Chapitre 4

Chapitre 4


- She left Toulouse, pretty sure of it. Ugo gave her a vacation, please tell me you know where she is...

Elle a quitté Toulouse, j'en suis sûr, Ugo lui a donné des vacances. Dis moi que tu sais où elle est partie...

Antoine entendit Reiko soupirer à l'autre bout du téléphone.

- She's my best friend, of course I know where she is, but I can't tell you, it wouldn't be fair.

C'est ma meilleure amie, évidemment je sais où elle est, mais je ne peux pas te le dire, ce ne serait pas juste.

Il était tellement à bout qu'il était à deux doigts d'hurler mais ce n'était pas la faute du Néo-Zélandais.

- I'm really sorry, Antoine. You know I really like you both and I really really hope you figure it out. I hate when you guys fight, after all I usually take you for my goal couple, dit Reiko avec un léger rire.

Je suis vraiment désolé Antoine. Tu sais que je vous aime beaucoup and j'espère vraiment que vous trouverez une solution. Je déteste quand vous vous disputez, après tout vous êtes mon modèle de couple.

Antoine sourit malgré lui. Il avait toujours le don de détendre l'atmosphère.

- Sorry for you then, murmura-t-il. Can you just tell me how she's feeling ? Is she... hates me ?

Désolé pour toi alors. Tu peux juste me dire comment elle se sent ? Est-ce qu'elle... me déteste ?

- No, of course not, she's just disappointed. She doesn't really understand what's happened, she could see you weren't feeling well, but she didn't expect you to freak out so much even against her.

Non, évidemment que non, elle est juste... déçue. Elle ne comprend pas trop ce qui s'est passé, elle voyait bien que tu n'allais pas bien mais elle ne s'attendait pas à ce que tu pètes autant un cable et contre elle.

- That's why I really need to explain myself to her, Reiko.

C'est pour ça que j'ai vraiment besoin de m'expliquer, Reiko.

- Fo me, what you nedd most of all is to work on yourself, find out why you snapped like that, learn how to stay calm, control yourself, stop hurting her... or hurting yourself.

Pour moi, tu as surtout besoin de travailler sur toi-même, savoir pourquoi tu as craqué comme ça, apprendre à rester calme, à te contrôler, à ne plus lui faire du mal, ou te faire du mal.

- Mmh, répondit simplement Antoine.

- Trust me, my friend.

Fais moi confiance, mon ami.

- I guess I do.

J'imagine que c'est le cas.

- Just one last thing, ajouta Antoine, if she moves on with someone, just let me know, okay?

Juste une dernière chose, si elle passe à autre chose avec quelqu'un, juste dis le moi, ok ?

- Of course, but don't think like that.

Bien sûr, mais ne pense pas comme ça.

But like that, he can't stop thinking.

Mais comme ça, il ne pouvait s'empêcher de penser.

Antoine regardait inlassablement les différents contacts de son téléphone à la recherche du possible hébergeur de Charlie. Il se savait ridicule mais c'était plus fort que lui. Elle n'était pas restée à Toulouse, il en était certain. C'était dans son tempérament de quitter le lieu de ses problèmes pour respirer. Elle n'était pas allée en Nouvelle-Zélande, certainement pas au Japon, elle n'aurait pas aimé demandé de l'aide à des membres d'une famille qu'elle connaissait si peu. Elle était sans doute encore en France, mais où ? Paris ? Avec qui ? Il se laissa tomber sur son canapé, enfin leur canapé, à bout de force.

Charlie fixait une offre d'emploi sur son téléphone. Recherche entraîneur.e pour les U13 (départemental) et U15 (national) au Toulouse Athletic Club (rugby à XV), temps plein. C'était peut être de ça dont elle avait besoin. S'éloigner d'une monde professionnel, du Stade Toulousain, retourner aux fondations, à ce qu'elle aimait dans ce sport : enseigner, former, apprendre. Ca signifiait aussi rompre son contrat avec le Stade Toulousain. En avait-elle vraiment envie ? Après avoir rencontrer le succès pendant sa première année, c'était forcément un échec. Quelques jours auparavant son premier réflexe aurait été d'en parler avec Antoine mais elle doutait qu'il réagirait calmement à présent.

Plusieurs jours passèrent dans une atmosphère étrange, oscillant entre le froid de décembre et la douceur du canapé dans lequel elle passait le plus clair de son temps. Sur la dernière année, elle n'avait pas souvent vu Earvin et elle était ravie de le voir aussi épanoui et heureux. Jenia passait très souvent manger le soir avec eux. Elle découvrit un homme calme, tempéré qui équilibrait le côté over the top d'Earvin. Parfois il proposait de sortir en boîte mais Jenia lui rappelait souvent que Charlie n'avait certainement pas envie de faire la fête et ils finissaient par faire un puzzle avec un match (ils se bagarraient d'ailleurs souvent sur le sport en question) en fond. Quand elle les observait, elle y voyait une vie rêvée avec Antoine.

Finalement, alors que la première semaine de ses congés s'achevait, Earvin réussit à la convaincre de sortir à une soirée privée. C'était à l'occasion du lancement de nouveaux produits Adidas et elle ne sut dire non. Elle en avait envie. Il y aurait d'autres personnes qu'elle connaissait et  voir du monde, penser à autre chose que son échec à Toulouse et à Antoine lui ferait le plus grand bien. Le volleyeur lui obtint une invitation et ils entrèrent tous les deux dans une de ces soirées dont la capitale française avait le secret. La présentation de la collection, les discours rapides, les petits fours, la musique et les discussions. Elle appréciait chaque seconde. 

Elle eut un pincement au cœur lorsqu'elle remarqua Earvin discuter avec plusieurs personnes, dont Jenia, et les deux agissaient comme s'ils n'étaient que des coéquipiers, des amis tout au plus. Le libéro semblait d'ailleurs fatigué de ce rôle tandis qu'Earvin était un des meilleurs pour jouer cette partition. Il avait toujours été ce garçon excentrique qui n'avait aucun mal à cacher ses sentiments.

Elle dansa, discuta, profita, oubliant presque ses quelques problèmes. Elle était tellement prise dans l'ambiance du moment qu'elle n'entendit ni ne vit les quelques influenceurs qui prirent des photos des participants pour leur Instagram.

Ce fut, alors que les trois poussaient la porte de l'appartement du volleyeur, que Jenia laissa échapper un hoquet de surprise.

- Charlie ! Il y a une photo de la soirée où tu es tag !

- Hein ? Montre.

La coach adjointe de Toulouse @ CharlieWk à la présentation de la nouvelle collection Adidas en pleine conversation avec @ earvinngapeth

- Putain, chuchota-t-elle en pensant une main dans ses cheveux.

- T'inquiète pas, je suis sûr que personne va lui dire... assura Earvin sans trop y croire

Elle leva les yeux au ciel.

- Je croyais que personne n'allait me remarquer, lança-t-elle d'un air accusateur

- Allons, Charlie, c'était un lancement de collection, évidemment qu'il y allait avoir des photos, de la comm.

- Bah oui, soupira-t-elle, c'est moi qui suis conne, dis le tout de suite.

Elle ne le laissa pas répliquer et entra dans l'appartement pour s'enfermer dans la chambre où elle dormait. Elle pouvait les entendre entrer en commençant à se disputer.

- Tu n'étais pas obligé de lui répondre ça, critiqua Jenia.

- Elle savait très bien que cela pouvait arriver, elle a simplement décidé que sortir un peu en valait la chandelle. Ce n'est pas ma faute.

- Peut-être mais un peu de tact ne fait jamais de mal...

- Antoine allait finir par savoir de toute façon, et ils ont besoin de parler.

Elle entendit Jenia élevait quelque peu le ton, ce qui l'étonna.

- C'est pas à toi de décider ça ! Peut-être qu'elle aurait préféré qu'il ne sache jamais !

- Ok ça va j'ai compris, t'as quoi là ? s'écria Earvin

Jenia soupira.

- Rien, absolument rien.

Leur voix disparurent lorsqu'ils entrèrent dans leur chambre en refermant la porte. Elle s'effondra dans son lit en scrollant Instagram. Des amis qu'Antoine et elle avaient en commun partageaient déjà le post et elle sut qu'il comprendrait rapidement où et chez qui elle était. Elle n'arrivait pas à savoir ce qu'elle lui dirait lorsqu'il serait devant la porte ni si elle avait envie de le lui dire.


Et un soir, en effet, il toqua à la porte. Antoine était nerveux, il prit le premier vol pour Paris dès qu'il avait pu se libérer après avoir compris que Charlie était chez Earvin. Il ne s'attendait à rien honnêtement. Il espérait deux choses : s'assurer qu'elle aille bien et avoir l'occasion de s'excuser en face.

Ce fut un Earvin faussement surpris qui lui ouvrit. Ils se jaugèrent un instant et Antoine fit preuve de tout son sang froid pour ne pas être agressif. Beaucoup de questions parasitaient son esprit. Pourquoi était elle allée chez lui en particulier ? Est-ce qu'il y avait quelque chose entre eux ? Quelque chose dont il devait se méfier ?

- Je ne suis pas sûr qu'elle soit ok pour te voir, murmura-t-il.

- Peut-être que Charlie peut répondre pour elle-même...

- Si elle voulait te parler, elle serait venue te voir, mais il ne faut jamais désespérer j'imagine.

Antoine serra les poings mais réussit à garder son calme.

- Je vais la voir, finit par répondre Earvin en retournant à l'intérieur.

Il revint quelques secondes plus tard et l'invita à rentrer avec des gestes qui trahissaient toujours à quel point il n'appréciait pas que le demi de mêlée soit chez lui. 

Il marcha dans l'appartement et sentit son cœur s'arrêtait lorsqu'il la vit, assise sur le canapé, semblant tout autant stressée que lui. Il la contempla en s'approchant. Elle lui sourit doucement et il la trouva encore plus belle qu'avant. Il était submergé par une vague d'émotions. La culpabilité, d'abord, de l'avoir blessée, de l'avoir poussée à s'éloigner. Puis la peur, qu'elle ne lui pardonne jamais vraiment, que cette beauté, cette force lui échappent à jamais. Et enfin, un désir ardent, un besoin viscéral de la retrouver, de la convaincre que rien n'avait plus de valeur à ses yeux qu'elle.

- Salut, dit-il.

- Salut.

- Est-ce que tu vas bien ? Ton congé nous a un peu surpris. Est-ce que c'était ce que tu voulais ou est-ce qu'on t'a un peu forcé la main ?

Elle sourit encore un peu plus. Elle retrouvait un Antoine inquiet avant tout.

- Non, c'est ce que je voulais. J'avais besoin de réfléchir.

Il hocha la tête.

- Et est-ce que ta réflexion t'a menée quelque part ?

Elle pensa à l'offre d'emploi mais décida de garder ça pour elle pour l'instant.

- Oui je crois... mais je pense que peut-être avant tu as des choses à dire, dit elle

Antoine déglutit. Il sentit son cœur se serrer, douloureusement conscient de tout ce qu'il risquait de perdre. Elle lui avait manqué d'une manière qu'il ne parvenait même pas à mettre en mots. Chaque nuit passée sans elle avait creusé en lui un gouffre, une absence palpable qui résonnait dans chaque fibre de son être. Et maintenant qu'elle était là, si proche, il avait envie de la prendre dans ses bras, de la serrer contre lui jusqu'à ce que le monde s'efface. Il savait que de ces mots dépendraient le reste de sa vie et ça le terrifiait.

- Je ne vais pas chercher à me trouver des excuses mais simplement je veux que tu comprennes ce qu'il s'est passé dans ma tête, rien de plus.

Elle hocha la tête.

- J-Je me suis laissé entraîner dans une spirale. Après la coupe du monde, j'étais le meilleur et en revenant à Toulouse, j'étais catastrophique et... je n'arrivais pas à me dire que c'était à cause moi, alors j'ai blâmé les autres, mes coéquipiers, le coaching, toi. Et je sais que ce n'est pas juste et que j'aurai juste du me remettre en question mais tu sais bien que je suis lent à comprendre...

Elle rigola.

- Tu me manque beaucoup mais je comprends que tu ne veuilles plus me voir. Je t'assure que j'essaye de travailler sur moi, j'ai commencé à en parler avec un psy, et je veux devenir meilleur, pour toi, mais aussi pour moi.

- J'ai l'impression qu'on a déjà eu cette conversation plein de fois...

- Je sais mais peut-être qu'il nous faut plus de temps qu'aux autres, tenta Antoine.

Elle paraissait hésiter et il fut comme déçu qu'elle n'ose pas lui dire tout ce qu'il lui passait par la tête.

- Je crois que je vais démissionner.

- Quoi ? s'écria-t-il

- Je ne pense pas que je peux te coacher et t'aimer, ça ne marche pas pour nous deux...

Antoine se mit à trembler. Il ne voulait pas qu'elle abandonne à cause de lui.

- Ce n'est pas juste, c'est moi qui devrait partir, ça se trouve ils vont me virer de toute façon et...

- Ne dis pas n'importe quoi, ils ne vireront jamais. Et puis, je crois que je n'ai pas pris beaucoup de plaisir depuis le retour de la saison, et ça n'a rien à voir avec toi, c'est juste beaucoup de stress et de responsabilité... Je pensais à prendre un poste d'entraîneur pour des U13 ou quelque chose comme ça. M'amuser plus.

Il resta muet.

- Tu es sûr que c'est ce que tu veux ?

- Je veux essayer en tout cas. Je vais rompre mon contrat et faire ce nouveau travail. Et puis après on verra.

- C'est-à-dire ?

- J'ai besoin de respirer.

Malgré lui, il commença à s'agacer.

- Mais tu as eu le temps de respirer là.

- Ca fait cinq jours !

- Peut-être que tu es déjà passé à autre chose, murmura-t-il en se retournant pour voir Earvin qui écoutait distraitement dans la cuisine ouverte.

- N'importe quoi, se surprit-elle à pouffer devant l'absurdité de ses propos.

- Quoi n'importe quoi ?

- Non mais enfin Antoine, il est en couple...

- Ca n'empêche pas...

Elle voulut préciser avec qui il était en couple mais elle se rappela qu'ils ne voulaient pas que ça s'ébruite.

- Ce n'est pas son genre.

- Oh si c'est son genre justement, répliqua Antoine.

- Charlie n'est pas mon genre, assura d'une voix forte Earvin. Promis.

Antoine finit par hocher la tête.

- Désolé.

Elle lui sourit d'un air entendu.

- Bon, je vais te laisser. Je suis encore à Paris jusqu'à après-demain. Si jamais tu veux qu'on se voit ou que... Enfin dis moi quoi.

- Ok. Merci d'être venu t'expliquer, ça compte pour moi.

Il lui sourit également. Il n'osa pas s'approcher d'elle, de peur d'être repoussé alors se contenta de retenir le plus de détails. Son sourire. Son regard doux. Elle était belle, plus belle encore que lorsqu'il était entré. Ses traits étaient fins, délicats, comme taillés dans un rêve. Et pourtant, il savait que ce n'était pas qu'une question d'apparence. C'était ce qu'elle représentait pour lui, cet amour qu'il avait bêtement mis en péril.

Il se contenta de plonger son regard dans le sien, espérant qu'elle puisse voir dans ses yeux toute la profondeur de ses regrets, de ses sentiments, et à quel point elle lui avait manqué, elle lui manquait déjà. Il crut voir dans ses yeux qu'elle avait comprit mais n'en était pas sûr. Et sans un mot de plus, il quitta l'appartement. 

***

Merci pour la lecture, j'espère que ça vous a plu ! Un chapitre plus long que d'habitude ! J'ai bien aimé l'écrire et j'ai des idées pour la suite et ça c'est fou !

Bonne journée ! 

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top