Chapitre 13.
[Route; Mount Pocono, Pennsylvanie ; matinée]
Temps écoulé depuis le début de l'épidémie : 5 mois et 24 jours.
Après trois quart d'heure de route à faire connaissance, Sasha s'était installée pour faire une petite sieste. Elle réussit à somnoler une dizaine de minutes, blottie contre sa portière, avant que la voiture ne commence à ralentir petit à petit jusqu'à se stopper complètement. Les sourcils froncés, elle ouvrit les paupières et regarda par la fenêtre pour essayer d'apercevoir le campement mais ils n'étaient entourés que d'arbres et d'une ou deux rares maisons. C'était logique dans son esprit puisque Lucas leur avait indiqué que le campement de survivants était à plus de deux heures de Newark et qu'ils n'avaient effectué que la moitié du trajet. Sasha se redressa et se pencha entre les sièges avant pour regarder à travers le parebrise. La deuxième voiture était arrêtée devant eux en plein milieu de la route, ses warnings allumés.
‒ Il se passe quoi ?
‒ Je sais pas, répondit Lucas en mettant le frein à main. Kole s'est arrêté sans prévenir.
‒ Peut-être qu'ils ont besoin d'un pause pipi ?
‒ Mmh, peut-être.
En silence, le petit groupe de quatre attendit que quelque chose se passe. La portière côté passager finit par s'ouvrir et Toby sortit de la voiture puis il la referma et se dirigea vers eux. Lucas baissa sa fenêtre et attendit qu'il soit à leur niveau.
‒ Y a un problème ?
‒ Ouais, on peut plus avancer, annonça-t-il en venant s'accouder à la fenêtre, une grimace contrit aux lèvres.
‒ C'est-à-dire ?
‒ On a plus d'essence.
‒ Tu te fous de moi Toby. T'as pas vérifier le niveau avant de partir ?
‒ Non.
Lucas rejeta sa tête en arrière pour la cogner contre l'appuie-tête de son siège et soupira. Ce long soupir ne pouvait que traduire son exaspération.
‒ Toby ! s'exclama Alec à l'arrière, lui aussi tout autant frustré.
‒ Ca va les gars, j'y ai pas pensé sur le moment ! De toute façon c'était la seule bagnole qui voulait bien démarrée, on a pris ce qu'on avait sous la main.
‒ Oui mais on aurait siphonné de l'essence là-bas pour pas s'arrêter en chemin !
‒ Je suis désolé les mecs. Vraiment.
‒ C'est bon, ça arrive à tout le monde, soupira de nouveau Lucas. C'est quoi le plan maintenant ?
‒ On va aller en ville voir si on peut pas trouver une voiture à siphonner.
‒ Qui « on » ?
‒ Kole, Simon et moi. Et vous, vous restez aux voitures pour les surveiller.
À ces mots, la jeune femme se redressa, détacha sa ceinture du sécurité et commença à rassembler ses affaires. Alec la regarda faire avec un froncement de sourcils prononcés qui lui rappelait leur père quand il était contrarié -c'était souvent quand il vivait encore avec eux à Tijuana- et posa une main sur son avant-bras comme pour l'arrêter dans son élan mais déjà elle parla.
‒ Je viens avec vous. On se séparera en deux équipes comme ça on pourra parcourir plus de distance et on augmentera nos chances de trouver une voiture avec de l'essence.
Immédiatement, Adam se retourna depuis le siège passager pour lui lancer un regard mécontent et ses propres sourcils froncés. À l'instant, la ressemblance entre son comportement avec elle et celui de son frère était frappante. Et bien que différents physiquement, Adam pourrait néanmoins passer pour un membre de leur famille.
‒ C'est hors de question Sasha, tu es toujours blessée, refusa-t-il.
‒ Il a raison, c'est une mauvaise idée, appuya Alec en pressant légèrement son bras et secouant la tête.
Elle voulut protester, faire valoir ses arguments. D'un, elle s'était plus qu'assez reposée depuis la veille à cause de sa jambe si vous lui demandiez son avis, et elle en avait marre de se sentir inutile. Dans le groupe, chacun avait toujours fait sa part, c'était ainsi qu'ils fonctionnaient. Et de deux, même si le groupe de son petit frère semblait amical et bienveillant, elle ne se sentait pas à l'aise de laisser Simon partir à l'aventure seul avec deux d'entre eux. Pas si elle pouvait l'en empêcher.
‒ En revanche elle a raison, c'est mieux si on y va à quatre et qu'on se sépara en deux équipes pour chercher, continua le plus jeune des Matthews. Je viens avec vous.
‒ OK alors prends tes affaires, on va partir d'ici peu.
La décision fut prise de confier la voiture avec le réservoir plein à ceux qui se rendaient en ville tandis que les autres s'entassèrent dans le second véhicule. Dès que Sasha s'assit sur le siège passager, Echo se précipita depuis la banquette arrière et vient lui lécher le visage, écrasant les jambes de Winnie dans son excitation pour l'atteindre.
‒ Echo, ça fait même pas deux heures que tu m'as pas vu, gloussa-t-elle.
Néanmoins elle permit à la chienne de venir s'installer sur ses cuisses et lui octroya toutes les caresses et les baisers qu'elle désirait.
Le rendez-vous avait été fixé pour le début d'après-midi et, tandis qu'ils vagabondaient en ville, le deuxième groupe s'était évertué à rester occupé afin de ne pas laisser l'ennui prendre trop de place. Ils continuèrent à faire connaissance en discutant de choses banales mais tournant autour de leur vie d'avant et ils partagèrent quelques biscuits et de la viande séchée puis il fut décrété que l'heure de la sieste était arrivée alors que le soleil atteignait son zénith. La discussion s'était lentement tarie, les deux plus jeunes s'étaient endormis sans aucunes difficultés et même Echo ronflait aux pieds de Sasha. Cette dernière s'était installée de biais sur son siège, les jambes rempliées contre son torse dans une position fœtal pour donner plus de place à la chienne, et elle avait la joue appuyée sur l'appuie-tête pour pouvoir regarder son frère dormir.
Sa priorité absolue avait été de retrouver sa fille dès que les choses avaient pris une tournure de fin du monde mais ce n'était pas pour autant qu'elle n'avait jamais songé au sort de sa famille et de ses amis. Celui de sa mère était incertain mais maintenant elle essayait de traiter le fait que son père et Lauren n'étaient plus de ce monde et qu'Alec était là, sain et sauf avec elle. Assimiler ces informations était difficile, c'était comme si son cerveau refusait de comprendre. Parfois, elle regardait son frère et elle avait l'impression que c'était un mirage.
‒ Il parlait souvent de toi tu sais.
‒ Mmh ?
Quittant ses pensées, la jeune femme tourna son regard vers Lucas qui était appuyé contre sa portière dans une position qui semblait tout sauf confortable.
‒ Alec. Il nous a souvent parlé de toi, répéta le jeune homme. Quand on a trouvé le campement Toby et moi, il hésitait à partir à ta recherche. La plupart de ses amis avec qui il était venu campé sont morts en voulant retrouver leurs familles. Il avait peur de risquer leurs vies et leur sécurité. Surtout que Lauren venait de mourir.
‒ Comment elle est morte ?
‒ Une morsure. J'étais pas là quand ça s'est passé mais c'est ce qu'a dit Alec. En tout cas, je suis désolé pour ta perte. Et pour ton père.
‒ J'ai l'impression que c'est une phrase qu'on va beaucoup entendre maintenant.
‒ Ouais, j'ai cette impression aussi.
‒ T'as perdu des gens ?
‒ Juliet, notre meilleure amie à Tobias et moi. On se connait- on se connaissait depuis qu'on avait six ans.
‒ Désolée.
‒ Ouais... toujours est-il qu'Alec était persuadé que tu finirais par arriver. Il a jamais perdu espoir de te voir un jour débarquer de nulle part.
La conversation s'essouffla de nouveau naturellement alors que Sasha souriait à Lucas et redirigeait ses yeux vers son petit frère. Alec la connaissait bien, peut-être mieux que leur mère ne l'avait fait. Il devait savoir qu'elle aurait été incapable de rester en Californie alors que sa fille était loin d'elle et qu'elle ne savait pas si, oui ou non, elle était en sécurité à l'autre bout du pays. De plus, elle ne pouvait qu'être d'accord avec sa décision de ne pas quitter son campement pour partir à sa recherche. En dehors du fait que c'était plus risqué d'être sur les routes, peut-être qu'ils se seraient croisés à quelques kilomètres d'intervalles et se seraient manqués.
Quand la jeune femme sortit de ses pensées, elle remarqua que le soleil avait fait un bon bout de chemin dans le ciel et que l'après-midi était bien entamé. Elle se redressa pour adopter une meilleure position, ses pieds cognant Echo qui grogna de mécontentement, et se pencha vers Lucas pour essayer d'apercevoir l'heure sur sa montre. À l'envers elle était cependant incapable de la lire. Le jeune homme la regarda faire avec un froncement de sourcils avant de lui demander ce qui se passait.
‒ Les autres devraient être rentrés non ? questionna-t-elle presque rhétoriquement.
Comprenant parfaitement où elle voulait en venir, Lucas se redressa à son tour et jeta un coup d'œil à sa montre.
‒ Euh... ouais. Ils devraient déjà être là. Depuis plus d'une heure en fait.
‒ Et merde !
La jeune femme commença à scruter l'horizon à travers le parebrise comme si une voiture allait apparaître soudainement.
‒ Tu penses qu'ils ont un problème ?
‒ Je sais pas... Pas nécessairement ? Peut-être qu'ils ont juste pas trouvé d'essence et qu'ils ont décidé de continuer à chercher...
‒ Mais si on a donné une heure de rendez-vous c'était pour être sûr que tout le monde allait bien, justifia Sasha. Même s'ils voulaient continuer leur recherche ils auraient dû d'abord se présenter pour nous rassurer puis repartir, non ?
‒ Ouais, tu as raison.
‒ Je le sens pas Lucas. On devrait aller voir.
‒ Comme ça, sans savoir dans quoi on s'embarque ni où ils sont ? On a même pas de voiture qui roule avec nous. C'est dangereux.
‒ Tu préfères attendre et voir ? demanda la jeune femme alors qu'elle se préparait à se mettre en route, la main sur la poignée de sa portière. Et s'ils ont rencontré un problème et qu'ils ont besoin d'aide ? Peut-être que des rôdeurs les ont encerclés et si on ne vient pas prêter main forte ils vont mourir. Et s'ils ne reviennent jamais parce qu'ils le sont déjà ? Tu es prêt à attendre ici pendant que nos amis sont morts ou en train de se battre pour leur vie ?
Ses arguments atteignirent parfaitement leur cible tandis que le visage de Lucas traduisait tout ce qu'elle avait besoin de savoir. Le jeune homme tenait à son groupe, à leur sécurité et à leur survie. Il ne prit même pas la peine de lui répondre alors qu'il attrapait son pistolet automatique et son couteau jusque-là posés sur le tableau de bord et sortit de la voiture. Le bruit réveilla les deux plus jeunes à l'arrière. Sasha ouvrit sa propre portière pour laisser une Echo agitée sauter hors du véhicule et se retourna vers son frère et son amie.
‒ Il se passe quoi ? marmonna le premier.
‒ Ils sont revenus ? demanda Winnie pleine d'espoir et nettement plus éveillée.
‒ Non justement, ils auraient déjà dû mais y a aucun signe d'eux. Lucas et moi on va aller faire un tour en ville et jeter un coup d'œil pour être sûr qu'ils ont pas besoin d'aide. Vous deux vous rester dans la voiture avec la chienne.
Tout en parlant, la jeune femme sortit à son tour, enfila les brettelles de son sac et rangea correctement son couteau et son semi-automatique pour être prête à les saisir à n'importe quel moment.
‒ Non, absolument pas, refusa l'adolescente alors qu'elle se précipitait à sa suite. On a dit qu'on se séparait plus alors je t'accompagne.
‒ Winnie.
‒ J'ai dit non !
‒ Je viens moi aussi, déclara Alec en apparaissant à côté de Lucas. Plus de paires d'yeux pour regarder et de paires de mains pour se défendre.
Les deux plus jeunes partageaient cette lueur déterminée dans leurs regards que Sasha savait être de la détermination et de l'entêtement. Quoiqu'elle dise, quoiqu'elle fasse, ils changeraient pas d'avis. Avec un soupir, elle leur fit signe de se mettre en route. Leur chienne ne semblait attendre que cela pour commencer à trottiner devant eux, heureuse qu'on ne l'ait pas mise en laisse cette fois-ci, et alla renifler chaque brin d'herbe et chaque fleur qui attiraient son attention. Sasha vérifia qu'elle avait bien prise la laisse et se promit de lui mettre dès qu'ils atteindraient les abords de la ville. Pendant les premiers kilomètres, personne ne parla et la marche s'effectua dans un silence lourd avant que Winnie ne ressente le besoin d'extériorisé ses craintes.
‒ Vous croyez qu'il s'est passé un truc ? Qu'ils ont un problème ?
‒ J'en sais rien Winnie, j'espère pas.
‒ Tous les quatre sont intelligents, je suis sûr qu'ils trouveront un moyen de se mettre en sécurité si c'est le cas, affirma Lucas avec un sourire rassurant pour l'adolescente. Je sais pas pour vos amis mais j'ai déjà vu Kole et Toby à l'œuvre. C'est pas notre premier rodéo comme on dit.
‒ Mais, et si c'était une horde qui les avait piégé ?
‒ Une horde ?
‒ Oui, un grand groupe de rôdeurs.
‒ C'est comme ça qu'on les appelle quand ils sont très nombreux, ajouta Sasha. Ils se déplacent et se comportent comme une horde, ça leur correspond bien.
‒ Oh. Eh bien cette ville est plutôt petite... je ne pense pas qu'ils en rencontreront une.
‒ Ca ne veut rien dire, on en a rencontré une à Leesburg et la ville était très petite, pas vrai Sasha ?
‒ Ouais elle a raison. On est où de toute façon ?
Au même moment où elle posait cette question, un énorme panneau apparut ou plutôt elle réussit enfin à le distinguer parfaitement malgré la distance. Il était accroché sur un pont permettant à un chemin de fer de passer au-dessus de la route et avait inscrit en gros dessus « Bienvenue à Mount Pocono ». Elle n'avait aucune idée d'où cela se trouvait sur une carte. D'autant plus qu'elle avait entièrement fait confiance à l'autre groupe pour les diriger vers leur campement et n'avait pas une seule fois regarder le plan. Sasha siffla la chienne qui avait déjà presque atteint le pont. Echo s'arrêta, les oreilles redressées, et tourna la tête vers les humains puis elle fit demi-tour et courut dans leur direction. Comme à son habitude, la chienne quémanda des caresses quand elle fut à leur niveau. Sasha lui en donna quelques-unes avant d'attacher son collier à la laisse et de l'enrouler autour de sa main pour la raccourcir afin qu'Echo ne puisse pas s'éloigner de plus d'un mètre.
Quand ils arrivèrent en ville, ils marchèrent sur ce qui sembla être la rue principale, remplie de petits commerces, et observèrent attentivement les alentours à la recherche des membres de leur groupe. À part quelques rôdeurs éparpillés dont s'occupèrent les quatre survivants, la rue était assez calme. Trop calme. Au bout de celle-ci, la route se séparait en deux : soit ils continuaient tout droit, soit ils bifurquaient à gauche ; mais avant même qu'ils ne se concertent pour prendre une décision, Alec remarqua une voiture familière garée sur le bas-côté de la route.
‒ Ils ont dû décider de se séparer à partir de là.
Alors qu'ils se rapprochèrent du véhicule, plusieurs choses furent à prendre en compte : les cadavres d'infectés l'entourant, les signes clairs de lutte ainsi que les impacts de balle sur la carrosserie de la voiture et le bitume. Deux hypothèses, soit le groupe s'était fait attaquer dès leur arrivé en ville mais alors pourquoi ils étaient sortis de la voiture si la menace était trop grande ? Soit cela s'était passé au moment de leur départ. Alec proposa qu'ils suivent les cadavres dans l'espoir qu'ils tombent sur les autres et, étant donné que c'était leur seul piste, cela fut vite accepté. Ils se remirent en route.
◇ ◇ ◇
[Rue; Mount Pocono, Pennsylvanie ; après-midi]
Temps écoulé depuis le début de l'épidémie : 5 mois et 24 jours.
L'infecté tomba au sol dans un bruit sourd. Son élan et son poids entrainèrent Sasha en avant mais elle se retient de tomber d'une main sur le mur de brique en face d'elle. Elle se dépêcha de récupérer son couteau mais en le retirant une gerbe de sang poisseux et noirâtre l'éclaboussa. Dans un reflex nouvellement acquis, elle ferma avec précipitation sa bouche et ses paupières pour protéger ses muqueuses et autres parties sensibles puis elle se dépêcha d'essuyer son visage avec la manche de son pull. Bien évidemment la plupart du sang s'étala plutôt que de se retirer mais au moins rien d'important n'avait été atteint. C'était une hypothèse émise par Adam au cours de leurs semaines à marcher à travers les états que le sang et la salive des rôdeurs étaient ce qui les contaminaient si cela entrait en contact avec eux. Depuis Sasha faisait très attention à ce que ses parties vulnérables à la contagion soient protéger au cas où.
Les grognements hargneux d'Echo la firent rouvrir les yeux et reprendre connexion avec son entourage. Winnie était à quelques pas d'elle et se débattait avec son propre rôdeur. Son couteau était tombé à ses pieds alors tout ce qu'elle pouvait faire était d'essayer de le repousser à l'aide de ses bras mais Sasha savait très bien qu'elle tiendrait pas longtemps, elle n'avait pas énormément de force dans ceux-ci et elle se fatiguerait très vite. Echo, toujours le garde-du-corps loyal, avait choppé l'infecté par la jambe et tentait de l'entraîner loin de la petite humain dont elle était éprise. Sans attendre, Sasha se précipita à leur rescousse. Elle attrapa le rôdeur par le dos de sa chemise, le tira vers elle et enfonça sa lame dans sa mâchoire jusqu'à atteindre son cerveau. Le corps devient mou alors elle le laissa tomber et récupéra son arme en faisant attention cette fois à ne pas s'éclabousser. Elle en profita pour récupérer le couteau de l'adolescente et le lui remit.
‒ Ca va Winnie ? demanda-t-elle essoufflée.
Dans son champ de vision, Alec et Lucas se défendaient avec rage mais il restait au moins quatre infectés à se débarrasser alors la jeune femme attendit que Winnie hoche la tête pour lui confirmer qu'elle allait bien puis elle s'élança pour venir les aider. Elle sortit son semi-automatique et couvrit les deux hommes en tirant sur ceux qui se rapprochaient. Elle manqua trois fois sa cible mais les cours de tir avec Sully avaient payé, elle réussit à en tuer deux comme ça. Lucas se chargea l'avant-dernier au couteau pendant que le frère et la sœur firent équipe pour achever le dernier. Quand le calme revient, Sasha rangea son pistolet mais garda sa lame à la main tandis que son regard voyageait sur les corps. Jamais elle ne s'était attaquée à un aussi grand groupe, en général son groupe et elle fuyaient, pas très enclin à prendre ce risque.
‒ Tout le monde est ok ? appela Lucas, lui aussi autant essoufflé qu'elle.
Les trois autres donnèrent leur propre version d'un acquiescement.
‒ Alors on continue.
◇ ◇ ◇
[Rue; Mount Pocono, Pennsylvanie ; après-midi]
Temps écoulé depuis le début de l'épidémie : 5 mois et 24 jours.
Au détour d'une rue, le petit groupe s'était retrouvé sans cadavre à suivre. Perdus, ils tournèrent en rond à la recherche d'un indice pendant plusieurs longues minutes mais rien de visible ne put les aider. Finalement, quelques rôdeurs apparurent et, au lieu de leur prêter un quelconque attention et de les prendre en chasse, ils se dirigèrent d'un pas pressé vers un endroit inconnu. C'était comme si quelque chose les attirait. Alors les quatre survivants décidèrent de les suivre à bonne distance. Effectivement, une cacophonie de grognements excités se fit entendre au bout de quelques mètres avant même qu'ils puissent apercevoir leurs propriétaires. Au bout d'une impasse, une maison sur deux étages était encerclée par un nombre important d'infectés. Certains tambourinaient aux portes et aux fenêtres tandis que d'autres griffaient les murs comme s'ils essayaient d'en peler les couches.
‒ Ça doit être eux, affirma Lucas. Ils se sont certainement abriter à l'intérieur pour échapper aux marcheurs et maintenant ils sont piégés !
De là où elle se trouvait, Sasha pouvait distinguer une baie vitrée donnant sur le jardin latéral de la maison bien qu'à peine visible à cause de tous les corps amassés contre elle. Leur poids combiné ainsi que les coups qu'ils y portaient menaçaient clairement de la briser, il fallait se dépêcher de les éloigner de là.
‒ À l'étage ! Je vois Simon, indiqua Winnie en pointant une fenêtre.
‒ Faut qu'on trouve un moyen de les aider avant que les rôdeurs n'arrivent à-
La phrase de Sasha fut coupée en plein milieu par un fracassant bruit de verre brisé tandis que la baie vitrée cédait. Un flot d'infectés se déversa immédiatement dans la maison par la nouvelle brèche.
‒ Merde !
Le groupe accéléra leur course jusqu'à se tenir plus proche de la maison sans pour autant que les rôdeurs les remarquent. Cependant, certains des plus éloignés se tournèrent néanmoins vers eux et commencèrent à marcher dans leur direction. La plupart était toujours focalisée sur la maison et sur leurs proies piégées à l'intérieur. Sasha pouvait les voir se bousculer pour entrer. Certains avaient leur peau qui s'accrochait aux morceaux de verre tranchants encore présents dans l'encadrement de la porte mais ils continuaient d'avancer en faisant fi des lambeaux qui se déchiraient de leur visage ou de leur corps.
‒ Comment on fait ? s'exclama Winnie dont la voix était un peu forte pour se faire entendre par-dessus le brouhaha des grognements mais qui attira quelques infectés vers eux par la même occasion. On peut pas rentrer là-dedans, ce serait du suicide !
‒ Faut créer une diversion ! répondit Lucas tandis que le premier atteignait son niveau et qu'il sortit son couteau pour le planter.
‒ Oui mais quoi ?
Et alors qu'ils échangeaient des idées, le petit groupe commença à être petit à petit encerclé de rôdeurs. Plus le temps passait, plus ils devaient reculer pour éviter des morsures ou de se faire coincer. Cela aurait été utile si ça les éloignait aussi des autres qui étaient piégés mais leur nombre était assez conséquent pour qu'ils prennent en chasse les deux groupes sans problème. Finalement, l'idée la plus faisable et la moins dangereuse fut proposé par Alec : trouver une voiture qui démarrait et allumer le poste-radio en priant pour qu'il y ait un CD afin d'attirer les infectés avec de la musique. Le problème étant que la rue ne possédait que très peu de véhicule, on pouvait en compter quatre dont un était déjà inatteignable. De plus, parmi les rares présents, il fallait que l'une d'elle soit déverrouillée dans l'idéal puisqu'ils n'avaient que très peu de temps pour forcer une serrure ou casser une vitre. Les rôdeurs étaient bien trop proches d'eux pour se permettre une marge de manœuvre, et il fallait penser à leurs amis à l'intérieur de la maison qui feraient bientôt face à un gros groupe d'entre eux. N'ayant que cette idée de réalisable, les quatre survivants se mirent en mouvement. Pendant que Sasha et Winnie trottinaient d'une voiture à une autre et essayaient d'ouvrir en vain toutes les portières et même les coffres, les hommes assuraient leurs arrières et repoussaient leurs ennemis. La jeune femme avait presque perdu espoir quand elle atteignit le dernier véhicule qui était arrêté en plein milieu de la route et, sans y croire, elle actionna la poignée de la portière conducteur. Celle-ci s'ouvrit sans un seul accroc, sous leurs yeux ravis mais presque stupéfaits. Ils n'eurent cependant pas le temps de s'attarder sur leur joie, des vies étaient en jeu. Sasha s'assit derrière le volant et commença à fouiller l'habitacle à la recherche des clés. Ces dernières étaient, par chance, encore sur le contact. Elle enroula ses doigts autour et tourna la clé. Le moteur revient timidement à la vie quelques instants dans un grondement avant d'émettre des sons inhabituels et de s'éteindre.
‒ Allez, allez, marmonna la jeune femme en recommençant.
Mais, mise à par des cliquetis, des grincements et des sifflements, la voiture refusa de démarrer.
‒ Alors ? s'enquérit Lucas tandis que ses combats le rapprochaient d'elles.
Tout en essayant une nouvelle fois de faire démarrer le moteur, Sasha regarda vers le jeune homme. Il venait de planter son couteau dans un rôdeur et était en train de tirer sur un second trop proche de lui avec son pistolet. Au moins les coups de feu étaient assez bruyants pour percer l'air et attirer certains des infectés vers eux.
‒ Elle veut pas démarrer !
‒ Et si-
‒ On a plus le temps faut qu'on se tire de là ! cria Alec en apparaissant soudainement à côté de lui.
Son petit frère était en sueur et débraillé, avec une lueur concentrée dans le regard. Il tira Winnie par le bras et la poussa vers la sortie de la rue pour qu'elle commence à avancer avec la chienne tandis qu'il aidait Sasha à sortir de la voiture.
‒ Mais, et les gars ! On-
‒ On va réfléchir à une autre solution mais faut bouger !
Et effectivement, tout autour d'eux les rôdeurs s'amassaient de plus en plus et commençaient à les encercler. S'ils se faisaient piéger bêtement ici alors ils seraient venus pour rien : ils mourraient sans avoir aidés leurs amis, qui eux aussi périraient certainement dans cette maison. Faisant fi de sa douleur à la jambe, Sasha commença à courir et, en passant à côté de Winnie, elle lui attrapa la main pour l'entraîner avec elle. Alors qu'ils s'éloignaient, elle pria tous les dieux qu'elle connaissait que Simon et Adam s'en sortent.
Pitié, ne me les prenez pas eux aussi.
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