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Le jeune facteur est mort. C'était avant hier ou peut-être lundi. Je ne sais pas trop. Personne ne sait réellement. Cependant, ce qui est sur, c'est qu'il est mort. J'ai essayé de pleurer, mais les larmes ne sont pas venues. C'est normal, nous ne nous connaissions pas tant que ça. Pourtant, je ressens quand même une douleur au creux de ma poitrine. Un poids. Stupide sensibilité.
Je l'observais, tous les samedis matins depuis la fenêtre de ma chambre. Il était le messager de mon amour. Il n'y avait rien d'attirant dans sa personne. Chaque jour, il semblait plus vulnérable que la veille. Il avait des cernes, les cheveux en bataille, les lèvres gercés, des cicatrices sur les mains, les phalanges rougies, la voix cassée lorsque je le saluait pour aller à l'école les jours de semaine, une clope entre les lèvres. On aurait dit qu'il se foutait de savoir s'il allait mourir un jour ou non. Ça lui donnait un petit air négligé et lui apportait ce mystérieux charme, gravé dans son âme amochée, fissurée, cet air nonchalant. Il faisait partit de ces personnes qui n'attendait pas la mort mais qui allait vers elle.
Je ne sais pas s'il était triste ou désespéré, mais il a franchit le pas sans regarder en arrière. Il transportait les armes les plus dangereuses. Il tenait entre ses doigts les maux les plus torturés jusqu'à ce qu'il ne reste plus que des centaines de lettres. Il transportait des larmes et des sourires. Il déposait la tristesse et l'amour. Il nous donnait des peines et des joies. Il était le messager des maux et des mots. Le messager de notre amour. Mais depuis qu'il est mort, il ne peut plus voyager.
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