffa affectueusement les cheveux, son sourire se voulant réconfortant.

‒ On est rentrés en un seul morceau, c'est tout ce qui compte, dit Lucas en s'immisçant dans la conversation et serrant son épaule.

‒ Lucas a raison. Allez, viens, on a des choses à vous montrer.

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