Le réveil


Plus je me débats, plus ces chaînes insidieuses semblent surgir de nulle part, m'enfermant davantage dans cet espace sans fin. Mes mains agrippent l'air, cherchant frénétiquement à rompre ce lien invisible, mais chaque mouvement ne fait que resserrer leur emprise impitoyable.

Autour de moi s'étend un vide infini, un abîme de ténèbres constellées de lueurs lointaines, semblables à des étoiles inaccessibles qui se moquent de mon désespoir grandissant. Mes cris se perdent dans cette étendue sans limites, étouffés par l'immensité de mon isolement.

Mon cœur s'emballe, martelant ma poitrine comme pour briser ses barrières, tandis que je lutte pour échapper à cette réalité cauchemardesque. Les secondes s'étirent en une torture éternelle, chaque moment devenant une éternité dans ce vide oppressant où le temps semble se distordre.

Les chaînes, une fois invisibles, deviennent maintenant des entraves tangibles, s'enroulant autour de mes membres tels des serpents venimeux. Leur froid mordant se répand dans ma chair.

Mon souffle se fait haletant, rythmé par la panique qui m'étreint. Les lambeaux de ma vie défilent dans mon esprit, des souvenirs fugaces dansant devant mes yeux, alors que je lutte pour échapper à ces chaînes qui me retiennent, corps et âme.

Je refuse d'abdiquer ...

Jusqu'à ce qu'une lueur blanche m'aveugle, les chaînes disparaissent soudainement, me libérant de leur emprise oppressante. Et là, tel un rêve éveillé, je me retrouve au milieu du champ de fleurs de mon enfance.

Les pétales colorés s'étendent à perte de vue, vibrant de vie et d'innocence. Le parfum doux et familier chatouille mes narines, apaisant les battements frénétiques de mon cœur. Les rayons du soleil caressent ma peau, dissipant les ombres de mon calvaire passé.

Chaque brin d'herbe semble murmurer des souvenirs heureux, des moments insouciants de mon passé enfoui. Les rires cristallins résonnent dans le vent, ramenant à moi les échos d'une époque où les fardeaux n'existaient pas encore.

Je laisse mes doigts glisser sur les pétales délicats, ressentant la texture soyeuse qui me ramène à une époque où le monde était empli de promesses et de découvertes. Les fleurs se penchent doucement sous ma caresse, comme si elles aussi partageaient ma joie d'être libre à nouveau.

Les éclats de rire des enfants résonnent dans l'air, comme des mélodies joyeuses qui attirent mon attention. Mon cœur bat d'excitation alors que je me mets à courir, attiré par ces sons familiers et enchanteurs. Mes pas me guident à travers le champ de fleurs, les pétales doux sous mes pieds, tandis que j'aspire l'essence vivifiante de cet endroit qui m'est si cher.

Et puis, au détour d'une colline couverte de marguerites, l'image que je croyais à jamais perdue se matérialise devant moi. C'est moi, en enfant, assis sur une couverture colorée, crayon à la main, riant avec Marguerite.

Les éclats de rire se mêlent aux bruits doux de la brise et aux chants des oiseaux, créant une symphonie d'insouciance et de tendresse. Je me rapproche silencieusement, m'immergeant dans cet instant précieux de mon passé. Le petit moi d'alors se concentre sur un dessin, sa langue pointant légèrement hors de sa bouche, les yeux brillants d'une créativité juvénile.

Soudain, Marguerite prit la parole d'une voix douce mais curieuse : "Pourquoi dessines-tu ces marguerites ?"

Le petit moi enfant leva les yeux de son dessin et sourit, répondant avec enthousiasme : "Parce que les marguerites sont douces et belles à la fois."

Marguerite répliqua d'un ton taquin, sautant sur l'occasion pour taquiner : "Elles sont fades et banales, tout comme toi, Aoi."

Un éclat de rire s'échappa des lèvres de l'enfant, et il répondit avec malice : "Eh bien, dans ce cas, je vais te surnommer 'Marguerite'."

Cependant, tout bascula soudain dans l'obscurité. Un rire sinistre, cruel, emplit l'air, me glaçant jusqu'à l'os. L'atmosphère autour de moi changea brusquement, comme si une ombre maléfique avait submergé ce lieu autrefois empli de joie et de souvenirs.

"Quel joli souvenir... Dommage que tu as tout gâché, Aoi", susurra une voix tordue, mêlant le venin à la douleur.

Et puis, comme si tiré par une main invisible, Marguerite apparut devant moi, son visage maculé de sang. Un sourire sinistre se dessine sur son visage, et elle semble fière du massacre qu'elle vient de commettre.

Une nausée intense m'envahit alors que mon esprit imagine les actes sadiques et macabres que Marguerite aurait pu commettre. Les images tourmentées se superposent à ma vision, créant une toile d'horreur que je ne peux ignorer. La réalité de ce qu'elle est devenue, en contraste brutal avec mes souvenirs doux et chaleureux, me submerge d'une terreur indescriptible. Mon estomac se tord d'angoisse, et je lutte pour retenir le contenu de mon ventre.

Marguerite éclate de rire à nouveau en voyant la détresse sur mon visage. Son rire résonne dans l'air comme une mélodie discordante, amplifiant mon malaise. Mon instinct de survie prend le relais, et je recule précipitamment pour m'éloigner d'elle. Mais mes pas maladroits me trahissent, et je trébuche sur un obstacle invisible, mon corps basculant en arrière.

L'impact est brutal, mes mains tentant désespérément de saisir quelque chose pour me raccrocher à la réalité. Mon cœur martèle ma poitrine alors que je chute, mon souffle coupé par la surprise. Mon regard se lève vers Marguerite, qui s'approche de moi d'un pas lent et délibéré, son visage toujours maculé de sang, ses yeux brillants d'une lueur malsaine.

Elle s'approche lentement de moi, se tenant au-dessus de moi alors que je gis sur le sol, totalement vulnérable à sa volonté tordue. D'une voix basse et glaciale, elle murmure à mon oreille, "Je me suis bien défoulée, tu sais à quel point cela m'a manqué." Un rire sinistre s'échappe de ses lèvres. "Je te rends ton corps, comme stipulé dans notre contrat, mais je me demande ce que vont faire tes nouveaux compagnons en apprenant ce que nous avons fait... J'espère qu'ils verront le monstre que tu es."

Je reste muet, incapable de trouver les mots pour répondre à sa cruauté. Ses paroles pénètrent au plus profond de moi, semant le doute et la peur dans mon esprit déjà tourmenté.

Soudain, tout devient flou, et je ressens une force invisible me pousser violemment. Je suis propulsé à travers l'obscurité, une sensation de chute vertigineuse m'envahissant. Mon cœur bat la chamade, et mon esprit est en proie à une tempête d'émotions contradictoires.

Et puis, brusquement, je me réveille en sursaut. Mon souffle est erratique, et ma peau nue est collée aux draps, imprégnés de sueur. Je suis enveloppé par une panique intense et une culpabilité dévorante, comme si le rêve troublant continuait de m'assaillir même après mon réveil.

Je me recroqueville instinctivement, incapable de cesser de m'excuser à voix haute, la culpabilité me tordant l'estomac. Mes pensées tourbillonnent dans un mélange chaotique de terreur et de honte.

Soudain, une main douce et réconfortante se pose sur mon épaule, me faisant sursauter. Je tourne la tête rapidement pour voir Cléo à mes côtés, les yeux empreints de préoccupation et de compassion. Mon cœur bat la chamade, mais la présence rassurante de Cléo commence à calmer les vagues tumultueuses de mes émotions.

Je prends quelques instants pour observer les alentours, réalisant peu à peu que je suis dans notre caravane.

Dans cet instant mélangeant soulagement et émotion, je m'abandonne à mes larmes, trouvant un réconfort profond dans l'épaule accueillante de Cléo. Ses paroles douces et apaisantes semblent tisser autour de moi un cocon protecteur, comme si elles avaient le pouvoir de calmer les tempêtes tumultueuses qui secouaient mon esprit tourmenté. La voix douce de Cléo, évoquant une chaleur réconfortante, agit comme un baume sur mes blessures émotionnelles, et peu à peu, je commence à retrouver un semblant de calme dans cette mer de chagrin.

Entre deux sanglots étouffés, je réussis enfin à murmurer, la voix brisée : "Je suis désolée, vraiment désolée." Cléo resserre doucement son étreinte autour de moi, laissant l'émotion s'écouler à son propre rythme, me donnant l'espace nécessaire pour reprendre mon souffle. "Je sais, Aoi, je sais que tu n'as pas voulu que les choses se passent ainsi. Je sais que tu n'es pas responsable de ce massacre, c'est ton démon qui en est à l'origine, pas toi."

Les mots de Cléo pénètrent dans les profondeurs de mon être, apaisant non seulement mes larmes, mais aussi les tourments de ma conscience. Sa compréhension de ma situation et sa capacité à distinguer ma véritable nature de celle de mon démon sont comme un baume pour mon âme meurtrie.

Entre deux respirations tremblantes, je parviens à ajouter : "Merci, Cléo. Cela signifie tellement pour moi que tu comprennes. J'ai tellement peur des conséquences de tout cela, des vies qui ont été détruites..." Mes paroles s'effritent alors que l'émotion continue de me submerger.

Cléo essuie doucement une larme qui glisse le long de ma joue, ses yeux empreints de compassion fixés sur les miens. "Aoi, écoute-moi attentivement. Je ne te vois pas comme le démon que tu imagines être. Tu es bien plus que cela. Nous sommes tous faits d'ombres et de lumières, de parties bonnes et moins bonnes. Ce qui compte, c'est ce que nous choisissons de faire avec ces différentes facettes de nous-mêmes."

Ses paroles résonnent en moi comme une véritable bouée de sauvetage dans cet océan d'auto-flagellation et de culpabilité. Enfin, je me sens entendue, comprise, et soutenue. Cela me donne le courage de poursuivre : "Cléo, je veux vraiment essayer de réparer les choses, de trouver un moyen de faire amende honorable, même si je ne peux pas changer le passé."

Un léger sourire illumine le visage de Cléo tandis qu'elle effleure ma joue du bout de ses doigts, un geste tendre et réconfortant. "C'est ce genre d'intention qui révèle qui tu es vraiment, Aoi. N'oublie jamais de te valoriser. Nous sommes tous en perpétuelle évolution. Et si ton désir sincère est de faire ce qui est juste, je serai là pour te soutenir à chaque étape de ton cheminement."

Ses paroles me soulagent, apaisant les battements de mon cœur. Elle m'adresse un sourire puis se dirige vers une carafe d'eau, lorsque je sens soudainement que la caravane est en mouvement.

"Où allons-nous ?" ma question s'échappe instinctivement.

D'un ton doux et maternel, elle répond : "Nous nous dirigeons vers Mirage, pour une quête et pour nous approvisionner... ainsi que pour acheter de nouveaux vêtements. Je pense que c'est nécessaire, n'est-ce pas ?" Elle semble amusée par cette dernière remarque.

Mon visage brûle d'une teinte écarlate intense, trahissant mon embarras. Ma transformation a été si drastique qu'elle a réduit en lambeaux mes vêtements autrefois impeccables, tout comme le sac qui abritait soigneusement tous mes habits de rechange.

Dans un état de panique frénétique, je me saisis de la couverture la plus proche pour tenter de masquer autant que possible mon état déplorable. C'est alors, à travers les plis de la couverture, que je découvre quelque chose d'inattendu : le manteau de Plissken. Mes doigts tremblent légèrement lorsque je le saisis, la surprise me laissant momentanément sans voix.

"C'est...," balbutié-je, incapable de finir ma phrase alors que mon esprit est submergé par un mélange de confusion et de reconnaissance.

"Oui, c'est lui qui t'a ramené," intervient une voix chaleureuse et rassurante. Je lève les yeux pour rencontrer son regard bienveillant, incapable de cacher mon étonnement.

Elle me tend une tasse avec un liquide réconfortant à l'intérieur. "Tiens, bois un peu, cela te fera du bien." Sa gentillesse m'apaise légèrement alors que je prends la tasse entre mes mains.

"Je vais te trouver une tenue à moi," annonce-t-elle avec un sourire taquin. "Bien que je craigne que la taille ne soit pas tout à fait adaptée, nous ferons avec ce que nous avons."

Cléo, avec son air décidé, ouvre une armoire d'où elle extrait une robe aux écailles d'un rouge saisissant. Elle la dépose soigneusement à côté de moi, m'offrant un sourire réconfortant. "Tiens, prends cela," dit-elle d'une voix apaisante. "Prends ton temps pour t'habiller, et vas-y doucement. Tu es restée inconsciente un moment. Lorsque tu te sentiras prête, lève-toi à ton rythme."

Je regarde la robe avec un mélange de gratitude et de curiosité. Ses écailles reflètent la lumière d'une manière étonnante, créant une illusion de mouvement. Tout en laissant un soupçon d'inquiétude derrière moi, je m'empare de la robe et la tiens près de moi. La texture est à la fois douce et singulière au toucher, évoquant une histoire mystérieuse.


"Merci," parviens-je à prononcer avec un sourire timide. Elle m'adresse un sourire réconfortant et s'éclipse vers l'arrière de la caravane, me laissant un brin d'intimité grâce au rideau qui sépare la zone de couchage du reste de l'espace. Je prends une grande inspiration, rassemblant ma détermination pour me lever et affronter la situation.

Avec précaution, je m'élève lentement hors de la couverture et pose un pied hésitant sur le sol de la caravane. À peine ai-je pris appui que le monde semble basculer autour de moi. Un vertige puissant me submerge, suivi d'une douleur soudaine et intense qui se propage à travers chaque fibre de mon être. Mes doigts se crispent sur la robe à écailles, mes articulations blanchissant sous la pression involontaire.

La douleur est si intense que je retiens mon souffle, mon visage se plissant à cause de l'effort pour maintenir ma stabilité. Mon cœur tambourine dans ma poitrine, faisant écho à la souffrance qui me transperce. L'air semble s'épaissir, les sons autour de moi se mêlent dans une cacophonie lointaine.

Allez, ce n'est rien de grave. Je ne dois pas me laisser abattre pour si peu. Je secoue la tête comme si je pouvais balayer la douleur d'un geste de la main et rassemble mes forces pour enfiler la robe. Comme l'avait dit Cléo, la robe est vraiment courte au niveau des jambes et serre au niveau des hanches. En revanche, elle est légèrement trop grande par rapport à la poitrine.

Je me sentais profondément mal à l'aise dans ces vêtements. Le tissu léger et ajusté de la robe mettait en évidence des parties de mon corps que je préférais garder cachées. Mon regard chercha fiévreusement une solution, un moyen de couvrir mes épaules dénudées et le haut de la robe qui exposait un peu trop ma peau.

C'est alors que mes yeux tombèrent sur le manteau de Plissken, soigneusement posé sur le lit. Sans hésiter, je le saisis et le fis glisser sur moi. La matière épaisse et sombre du manteau enveloppa mon corps, créant un sentiment de réconfort et de dissimulation.

Après un bref moment de pause, mes yeux se sont irrésistiblement attardés sur le miroir qui trônait délicatement au sommet d'une coiffeuse, à quelques pas de moi. Un mélange indescriptible d'émotions a submergé mon être, et lentement, telle une cascade silencieuse, des larmes ont amorcé leur descente solennelle sur mes joues.

C'est alors que l'impensable a commencé à se produire. Des écailles, semblables à celles d'une créature issue des abysses les plus profonds, ont timidement émergé sur ma peau autrefois lisse. Leurs teintes démoniaques dansaient mystérieusement à la lueur ambiante, créant une étrange harmonie avec la pénombre de la pièce. Tout aussi imperceptibles que tenaces, des cornes délicates ont commencé à surgir, jouant avec la lumière et projetant des ombres fantastiques sous mes yeux désormais voilés de tristesse.

Tel un masque de carnaval macabre, cette transformation prenait forme avec une étrangeté terrifiante. Deux petites protubérances, à peine visibles, ont émergé avec une délicatesse monstrueuse sur mon front. Mon reflet dans le miroir était devenu le vestige de mon ancienne vie, une métamorphose involontaire sculptant le portrait d'un cauchemar devenu réalité.

L'angoisse s'est insinuée dans chaque recoin de mon esprit. Comment pourrais-je dissimuler cela ? Je devais le monstre que je redouter tant ...

La peur persistait en moi, et même si j'avais dissimulé mon apparence déconcertante derrière un tissu qui couvrait le miroir, l'inquiétude continuait de me ronger. Je savais que tôt ou tard, je devrais affronter la réalité de ma transformation.

Je me dirigeai doucement vers l'arrière de la caravane, où Cléo était occupée à une activité qui m'échappait encore, elle semblait méditée. Je choisis de ne pas la déranger, sachant que mon état émotionnel était encore instable.

Cependant, alors que j'avançais, je fus soudainement confrontée à la petite que nous avions sauvée à Towlder. Elle se tenait là, une jeune adolescente, les yeux écarquillés de terreur. Mon cœur se serra à la vue de son effroi. Je me suis arrêtée net, essayant de paraître aussi rassurante que possible.

"Hey, moi c'est Aoi," dis-je doucement, me mettant à sa hauteur. "Tu te souviens de moi, non ?"

Cependant, sa peur était si intense qu'elle se figea, ses yeux écarquillés fixant en horreur. Un frisson parcourut son corps alors qu'elle reculait précipitamment, ses pas hésitants la guidant instinctivement vers l'avant de la caravane, là où se trouvaient les espaces aménagés avec des couchettes. Mon cœur se serra douloureusement à la pensée qu'elle me percevait comme un monstre, comme si sa vie déjà si jeune avait été saturée d'horreurs inimaginables.

Immobile, je restai planté là, pris au piège de cette situation complexe. Cette jeune fille déversait en moi son ressentiment brûlant... J'étais responsable d'avoir rasé son village, d'avoir anéanti tout ce en quoi elle avait trouvé de l'affection et du bonheur. Mon esprit s'engloutissait dans un tourbillon tumultueux d'émotions, une tempête mêlant peur, remords et culpabilité.

Perdu dans un labyrinthe de pensées, un rugissement de freins brisa le silence, suivi d'appels de détresse qui jaillirent de l'extérieur. La voix de Nika, notre meneuse de caravane, se mêla à celles d'étrangers, donnant naissance à une cacophonie d'échanges animés. Malheureusement, seules des bribes de ces échanges me parvinrent. Il semblait qu'un groupe de voyageurs était pris pour cible par des agresseurs, ces derniers sommant que nous ne nous mêlions pas de la situation et poursuivions notre route. Plissken et Nika, en coordination, semblaient enclins à obtempérer, à passer outre cette scène dérangeante et menaçante.

Pourtant, mon cœur s'emballa dans ma poitrine, martelant un rythme effréné. Les visages de ceux que j'avais tué, de ceux que je n'avais pas pu sauver, se superposaient aux visages de ces voyageurs en détresse. Trop de vies avaient déjà été englouties. Je ne pouvais pas rester là, les bras croisés, à regarder.

Le conflit entre mon propre démon et mon désir de préserver la vie s'agrandissait en moi. L'agitation à l'extérieur se poursuivait, les voix s'élevant dans un crescendo d'angoisse et d'urgence. Une décision devait être prise, une décision qui pourrait changer le cours de cette journée.

Déterminé à ne pas laisser cette tragédie se dérouler sous mes yeux, je bondis hors de la caravane comme une force de la nature déchaînée. Mon cœur tambourinait dans ma poitrine, alimenté par un mélange ardent de peur et de résolution. Mes doigts se refermèrent instinctivement autour d'une flèche de glace, mon pouvoir bouillonnant dans mes veines, prêt à être libéré.

L'agresseur, m'ignorant, fut pris de court alors que ma flèche de glace fendit l'air avec une vitesse mortelle. Elle se logea avec précision dans sa main armée, lui faisant lâcher son arme dans un cri de surprise et de douleur. Le choc de l'impact désarma le brigand et offrit un précieux instant de confusion aux victimes prises au piège.

L'homme, terrassé par mon attaque soudaine, s'effondra lourdement au sol, son visage tordu par la douleur. Un silence momentané s'installa alors que tous comprenaient à peine ce qui venait de se passer. Puis, dans ce silence, la voix du voyageur qui avait supplié pour notre aide se fit entendre. Ses mots atteignirent mes oreilles, porteurs d'une lueur d'espoir au milieu de l'obscurité de la situation. Ses compagnons en détresse se trouvaient un peu plus loin, à l'est.

Plissken, Nika et moi-même nous sommes trouvés face à un choix inéluctable. Le regard réprobateur de Plissken et Nika ne pouvait masquer l'urgence de la situation. Nous devions secourir ses amis, et ce, quelle que soit la dangerosité.

Nous nous dirigions vers l'est. Les sons discordants de la bataille devenaient de plus en plus audibles. À travers le crépuscule, nous avons vu ses amis en train de lutter vaillamment contre leurs agresseurs. Parmi eux, Maurice, notre ami de longue date, se démarquait.

Plissken n'a pas perdu un instant. Son pistolet a jailli de son étui, abattant un bandit menaçant les assaillants. Nika, quant à elle, a bondi depuis de la caravane, son sabre, pour se frayer un chemin parmi les ennemis.

Dans un moment spectaculaire, Cléo surgit de l'arrière de la caravane, la silhouette éclairée par une aura de magie. D'un geste gracieux, elle lança une boule de feu incandescente vers l'un des ennemis.

L'ennemi touché fut englouti dans une explosion de flammes, son corps tournoyant dans une danse macabre de feu et de fumée. Un cri de terreur se perdit dans le crépitement des flammes avant que l'assaillant ne s'effondre, terrassé par la dévastation de l'attaque magique de Cléo.

Ce spectacle de puissance magique fit vaciller la résolution des brigands. Terrifiés par la force combinée de Plissken, Nika, Cléo, et moi-même, ils ne purent que tourner les talons et fuir en désordre, laissant nos amis en sécurité dans l'obscurité grandissante. La bataille était gagnée, nos compagnons étaient hors de danger, et l'obscurité lentement descendait le rideau sur les derniers échos de cette confrontation.

Maurice, vêtu d'une imposante armure de Paladin, nous rejoignit immédiatement, son visage rayonnant de joie. Ses éclats de rire brisaient la tension de la récente bataille. D'un ton chaleureux, il s'exclama : "Eh bien, qu'est-ce que vous faites ici ?"

Plissken, toujours aussi impassible, lui répondit d'un ton froid : "Nous pourrions te poser la même question, mon ami." Les retrouvailles étaient empreintes de sarcasme, mais l'amitié profonde qui les liait était évidente.

Maurice éclata de rire, mais son rire était teinté d'une chaleur réconfortante. Il expliqua à Plissken que leur groupe avait été mandaté pour traquer une démone qui avait dévasté trois villages au nord du désert. À mesure qu'il parlait, je me figeai, mes pensées se bousculant dans ma tête. C'était moi, le démon dont ils parlaient. Une nausée me parcourut, et Cléo, ma fidèle amie, se mit instinctivement à mes côtés comme pour me protéger.

Maurice remarqua immédiatement mon malaise et arrêta de rire. Il plissa les yeux en me regardant, cherchant à comprendre ce qui se passait. Son regard pesait sur mes épaules, et je sentais qu'il avait compris. L'angoisse serrait mon cœur, redoutant qu'il ne révèle ma véritable identité à ces aventuriers, ce qui pourrait signifier ma mort imminente.

Soudain, Maurice éclata de nouveau de rire. "Eh bien, de toute façon, je vais les laisser partir pour leur quête et rejoindre mes amis," dit-il en reprenant son souffle. Ses paroles me surprirent, me laissant perplexe. Sa réaction inattendue me laissait espérer qu'il garderait mon secret pour lui-même.

Mon cœur, qui tambourinait d'angoisse quelques instants plus tôt, commença à retrouver un rythme plus calme. J'étais soulagée que Maurice ne semble pas vouloir partager ma véritable identité avec les autres aventuriers. La tension dans l'air s'apaisa, et je lui adressai un sourire reconnaissant.

Après quelques instants et un bon repas, le groupe que nous venions de secourir partit en direction du nord. Une fois qu'ils eurent disparu à l'horizon, Maurice se tourna vers moi avec une expression interrogative. Incapable de trouver les mots, je bégayai une réponse incompréhensible, me sentant mal à l'aise face à la situation.

Soudain, la voix calme et sombre de Plissken se fit entendre. "Elle l'a fait pour nous sauver la vie, c'est tout," déclara-t-il d'un ton autoritaire. Sa réponse était concise et sans équivoque, révélant que ma décision de révéler mon secret était motivée par le désir de protéger le groupe. Je me fis toute petite, sentant à la fois du soulagement et de la gratitude envers Plissken pour son soutien inattendu. La tension dans l'air commença à se dissiper, et je sentis que je pouvais désormais faire confiance à ces aventuriers pour garder mon secret en sécurité.

Nous passâmes la soirée à parler de notre quête qui nous avait menés à Mirage, et nous célébrâmes le retour de Maurice avec une petite fête. Malgré l'ambiance festive, Plissken restait à l'écart, ce qui ne passa pas inaperçu. De plus, je ressentais un regard posé sur moi, et j'avais l'intuition que c'était celui de Plissken. Cependant, chaque fois que je relevais les yeux vers lui, il détournait le regard. Son comportement énigmatique me laissait penser qu'il me surveillait, mais je n'en étais pas certaine.

La fête prit fin lorsque Nika s'écroula ivre morte, signalant qu'il était temps d'aller se coucher. Les événements de la soirée avaient ajouté une couche de mystère à la dynamique du groupe, et je me demandais si Plissken avait des motivations cachées pour agir ainsi.

Je montai dans la caravane et me retrouvai nez à nez avec mon reflet. Comment ces aventuriers n'avaient-ils pas compris que le démon, c'était moi ? C'était littéralement écrit sur mon front avec ces cornes. J'étais sur le point de les toucher quand la voix réconfortante de Cléo vint me rassurer.

"Je leur ai dit que tu étais une jeune dragomire. J'avais bien remarqué ton malaise quand tu as vu tes cornes, Aoi. Tu ne devrais pas baisser la tête, tu es très belle ainsi", déclara-t-elle.

De nouveau, je balbutiai une réponse incompréhensible, ce qui fit rire Cléo. Elle prit un ton maternel. "Tu es belle, Aoi, et je sais comment faire pour que tu sois confiante en cela." Cléo fit apparaître son portrait. "Quand je doute de moi, je fais apparaître mon portrait et je me répète à quel point je suis belle, forte et charismatique."

Ses paroles étaient empreintes de sagesse et d'expérience, et je sentis un élan de gratitude envers Cléo pour son soutien. Peut-être que, peu à peu, j'apprendrais à accepter cette nouvelle partie de moi-même.

Cléo m'adressa un léger sourire avant de partir se coucher. Pour la première fois depuis que j'étais dans ce groupe, je n'allais pas dormir dehors, loin d'eux, mais j'allais dormir dans la caravane.


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