13. [Alex]
Alex faisait face à un faucheur, il en était certain. Devinant la forme de son masque ainsi que celle de sa faux ornée de pierres précieuses, il entendit sa respiration, de plus en plus forte, comme si son envie de meurtre croissait. Ses yeux perçants le tétanisait. Il savait qu'il ne pourrait pas lui échapper. Plus maintenant. Il aurait dû s'enfuir tant qu'il le pouvait.
Une idée stupide lui traversa l'esprit: pourquoi ne pas l'affronter?
Comment? Il n'en avait pas la moindre idée. "Mais merde hein" se disait-il. "Autant mourir en ayant essayé".
Tandis que les trois imposants étages du carrousel surplombaient la forêt, des lumières multicolores en jaillissaient de toute part, les chevaux montaient et descendaient au rythme des rires de petites filles qui semblaient se prolonger en échos interminables. Devant le manège, la modeste cabane en bois cachait le faucheur du champ de vision d'Alex.
Les bruits de pas s'intensifiaient à mesure qu'il reculait. Alex n'était pas pris de panique, au contraire, il resta calme. Lentement, il enjamba la marche du carrousel et sans faire de bruit, il essaya de se frayer un chemin parmi les chevaux. Perdant sa proie de vue, le faucheur monta à son tour sur le carrousel et se lança à sa rencontre.
Un jeu s'installait entre Alex et le faucheur. Aucun des deux ne se précipitait, comme s'ils respectaient un certain code de conduite. "L'art de tuer". C'était pour cela qu'il ne s'était pas enfui, il savait qu'un fuite de dernière minute aurait agacé le faucheur qui l'aurait sans doute tué instantanément.
D'une voix enjouée, le faucheur entama les hostilités: "Caché ou pas, j'arrive". Alex n'arriva pas à rigoler et considéra cette réflexion comme une violation de leur jeu.
Silencieusement, Alex entame son ascension vers le deuxième étage du carrousel. Il se concentra pour ne pas faire grincer les marches de l'escalier mais il perdait en même temps de précieuses secondes, il en était conscient. De toutes façons, il ne pouvait pas se permettre de se faire repérer par le faucheur. Une fois l'étage atteint, Alex rampa le long du sol et parvint à se cacher dans une calèche. C'était décidé, il resterait plante ici en faisait le mort tant qu'il n'entendait pas le faucheur se rapprocher. Cela lui laisserait du temps pour établir une stratégie.
Le bruit de la faux tapait contre le sol. Le son semblait de plus en plus proche à mesure que la respiration d'Alex se coupait. Chaque coup résonnait dans son corps et lui fit réaliser à quel point le jeu auquel il pensait jouer n'était autre qu'une mise en scène de sa mort.
Les bruits de pas lui indiquèrent que le faucheur se rendait au deuxième étage. Le bruit et la fréquence des coups de faux s'intensifiaient. Alex pensa que son cœur allait littéralement imploser. Il ne pouvait plus supporter cette ambiance sordide, pas une seconde de plus.
Tenter une approche ou attendre la mort, telles étaient les options d'Alex. Finalement, il se résigna à exécuter son plan sans trop se poser de questions. Alors il se leva, poussa la porte du carrosse et se focalisa entièrement sur les escaliers qui menaient hors du manège. Il fit abstraction de tout ce qui l'entourait, y compris du faucheur. Tout était vide, seul ces escaliers importaient maintenant. Il courut, courut, enjamba chaque marche et finit par les descendre quatre à quatre.
Dans sa course effrénée, il esquiva chaque obstacle, son cerveau analysait tout en à peine une seconde. Il sentait son énergie inonder son corps. Jamais Il ne s'était senti aussi vivant.
Tandis que son élan de courage ne dura que quelques secondes, cela lui parut une éternité. Il n'avait plus le temps de penser à la fatigue, l'instinct de survie prit désormais le dessus.
Arrivé devant la cabane en bois, il posa sa main sur la poignée de la porte mais n'arriva pas à l'ouvrir. Il essaya encore, encore et encore. Rien. Alors il poussa de toutes ses forces sur cette porte, tenta de la défoncer. Il avait l'impression de perdre son avance sur le faucheur, comme si chaque nouvelle tentative n'était qu'un pas de plus qui le rapprochait du faucheur.
Après ces échecs à répétition, Alex se retourna pour regarder où était le faucheur. Et là il comprit. Là il sentit une boule au ventre se former, son cœur repartir de plus belle et ses espoirs jaillir en éclats. Les larmes montaient, il tremblait. Le courage se dissipa et laissa place à la panique.
La clef de la cabane était attachée autour du cou du faucheur, qui n'a pu s'empêcher d'esquisser un sourire en voyant la tête d'Alex se décomposer.
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