Chapitre 14
Hi! J'espère que vous allez bien?
Je vous remercie mille fois pour tout votre soutien et tout votre amour! Je suis enfin en vacances donc je vais pouvoir reprendre l'écriture de « Le lanceur de fleurs » plus intensément !
Merci pour vos commentaires. Merci de me donner la chance de lire vos réactions.
J'espère que ce chapitre vous plaira !
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CHAPITRE 14
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(This Side Of Paradise_Coyote Theory)
HARRY.
« Je n'arrive toujours pas à croire qu'il soit là. »
Je ne peux m'empêcher de sourire, amusé, lançant un regard à Inès qui ne cesse de râler depuis que nous sommes sorti du métro. Non, depuis que nous sommes parti de la maison en fait. Et encore plus maintenant qu'elle aperçoit Alexis au bout de la rue, en train de discuter avec Louis. Mes yeux se posent sur lui, qui ne nous a toujours pas aperçu. Les mains dans les poches de sa veste, par dessus un sweat gris, il semble concentré dans sa conversation avec son élève. Mon regard glisse sur son visage, sur ses quelques mèches de cheveux qui s'envolent sous le vent, et je sens cette chaleur reprendre place au fond de ma poitrine.
« Moi non plus. » Répond Alexandre.
Même s'il le dit calmement, je me doute que la présence d'un garçon qui craque pour sa copine soit dérangeante. Mais, égoïstement, j'aime beaucoup Alexis. Alors je n'ai pas vraiment réfléchi à la présence d'Alexandre lorsque Louis m'a demandé d'inviter son élève.
Ils finissent d'ailleurs par tourner la tête vers nous lorsque nous arrivons devant la galerie. Si le regard d'Alexis tombe directement dans celui d'Inès, celui de Louis retrouve le mien. Il me sourit et parait presque soulagé, comme s'il avait douté du fait que je vienne vraiment. Peut-être que j'en ai douté moi aussi, en fait. Mais je suis là. Alors ça veut dire ce que ça veut dire.
« Salut. » Finit par dire Louis en regardant également Inès et Alexandre.
« Louis, je te présente mon copain. Alexandre. » Dit ma cousine en souriant.
« Tu tutoies monsieur Tomlinson? » S'étonne Alexis en fronçant les sourcils.
Inès ouvre la bouche mais la referme aussitôt, passant son regard de Louis à moi, perdue. Elle ne sait pas ce qu'elle doit répondre. Ce qu'elle peut répondre. Et je dois avouer que moi non plus alors je regarde Louis à la place, l'interrogeant silencieusement du regard. Ce dernier réussit à ne rien laisser paraitre et hausse simplement les épaules en disant à Alexis:
« En fait, je connaissais Inès et Harry avant d'être professeur. C'est pour ça.
-C'est pour ça que tu es bien noté. » Se moque alors Alexis.
« Ou parce que je sais dessiner autre chose que des bonhommes bâtons.
-Moi aussi. Je suis passé aux soleils.
-Wow, quel artiste.
-Ouais alors ne viens pas gâcher cette sortie, s'il te plaît. Je viens me cultiver. C'est un truc d'artistes. »
Sur ces mots, Alexis passe son doigt de Louis à lui pour les désigner. Inès ne peut alors s'empêcher de craquer, lâchant un léger rire qui fait naître un sourire fier sur le visage d'Alexis. Je souris aussi. Ma cousine dit détester Alexis mais faudrait peut-être qu'elle admette qu'il a au moins le don de la faire rire. Autant qu'il l'agace, en tout cas.
« D'ailleurs, l'artiste nous attend à l'intérieur. » Annonce Louis en nous ouvrant la porte de la galerie.
Je laisse les adolescents entrer en premier avant de passer devant Louis dont je sens le regard toujours posé sur moi. Son odeur m'envahit face à cette proximité et je peux sentir mon coeur se serrer et se réchauffer en même temps. Cette odeur. Ça peut paraître si bête mais c'est exactement la même. Le mélange entre son parfum et son odeur à lui. Ça me semble si familier à cet instant. Ça me ramène à l'odeur que je respirais au quotidien, plusieurs années en arrière. Sans même y faire attention d'ailleurs. Elle était juste là. Sur mes draps et oreillers quand il venait dormir à la maison. Sur mes pulls quand on se les prêtait. Partout autour de moi lorsqu'on s'asseyait à côté en classe, dans le bus, dans le métro, sur les escaliers...
« Louis! »
Je sors de mes pensées en voyant un homme s'approcher de nous dans la galerie. Il doit avoir le même âge que Louis et moi. Il est très bronzé, a les yeux et cheveux noirs et a un accent espagnol assez prononcé . Il prend instinctivement Louis dans ses bras en disant:
« Ça me fait plaisir de te revoir!
-Moi aussi. Je ne pouvais pas ne pas venir en sachant que tu étais de passage à Paris.
-Je ne savais même pas que tu venais vivre ici! »
Louis me lance alors un regard avant de regarder de nouveau son ami.
« J'avais besoin de rentrer à la maison. »
Mon coeur se serre doucement tandis que Inès me lance un discret regard.
« Présente-moi tes amis! » Dit l'artiste en se tournant vers nous.
« Fabio, je te présente Inès, Alexandre, Alexis et Harry.
-Enchanté. » Je réponds lorsque Fabio me tend sa main.
Sauf qu'il serre un peu plus longtemps ma main dans la sienne, son regard restant bloqué dans le mien quelques secondes. Il fronce les sourcils puis lance un regard à Louis que je vois rapidement tourner la tête vers les tableaux. Fabio sourit en coin, finissant par me dire:
« Enchanté aussi, Harry.
-Vous faites de l'aquarelle? » Lâche Inès, ses yeux se mettant à briller face aux tableaux autour d'elle.
Fabio se retourne vers elle et sourit en hochant la tête avant de lui répondre:
« Je ne fais pas seulement de l'aquarelle mais effectivement c'est le cas pour cette exposition.
-On en a fait lors de mon dernier cours. » Lui dit Louis.
« On n'a jamais fait d'aquarelle en cours. » Intervient Alexis en fronçant les sourcils.
« Je voulais dire lors des cours que je prends, pas que je donne.
-Vous êtes professeur et vous prenez des cours?!
-Et bien, oui. J'arrêterais jamais d'apprendre. Et je ne veux pas arrêter, d'ailleurs. J'apprends même de mes élèves.
-Je vous apprendrais à faire de beaux soleils alors. »
Alexis nous arrache à tous un rire et Fabio finit par proposer une visite guidée à Alexis, Inès et Alexandre. Je suis convié aussi mais, en voyant Louis rester à l'écart du groupe, je décide de m'approcher de lui à la place. Fabio part donc avec les adolescents, nous laissant Louis et moi devant une grille où des tableaux sont accrochés.
« Tu ne voulais pas de visite guidée? » Me demande Louis.
« Tu le connais d'où, ce gars? » Je demande à la place.
Honnêtement, je m'en fiche un peu de son aquarelle.
Louis se pince les lèvres avant de me répondre, regardant les tableaux face à lui.
« On était dans la même classe en terminal. »
Mon estomac se retourne légèrement. Oh. Ok.
Fabio a connu Louis quand moi je l'ai perdu.
« On avait tous les deux prit option art plastique.
-Il est bizarre.
-Bizarre? » Répète Louis en tournant la tête vers moi cette fois.
« Ton pote a l'habitude de fixer les gens pendant dix minutes au moment de les saluer? »
Louis rit légèrement et secoue la tête. Puis, doucement, son sourire s'efface et je vois sa poitrine se soulever lorsqu'il prend une légère inspiration avant de m'avouer, regardant de nouveau les tableaux face à lui:
« C'est juste qu'il t'a reconnu.
-Reconnu?
-Je te dessinais, parfois. »
Mon coeur rate plusieurs battements et, cette fois, c'est moi qui reste figé face à ces tableaux que je prends même pas le temps de contempler. Je sais qu'il y en a un qui représente des silhouettes sur une plage avec la mer en face qui prend toute la place. Un autre avec une ruelle éclairée par des lampadaires, dessinant des ombres au sol alors qu'il n'y a personne dans la rue.
« Tout le temps. » J'entends Louis murmurer.
La gorge nouée, je n'arrive plus à savoir si ce que je ressens à cet instant est agréable ou non. Un peu des deux je crois. De la tristesse mélangée à cette chaleur. Comme des flammes qui refusent de s'éteindre malgré le fait qu'une tempête se mette à souffler dans ma cage thoracique.
On relève tous les deux la tête en entendant la voix de Fabio résonner. On le voit passer au fond de la salle, suivi de près par Inès et Alexandre. Ce dernier passe un bras autour de l'épaule de ma cousine tandis que Alexis, derrière eux, baisse le regard un instant avant de se concentrer de nouveau sur ce que raconte l'artiste.
« Et toi, est-ce que tu comptes exposer? » Je demande pour briser le silence qui s'était installé.
Surpris par ma question, Louis tourne la tête vers moi en répondant:
« Je l'ai déjà fait quelques fois dans le sud. Mais, oui, c'est sûr que j'aimerais bien le faire ici aussi. Si c'est possible.
-Ça l'est forcément. Tes tableaux sont mieux que les siens. » Je réponds, honnêtement.
Louis fronce les sourcils mais ne peut s'empêcher de sourire légèrement avant de répondre:
« Fabio est vraiment talentueux. Ce n'est juste pas ton style.
-Peut-être.
-Et ce que je fais aujourd'hui ne l'est peut-être pas non plus. » Il dit plus doucement.
Je repense alors à cette soirée où j'ai dû le ramener chez lui. Aux oeuvres qui étaient éparpillées un peu partout dans son appartement. De la peinture. Du dessin. Des styles et techniques différentes sûrement, j'en sais rien puisque je ne m'y connais pas, mais j'aurais pu les reconnaitre dans une galerie. J'aurais pu reconnaitre les coups de crayons ou de pinceaux de Louis. Je l'ai regardé faire tant de fois. J'ai aimé le regarder.
L'art ne m'inspirait peut-être pas.
Mais lui, si.
« Toi, c'est différent. »
Ce n'est qu'un murmure. Des mots qui voulaient s'échapper de ma poitrine. Mais au regard que Louis me lance, aux lueurs qui traversent son regard, je sais qu'il les a entendu. Je le regarde en retour, silencieux, jusqu'à ce que cette chaleur me fasse presque trop mal et que je sois obligé de tourner la tête. Du coin de l'oeil, je vois Louis faire la même chose, regardant le reste du groupe au fond de la salle.
« C'est moi ou Alexis craque pour ta cousine? » Il demande soudainement.
Je ne peux m'empêcher de sourire en coin. Je savais qu'il finirait par me poser cette question. Louis a toujours été très observateur. Mais surtout très curieux. Au lycée, personne ne le remarquait mais lui savait presque tout sur tout le monde à force d'entendre des conversation dans les couloirs, au CDI, en permanence. Il me racontait tout le soir, chez lui, chez moi ou encore au téléphone et je l'écoutais comme si j'en avais vraiment quelque chose à faire de la vie des autres. Ça devenait quand même plus interessant lorsqu'il entendait des choses sur des professeurs.
« Il craque pour elle, ouais. Il me fait presque de la peine quand il la voit avec Alexandre.
-Je comprends. » Répond Louis, distraitement.
Je tourne de nouveau la tête vers lui et il croise mon regard, ne cherchant même pas à le détourner ou à changer de conversation. Ça aussi, c'est quelque chose qui a changé chez lui. Avant, dès qu'une situation lui échappait, il fuyait. Il détestait les confrontations. Il détestait assumer. Il était celui qui se taisait, qui se faisait discret. Aujourd'hui, son regard confiant me déstabilise. Et, en même temps, ça me donne l'impression de pouvoir lui rentrer dedans. De pouvoir enfin lui poser certaines questions même s'il ne veut toujours pas répondre à celles liées à son départ.
Mais il y en a d'autres que je me pose.
« Depuis quand? »
Louis fronce les sourcils, ne comprenant pas tout de suite.
« Depuis quand tu ressentais ça pour moi lorsque tu m'as embrassé? » Je reprends alors.
Pendant une seconde, j'ai l'impression que c'est finalement moi qui vais me défiler. Qui vais ignorer ma propre question. Mais je continue de le fixer, comme il le fait en retour. Et il n'hésite même pas lorsqu'il me répond calmement:
« Depuis toujours. »
Ma poitrine se compresse tellement que je respire un peu plus fort, tentant de calmer les battements de mon coeur. Je ne m'étais jamais posé la question avant qu'il m'embrasse. Je savais que notre relation était spéciale, unique, mais je ne la voyais pas comme telle. Alors j'imaginais encore moins Louis ressentir autre chose que de l'amitié. Tout s'est bousculé lorsqu'il m'a embrassé. J'ai repensé au nombre de fois où je lui présentais des filles. Où je lui parlais d'elles. Où on allait même parfois dans les détails avec Sacha et que Louis nous écoutait en souriant et même en riant avec nous. Il ne laissait rien paraitre. Rien. Alors qu'il ressentait ça depuis tout ce temps.
Moi je n'ai jamais eu à me poser cette question. Louis ne voyait aucune fille. Aucun garçon non plus. Il était toujours là, avec moi. Il était toujours là quand j'avais besoin de lui. Il ne m'a jamais donné l'impression d'être délaissé. Il faisait de moi sa priorité même si je n'en étais pas forcément conscient. Il a toujours eu cette place spéciale dans mon coeur mais je ne savais pas encore à quel point jusqu'à ce qu'il m'embrasse. C'est comme si c'était enfouit quelque part en moi. Alors, forcément, je ne le subissais pas. Du moins pas jusqu'à son départ.
Je réalise que ce que je ressens depuis huit ans maintenant Louis le ressent depuis toujours. Cette chaleur et ce vide en même temps. La différence est que Louis m'avait toujours près de lui lorsqu'il ressentait ça. Moi je l'ai perdu lorsque je l'ai ressenti. Peut-être que les deux situations sont aussi douloureuses l'une que l'autre. A quoi bon ressentir ça pour une personne qui ne vous le rend pas?
Je regarde Inès et Alexandre puis Alexis derrière eux. J'imagine Louis à la place. Et une pointe de culpabilité me traverse.
« C'est pas de ta faute. C'est moi qui te le cachait. » J'entends Louis dire, comprenant mes pensées.
Je sais que ce n'est pas de ma faute. J'en ai conscience. Je ne voyais pas Louis autrement que comme un ami à ce moment-là. Mais ça fait mal de réaliser qu'il a su me cacher tant de choses alors que je pensais le connaître par coeur. Qu'il a su faire semblant jusqu'à son départ.
« Et je me demande ce que tu me caches encore. » Je réponds en plantant mon regard dans le sien.
« Demande-moi ce que tu veux et je te répondrais. »
Il n'a pas besoin de préciser en dehors de mon départ. Je le sais déjà. Notre dernière dispute à ce sujet est encore bien ancrée en moi. Il a dit avoir besoin de temps à ce sujet. Et même si ça me frustre, si je suis là avec lui aujourd'hui, c'est bien parce qu'une part de moi lui accorde ce temps.
« Tu en as parlé à quelqu'un d'autre? De ce que tu ressentais pour moi?
-Mes parents. »
Je hoche la tête. Ça ne m'étonne pas vraiment. Ils ont toujours été très complices tous les trois. Louis se sentait forcement en confiance avec eux pour leur confier ça.
Je réfléchis quelques secondes puis me pince les lèvres avant de finalement oser:
« Tu as rencontré quelqu'un là-bas? »
Cette fois, aucun de nous ne se regarde. Nos regards sont fixés sur les mêmes foutus tableaux devant nous. Sur cette aquarelle qui ne me fait rien ressentir du tout. Aucune émotion. Aucun sentiment. Rien de comparable à la simple présence de Louis à mes côtés. Comme si c'était lui le seul tableau capable de me faire passer par mille émotions différentes. De la moins agréable à la plus folle.
« Oui. » Il finit par répondre.
Là, c'est la moins agréable.
« J'ai rencontré un garçon durant ma première année d'université. Clément.
-Il était comment?
-Calme. Patient. Gentil. Attentionné. »
Il ne me ressemblait pas vraiment.
« Il aimait l'art. Il aimait particulièrement mes oeuvres. »
Pas plus que moi. C'est impossible.
« Vous êtes resté longtemps ensemble?
-Cinq ans. »
Cinq ans. Putain.
« Tu l'aimais. »
Cette fois, ce n'est même pas une question de ma part. Pourtant je vois Louis hocher la tête avant de répondre:
« Je l'aimais, oui. D'une certaine façon. »
Je fronce les sourcils et ne peut m'empêcher de tourner la tête pour le regarder. Si je semble perdu, voir énervé, Louis, lui, reste calme en me regardant en retour.
« D'une certaine façon? Tu l'aimais, point. Il n'y a pas mille façon d'aimer un gars avec qui tu restes cinq ans.
-Je ne sais pas s'il y en a mille mais j'en connais au moins deux. »
En même temps qu'il lâche cette phrase, Louis se retourne complètement vers moi. L'atmosphère change et une certaine tension s'installe lorsqu'il ancre son regard dans le mien. Je peux ressentir toute son assurance et, lui, toute cette colère que je ne laisse pas exploser:
« Je connais la façon dont j'aimais Clément. C'était un amour sain. Calme. Tranquille. Parce que c'étaient des câlins, des baisers, des nuits de tendresse. J'avais quelqu'un derrière moi qui promettait de me rattraper quoi qu'il arrive. Qui me soutenait. Qui me faisait confiance comme je lui faisais confiance en retour. Il n'y avait aucuns pleurs. Des disputes qui n'en étaient pas vraiment puisqu'on communiquait sans avoir besoin de crier ou de se blesser.
-Alors pourquoi ça s'est terminé si c'était si parfait? » Je ne peux m'empêcher de répondre, la mâchoire serrée.
Parce que Louis méritait tout ça mais que je ne peux m'empêcher de sentir cette colère monter en moi en imaginant tout ce qu'il vient de lâcher. L'imaginer avec ce gars dont je ne connais même pas le visage mais que je vois pourtant très bien câliner Louis, l'aimer, le rassurer, le regarder dessiner.
Le regarder dessiner, putain.
« Tu me demandes vraiment pourquoi? » Rit ironiquement Louis.
S'il était calme jusqu'à maintenant, je peux sentir une certaine colère trembler dans sa voix lorsqu'il reprend en me regardant:
« Parce qu'il y a cette deuxième façon d'aimer, justement. Parce qu'il y a la façon dont je t'aimais toi, Harry. Il y avait des pleurs, ouais. Des pleurs que je cachais à tout le monde en te voyant avec ces filles. Mais aussi des pleurs parce que j'avais honte de ressentir ça, de te cacher ça. Mais il y avait aussi la façon dont tu pouvais me regarder dessiner ou m'écouter parler d'art pendant des heures alors que tu étais la personne la plus impatiente que je connaisse. Il y avait tes mots qui arrivaient à calmer mes crises d'angoisses alors que tu n'arrivais même pas à te calmer toi. Il y a eu toutes ces fois où tu m'as protégé. Où tu m'as défendu. Il y avait cette chaleur au fond de moi à chaque fois que j'étais avec toi. Le réflexe de te chercher du regard à chaque fois que j'entrais dans une pièce. Je ne voulais qu'être avec toi. Je ne voulais que toi. Tout le temps. Partout. Et tout ça je n'arrivais pas à l'oublier même en présence de Clément. Je l'aimais peut-être mais ce n'était jamais assez fort pour effacer ce que j'avais pu ressentir pour toi. »
Figé, je regarde Louis qui reprend sa respiration avant de baisser le regard quelques secondes et de le relever au moment de me demander:
« Alors tu me demandes pourquoi ça s'est terminé? »
Il sourit nerveusement avant de hausser les épaules et d'avouer plus tristement:
« Parce que Clément méritait quelqu'un qui fasse de lui la personne la plus importante de sa vie. »
Son regard se met à briller et mon coeur se retourne lorsqu'il termine:
« Et que quelqu'un d'autre avait déjà cette place pour moi. »
Et là, c'est l'émotion la plus folle.
♦
(Loving You_Seafret)
« Merci beaucoup d'être venu! » Dit Fabio lorsque nous sortons de la galerie.
« Encore bravo pour l'exposition! » Lui répond Louis, le sourire aux lèvres.
Je le regarde et je me demande pour la énième fois comment il fait pour berner aussi facilement les gens. Pas qu'il soit malhonnête mais, je sais pas, il a cette facilité à cacher certaines de ses émotions. Après tout ce qu'il m'a lâché dans la galerie il arrive à sourire et faire comme si de rien était alors que, moi, je suis muet et j'ai toujours l'impression que ma poitrine est sur le point d'exploser.
Nous disons au revoir à Fabio puis Alexandre se retourne pour regarder une voiture garée un peu plus loin dans la rue.
« Ma mère est venue nous chercher. » Il dit en se tournant vers Inès.
C'était prévu qu'elle aille dormir chez lui quelques nuits pendant les vacances. La seule condition de ma tante c'est qu'elle n'oublie pas de réviser et faire ses devoirs. Mais vu le sérieux d'Alexandre également, je n'en doute pas.
D'ailleurs ce dernier se tourne vers Alexis et il semble hésiter un instant avant de finalement lui demander:
« On peut te déposer chez toi si tu veux. »
Surpris, Alexis le regarde et hausse les épaules en répondant:
« Euh, bah je veux bien c'est gentil. Si ça dérange pas.
-Non t'inquiète. » Le rassure Alexandre.
Inès sourit doucement en regardant son petit-ami et je dois avouer que je souris légèrement aussi. C'est sympa de la part d'Alexandre. Inès s'approche de moi pour me dire au revoir et je la prend rapidement dans mes bras avant de faire un signe de la tête aux garçons.
« A la rentrée on va travailler l'aquarelle. » Lâche Louis lorsque Alexis lui dit au revoir.
« Sérieux? Pour une fois que je saurais de quoi on parle avant que vous l'expliquiez.
-C'était le but. » Avoue Louis.
Alexis ouvre la bouche avant de la fermer à nouveau pour finalement l'ouvrir aussitôt:
« Vous vouliez que j'ai de l'avance?
-Je voulais que tu découvres le sujet autrement qu'à travers un cours. Mais, oui, je voulais aussi que tu prennes de l'avance pour ne pas que tu te sentes perdu à la rentrée.
-Merci. » Sourit Alexis en enfilant son bonnet.
« Avec plaisir, Alexis. »
Louis sourit en regardant son élève et c'est exactement cette lueur qu'il a dans les yeux qui m'inspirait moi-même lorsqu'on était encore au lycée. Cette bienveillance là et cet amour du partage qui m'a poussé à lui dire de devenir professeur. Je ne pense pas m'être trompé.
Les ados finissent par rejoindre la mère d'Alexandre et il ne reste plus que Louis et moi. L'ambiance est spéciale depuis notre dernière conversation mais Louis finit par briser la glace en me demandant simplement:
« Tu es venu en voiture?
-Non, métro.
-Moi aussi. »
On se met alors à avancer jusqu'au métro dans un silence qui n'est pas forcément gênant. C'est surtout que je ne sais pas quoi dire. J'ai l'impression qu'il me faut toujours un temps pour me remettre d'un moment passé avec Louis alors que ce dernier continue d'agir naturellement.
« Qu'est-ce que tu as prévu pendant les vacances?
-Pas grand chose. Aller à la boxe. Et Michael va sûrement me demander de sortir avec lui quelques soirs. Je crois qu'il veut aussi embarquer Lucas.
-Sacha ne vient pas avec vous? »
Je me fige un instant, en même temps qu'on s'arrête pour attendre le métro. C'est la première fois que Louis me parle de Sacha de lui-même. Depuis qu'il est revenu, il évite le sujet. Et la dernière fois qu'il l'a croisé à la boxe, il l'a évité tout court. Je lui lance un regard mais il fixe un point invisible devant lui.
« Si, il vient parfois avec nous. Quand il n'est pas en train de bosser ses cours. Il fait du droit. »
Louis ne répond pas mais je vois qu'il m'écoute attentivement. Je me surprend à vouloir lui en dire plus. A lui avouer que Sacha s'intéresse soudainement à l'armée et que l'idée qu'il finisse par partir lui aussi m'effraie sérieusement. Ouais, je ressens cette envie de juste me confier à Louis comme je l'ai toujours fait à l'époque. Mais il y a cette petite voix dans ma tête qui me rappelle son abandon. Il y a ce frein que je me mets moi-même. Et, en plus, je me dis que Sacha n'a peut-être pas envie que je raconte sa vie à Louis qui l'a abandonné lui aussi.
Notre métro finit par arriver et nous y entrons. Il n'y a plus de place assises alors on reste debout au milieu, l'un à côté de l'autre. Je lève la tête pour regarder les arrêts qui sont affichés et si je me remémore bien l'adresse de Louis le sien est avant le mien.
« C'est cool ce que tu as fait pour Alexis. » Je finis par lui dire.
Louis tourne la tête vers moi et sourit doucement.
« C'est normal.
-Pas pour lui. Il est doublant et j'ai vu peu de professeurs l'encourager. Il ne le dira sûrement pas mais ça le touche que tu sois autant derrière lui. Il a pas l'habitude qu'un adulte croit en lui. Son père lui-même ne le fait pas. »
Louis se pince les lèvres et soupire tristement en hochant la tête:
« Ouais, c'est ce que j'ai cru comprendre. »
Puis il ajoute en me regardant:
« Tu te vois un peu en lui, pas vrai? »
Mon coeur se serre et je hausse les épaules, tentant de rester détacher.
« Je l'ai déjà vu craquer. Et, ouais, à ce moment-là, j'ai cru me voir moi. Surtout quand il m'a dit, après avoir raté une première fois son bac, qu'il ne faisait pas parti de ceux qui réussissent. Qu'il en était sûr et que les autres le savaient aussi.
-Pourtant toi tu as réussi.
-Mais je suis toujours en colère. » J'avoue.
A ce moment-là, je parle de la vie en général. Des inégalités auxquelles j'assiste. De l'injustice. Mais je pense aussi à Louis. A cette peur de l'abandon. A mon propre père. A ce qu'ont traversées ma mère et ma tante. A ces dernières années.
« Moi aussi. » Lâche doucement Louis.
C'est ce que j'ai cru comprendre tout à l'heure, lorsque sa voix s'est mise à trembler. Je ne sais juste pas si toute sa colère est tournée vers moi, ou vers ce qu'il a pu ressentir envers moi. J'ai l'impression que c'est plus que ça, même s'il le cache bien.
« Mais l'art m'aide. »
Je hoche la tête.
« D'ailleurs... »
Voyant qu'il ne termine pas sa phrase, je tourne la tête pour le questionner du regard. Des personnes nous bousculent un peu pour descendre à l'arrêt et on se retrouve un peu plus proches lorsque d'autres entrent.
« Je participe à un atelier de peinture samedi et j'aurais besoin de quelqu'un pour m'aider. »
Son regard devient un peu plus insistant et j'ouvre grand les yeux.
« Euh, je sais pas si t'as oublié mais je ne sais pas dessiner. Et encore moins peindre.
-Je ne l'ai pas oublié. Tes dessins étaient affreux.
-Sympa. » Je marmonne, tentant de cacher un sourire amusé.
Louis rit, absolument pas désolé.
« Du coup j'ai du mal comprendre.
-Non, t'as très bien compris. » Il répond.
Je fronce les sourcils et Louis perd doucement son sourire pour m'expliquer:
« L'idée de l'atelier c'est de peindre sur une partie du corps de quelqu'un. N'importe laquelle. »
L'atmosphère change à nouveau lorsque je crois comprendre sa proposition. J'imagine la peinture froide et le pinceau de Louis glissant sur ma peau. Un doux frisson me traverse mais je tente de le cacher comme je peux lorsque Louis continue en me regardant:
« Je voulais savoir si tu accepterais que je peigne ton dos. »
Légèrement perdu, je regarde Louis sans savoir quoi répondre. Et mon silence ne doit pas être très rassurant puisqu'il ajoute:
« Ce n'est pas grave si tu ne veux pas. Thomas acceptera peut-être de m'accompagner si je trouve personne. »
Ça c'est fourbe. Louis sourit légèrement en voyant mon regard changer et je ne peux m'empêcher de secouer la tête, cachant un sourire derrière ma main lorsque j'apporte cette dernière à mon visage.
« Est-ce qu'il y aura des gens nus autour de moi?
-Euh, pas forcément non.
-Une musique classique comme fond sonore?
-Mais qu'est-ce que tu racontes?
-Il n'y a que des gens perchés pour faire ce genre d'ateliers. Je veux pas finir par poser entre une paire de seins et de fesses ou qu'on me demande de prendre une rose dans ma bouche. »
Louis lève les yeux au ciel et finit par rire en me regardant.
« Je veux juste peindre ton dos, Harry. Pas te faire poser ni te demander de... T'as dit quoi déjà? Bouffer une rose?
-On sait jamais avec vous, les artistes.
-Encore une fois si tu veux pas je peux demander à...
-Non, c'est bon. Je viendrais.
-Vraiment?
-Ouais. »
Les bras croisés sur mon torse, me demandant dans quoi je m'embarque, je lance un regard à Louis qui sourit discrètement.
« Je t'enverrais l'adresse. » Il me dit.
Je hoche la tête et, au même moment, le métro freine un peu trop violemment. Louis bascule sur le côté et j'ai le réflexe de décroiser mes bras pour en enrouler un autour de sa taille, l'aidant à se stabiliser. Mais je réalise rapidement mon geste et donc notre position lorsque Louis relève la tête vers moi, son corps pratiquement collé au mien. Nos regards s'accrochent, retournant ma poitrine. Encore plus lorsque Louis s'humidifie les lèvres, son regard glissant vers le bas de mon visage... Mais il ne s'y aventure finalement pas, tournant la tête vers les portes du métro qui s'ouvrent.
« C'est mon arrêt. » Il dit.
Je retire rapidement mon bras de sa taille, ignorant la décharge électrique qui me traverse au même moment. Louis me regarde une dernière fois et sourit simplement en disant:
« On se voit samedi, du coup.
-Ouais, à samedi. » Je réponds faiblement.
Puis je regarde Louis s'excuser pour qu'on le laisse sortir du métro. Il sourit aux gens et, une fois dehors, se retourne une dernière fois vers moi. Je n'arrive plus à décrocher mon regard de lui et toutes les émotions de cette journée me retombent dessus en même temps que les portes se ferment à nouveau.
Mais je le vois encore, derrière la vitre.
Il continue de me regarder.
Et je peux encore l'entendre me dire:
Je ne voulais qu'être avec toi. Je ne voulais que toi. Tout le temps. Partout.
...
J'espère que ce chapitre vous aura plu?
Alors que pensez-vous de cette petite sortie au musée? On dirait que Louis a commencé à se confier sur ce qu'il ressent...
Et on dirait également qu'un nouveau rendez-vous les attend.👀
Je vous donne rendez-vous vendredi prochain!
Encore merci mille fois d'être là.❤️
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