Eren avait la tête baissée, les yeux rivés sur ses deux poings fermés sur ses genoux.

Il était peu confiant face au fameux "pouvoir de persuasion" de Livai.

Pourtant, impossible de revenir en arrière. Son proviseur, quelque peu sur les nerfs, se tenait devant les deux protagonistes, attendant les explications.

Le plus jeune avait beau vouloir s'échapper à toute vitesse et ne jamais revenir, il ne le pouvait pas.

- Eh bien, Jäger ? Pourquoi regardez-vous le sol ? Ma patience a des limites. Dois-je vous rappeler le fait que vous ayez disparu pendant un an et demi ?

- Non, Monsieur...

- Alors ? Allez-y, j'attends.

Eren ne répondit rien.

Il était quelque peu paniqué, pourquoi Livai n'intervenait-il donc pas ?

Le garçon aux yeux verts essaya de lancer un "signal" à son nouveau colocataire, qui n'eut aucune réaction.

Il avait envie de lui dire de faire quelque chose, qu'il était en position de faiblesse et qu'il avait besoin de soutient, mais encore une fois, il ne pouvait pas.

Il avait comme l'impression que Livai prenait un malin plaisir à le laisser dans l'embarras.

- Et vous, jeune homme ? Pourquoi êtes-vous ici, avec lui ? Pourquoi n'ai-je pas en face de moi l'un de ses deux parents ?

- Qui vous dit que je suis pas son père ?

Le plus vieux des trois déglutit.

- J'ai 34 ans, vieux bigleux.

Comme s'il s'apprêtait à répondre quelque chose, l'homme assit à l'autre bout du bureau ouvrit légèrement la bouche, mais la referma tout de suite après.

Eren le savait, Livai venait d'acheter son silence, et pas avec un quelconque pouvoir de persuasion.

- Eren à récemment appris l'existence d'un demi-frère caché. Il a été à sa rencontre et l'a cherché dans tous les endroits possibles, sans succès. Comprenez le, qu'auriez-vous fait, vous, qui êtes donc si sage, à sa place ?

Le garçon aux cheveux légèrement ébouriffés tourna vivement son regard vers Livai. Il avait changé de plan à la dernière minute ?! Une pointe d'indignation monta en lui, mais il devait s'abstenir de le montrer, au risque d'éveiller des soupçons. Qui plus est, pourquoi ne vouvoyer le proviseur que maintenant ?

- Peux-tu confirmer les faits, Eren ?

Il hésita. Beaucoup. Peut-être un peu trop, d'ailleurs. Il n'avait pas envie de mentir, et le regard dur et sévère de la personne en face de lui le faisait déglutir. Il n'était plus très sûr de vouloir suivre Livai dans son mensonge.

-... Oui. Il s'appelle... Euh... Michel ! Oui, il s'appelle Michel ! Il a quatre ans de plus ! Il veut devenir astrologue !

Il s'arrêta net.

Michel ? Encore une fois, Eren ne voulait que s'en aller en courant. Il ne pouvait donc pas trouver mieux ?

-...Très bien, mais je garde quelques doutes à votre égard. Cependant, il y a un point que je ne comprend toujours pas... Pourquoi être parti sans prévenir personne ?

Question piège.

Il aurait dû répondre de suite, mais il ne savait pas quoi dire. La plupart des gosses de son âge n'auraient pas hésité à raconter une telle chose à tous leurs amis, pourquoi lui ne l'aurait pas fait ?

- Le fait que ses amis devaient savoir n'était pas une nécessité. Après tout, ils ne l'auraient sûrement pas cru et, qui plus est, s'il revenait les mains vides, il aurait été victime de moqueries pendant un long moment.

Livai venait de le sauver.

- Si vous le dites... Bien, je n'ai d'autres choix que de vous croire. Je n'ai aucune preuve de l'inverse, de toute façon.

Le plus jeune des trois soupira de soulagement. Il allait enfin pouvoir sortir de ce bureau !

- Merci d'être venu, Monsieur...?

- Ackerman. Monsieur Ackerman.

Alors qu'il s'apprêtait à franchir le seuil de la porte, le proviseur resta immobile de stupeur.

- Ackerman...? Attendez, vous êtes le fameux grand frère de Mikasa ?!

Mais Livai ne répondit pas et s'en alla, tirant Eren par la main et claquant la porte du bureau.

- Pourquoi il était aussi surpris...?

- J'en sais rien. J'imagine que Mikasa a dû dire énormément de mal de moi pour que son proviseur reste pétrifié en écoutant mon nom et en apprenant qui je suis.

Les paroles de Livai rendaient Eren quelque peu mal-à-l'aise.  Qu'était-il censé dire ?

- Eh, c'est pas le frère d'Ackerman...?

- J'crois... Pourquoi il est avec Eren ?

- Il a appris pour eux ?

- Mais ils ont cassé...

En moins de quelques secondes, les deux hommes étaient devenus le centre d'attention de tout le monde. Qui aurait pu penser qu'ils étaient colocataires, vu l'histoire qui liait Eren et Mikasa ?

- Ils me cassent les oreilles. Faut vraiment les interner.

- Soit pas si dur Livai, au fond ils sont gentils... Je crois...?

Le plus vieux soupira.

- T'es même pas capable de complimenter les autres correctement.

- Pas besoin d'être aussi énervé, uh...

Ce fut donc au tour du brun de soupirer. Livai s'agaçait de plus en plus souvent sans réelles raisons, qu'est-ce qui pouvait bien le rendre aussi exaspéré ? Le meilleur moyen de le savoir était sûrement de directement demander.

- T'es constamment sur les nerfs, qu'est-ce qu'il t'arrive ?

- Rien. Mêle toi juste de tes affaires.

Et ce fut encore un échec.

Eren avait beau essayer de comprendre cet homme si ténébreux, il n'y arrivait pas, mais il n'empêchait qu'il avait l'impression qu'ils s'étaient rapprochés avec tous les événements qui étaient récemment arrivés. Alors, s'ils étaient si proches, pourquoi est-ce que le plus jeune sentait ce froid, comme s'ils étaient tout deux revenus au point de départ ? L'époque où Livai avait du mal à communiquer avec lui ? Tout cela ne pouvait plus durer. Eren ne pouvait pas perdre son colocataire. Cette idée le rendait fou, et il ne savait pas pourquoi. Peut-être que personne ne savait.

La cloche sonna, annonçant le début des cours. Les murmures s'arrêtèrent petit-à-petit et tout le monde retourna en classe. Tout le monde, sauf nos deux protagonistes.

Les couloirs étaient désormais vides, silencieux. Le seul bruit qu'il y avait était celui de leurs pas, quand Eren cessa soudainement de marcher.

- Qu'est-ce que tu fous ? Ca fait dix minutes que la cloche à sonné.

-... Je suis lassé, Livai.

Le concerné se retourna vivement.

- Comment ça ?

- Je vois bien que tu vas mal. Pas dans un sens triste mais plutôt irrité. Quand tu me parles, c'est presque toujours pour dire quelque chose de négatif sur moi ou sur les autres. Tu me critiques sans arrêt, je ne sais même pas pourquoi ! N'avions-nous donc pas noué quelque chose de solide, quelque chose de précieux ? J'avais vraiment l'impression que c'était le cas, mais ça doit sûrement aller en sens unique, vu comment tu me parles. Ca fait mal, tu sais ? De savoir qu'on s'éloigne, tout doucement. Que ce lien que nous avions tissé se desserre lentement. J'aurais au moins voulu savoir pourquoi, mais je crois que tu n'es pas prêt à m'offrir ce plaisir...

Livai le regarda, la bouche entre-ouverte, peut-être à cause du choc. Les yeux verts émeraude du plus grand le fixaient, quasiment sans cligner.

Il venait de relâcher une partie de la pression qu'il avait sur le cœur. Mais ce n'était pas fini, loin de là.
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Et le chapitre 22 de sorti !

Oui, je vous l'accorde, chapitre un peu plus triste vers la fin que d'habitude (bien que ma fanfiction ne soit pas particulièrement triste xD ).

Je pense que rajouter des petites scènes déprimantes comme celle-ci rajoute une sensation de réalisme aux histoires. Après tout, la vie n'est pas toujours rose et joyeuse ! Faut bien rendre l'atmosphère pesante de temps-en-temps, non ?

Salut salut !

C.R