Chap.30 : Combien sur six ?
Rayan de nouveau sur ma liste de suspects, j'avais enfin découvert l'identité de cinq rois sur six. C'était une avancée significative, mais le temps pressait. Le moment butoir approchait à grands pas, et pourtant, je n'avais plus aucune piste exploitable.
Le poids de l'incertitude me pesait. Comment allais-je m'en sortir ? Toute cette semaine s'écoula sans aucune nouvelle information, tandis que les assassinats continuaient avec une effroyable régularité. Le climat devenait critique : les effectifs de l'internat avaient tellement diminué qu'il ne restait plus qu'une dizaine de lycéens par classe.
Un sentiment étrange de soulagement commença néanmoins à m'envahir. Je voyais finalement la peur se lire de façon claire sur le visage des autres élèves. Les professeurs eux-mêmes, d'abord indifférents, semblaient à présent perturbés par ces disparitions brutales. Enfin ! Il était temps qu'ils prennent conscience de la gravité de la situation, comme s'ils avaient été soudainement ramenés à la réalité après un long moment d'aveuglement.
Je me sentais seule dans cette lutte, mais plus que jamais, je devais retrouver ces rois, pour eux, mais surtout pour moi.
Ce jour-là, punie une énième fois pour avoir esquivé des corvées afin de me concentrer sur mon enquête, je m'affairais à dépoussiérer les étagères de la bibliothèque. La tâche était monotone et je m'efforçais de la terminer rapidement. Perchée sur un escabeau, plumeau en main, je m'attaquais aux rayons du haut lorsque des pas retentirent derrière un tas de livres. Des élèves discutaient, mais au début, cela ne m'intéressa guère.
Puis, une voix fit écho dans ma mémoire. Je fus soudainement envahie par un frisson : je l'avais déjà entendue. C'était celle du roi qui avait menacé Dora dans la salle de rattrapage. Je le savais. Il était là, juste derrière ce mur de livres.
L'excitation mêlée à la tension monta en flèche en moi. Je retirai discrètement un livre pour avoir une vue dégagée sur le petit groupe. Mon cœur s'emballa en apercevant une fille parmi eux, une jolie rousse aux boucles soignées. Elle avait tout l'air d'une élève ordinaire, et pourtant... Les apparences étaient bien trompeuses. En d'autres circonstances, jamais je n'aurais pensé à la suspecter.
Une fois qu'elles eurent pris leurs livres et quitté la pièce, une idée jaillit dans mon esprit. Je ne pouvais perdre cette opportunité. Je descendis précipitamment de mon escabeau et m'avançai vers le bibliothécaire.
— Monsieur, je crois que quelqu'un est parti sans inscrire son ouvrage, dis-je avec un air inquiet.
— Quoi ?! Répondit-il, visiblement alarmé.
Il bondit de son comptoir et déserta les lieux, me laissant seule avec la machine d'enregistrement. Il ne me restait plus beaucoup de temps.
Je me glissai derrière son bureau et me mis à fouiller frénétiquement les derniers emprunts. Si mes souvenirs étaient exacts, elle avait été la troisième à faire scanner son livre. Et là, je la trouvai enfin. Son nom s'affichait : Mickaela Frensy. Sa photo d'identité confirmait ce que je redoutais.
Bingo.
Juste à temps, je repris ma place initiale avant que le bibliothécaire ne revienne dans la pièce, l'air perplexe.
— Vous êtes sûre de ce que vous avez vu ? demanda-t-il en arquant un sourcil.
— Eh bien... maintenant que j'y pense, c'était peut-être un de ses livres personnels..., mentis-je en haussant les épaules.
Il leva les yeux au ciel, agacé, et me renvoya à mes corvées. Mais j'avais obtenu ce que je voulais.
Mickaela. Enfin, je savais qui était ce roi.
Au cours de la semaine, je fis quelques recherches supplémentaires. Mickaela, élève de la première A, faisait partie de la promotion de Dora. Son dossier n'était pas sans taches. Elle avait eu des troubles comportementaux dans le passé, des problèmes mystérieusement résolus l'année précédente. C'était suffisant pour moi. Elle était désormais indéniablement sur ma liste.
Le soulagement me submergea après cette découverte. Pour la première fois depuis un moment, je décidai de m'accorder une pause, de m'éloigner de cette enquête, de cet internat oppressant, de ce jeu morbide, et même de mes propres pensées. Juste pour quelques heures.
Allongée sur mon lit, les yeux mi-clos, je sentais le sommeil profond m'envahir enfin. Mais c'est alors qu'un bruit sourd retentit. Quelqu'un frappait à mon entrée.
Frustrée, je me levai à contrecœur pour ouvrir à celui ou celle qui avait osé interrompre ma précieuse tranquillité. Mais lorsque je tombai nez à nez avec Fanta, l'ex binôme de Josh, haletante et en sueur, mes pupilles s'écarquillèrent de surprise.
Pourquoi était-elle là, devant ma porte ? Nous ne nous étions jamais vraiment parlé. Cette situation était tout simplement inexplicable.
Je me contentai de la regarder, perplexe, en attendant qu'elle reprenne son rythme normal. Une part de moi était agacée de devoir faire preuve de patience alors que je ne comprenais toujours pas ce qu'elle venait faire ici, et surtout pourquoi dans cet état.
Une fois que son souffle se fit moins erratique et que ses épaules cessèrent de trembler à chaque respiration, je réalisai que j'aurais peut-être dû l'inviter à entrer plus tôt. Par courtoisie, je m'effaçai un peu de la porte et la laissai passer.
Nous nous retrouvâmes toutes les deux assises sur mon lit, dans un silence étrange et lourd. Pesant et chargé d'une tension palpable, il s'étira alors que Fanta hésitait encore à parler. Je la fixais, impatiente, essayant de ne pas exposer le tourbillon de questions qui me traversaient l'esprit.
Et puis, finalement, elle lâcha un unique mot. Un prénom, plus précisément :
— Josh...
Mon cœur se pinça à l'instant même où elle prononça son appellation. Ce seul mot fit remonter à la surface une vague d'émotions que je m'efforçais de réprimer depuis des jours. Je serrai les poings pour ne pas montrer mon trouble, mais une tension sourde grimpait déjà dans ma poitrine.
Elle avait pris tout ce temps pour lâcher ce nom ? L'agacement gravit, prêt à exploser, mais avant que je puisse dire quoi que ce soit, Fanta éclata en gémissements. Des larmes dévalèrent soudainement ses joues, et son corps fut secoué par des sanglots incontrôlables.
Je me suis sentie dépassée. Qu'est-ce qui se passait ? Qu'était-il arrivé à Josh ? Pourquoi pleurait-elle ainsi ?
Mon estomac se noua, la panique commençant à me gagner. Mon esprit s'emballait, imaginant le pire. Une angoisse sourde me rongeait alors que j'attendais qu'elle trouve la force de s'expliquer.
<~Blues~>
— Steven... je me sens mal...
— Tu veux une pêche ?...
— Pourquoi faire ?
— Pour avoir la pêche, tiens !
— Putain ! Je n'en peux plus de toi !
Règle numéro 26 : Il faut arrêter de se mentir à soi-même !
🔦... À suivre... 🔦
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