Les Trois Diamants {Fanfiction}
CHAPITRE 1
— Pattes Vives, où es-tu ?
La chatonne se blottit tant bien que mal dans l'inconfortable buisson de ronces qu'elle avait pris pour cachette. Elle sursauta lorsque le museau crème de sa mère apparut face à elle. La petite femelle prit ses pattes à son cou mais Belle Aurore l'en empêcha, la regardant sévèrement.
— Voyons, Pattes Vives ! Tu n'es plus un chaton ! Ton baptème va avoir lieu dans quelques instants !
Elle entraîna sa fille en direction de la pouponnière, et celle-ci, en soupirant, grommela :
— Je ne veux pas que tu me fasses ma toilette. Tu me tires les poils et...
— Ne dis pas de bêtises. Regarde l'état de ton pelage ! la coupa Belle Aurore.
Le beau pelage blanc de Pattes Vives, en effet, était presque aussi noir que ses pattes, et ses poils étaient si emmêlés qu'on aurait pu croire qu'elle s'était battue contre dix guerriers - ou plutôt, contre un buisson de ronces.
Un peu plus tard, lorsque Belle Aurore eut terminé de nettoyer le beau pelage de sa fille, qui avait supporté ce moment de torture avec mauvaise humeur, l'appel habituel d'Etoile Lumineuse retentit dans la claririère qui abritait le camp de la Tribu du Soleil. Aussitôt, le mécontentement de Pattes Vives disparut, remplacé par la joie de devenir enfin apprentie, après six longues lunes d'attente dans la pouponnière.
Les membres de la Tribu se rassemblèrent sous le Grand Chêne, où, sur une branche, se tenait fièrement leur meneur, son pelage roux flamboyant sous le Soleil de l'après-midi. Pattes Vives s'avança fièrement parmi les multiples guerriers et apprentis et attendit que le chef la rejoigne au sol.
— Pattes Vives, au nom de nos ancêtres de la Tribu du Ciel, je te nomme disciple combattante sous le nom de Nuage Vif. Ecorce de Chêne, je te confie l'apprentissage de cette jeune apprentie. Je compte sur toi pour lui apprendre tout ce que tu sais.
Comme le voulait la tradition, Ecorce de Chêne, un mâle au pelage brun qui s'avérait être l'oncle de la jeune disciple, s'approcha et posa sa patte sur la tête de Nuage Vif. Des acclamations retentirent dans la clairière, et Nuage Vif vit les regards lumineux de ses parents posés sur elle. Ceux-ci s'avancèrent, et la calinèrent en ronronnant.
— Tu as intérêt à prendre soin de ma fille ! s'exclama Oeil de Saphir en donnant un coup de patte taquin à son frère.
— Ne t'inquiète pas, répondit Ecorce de Chêne sur le même ton. Et si on commençait par une visite du territoire ?
— Oh, oui ! cria Nuage Vif avec enthousiaste.
La petite femelle, au comble du bonheur, gambada aux côtés de son mentor vers la sortie du camp. Lorsqu'ils disparurent, Belle Aurore se blottit contre son compagnon et lui murmura :
— Quand vas-tu te décider à lui dire la vérité ?
— Je ne sais pas... soupira le guerrier en retour. Quand elle sera prête. Cela ne fait que six lunes.
— Je respecterai ton choix, Oeil de Saphir, mais elle va finir par l'apprendre seule et ce jour là, elle nous en voudra terriblement, tu le sais aussi bien que moi.
***
Petit Eclat trépignait d'impatience depuis l'aube. Le temps lui semblait passer si lentement qu'il se demandait comment il allait pouvoir attendre la tombée du soir alors que le Soleil était toujours haut dans le ciel. Le chaton s'ébroua et décida d'aller rendre visite à son oncle, le soignant de la Tribu - et aussi son futur mentor.
— Bonjour, Oreilles Sombres ! s'annonça t-il.
Aucune réponse ne lui fut donnée et le jeune mâle en conclut que le soignant n'était pas présent. Il allait rebrousser chemin quand un grand chat gris l'interpella derrière son dos.
— Bonjour, Petit Eclat, répondit-il enfin. Excuse-moi, je préparais des cataplasmes.
Il fit signe au chaton de le suivre, et ce dernier ne se fit pas prier. Les deux félins débouchèrent dans une caverne, assez vaste pour accueillir les blessés et conserver les différents remèdes. Petit Eclat connaissait bien cet endroit, il y avait passé le plus clair de son temps ces dernières lunes. Entre sa mère, Louve Blanche, qui était presque toujours à l'extérieur du camp - ce qui intriguait fortement le jeune mâle - et ses camarades, Petite Vague et Petit Glacier, qui ne voulaient que jouer à la bataille et qui hurlaient à longueur de journée, il s'était très vite retrouvé isolé et seule la tanière du soignant avait pu lui apporter un peu de réconfort.
Toutes les odeurs émanant des plantes exposées dans la caverne l'envahirent d'un sentiment agréable, et le tirèrent de ses souvenirs.
— Je suppose que tu es impatient à l'idée de devenir mon disciple, déclara Oreilles Sombres tout en triant ses remèdes.
— Oui, approuva Petit Eclat. Dis, tu peux me montrer de nouvelles plantes ?
— Pas maintenant. Ne t'inquiète pas, je t'apprendrai tout en temps voulu, le rassura t-il en voyant sa moue déçue.
Le jeune chaton opina de la tête et se dirigea vers la sortie. Il aurait voulu voir sa mère, mais elle était sûrement absente. Parcourant la combe servant de camp à la Tribu du Lac, il fut surpris d'apercevoir son pelage blanc. Elle discutait avec Oeil des Tempêtes à l'ombre de la pouponnière, et tout content, le jeune mâle se hâta dans leur direction.
— Bonjour, Petit Eclat, dit Oeil des Tempêtes à son arrivée. Je vous laisse, je vais voir ce que Petite Glacier et Petite Vague trafiquent.
Elle se leva et s'éloigna. Petit Eclat savait que le motif de son départ n'était qu'un prétexte pour qu'il puisse passer du temps seul avec sa mère, et il la remercia intérieurement pour cela.
— Tu es prêt pour ce soir ? lui demanda alors Louve Blanche, qui semblait assez mal à l'aise.
— J'ai hâte, répondit le chaton. Je suis sûr qu'Oreilles Sombres sera un excellent mentor.
— Je n'en doute pas, approuva la femelle blanche, les yeux dans le vague.
Petit Eclat n'insista pas pour poursuivre la conversation et cligna les yeux pour empêcher les larmes qui perlaient aux coins de ses yeux de s'écouler sur son museau. Il serra les dents quand Louve Blanche se leva.
— Je suis désolée, Petit Eclat, je... j'ai promis à... Pétale des Prés de la rejoindre pour chasser.
—Tu seras revenue pour ce soir ? demanda le chaton en essayant de dissumiler les tremblements de sa voix.
Louve Blanche hocha le tête, et après un dernier regard gêné, prit la direction de la forêt. Petit Eclat soupira et s'allongea tristement. Sa mère l'avait dupé lorsqu'il était plus jeune, mais ses mensonges paraissaient à présent évidents. Déterminé à savoir ce qui poussait Louve Blanche à délaisser son propre fils, le chaton se promit de découvrir le secret de sa mère, à ses risques et périls...
***
Le son familier des croquettes que l'on versait dans sa gamelle réveilla Kitty. La petite femelle s'étira et bailla longuement, et miaula quand Hélène, sa maîtresse, la prit affectueusement dans ses bras pour la déposer devant son repas.
Sa sieste lui ayant donné faim, la chatonne mangea avidement, puis lapa l'eau fraiche contenue dans la seconde gamelle. Après s'être léchée les babines, elle décida de faire un petit tour dans le jardin. Kitty traversa le salon et se faufila dans l'ouverture laissée entre la porte-fenêtre et le mur.
Ses petites pattes crèmes la portèrent jusqu'au centre du vaste jardin, où elle repéra un papillon coloré. Elle bondit pour l'attraper, mais l'insecte s'envola haut dans le ciel, et malgré ses efforts pour le poursuivre, Kitty se retrouva les quatre pattes en l'air. Alors qu'elle s'ébrouait en maugréant, un rire sonore résonna à ses oreilles. La petite femelle se retourna d'un bond et se retrouva face à face avec un petit mâle roux à peine plus grand qu'elle.
— Arrête de te moquer, Lucky ! s'exclama t-elle, vexée.
— Ne boude pas, Kitty, rit le chaton.
— Je ne boude pas !
— Si !
Kitty tenta de bondir sur son ami mais celui-ci recula et la chatonne s'écrasa de nouveau au sol. Lucky éclata une nouvelle fois de rire et aida sa camarade à se relever. Celle-ci le regarda, les yeux plissés, avant de se mettre à rire elle aussi.
Lucky était son meilleur ami depuis toujours. Il était un peu plus âgé que lui, et était le chat des voisins d'Hélène. Ils avaient tout de suite sympathisé et ils étaient presque inséparables.
Après un agréble après-midi passé à jouer, Lucky disparut de l'autre côté de la haie pour rejoindre le nid de ses maîtres. Kitty, quand à elle, décida de partir à la recherche de Vanille, la seconde chatte d'Helène. La jeune femelle la considérait comme une mère, et, d'aussi loin qu'elle s'en souvienne, Vanille s'était toujours occupée d'elle avec amour.
Kitty sauta maladroitement sur le muret donnant sur la rue et descendit de l'autre côté. Elle marcha sur le bas-côté, se demandant où pouvait se trouver son amie. Généralement, elle discutait avec Esmeralda, une chatte habitant à quelques pâtés de maisons. C'est donc dans cette direction que le chatonne blanche se dirigea. Ne voulant pas prendre le risque de se faufiler près du véhicule qui grondait devant elle, le petite chatte traversa prudemment la route pour se retrouver à la lisière de la forêt. Jamais encore elle ne s'en était approchée, et sans réfléchir, elle s'aventura dans les premiers buissons.
Quelques mètres plus loin, elle s'arrêta, et vérifia que la ville était toujours bien en vue. Elle ne désirait pas se perdre au beau milieu de cette immense forêt, alors que la nuit n'allait pas tarder à tomber. Après avoir hésité, Kitty voulut rebrousser chemin, mais des éclats de voix attirèrent son attention. L'une lui paraissait étrangement familière, et cette impression se confirma quand elle vit Vanille assise dans une petite clairière. Sans savoir pourquoi, Kitty décida de se cacher derrière un arbuste.
Voir Vanille dans la forêt ne l'étonnait pas ; elle savait que son amie aimait se promener. Non, c'était la femelle qui discutait avec elle qui lui était parfaitement inconnue. Au premier coup d'oeil, Kitty sut que ce n'était pas une chatte domestique. Elle n'avait pas de collier, et surtout, elle était maigre et son pelage était terne. Kitty décida d'épier leur conversation et tendit l'oreille, se concentrant sur leurs paroles.
— Comment va Petit Sable ? demanda l'inconnue.
— Bien, comme d'habitude, répondit Vanille en soupirant. Ecoute, Louve Blanche, tu ne peux plus continuer à venir tous les jours ici... Ta Tribu va finir par s'en apercevoir.
— Je le sais, mais je ne peux pas m'en empêcher... Elle a six lunes aujourd'hui. Son frère va être nommé disciple. Je suppose que Pattes Vives aussi.
Les deux femelles restèrent un moment silencieuses. Les pensées de Kitty se mélangaient dans sa tête. Petit Sable ? Louve Blanche ? Une Tribu, six lunes et un disciple ? Pattes Vives ? Quels étaient ces étranges mots - et noms, puisque Vanille avait appelé la femelle blanche par l'un d'eux.
— Je dois y aller, dit finalement Vanille.
— Attends, Vanille... Penses-tu que je puisse emmener Petit Sable dans ma Tribu un jour ?
Vanille se figea et posa ses yeux ambrés sur la dénommée Louve Blanche. Kitty ne l'avait jamais vue ainsi. Son amie semblait inquiète, et même en colère.
— Tu m'as déposée ta fille alors qu'elle venait de naître. Tu l'as abandonnée en me demandant de prendre soin d'elle, et maintenant, tu veux la reprendre ? Je l'aime. Je l'aime comme si elle était ma propre fille. Tu ne peux pas me l'enlever. Je te le répète : maintenant, c'est une chatte domestique. Elle ne s'appelle plus Petit Sable. Tu l'as abandonnée, répéta t-elle. Ta fille s'appelle Kitty et elle ne connaît que moi !
Vanille se détourna tandis que les larmes ruisselaient des yeux de Louve Blanche. Aucune d'elles ne remarqua Kitty, dissimulée derrière son buisson, les yeux agrandis de stupeur
A suivre...
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