Épilogue
Josh resta là, debout un moment, comme figé dans le temps, tandis que le corps sans vie de Saranne gisait à ses pieds, le sang maculant ses vêtements et le sol. Puis, sans crier gare, il fléchit les genoux, et, d'un geste lourd et presque résigné, il s'assit par terre.
Il ne disait rien, ne laissait échapper aucun son. Lentement, il se recroquevilla sur lui-même, ses bras encerclant ses jambes, sa tête se baissant jusqu'à presque toucher ses rotules. Il paraissait soudain si petit, écrasé par le poids de tout ce qui venait de se passer, comme s'il cherchait à disparaître dans le néant qui l'entourait.
Un sanglot silencieux monta en moi, mais je ne pouvais pas encore m'abandonner à cette douleur. Pas tant que je ne l'avais pas rejoint. Je devais l'atteindre. Je devais le toucher.
Rassemblant ce qu'il me restait de forces, je continuai de ramper, ma chair brûlant à chaque avancée. Chaque mètre me paraissait interminable, comme si le sol lui-même voulait me retenir. Mon souffle était court, mes muscles en feu, mais je n'arrêtais pas. Je ne pouvais pas.
Enfin, après ce qui me sembla une éternité, mes doigts frôlèrent ses vêtements. Je levai les yeux, et malgré la douleur lancinante qui battait dans mes tempes, je parvins à l'enlacer doucement par-derrière. Mes bras tremblaient, faibles et épuisés, mais je les serrai autour de lui, pressant mon front contre son dos avec tout l'amour et la chaleur qu'il me restait.
— Je suis là, Josh... murmurai-je, ma voix presque éteinte, brisée par l'effort et l'émotion. Je suis là.
Il ne bougea pas, mais je pouvais sentir sa respiration, irrégulière, vacillante. Peut-être que mes mots l'atteignaient. Peut-être que non. Tout ce que je savais, c'est que je ne le lâcherais pas. Pas maintenant. Pas après tout ça.
Le silence retomba sur nous, aussi grave que la pression qui régnait. Nous étions là, au milieu du sang, de la tragédie, mais, pour un bref instant, le monde s'effaçait. Il n'y avait plus que Josh et moi, assis dans ce désespoir muet, liés par la douleur, mais surtout par cette étreinte fragile que je refusais de briser.
Tout à coup, un fracas retentit, rompant la lourde quiétude qui pesait sur nous. Les portes furent violemment défoncées, des éclats de bois volant en tous sens, et une horde de policiers envahit la pièce. Ils nous encerclèrent, leurs armes pointées dans toutes les directions, leurs ordres fusant dans l'air.
— Ne bougez pas !
Le chaos s'installa instantanément près de nous, mais je ne percevais presque rien. Tout était devenu flou, comme si le monde entier était plongé sous l'eau. Je restai agrippée à Josh, mes bras toujours autour de lui, mon corps épuisé, mon esprit ailleurs.
Puis, au milieu de ce tumulte, je l'entendis souffler doucement, comme un murmure à peine audible. Ses membres se détachèrent ensuite lentement des miens, et, dans une confusion totale, je le sentis s'éloigner. Mon cœur se serra, paniqué, sans comprendre.
Mais avant que la peur ne prenne racine, Josh se tourna afin de me faire face, ignorant les policiers qui criaient ainsi que tout ce qui se passait autour de nous. Il s'avança et, sans hésiter, me prit dans ses bras avec une tendresse infinie. Il enfouit son visage dans mes cheveux, son souffle chaud contre ma peau, et pour la première fois depuis ce cauchemar, je sentis sa chaleur, son réconfort.
Je restai figée, surprise, mes mains suspendues dans l'air comme si je ne savais plus quoi faire. Mais la douceur de son étreinte finit par me faire fondre, et je m'abandonnai contre lui. Je fermai les yeux, me laissant bercer par cette chaleur rassurante, sentant son cœur battre faiblement contre ma poitrine.
Tout autour, les voix continuaient de s'élever, les ordres fusaient, mais plus rien ne semblait nous atteindre. Il n'y avait plus que Josh et moi, dans cette bulle de réconfort au milieu du chaos.
Sans prévenir, nos forces nous quittèrent d'un coup. Nos êtres entiers cédèrent sous le poids de la fatigue et de l'émotion. Nous nous écroulâmes lentement, ensemble, au sol, toujours enlacés. Mes doigts s'accrochèrent à sa chemise, tandis que mon esprit flottait doucement vers l'inconscience.
Je l'entendis murmurer quelque chose, mais je ne pus en saisir les mots. Tout devint de plus en plus flou, jusqu'à ce que la lumière disparaisse complètement, nous laissant sombrer dans une agréable noirceur, toujours dans les bras l'un de l'autre.
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Quand j'ouvris les yeux, une douleur sourde me traversa la tête, m'arrachant un gémissement. Je portai ma main à mes tempes, cherchant à apaiser le mal, et soudain, tout me revint. Les coups de feu, Saranne, Maël, Josh... Mon cœur accéléra sous l'assaut des souvenirs. Je me redressai lentement, le corps lourd et sensible, et scrutai la pièce.
Je me trouvais dans une nouvelle chambre d'hôpital. Les murs blancs, les draps immaculés, tout empestait l'antiseptique. Je laissai mon regard errer avant de m'arrêter sur un autre lit, à quelques mètres du mien. Josh y était allongé. Mon souffle se bloqua dans ma gorge en le voyant. Il était réveillé, ses pupilles bleues se posant sur moi avec une douce intensité.
— Comment te sens-tu ? me demanda-t-il d'une voix rauque, brisant le silence.
Je clignai des yeux, cherchant mes mots. Comment j'allais ? Tout était allé si vite... Mes pensées s'embrouillaient encore, et mes émotions étaient un tourbillon inextricable de confusion, d'effroi, et d'un soulagement mêlé de tristesse.
— Je... je ne sais pas, balbutiai-je finalement. Tout est... flou.
Il hocha lentement la tête, comme s'il comprenait parfaitement ce que je ressentais. Il tendit ensuite la main vers une petite télécommande à côté de lui et appuya sur un bouton. La télévision accrochée au mur s'alluma, faisant jaillir des images qui nous prirent tous les deux par surprise.
Je le regardai, interloquée, incapable de saisir ce qu'il faisait.
— Le discours du directeur ne va pas tarder, murmura-t-il calmement, ses yeux fixés sur l'écran.
J'allais lui demander de quoi il parlait exactement quand la porte de la chambre s'ouvrit brusquement, nous coupant dans notre échange. Je sursautai, tout comme Josh, alors qu'une silhouette familière apparaissait dans l'encadrement.
Steven.
Il nous observa un long moment, ses iris passant de Josh à moi, l'inquiétude marquée sur son visage. Finalement, il poussa un interminable soupir de soulagement, s'avança vers Josh, et dans un geste presque fraternel, tapota doucement la tête de ce dernier. Josh ne broncha pas, gardant toujours cet air impassible.
Ensuite, à ma grande surprise, Steven se dirigea vers moi, et avant même que je ne réalise ce qu'il faisait, il m'enlaça avec force. Je restai figée, confuse, ne sachant comment réagir, mais sa chaleur et sa sincérité finirent par m'apaiser un peu. Il me serra contre lui pendant de longues minutes, ses bras enveloppant mes épaules dans une étreinte protectrice. Je sentis qu'il tremblait légèrement.
— Vous m'avez vraiment fait peur, murmura-t-il, la voix doucement rauque.
Il s'éloigna, par la suite, à contrecœur, relâchant son enlacement avec une lenteur presque douloureuse. Je pouvais voir à quel point il était soulagé que nous soyons là, en vie. Il recula jusqu'à la chaise près de la porte, s'y installant enfin. Mais juste à ce moment-là, le discours du directeur commença à la télévision.
Steven détourna son attention vers l'écran, bien qu'un reste d'inquiétude fût visible dans ses yeux. Je le sentais, il avait encore envie de s'assurer qu'on allait vraiment bien, mais les événements récents pesaient toujours lourdement sur nous tous.
L'ex big boss prit la parole, son regard traversant la salle avec une gravité palpable.
— J'ai reçu de nombreuses plaintes pour avoir exposé l'existence d'enfants innocents, affirma-t-il d'un ton ferme. Pourtant, aucune preuve n'était en notre possession. Aucun indice, aucun coupable durant trois longues années... comment pouvions-nous procéder à une arrestation ou à une suspension d'activité dans ces conditions ? Il est vrai que de multiples jeunes vies ont été arrachées cette année, et plusieurs parents sont en deuil. C'est aussi mon cas, sachez-le. Mon fils a été la première victime de leur folie meurtrière... Repose en paix, Klein Hicks.
À l'énoncé de ce nom, je me retournai vivement vers Josh, une question brûlant sur mes lèvres.
Était-ce le même Klein qui s'était fait transpercer par Rayan ?
— Ton frère faisait-il partie du club de tir ? m'enquis-je, mon cœur se serrant d'empathie.
Il parut surpris, puis acquiesça, ses yeux s'assombrissant à la mention de son ainé.
— Comment le sais-tu ? demanda-t-il, visiblement troublé.
— Le professeur du cours m'avait parlé de son histoire...
Le directeur continua, sa voix pleine d'émotion et d'amertume.
— J'ai tenté à de nombreuses reprises d'attirer votre attention sur le caractère étrange de cet internat, mais mes préoccupations semblaient tomber dans l'oreille d'un sourd. Les promesses alléchantes de l'école ont séduit bon nombre d'entre vous, y compris les parents, qui ont voulu croire que tout était parfait ici. Sans preuve tangible, personne n'était de mon côté. Nous étions seuls, face à l'incompréhension et au déni.
Il marqua une pause, puis ajouta avec une gravité palpable :
— De plus, je me suis jeté dans la gueule du loup en engageant mon second fils dans cette lutte. Il prenait ces risques non seulement pour son frère, mais aussi pour protéger tous vos enfants. Si vous saviez toutes les nuits blanches que cela m'a causées...
La salle était silencieuse, chacun pesant ses mots. Je sentais le poids de l'émotion dans l'assemblée, chaque regard échangé chargé de douleur et de détermination.
— Je ne t'ai pas demandé, mais où avais-tu caché la clé ? questionna Josh, son ton curieux atténuant légèrement la tension.
— Où je l'avais trouvée, lui répondis-je simplement. Dans le livre, au même endroit, en prenant soin de lisser la bosse. C'était un risque que je prenais, mais je savais qu'ils n'y penseraient pas.
Il en soupira, exaspéré, en affichant un faible sourire.
Je haussai les épaules, consciente que c'était imprudent, mais cela avait fonctionné, et c'était tout ce qui comptait.
— Et dire que vous m'avez caché tout ça durant tout ce temps ! s'écria Steven, faisant la moue.
— Quand je te dis que tu as raté trop de choses pour pouvoir remporter la victoire, tu ne me crois pas, rétorqua Josh toujours impassible.
— Ce n'est ni le lieu ni le moment de vous chamailler, les gars... les interrompis-je, ne voulant pas laisser leur dispute prendre le dessus sur l'instant.
Nous soufflâmes tous les trois à l'unisson, une bulle de complicité nous enveloppant avant que nous ne nous concentrions à nouveau sur la présentation. Chaque mot résonnait, chaque regard échangé entre nous renforçait notre solidarité face à l'épreuve que nous venions de traverser.
Le discours du directeur continuait sur l'écran, sa voix retentissant dans la chambre d'hôpital. Je l'écoutais à peine, encore trop perdue dans mes propres pensées, jusqu'à ce que ses termes captent soudainement toute mon attention.
— Les deux individus en captivité ont été retrouvés, et il n'y a plus de souci à se faire à leur sujet. Quant à Monsieur Nivas, il a été envoyé dans une prison à sécurité maximale, où il passera le restant de ses jours.
Ses phrases antérieures me glacèrent instantanément. Un frisson me parcourut de la tête aux pieds. Le nom de Nivas, son visage, ses actes monstrueux... Tout cela s'imposa dans mon esprit avec une violence qui me coupa le souffle. Les atrocités des dernières heures défilaient devant mes yeux comme un cauchemar éveillé, m'étouffant lentement.
Je croisai instinctivement les bras contre moi-même, cherchant une forme de réconfort dans cet acte, comme si je pouvais me protéger des souvenirs qui me hantaient. Mon regard se perdit sur les draps qui reposaient sur moi, et le monde sembla s'éloigner, se fondre dans une brume sourde.
Je ne remarquai même pas Josh se lever de son matelas. Il s'était approché de façon silencieuse, le plâtre à son épaule gauche contrastant avec ses gestes mesurés. Il s'assit près de moi, sur le bord du lit, et un instant, je sentis simplement sa présence à mes côtés, sans même tourner la tête.
Il me fixait avec tendresse. Je le flairais. Comme une chaleur douce qui me tirait hors de cette spirale de peur et de confusion dans laquelle j'étais en train de sombrer, mécaniquement, sans réfléchir, je me laissai tomber contre son torse. Mon crâne trouva sa place contre lui, comme si c'était là qu'il devait être.
Ses bras vinrent entourer mes épaules avec une délicatesse infinie, me rapprochant un peu plus de lui. Le poids de tout ce qui était arrivé semblait s'alléger d'un coup, juste à travers ce contact.
Dans cet instant suspendu, le monde extérieur n'existait plus. La douleur, la peur, les échos des horreurs passées s'effaçaient doucement, remplacés par cette chaleur familière et protectrice. Son souffle calme m'apaisait, me ramenant à un endroit où, pour la première fois depuis longtemps, je me sentais en sécurité.
Lui non plus ne parlait pas. Il n'y avait pas besoin de mots.
Steven, témoin de la scène, assis sur sa chaise, poussa un léger soupir en détournant brièvement les yeux, comme s'il comprenait quelque chose qu'il avait déjà soupçonné.
— Tu as bel et bien une longueur d'avance, mèche bleue, murmura-t-il, presque pour lui-même.
Il se tut ensuite, laissant l'atmosphère entre Josh et moi se renforcer, dans une bulle fragile, mais puissante. L'espace entre nous trois était rempli de ce non-dit, de ce moment de répit où, enfin, tout semblait s'apaiser, au moins pour un temps.
Le jeu des rois avait pris fin, et malgré les tensions, nous savions que nous avions gagné.
<~Blues~>
— Je parie que je peux battre Josh au jeu de société ! affirma Aileen, sûre d'elle.
— Certaine ? Il a une stratégie secrète ! la prévint Steven.
— Une stratégie secrète ? Ça s'appelle tricher !
— C'est juste une technique avancée, Aileen ! se défendit Josh.
Règle numéro 36 : Chaque rencontre est une nouvelle aventure !
🔦... Fin... 🔦
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Le dernier chapitre est enfin publié 😫.
Merci d'avoir suivi cette histoire jusqu'au bout 😬.
N'hésitez pas à laisser des commentaires sur ce qui vous a plu ou ce qui vous a le moins enthousiasmé, que ce soit dans cette ultime partie ou tout au long du roman 😁.
Sur ce, on se reverra peut-être dans un autre récit. CIAO ☺️
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