26. [Edward]
Encore perturbé par l'annonce de Cinks, Edward se réveilla en sursaut. Assis sous un grand chêne, il n'arrivait qu'à peine à distinguer des ombres se mouvoir dans la pénombre. Son corps lui parut lourd, si lourd qu'il aurait aimé rester assis là toute la nuit, sous cet arbre majestueux.
En regardant autour de lui, il crut voir une lueur. Cela fut si rapide qu'il crut halluciner. Une partie de sa tête lui disait de courir, tandis qu'une autre, plus noire, le forçait à rester terrifié par la peur de l'inconnu. Il se sentait rongé de l'intérieur, et cela le rendait malade d'angoisse. Il savait, pourtant, que le mouvement garantissait la survie. Dave n'avait cessé de lui répéter.
Alors qu'il s'apprêtait à se lever, une ombre surgit dans son dos et enveloppa son misérable corps. Glacés d'effroi, ses membres ne répondirent plus. La proximité de l'ombre le convainquit de l'inutilité d'imaginer une fuite. Son coeur se serra lorsqu'il vit la lueur de la lune se refléter sur l'acier d'une faux scintillante. Ses doutes se confirmèrent.
Même s'il comprit la situation, il ne réagit pourtant pas. Un faucheur se tenait derrière lui, prêt à accomplir son devoir, et lui, tétanisé, attendait son heure. Sa faux brillait de mille feux à travers l'obscurité de la nuit.
Edward n'eut pas le temps de repenser à ses parents qu'il sentit déjà le souffle de la mort se poser sur lui. Il était prêt à se faire emporter par sa douce fraîcheur. Il se laissa alors guider par la brise nocturne et resta planté contre l'arbre.
La faux érafla son bras, laissant une marque ensanglantée sur sa manche. Il était comme ensorcelé par ces ténèbres si douces et ne sentit rien. Cela faisait longtemps qu'il ne s'était pas senti aussi en phase avec lui-même.
Un cri l'arracha de cet état hypnotique:
-Bouge Edward, vite, dégage !
Il se retourna et reconnut Stanislas dans un costume bordeaux courant à toute allure.
Il reprit dès lors ses esprits et revint à la réalité. Il réalisa qu'il fallait se dégager de cette situation, et au plus vite. L'adrénaline parcourut son corps et lui donna une incroyable force. En se recroquevillant sur lui-même et après quelques roulades disgracieuses, il parvint à se mettre debout et regarda ce qu'il se passait autour de lui. Il vit Stanislas plaquer à deux mains la faux du faucheur et l'appuyer contre son torse. Il remarqua qu'il n'arrivait pourtant pas à lui dérober. Fixant le faucheur droit dans ses yeux, Stanislas hurlait à mesure que ses muscles se tordaient.
-Je t'emmerde, toi et la mort, déclara-t-il avec sa voix modifiée qui le discréditait.
Spectateur de la scène, Edward voulut l'aider à prendre le dessus mais un bruit vint contrecarrer son élan de bravoure: deux autres faucheurs arrivaient par la gauche. L'un des deux portait une imposante faux incrustée de diamants. Il avançait, calmement mais le pas décidé, laissant pendre sa longue robe noire derrière lui. Le masque qu'il portait représentait un crâne noir parfaitement reproduit tandis que ses mains étaient décorées de bagues blanches. Une longue capuche recouvrait sa tête et le déshumanisait de telle sorte qu'Edward en oublia qu'il était humain.
Son camarade, moins imposant, en était une copie conforme. Seuls ses bagues vertes différaient. Edward ne le savait pas, mais il avait en face de lui la Grande Faucheuse accompagnée de l'un de ses disciples. Il prévint Stanislas qui se retourna aussitôt.
-Nous devons partir, vite, suggéra-t-il.
Sans avoir grande idée où ils partaient, ils s'engagèrent dans une modeste forêt . La sueur coulait sur le front du jeune homme et brillait à la lueur de la lune. Il n'avait jamais vécu aussi intensément auparavant. L'instinct de survie lui donnait une force indescriptible qui l'étonnait de jour en jour.
Les deux acolytes cherchant à créer de la distance entre eux et le groupe de faucheurs, ils ne se retournèrent pas une seule fois pour voir s'ils étaient toujours à leur trousse. L'unique source lumineuse qui leur permettait de se repérer était la lune, si claire par cette nuit prisée par les ténèbres.
Un panneau se présenta à eux, indiquant deux directions : l'Asile des Patients Oubliés et le Manoir Dissimulé. Sans consulter l'avis de son camarade, Edward emprunta la route menant à l'asile. Un tel édifice ne lui plaisait pas plus qu'un manoir mais il crut ne pas avoir le temps de réfléchir. La précipitation était un défaut qui réclamait bien souvent des additions trop salées, Edward.
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