7. [Pauline]
Pauline resta dans le centre de contrôle de longues minutes avant de se décider. Elle ne savait pas ce qu'il fallait qu'elle fasse. Au fond, elle était terrorisée par l'idée de mourir ce soir. Elle aimait la vie et s'était toujours projetée dans l'avenir. Oui, des projets, elle en avait. Des amis aussi. Elle ne les reverrait sûrement jamais, mais au moins elle avait eu la chance de partager des moments avec eux.
Il fallait se faire à cette idée et penser plutôt à survivre. Ses yeux bleus et son charme indéniable l'avaient toujours sortie d'affaire lorsqu'un obstacle se barrait en travers de sa route. Ici, c'était différent. La beauté n'importait plus.
Le silence donna espoir à Pauline. John devait s'être enfui, sans quoi elle entendrait du bruit venant de la piscine. Elle se demanda si les faucheurs savaient que quelqu'un était à l'origine de la coupure de courant. De toute manière, les faucheurs étaient occupés: c'était le moment de partir.
Lentement, elle se leva, poussa la porte et longea le mur. Il ne fallait pas faire de bruit, elle le savait. Elle tenta de se rappeler où était la sortie du bâtiment mais se rappela que John l'avait emmenée lorsqu'elle était inconsciente.
Soudain, un cri retentit. Elle reconnut le timbre de John. Elle comprit ce qui se passait mais ne voulut pas se l'avouer. Les faucheurs l'avaient eu, il ne s'était pas enfui. Et si éteindre la lumière l'avait mené vers sa mort? Elle s'arrêta dans son élan. Avoir une mort sur la conscience était quelque chose de nouveau pour quelqu'un de si jeune. La vie est injuste, si injuste. Elle aurait voulu que les choses se passent différemment mais elle ne pouvait plus rien y faire. C'était fait. Il était mort. Elle l'avait tué.
Tandis qu'elle se morfondait dans le couloir, une lueur éclairait le bas d'une porte. Elle s'en approcha et sentit une poignée au niveau de son ventre. Le temps d'un instant, elle soupira et réfléchit à ce qu'elle faisait.
Était-il vraiment mort ? Avait-elle le droit de l'abandonner, seul, avec les faucheurs ?
Le cœur lourd, elle fit pivoter la poignée.
Lorsqu'elle sortit, elle découvrit le jour qui commençait à se lever. Le bruit du vent et la fraîcheur du matin s'entremêlaient et lui procurèrent une sensation de calme. Elle savoura cet instant puis se rappela qu'il fallait s'en aller. Il fallait qu'elle trouve un endroit pour se mettre en sécurité, une cachette. Les faucheurs la chercheraient.
Une route en goudron abîmée serpentait le long d'une colline: elle n'avait pas d'autre alternative. Elle emprunta alors le chemin le temps de trouver un endroit plus sûr. Le long de la route, des pancartes en bois indiquaient qu'elle se dirigeait vers Everlasting Wonderland. La fatigue rendait sa marche difficile voire interminable mais cela ne représentait rien comparé au fait qu'elle n'avait pas sauvé John. Cela la rendait folle, un sentiment de culpabilité commença à l'habiter. Chasser cette pensée, elle le voulait, mais au fond d'elle, elle ne pouvait cesser d'y songer. Pleurer, elle n'en avait plus la force. Seuls l'amertume et le regret lui tordaient le ventre.
Au loin, elle aperçut l'entrée de ce qui semblait être un parc d'attraction. «Everlasting Wonderland» était écrit en lettres rouges sur un panneau en fer. Pauline adorait les parcs d'attractions mais n'avait pas la tête à se réjouir. Ici, tout était nuancé. Tout ce qui semblait normal était en réalité pourri par des surprises malvenues.
Pour assurer sa survie, Pauline s'imposa des règles: ne faire aucun bruit et rester prudente en toute circonstance. Personne ne devait être au courant de sa venue. Il n'était jamais de bonne augure de se faire remarquer.
Lorsqu'elle arriva au niveau des portails à l'entrée du parc, elle hésita. Cela pourrait être une nouveau piège, une nouvelle manière de la duper pour mieux la tuer. Malheureusement, son instinct lui murmurait d'entrer. Sur la route, Pauline était visible et maintenant que la jour s'était levé, il semblait plus raisonnable de trouver une cachette.
Discrètement, elle entrouvrit le portail, jeta un coup d'œil derrière elle et se faufila. Elle découvrit un vaste parc dont l'odeur de la peinture fraîche l'interpella. Ce parc d'attraction venait d'être construit, et personne ne semblait s'y être aventuré. Pourtant, tout fonctionnait comme s'il s'agissait d'une journée touristique banale. Les wagons du grand huit tournaient en boucle, le magasin de bonbons semblait ouvert et les chaises volantes tourbillonnaient.
Pourquoi avoir investi dans un tel ensemble alors que personne ne venait? Pauline n'eut pas le temps de se pencher sur la question que tout s'arrêta subitement. Le parc s'éteignit en une fraction de seconde. La douce musique d'ambiance laissa place à un silence pesant. Puis, quelques minutes plus tard, les hauts-parleurs laissèrent entendre un compte à rebours. Soixante, cinquante neuf, cinquante huit. Le temps volait à mesure que Pauline se posait des questions. Il fallait se décider, et vite.
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