Chap.18 : Rapprochement et séparation
Lorsque je repris conscience, la douleur au point où j'avais reçu le coup me faisait toujours mal, mais de façon supportable, tout comme celle de mon ventre, dont je ne comprenais pas vraiment la raison. Après quelques grimaces, je me décidai à ouvrir enfin les yeux. À ma grande surprise, j'étais observée par carrément toute la salle. Je pouvais sentir leur regard sur moi, ce qui ne faisait qu'aggraver ma gêne, et j'éprouvai un mélange d'embarras et de vulnérabilité. À mes côtés, Josh, Dora, le professeur et mon cher partenaire étaient là, et je me demandais ce qu'ils pensaient de moi.
— Elle a repris connaissance ! s'écria Dora, visiblement ravie.
Le soulagement qui émanait de leur présence me réchauffait un peu le cœur, mais je sentais une vague de honte me submerger à l'idée d'être ainsi le centre de l'attention. Je les vis souffler collectivement, comme si un poids venait de se lever, avant que l'enseignant ne prenne la parole d'un ton autoritaire.
— Ceci vous servira certainement de leçon. C'était pour éviter cela que je vous avais expressément demandé de ne pas mettre de force dans les coups donnés à votre partenaire et surtout d'être concentrés. Mais non, on n'écoute jamais le professeur !
Ne lui accordant pas plus d'attention, je tentai de me redresser, mon avant-bras sur mon plexus, encore choquée par ce qui s'était passé. À mi-chemin, Josh et Steven m'aidèrent à atteindre mon objectif, une main sur mon dos chacun. L'effort qu'ils fournissaient me toucha, mais une partie de moi se sentait plus que fragile.
— Je ne pensais pas avoir tapé si fort..., commença Steven, un air de culpabilité sur son visage.
— Si ce coup était ton plus bas, je n'imagine pas le plus fort, rigolai-je difficilement, tentant de cacher ma souffrance derrière l'humour. C'était ma faute, j'ai voulu jouer à la dure et j'ai raté mon blocage.
Les mots sortaient sans effort, mais au fond, je me sentais si faible. Le professeur, monsieur Jarwlle, annonça la fin du cours, et chacun retourna à ses occupations. Josh et Dora prirent mon sac, m'entourant de leur chaleur, et me raccompagnèrent doucement à ma chambre. Une fois installée sur mon lit, je sombrai sans attendre dans les bras de Morphée, épuisée par les événements. Mon sommeil était si profond que je n'entendis même pas la cloche de vingt heures. De toute façon, c'était tant mieux, j'avais déjà le ventre suffisamment retourné comme ça.
Le lendemain, la douleur était encore présente, mais à peine perceptible. Étant samedi, je me levai et partis faire mon nécessaire matinal avant de rejoindre Dora comme prévu à la bibliothèque pour avancer sur notre exposé.
— Hey ! me dit-elle en me voyant arriver.
Je lui lançai simplement un « salut » morne, sans réussir à masquer mon état d'esprit. Je pris place sur la chaise en face d'elle, espérant qu'elle ne remarquerait pas mon malaise.
— Ça va, tes douleurs ? me demanda-t-elle, un brin inquiète.
— Beaucoup mieux, merci, répondis-je, mais mon ton manquait de conviction.
Nous commençâmes ensuite nos recherches sur le diabète, mais je sentais que quelque chose n'allait pas. Au bout d'une demi-heure, je compris que Dora n'était pas mentalement avec moi. Elle faisait des trajets entre les livres et sa montre, son anxiété palpable.
— Si tu t'ennuies, dis-le, lui intimai-je de façon indifférente, en tournant une page du gros bouquin que j'avais entrepris de feuilleter.
— Ce n'est pas cela, Aileen, mais... en fait... on m'attend quelque part...
Je lui fis signe de la main que c'était bon, un sentiment d'abandon me serrant la poitrine. Elle s'éclipsa très rapidement, comme si elle avait peur que je change d'avis. Plongée dans ma lecture, je fus obligée de lever la tête lorsque je vis quelqu'un poser lourdement un livre en face de moi.
— Josh ? Tu me suis ou quoi ?
— Ne prends pas tes rêves pour la réalité, trancha-t-il, ses pupilles évitant les miennes. Il n'y a pas que vous qui veniez faire des recherches. D'ailleurs, en parlant de cela, où se trouve Dora ?
— Elle m'a plantée, elle avait mieux à faire, l'informai-je, même si cela me peinait.
Je l'étudiai alors, remarquant les sourcils légèrement plissés. Quand il croisa mon regard, il les fronça davantage, comme s'il essayait de dissimuler quelque chose.
— Tu as l'air énervé, lui dis-je en refermant mon bouquin, curieuse.
Il se contenta de m'observer, affichant une mine grave qui me perturbait.
— Attends, compris-je. Tu es en colère contre moi ?
— À ce que j'aperçois, tu vas mieux, dit-il, changeant de sujet avec une précipitation qui ne m'échappa pas.
— Effectivement, mais réponds. Pourquoi es-tu fâché contre moi ?
Je vis son regard se durcir, sa volonté de rester impassible renforçant l'anxiété qui grandissait en moi.
— Ne te méprends pas, je ne suis pas énervé ! s'écria-t-il en tournant les talons. Mais ça aurait été sympa que tu ne pivotes pas vers moi juste pour mater mon binôme, ajouta-t-il néanmoins doucement, le ton légèrement blessé.
— Je rêve ou... Tu es jaloux ? lui demandai-je, un sourire se dessinant sur mes lèvres, une lueur d'espoir illuminant mon cœur.
Il s'arrêta, figé, et je vis son hésitation. C'était un petit moment de vulnérabilité qu'il tentait de cacher, une part de lui qu'il ne voulait pas montrer.
— En fait, tu es aussi possessif que moi en amitié ! m'exclamai-je, la surprise mêlée à la joie dans ma voix.
— En amitié... ? Mouais..., lâcha-t-il, avant d'aller rejoindre sa partenaire, son regard fuyant trahissant sa réelle préoccupation.
J'ouvris donc mon livre, un sourire carnassier sur les lèvres, le cœur battant plus vite.
Pourquoi sa jalousie me faisait-elle tant plaisir ? C'était un mystère de la vie. Dans cette incertitude, je trouvais cependant une sorte de chaleur. La complexité de nos sentiments cachés sous des couches de provocation et d'indifférence, rendait tout cela encore plus excitant.
Lorsque je voulus me replonger dans mes recherches, je sentis un regard insistant sur moi qui m'obligea à lever la tête. De ma position, je pouvais très clairement voir des boucles blondes très familières dépasser de l'encadrement de la porte. Ne pouvant pas crier son nom, j'attendis qu'il me fixe une nouvelle fois pour lui signifier qu'il était découvert et qu'il pouvait me rejoindre.
Il avança alors timidement à moi, ce qui me fit doucement rigoler, avant de prendre place face à moi.
— Je te pensais plus sûr de toi que ça, le taquinai-je, une légère moquerie dans ma voix. Mais, en réalité, je trouvai son hésitation un peu touchante, même si je ne voulais pas le lui avouer.
— Rho, ça va hein, me sourit-il, mais de façon forcée. Sinon... Toi, ça baigne ?
— Ouais, t'inquiètes, je suis plus robuste que tu ne le crois, hein ! Tentai-je de le rassurer, même si je ne pouvais m'empêcher de me demander pourquoi il semblait si préoccupé.
— Tant mieux ! Ça me soulage. Bon, vu que tu es en convalescence, je vais filer... Parce que je risque de recommencer mon Steven et ce n'est pas le moment !
— Refaire ton Steven ? Tu m'intrigues, là, dis-je en arquant un sourcil, curieuse, mais aussi un peu agacée par son ton.
— C'est vraiment toi qui m'y obliges, souffla-t-il en se levant, l'air exaspéré.
Il ferma les paupières quelques secondes, comme s'il tentait de se ressaisir, et afficha un sourire charmeur qui ne parvint pas à dissimuler l'inquiétude dans ses yeux. Il se rapprocha de moi jusqu'à ne garder qu'un infime espace entre nous, un mouvement qui me prit par surprise et me laissa sans voix. Je pouvais sentir une tension palpable entre nous, mais j'étais confuse quant à la raison de cette proximité soudaine.
Avant que je ne puisse prononcer le moindre mot, il sortit une grimace tellement ridicule et imprévue que je ne pus retenir un fou rire, attirant alors tous les regards vers nous.
Il était vraiment débile ce gars ! J'avais mal à mon plexus, mais impossible de m'arrêter.
— Merde ! s'écria Steven, y a le bibliothécaire qui arrive ! Faut qu'on s'casse.
Je pris mes affaires d'une main et imitai Steven à l'extérieur de la bâtisse, me sentant quelque peu soulagée. Une fois dans la cour, on s'assit sur un banc avant d'éclater de rire.
— Steven Strauss, terminale A, je suis humoriste et charmeur, m'informa-t-il suivit d'un clin d'œil.
— Aileen Jennings, première D1, je suis une simple lycéenne, enchantée, lui répondis-je avec un sourire, appréciant la légèreté de l'échange.
Lorsqu'en soirée, l'alarme de vingt heures retentit, je tombai sur Josh dans la cage d'escalier, en sortant des dortoirs. Quand il me vit, il afficha une expression étrange, presque tourmentée, avant de continuer son chemin, feignant l'indifférence.
— Josh ! l'appelai-je en me dépêchant de le rejoindre.
— Ouais ?
Sa froideur me surprit énormément. Il semblait s'efforcer de garder ses distances, et cela me troubla. Le laissant alors s'en aller, j'attendis quelques secondes avant de courir dans sa direction. Une fois à sa hauteur, je lui mis un coup de poing dans le bras, ce qui le fit réagir, mais je pouvais lire une frustration cachée dans ses pupilles bleutées.
— Putain, Aileen !
— Tu m'expliques ? C'est quoi cette froideur-là ?
Il leva les yeux au ciel, une manière de montrer son agacement, mais cela ne masquait pas l'angoisse qui se dégageait de lui. Il était vraiment têtu celui-là ! Ne me laissant pas le choix, je répétai le même scénario une nouvelle fois.
Il se tourna alors vers moi, l'air énervé, mais son regard trahissait une tempête intérieure. Cela me fit prendre mes jambes à mon cou dans la cour avec lui à mes trousses. Ayant de plus longs membres que moi, il ne tarda pas à me rattraper et à m'immobiliser, maintenant fermement mes deux bras.
— À quoi joues-tu, Aileen ? s'enquit-il, me fixant des yeux, un mélange d'angoisse et de colère sur son visage.
— Je ne joue pas, lui dis-je en soutenant son regard, déterminée à comprendre ce qui n'allait pas chez lui.
— Tu as fini de t'amuser avec l'autre guignol là et tu reviens vers moi maintenant ? me demanda-t-il très sérieusement, comme s'il avait besoin de garder le contrôle sur ses émotions. Sa voix était dure, mais je pouvais percevoir la vulnérabilité qui se cachait derrière.
— Josh... Qu'est-ce que...
Il me fixa un instant, perplexe, semblant beaucoup plus perdu que moi. Il me libéra ensuite de son emprise, ses yeux trahissant une lutte intérieure.
— Désolé, Aileen, émit-il doucement avant de quitter les lieux sans un regard en arrière.
Mon cœur se serra. Que se passait-il ...? Je restai là, figée, un mélange d'incompréhension et de frustration m'envahissant. Pourquoi cette distance soudaine ? Pourquoi ce besoin de fuir ? L'interaction légère et joyeuse que nous avions partagée rien que la veille me semblait maintenant lointaine, remplacée par cette froideur qui laissait un goût amer.
Les jours défilèrent, et, heureusement, aucun mort ne fut enregistré la semaine qui suivit. Je n'avais pas reparlé à Josh depuis les derniers événements... En fait, je ne savais pas quoi lui dire, et c'était sûrement son cas à lui aussi. Chaque fois que nos regards se croisaient en classe, une vague d'émotions me submergeait. Je ressentais une tension palpable, un mélange de frustration et de tristesse qui m'affectait beaucoup plus que je ne l'aurais cru... Ça faisait des mois que nous traînions ensemble, après tout. Son absence, son silence, c'était comme un vide que je n'arrivais pas à combler. Je me sentais perdue, coincée entre le désir de lui parler et la peur de ne pas savoir comment aborder le sujet.
Du côté de Steven, c'était le seul qui me mettait un peu de baume au cœur dans ce monde de brutes. On se voyait assez souvent après les cours et on faisait les quatre cents coups, mais malgré tout le plaisir que je prenais à passer du temps avec lui, je ne pouvais m'empêcher de penser à Josh. À chaque éclat de rire partagé avec Steven, je sentais un pincement. La joie que je ressentais était toujours teintée de mélancolie, comme si une partie de moi manquait à l'appel.
Quant aux recherches de notre exposé, elles avançaient également, même si Dora ratait la plupart de nos rencontres... J'avais vraiment l'impression de me faire pigeonner...
Aujourd'hui, je le patientais depuis une heure déjà pour progresser sur ce qui devenait « ma présentation », lorsque les interphones de l'établissement retentirent avec un bruit que je ne connaissais que trop bien.
— Mademoiselle Jennings, dans mon bureau.
Ça m'avait presque manqué de l'entendre. Je disais bien presque. Je savais pertinemment pourquoi j'étais convoquée. En attendant Dora en début de semaine, je m'étais endormie et étais arrivée en retard à un de mes clubs. Je m'étais fait sermonner, bien comme il le fallait, mais il semblerait que ce n'était pas terminé.
— Mademoiselle Jennings, moi qui pensais que vous aviez repris le droit chemin, voilà que vous replongez. Quelle est votre excuse cette fois-ci ? Vous ne saviez pas que vous aviez cours ? S'enquit-il en arquant un sourcil, faisant référence à ce que je lui avais servi précédemment.
— Je me suis endormie, lui dis-je honnêtement.
— J'apprécie votre franchise, mais vous n'échapperez pas à une sanction.
Il fouilla dans un de ses tiroirs, puis en sortit une clé qu'il me tendit.
— Vous devrez nettoyer la salle de rattrapage des devoirs. Étant mercredi, vos cours se terminent à seize heures, n'est-ce pas ? Vous devrez y être à seize heures trente précises. Pas avant et pas après. Ensuite, patientez sans un bruit si c'est occupé.
Pourquoi à seize heures trente tapantes ? Et pourquoi donc toutes ces précisions ? Il était plus pointilleux sur les horaires que je ne l'imaginais.
Je pris donc la clé avant de quitter les lieux. Il me restait environ quinze minutes pour pouvoir manger avant le début des cours de l'après-midi, mais même la nourriture ne pouvait apaiser le tourbillon d'émotions qui m'assaillait en pensant à Josh.
<~Blues~>
— Yeux ?
— Noisette
— Cheveux ?
— Blonds
— Sourire ?
— Charmeur
— Taille ?
— 175 cm
— Couleur préférée
— Noir
— Identité ?
— Steven Strauss
Règle numéro 14 : Ne jamais se laisser abattre.
🔦... À suivre... 🔦
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