Il a deux trois rides aux coins des yeux
Rien de bien méchant ça lui va plutôt bien
Son front s’est installé là où il avait des cheveux
Une mèche en avant et voilà qu’il revient

Euphorique devant son miroir Étienne
Applique sur ses poches une petite crème
Esthétique pour lui sont les stratagèmes
En musique il retrouve la vingtaine

Rasé de près et sur les joues un après
Dans un nuage de parfum il piétine sur un refrain
Il est fin prêt plus qu’un bijou et c’est fait
Met son pantalon jasmin puis ses bottines en daim

Étienne a peur de paraître vieux
Il se sert un verre pour que ça aille mieux
Dans l'entrée deux enfants en photo lui font face
Gêné évitant leur regard il s’efface

C’est à vingt heures que la soirée commence
Sur la terrasse d’un pub quatre copains d’enfance
Des rires de la joie à l’heure des réjouissances
A la tienne Étienne que ton ivresse est un sens

La soirée s'accélère les verres fusent
Attentif à quelques célibataires il s'excuse
Étienne désinhibé aime plaire et la suze
Elle est séduite son nom c’est Claire il s’amuse

Les trois copains hilares observent le quatrième faire le show
Monopolisant l’attention l’alcool aidant ses jeux de mots
Étienne se sent revivre invincible dans la peau d’un ado
Une énième tournée la spirale est lancée il boit beaucoup trop

Les lumières tournent et le temps lui échappe
Qu’il soit tard ou tôt à vrai dire il s’en tape
Le visage renfermé quand la vodka se frappe
Il y a toujours un temps où notre ami dérape

C'est à minuit passé qu'Etienne bégaye et titube
Il en a jamais assez et se noie dans ses certitudes
Ses amis craignaient ses manies qu’ont la vie rude
Mais on ne peut le freiner comme à son habitude

D’un geste mal assuré il brise son verre
Sur sa veste dégouline le citron vert
Dans son ivresse défiant les regards de travers
Auxquels il s’adresse d’un majeur tendu en l’air

De jeune séducteur charismatique à vieille ivrogne pathétique
Dans les yeux de Claire l’instant n’est plus magique
Ce d'Étienne sont vides et à sa manière lui explique
Qu’elle et sa clic sont faciles et ne courent qu’après le fric

Invité par le barman à quitter les lieux
En gentleman il insulte ce pauvre vieux
Une fois de plus il a déçu et pas le dessus
Sur un mal venu au bout d'une ivresse voulue

Le chemin du retour est long jusqu'à chez lui
Des zigs et des zags les yeux dans le vague
Crit-il à l’amour quand il se perd dans la nuit ?
Claire et la drague  n'est qu'un souvenir qui le nargue

La clé dans la serrure
Dans l'entrée deux enfants toujours lui font face
Gêné leur demandant pardon il s'efface
Ses travers les éloignent à coup sûr

Deux amours inconsidérés
L’auront définitivement déchiré
Celui qu'il porte aux femmes et aux soirées arrosées
Et celui qu'il porte à sa femme et aux enfants qu’ils ont fait

Sont ils partis parce qu’il boit
Ou boit-il parce qu'ils sont partis
En tout cas il a la gueule de bois
Depuis le jour où elle s'est enfuie

PseudoRime