PDV Hinata

C'est gênant.

Je me souviens de toute ma soirée d'hier, mais quelque chose dans mon cerveau m'empêche d'assumer mes actes. Ma tête fait d'ailleurs atrocement mal, comme si un éléphant obèse tentait de l'écraser sous ses immenses pattes. J'ai aussi mal au cœur. C'est décidé, plus jamais je ne boirai d'alcool de ma vie. L'eau, c'est bien meilleur.

-Hinata, dépêche-toi de prendre tes affaires avant que l'autobus parte, grogne Kageyama qui a terminé de ramasser ses quelques biens personnels.

Je mords ma lèvre inférieure avec embarras, incapable de le regarder dans les yeux après ce que j'ai osé lui dire hier. C'est si humiliant. Pourquoi lui ai-je déclaré mes sentiments dans un tel moment alors que je n'avais pas toute ma tête ?! Nous nous sommes câlinés toute la nuit... Il ne m'a pas repoussé. Si ça se trouve, il ressent la même chose? Juste d'y penser, ça m'angoisse.

Une fois prêt, je suis le passeur au rez-de-chaussée qui semble vide depuis que la fête est terminée. C'est atrocement bordélique. Des canettes d'alcool trainent un peu partout et il y a de la nourriture renversée sur le sol. Quelques joueurs de Nekoma essaient déjà de faire le ménage sans grande motivation, alors que Lev nous salue joyeusement de la main, très en forme malgré la grosse soirée de la veille.

Sur le canapé, Kuroo semble mort. La tête sur les genoux de Kenma, il le laisse jouer dans ses cheveux alors que ses yeux sont fermés. Tsukishima n'est pas avec lui? J'imagine que sa conversation derrière les rochers ne s'est pas très bien passée, mais tout va finir par se régler. Ils forment un trop beau couple pour qu'une petite dispute les brise.

J'entre dans l'autobus avec Kageyama, puis nous nous installons sur un banc du fond ensemble. Le trajet va être long... Le coach Ukai et monsieur Takeda paraissent de bonne humeur, parlant joyeusement ensemble. Je me demande ce qu'ils ont fait pendant que nous étions à la fête? C'est gentil qu'ils aient sacrifié leur Saint-Valentin pour nous.

-Je suis tellement fatigué, se plaint Nishinoya en pénétrant le véhicule.

-Et moi j'ai très mal au coccyx, soupire Asahi en se laissant tomber dans un banc, et au dos... et aux jambes.

Tsukishima, qui est assis juste devant eux, se retourne pour les regarder travers. Ses yeux cernés sont remplis de jugement, mais je ne comprends pas pourquoi. Ils n'ont rien dit de mal.

-Vous êtes vraiment des gros pervers pour parler de ça ouvertement, crache le blond avec dégout.

-Hein? S'étonne Nishinoya, OH! Non, on ne fait pas allusion à ça! En fait, on a passé la nuit enfermée dans le grenier avec Oikawa et Iwaizumi. C'est une longue histoire... mais si ça t'intéresse, moi et Asahi sommes vraiment en couple. C'est officiel.

Le petit libéro pose fièrement une main sur la large cuisse du champion, ce qui fait fondre de gêne ce dernier. Asahi cache son visage couleur tomate entre ses mains, incapable d'affronter le regard des gens. Si je n'avais pas une si grosse gueule de bois, je sauterais dans leur bras pour les féliciter. Cependant, juste l'idée de bouger suffit à me donner le vertige.

-Ah? Répond le garçon à lunette, je suis aussi en couple.

-On sait tous que tu sors avec le capitaine de Nekoma! Ce n'est pas nouveau.

-Je ne sors plus avec lui. Je suis maintenant en couple avec Yamaguchi.

Comme preuve, Tsukishima agrippe la main de son meilleur ami qu'il serre avec tendresse. Le tacheté sourit idiotement, clairement fier alors que nous sommes tous sous le choc. Comment a-t-il pu laisser Kuroo un soir de Saint-Valentin et nous le dire sans le moindre remords ?! Le pauvre... déjà remplacé en si peu de temps. Avoir sus, je lui aurais donné mon soutien avant de partir.

Personne n'ose commenter l'annonce de Tsukishima, car personne n'est très à l'aise avec cette nouvelle. S'il était le seul concerné, les gars ne se gêneraient pas pour le traiter de connard et lui dire leur façon de penser. Cependant, le gentil Yamaguchi est impliqué. Il ne mérite pas que sa première relation amoureuse soit victime de jugement.

***

Je passe le trajet entier à essayer de dormir, la tête couchée sur l'épaule de Kageyama qui se laisse faire. Pendant un moment, je réussis à sombrer dans les bras de Morphée, mais le premier arrêt aux toilettes me tire difficilement du monde des songes. Au moins, je n'ai pas à parler avec mon passeur de ce qui s'est passé hier. Cette discussion me terrifie, car j'ignore comment l'aborder. Est-ce que notre relation risque de se gâcher si je me déclare officiellement à lui? J'ai sincèrement envie d'essayer d'être son amoureux, mais cette idée reste angoissante. 

Lorsque l'autobus arrive enfin à l'école, je sors du véhicule en m'étirant douloureusement. Quatre heures à être assis sur un banc dur, c'est tout sauf agréable. Dire qu'il faut encore que je marche jusque chez moi... Ma détermination est soudainement inexistante.

-Hinata, je te raccompagne, fait une voix dans mon dos, on doit discuter.

Mon cœur fait un bond en entendant cette voix grave. Discuter... La panique s'étend dans tout mon corps alors que Kageyama me fait signe de le suivre. Suis-je prêt à lui avouer? Prêt à troquer notre statut de meilleurs amis contre celui de petits amis? C'est ce que je souhaite depuis longtemps, mais maintenant que cet objectif qui me paraissait chimérique devient atteignable, l'hésitation prend le dessus sur l'envie. Nous sommes tous les deux dévoués au volley-ball corps et âme, ce qui risque de rendre ce couple plus compliqué.

Dans une grande inspiration, j'enjambe le pas au beau passeur de l'équipe, priant intérieurement pour qu'il oublie le sujet de conversation. Au début, c'est très silencieux entre nous. Non seulement à cause de mon mal de cœur, mais aussi parce que la tension est palpable. Qui brisera le silence en premier?

-Est-ce que tu te souviens de ce que tu as dit hier? Fini par demande Tobio sans oser me regarder.

De la bave passe de travers dans ma gorge. Je dois rester calme.

-Oui... Je me souviens de tout.

-Bien.

Le silence renait, cette fois en créant avec lui un malaise déplaisant. Que suis-je censé dire? Les yeux baissés vers le sol, je continue à avancer vers ma maison lorsque le garçon qui m'accompagne me retient par le poignet. Curieux, je tourne par réflexe la tête vers lui. Ce dernier me fixe avec son habituel sérieux.

-Redis-le, déclare Kageyama.

-Hein? Redire quoi?

-Tu le sais... Ce que tu as dit hier et que je t'ai dit de me redire quand tu ne serais pas ivre!

-OH!

Mes joues brulent sous la gêne et je mords ma lèvre inférieure. Je peux le faire... Pourquoi de simples mots peuvent-ils être si difficiles à prononcer? Ce n'est pourtant pas la fin du monde, mais l'hésitation rend cette courte phrase encore plus ardue à sortir. Je prends une grande inspiration. Il faut que je me lance.

-Pourquoi tu ne le dis pas, toi? Grognai-je, tu me donnes la tâche la plus difficile!

-Car c'est toi qui l'as dit en premier, donc c'est à toi de le répéter!

-Mais justement, je l'ai déjà dit en premier. Tu pourrais bien être le deuxième. J'ai déjà fait le pire du boulot!

Je gonfle les joues en croisant les bras, décidé à ne pas céder. Kageyama claque la langue contre son palais, clairement agacé par ma tête de mule. Au moins, il est habitué à côtoyer cette partie de ma personnalité. Le garçon semble hésiter, puis il ouvre la bouche. Va-t-il le dire? Cependant, aucun mot ne sort, seulement un grognement.

-Tu fais chier! Crache-t-il.

Je m'apprête à répliquer par une insulte, mais Kageyama ne me laisse pas faire. Il glisse une main derrière ma tête, puis trop brusquement il pousse mon visage vers le sien. J'ouvre grands les yeux lorsque nos dents se frappent douloureusement, me faisant couiner en me reculant, une main sur ma bouche endolorie.

-T'es con, pourquoi tu m'as frappé ?! Criai-je, ça fait mal!

-Je... Désolé... Je voulais juste t'embrasser.

Le garçon parait un peu tourmenté par la collision récente. Les sourcils froncés, il me regarde sans comprendre comment un simple baiser a pu se transformer en attaque brutale. Mes joues rougissent à nouveau et je le regarde enfin droit dans les yeux.

-Idiot, ce n'est pas comme ça qu'on embrasse quelqu'un!

-Ah?

Étrangement, ce baiser raté m'aide à chasser le doute dans ma tête. Sans le stress, notre relation redevient ce qu'elle à toujours été. C'est ce qui me plait avec Kageyama et j'ai espoir que même si nous devenons un couple, nous ne changerons pas totalement. Jamais je ne le laisserai gagner une compétition contre moi parce que je l'aime et nos petites disputes ne risquent pas de disparaitre.

Mes mains se glissent doucement dans son dos et avec lenteur cette fois, je me mets sur la pointe des pieds dans l'espoir de poser mes lèvres sur les siennes. Il est trop grand! Kageyama me regarde faire avec amusement, puis juste avant que je perde patience, il se penche pour m'offrir ce baiser tant attendu. Sa bouche est si douce...

Ses bras musclés s'enroulent autour de mon cou pour me tenir contre lui alors que nous nous embrassons pour la première fois. Même si cette étreinte est maladroite, les sensations agréables dans tout mon corps me confirment que nous pouvons être en couple. Je ne veux personne d'autre.

-Je t'aime aussi, avoue finalement Kageyama en rompant le contact succulent.

-Tu vois que ce n'était pas si difficile!

-La ferme.

En rigolant, je retourne l'embrasser, sincèrement heureux. Kageyama sera mon petit ami.

Je vais avouer quelque chose de triste... cette histoire vient tout juste de s'achever avec ce vingtième chapitre. Je sais que ce n'est sûrement pas une fin digne de ce nom, mais la fête est terminée et tous les couples sont ensemble. Je n'ai plus d'idées >~<.

Merci à tout ceux qui m'ont encouragé. Les commentaires sont toujours ce qui me motivent ou non à continuer une histoire. Vous êtes très gentils <3.