30. [Pauline]

C'était suspendue au dessus du vide que Pauline se réveilla. Attachée par une corde dans le dos, elle surplombait un précipice vertigineux. Chuter des Falaises Jumelles n'était pas une bonne idée, il y avait plus original comme mort.

"Ne pas paniquer, ne pas paniquer, ne pas paniquer", ne cessait-elle de se répéter face au vide. "Il doit y avoir une explication rationnelle à tout ça". Tétanisée pendant plusieurs minutes, Pauline décida de fermer les yeux pour ne plus y penser. Il fallait qu'elle se sorte de cette situation, sans quoi n'importe qui pourrait passer par là et couper le fil qui la retenait à la vie.

En tenant de sa balancer, Pauline se heurta à une paroi. Décidée à ne pas passer la nuit ici, elle se retourna et eut une idée. Avec courage et bravoure, elle essaya d'escalader ce mur de pierre. Pauvre en points d'accroche, elle ne parvint qu'à remonter quelques mètres avant que son pied ne trébuche et ne la remette dans sa position initiale. Frustrée de ne pas avoir réussi, Pauline tenta à nouveau de remonter, mais avec une toute autre technique.

Les pieds positionnés contre la paroi, elle remonta mètre par mètre en se hissant avec la corde. N'ayant pas une force herculéenne, quelques cris de douleur s'arrachèrent de sa bouche. Après vingt minutes d'escalade périlleuse, Pauline atteignit le sommet des Falaises Jumelles. Epuisée, elle s'octroya une pause pour se remettre de ses émotions. "Je ne me laisserai pas crever", jura-t-elle à haute voix.

-Taisez-vous bon sang ! coupa une voix rauque.

Pauline sursauta, elle ne s'attendait pas à trouver quelqu'un ici.

-Je vous demande pardon? dit-elle offusquée à la fois par la remarque que par sa voix modifiée de petite fille.

-Vous allez le fermer, votre clapet?

-Qui est là? chuchota-t-elle.

-Comme si je pouvais vous répondre, petite idiote. Je tiens à ma vie, moi! Arrêtez de faire du bruit à la fin, il y a un faucheur en contrebas !

Pauline se figea. Le terme "faucheur" résonna dans sa tête et lui rappela ce qui s'était passé la veille. Son visage crispé laissa place à une mine sérieuse et calme.

-Où êtes-vous? demanda-t-elle discrètement.

-Je suis caché dans le buisson, répondit-il.

-J'arrive vous rejoindre, déclara-t-elle.

-Ah ça non je n'y tiens pas, vous allez me causer des ennuis !

-Oh, je ne vais pas rester seule, dit-elle avec sa voix d'enfant, ne bougez pas j'arrive quand même!

L'inconnu n'eut pas le temps de se plaindre que Pauline parvint à le retrouver. Effrayée, cette dernière ne put se retenir de se coller à lui.

-Qu'êtes-vous en train de faire, là, je peux savoir? demanda-t-il l'air dépassé.

-J'ai peur moi, vous n'aller quand même pas me laisser mourir de peur, si?

-Eh ben. Vous ne manquez pas d'air, dis donc.

Soudain, Pauline eut une idée. Une excellente idée.

-Si vous voulez, je peux me faire pardonner.

-Ah oui, et comment?

-Avons-nous le droit de parler de notre rôle quand nous sommes dans l'arène? fit-elle semblant de demander.

-Bien sûr, tout est anonyme, c'est bien le seul endroit où vous pourrez en discuter.

-Très bien, répondit-elle. Je vous dis tout alors.

-Allez-y mais chuchotez nom de Dieu ! Vous n'êtes vraiment pas culottée !

-Justement, grâce à mon rôle nous n'aurons plus besoin d'être prudents, expliqua-t-elle.

Pauline eut peur que son mensonge ne se fasse remarquer.

-Qu'est-ce que vous insinuez? Vous êtes de mèche avec les faucheurs? s'indigna-t-il.

-Non, rien à voir. Je suis la fée des auras, voilà tout, inventa Pauline prise de panique.

"Quel nom de rôle merdique", ne put-elle s'empêcher de penser.

-Et qu'est-ce que cette fantaisie permet? demanda-t-il intrigué.

-Ecoutez, chaque nuit, deux potions me sont remises. J'ai le droit de les boire ou bien d'en faire don à d'autres innocents que je croise.

-Et vos potions, à quoi servent-elles? Je ne voudrai pas avoir des incontinences.

-Elles répandent des auras, déclara Pauline.

-Cela, je l'ai bien compris, mais à quoi bon répandre des auras?

-Ces auras procurent des hallucinations qui feront fuir les faucheurs à proximité. Dingue non?

-Oui dingue comme vous dîtes, vous êtes dingue, ça je vous l'accorde. Et c'est ce cadeau là que vous comptiez me faire?

-Si cela vous intéresse, bien entendu, proposa-t-elle.

-Je n'y suis pas réticent, sans vous mentir.

-Tenez, dit Pauline en lui tendant un flacon de poison. Buvez-en une goutte pour que les faucheurs ne vous localisent pas.

-Simplement une? Heureusement que ce n'est pas de l'alcool, je vous aurai tout siffler.

Pauline fit mine de rigoler.

-Vous n'en prenez pas, vous?

-Euh, non, répondit-elle hésitante. Je viens d'en boire.

-Ah oui, et le goût est agréable une fois en bouche?

-Je ne crois pas que ce soit le plus important, mais oui, c'est très doux, une léger gout de vanille.

-Oh dis-donc, la vanille, que ça enivre, que ça enivre! Cela a un parfum si délicat, dit-il en débouchant le capuchon, j'en boirai à m'en faire exploser la vessie, ricana-t-il.

Sans faire exprès, gênée par la situation, Pauline s'esclaffa d'un rire si gras et si forcé que l'inconnu la prit pour une folle.

-Soyez plus discrète s'il vous plaît ! Je veux bien croire à l'hilarité de mes blagues mais vous en faites un peu trop.

-Excusez-moi, c'est comme les pets vous savez, ça vous échappe sans que vous ne puissiez rien n'y faire...

Pauline n'arriva pas à croire ce qu'elle venait de dire, la panique lui faisait dire n'importe quoi.

-S'il vous arrive d'avoir des gaz intestinaux qui s'échappent de votre anus avec bruit, attendez au moins que je ne sois pas à côté de vous !

Ne sachant plus où se mettre, Pauline préféra se taire.

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