15 juin

En plein mois de juin, on a cours. On est pas encore en vacances. Wen est dans ma classe. En cet instant, assise à côté de moi dans son pull jaune citron, souriante et attentive. 
Moi je suis bien moins studieuse qu'elle. Je rêvasse, les yeux par la fenêtre dans les nuages. 
Les cours passent vite pour moi. 
Car je n'y pense pas. 

On sort du cours de français, Wen est folle d'enthousiasme. Le livre qu'on étudie lui plaît. Je souris en la voyant dans cet état. 
On descend dans la cour. Carl et Michael sont déjà là et discutent, de sport. De football. OH NON ! Mais heureusement, dès qu'on arrive, la discussion bascule sur Adam grâce à Wen ; 
- Il est où, Adam ? 
- On sait pas, répond Carl. Il est resté avec Mme Couturier à la fin du cours. 
Mme Couturier, c'est la prof de dessin. La professeure principale d'Adam. Pas très rassurant... Je me demande de quoi ils peuvent parler.
Mais l'explication suffit visiblement à mes amis qui ne cherchent pas plus loin et discutent de projets pour l'été. 

Enfin, il arrive, et dit aussitôt : 
- Rien de grave, la prof voulait me parler. 
Il arbore un sourire plein de gentillesse, et demande si tout va bien pour nous deux. Tout va bien ! Alors on continue à parler de plans. 
Mais la sonnerie retentit, je la déteste. Elle est cruelle et écorche les tympans. 
Mais ici, on obéit à la sonnerie, quoiqu'il arrive. C'est elle qui nous dicte quoi faire et je déteste ça. 

On abandonne les garçons et rejoint la classe d'italien. C'est pas ma matière préférée... Je souris, pourtant, et j'y vais. Parce que ben... Je dois décrocher des bonnes notes là-bas. Pour mes parents, parce qu'après tout ce que je leur cache, je leur dois bien ça. 

En sortant des cours pour qu'on aille manger à cinq, un nouveau vrai sourire apparaît sur mon visage. Je les laisse choisir. 
Les sushis. J'adore ça, je ne vais pas me plaindre. Adam m'attrape la main et on va choisir des sushis. A emporter, pour les manger sur un banc du jardin public. Ça sent la fin de l'année, l'été, les barbecues dans les jardins et les virées à la piscine. 
Ou dans le parc pour manger des sushis. J'observe les feuilles des arbres, souriante. Heureuse. Wen et Carl parlent de jeux vidéos, Michael écoute silencieusement. Enfin, écoute. Je vois bien son regard envieux dirigé vers le ballon d'un gamin d'une dizaine d'années. 
Adam sifflote des notes éparses. Je l'écoute lui, moi. 
- C'est quoi ? 
Il me regarde, et répond malicieusement :
- De la musique. 
Je ris. Puis je renchéris : 
- Mais quoi comme morceau ? 
Il réfléchit un peu, ça me rassure. 
- Rien de précis. Tu vois, toi, tu choisis de danser ce qui t'entoure. Moi je le chante. 
- Je ne danse pas ce qui m'entoure, marmonne-je le nez baissé. 
- C'est que tu ne t'en rends pas compte. 
Clin d'œil. Sourire. 

Puis, il rompt la magie en effaçant son sourire. 
- D'ailleurs, tu me parles plus beaucoup de tes cours de danse. Tout se passe bien ? 
Je fais la moue, cherchant un mensonge, mais il le voit bien. 
- Chelsea. 
- Ça va faire trois semaines que j'y suis pas allée. 
Il soupire. 
- Bon, Wen, viens là. Ça fait trois semaines qu'elle n'a pas dansé. Chelsea, debout. Vous aussi, les gars. On va chez moi, puis on se ramène au lycée. 
Ils éclatent de rire et on suit Adam jusqu'à chez lui où il distribue des instruments. Il prend sa guitare, file des baguettes de batterie à Michael et laisse ses claviers à Wen et Carl. 
- Allez les gars ! Adaptez-vous à moi, on s'en fout, l'important c'est qu'il y ait suffisamment de rythme pour danser. 
- C'est de la danse classique, je réponds en rougissant. 

Mais il s'en fout. Ils commencent, tâtonnent, trouvent un rythme. C'est vraiment bien ! J'enlève mes chaussures, et ménage un espace dans le bordel d'Adam. 
Ils ne s'arrêtent pas de jouer. Je dois commencer à danser. Je ne sais pas quoi faire, juste bouger, juste danser ! Pour eux ça semble facile. 
C'est facile, juste... Je tend les bras, en couronne, je monte sur mes demi-pointes. La musique est inadaptée mais c'est pas grave. Je bascule à gauche, tend la jambe en arrière. Remonte. Je tourne, la musique monte. Le rythme, la mélodie, ils se sont trouvés ! C'est plus adapté à du contemporain, mais le contemporain c'est vraiment pas mon truc.
Je tend les bras  de chaque côté de mon corps et ça y est. J'ai trouvé. Je virevolte, enfin, parfois un geste un peu moins maîtrisé m'entraîne mais toujours je reste là, debout, à danser, tournoyer comme les danseuses des boîtes à musique. 
Je monte sur ma demi-pointe, je tend l'autre jambe, haut, si haut. Je saute, un grand jeté, une pirouette. On rit, on sourit, on s'éclate. Et le plus beau : c'est ensemble, parfaitement ensemble qu'on finit. 

- Ben tu vois ! Lance Adam lorsqu'on reprend le chemin du lycée. C'était pas sorcier ! 
- Dis, remarque Wen. Pourquoi tu t'obstinais à danser des danses de ballet ? Je sais pas, je te juge pas, hein... Mais, à mon avis, un truc comme du hip-hop, ou je sais pas, un truc plus moderne, ça aurait été plus adapté. 
- Je sais, murmure-je, mais je ne sais pas. Je maîtrise pas. 
- A mon avis, poursuit Adam, tu as engrangé assez de classique. Ça continue de te plaire ? 
- Mais oui ! M'écrie-je, révoltée. C'est quoi ce procès ?
- Non mais tu devrais essayer. Juste essayer ! 

On sourit et retourne en cours. Je me demande si je devrais suivre leurs conseils. 

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