Chapitre 21 - Hope 🪷
Hope
Lorsque mon réveil sonne, j'essaye de me convaincre que ce bruit est une pure imagination de mon esprit. En vérité, si j'ouvre les yeux, le milieu de matinée est entamé et il est allongé dans mes draps en train de dormir paisiblement. Je le sais parce que c'est comme ça que s'est finie notre soirée hier. Je me retourne lentement pour retrouver son contact. Je l'ai amené au café de mon père, nous avons dîné - surtout moi -, bu un peu de vin et je l'ai ramené ici, dans mon appartement.
Dans ma chambre.
Nous avons fait l'amour dans une étrange tendresse et nous sommes endormis.
Pourtant, quand ma main cherche la chaleur de sa peau, elle ne rencontre que les plis désordonnés des draps : il n'est plus là.
Mon portable sonne, encore, pour me rappeler que je ne suis pas millionnaire et que je me dois d'aller travailler si je veux payer mon loyer. J'appuie à tâtons sur le bouton qui permet de couper le son et ouvre les yeux sans conviction. Je soulève la couette pour constater que je ne porte ni pyjama, ni sous-vêtements. Mon oreiller sent son parfum. Je sais que je ne suis pas cinglée à ce point pour avoir inventé un tel scénario !
Avec espoir, je regarde les notifications de mon téléphone, comme s'il allait me souhaiter une bonne journée. J'ai simplement un texto de Sara : Liam m'a invité chez lui hier soir, je pars au boulot. On débriefe quand je rentre ! V.P.C. C'est un petit code qu'on a entre nous : Vin, Pop-Corn. Notre kit de survie quand on a des milliards de choses à se raconter. Et bien qu'il ne soit que 7 h du matin, je prendrais bien un verre de blanc pour inonder mes pensées dépressives. Au bout d'une dizaine de minutes, je décide finalement qu'il est temps pour moi de mettre un terme à mon rendez-vous avec mon abandon et de me préparer.
Je passe rapidement sous la douche, noue mes cheveux longs dans un chignon et enfile une robe en laine qui tombe sur un collant noir peu opaque.
Je jette un coup d'œil dans le bouquet de fleurs qui trône sur ma table. Sur un malentendu, sait-on jamais... Mais il n'y a rien. Il est parti au milieu de la nuit, sans un mot. Je grimpe dans le premier taxi qui passe devant chez moi en envoyant un message à mon père pour lui indiquer que je suis en retard et que je n'ai pas le temps de passer ce matin. Je sais qu'il voudra en savoir plus sur l'homme qui m'accompagnait hier et je n'ai pas envie de m'étendre sur un fantôme. Je suppose que c'est pour ça qu'il était si bizarre hier soir.
Qu'est-ce que tu attends de moi ?
Je n'ai pas vraiment pris le temps d'analyser cette phrase, mais sans doute voulait-elle dire qu'il n'avait rien à m'offrir. Ou du moins, pas ce que j'espérais. En fixant les bâtiments new-yorkais qui défilent, je réalise que ma vie sentimentale est un véritable fiasco. Je ne sais pas à qui ou même ce que j'ai pu faire de mal, mais il est clair que quelqu'un dans les tréfonds de l'univers m'en veut à mort !
Il faut dire que j'ai encore réussi à jeter mon dévolu sur le meilleur parti qui soit. Même s'il ne l'a pas dit de façon explicite, il m'a clairement fait comprendre que nous étions différents sur beaucoup de points et que je mettais les pieds dans les problèmes. Mais qu'est-ce que j'y peux moi ? Je n'ai jamais appris à faire semblant, à outrepasser mes sentiments.
Zach vient à ma rencontre à la sortie de l'ascenseur et passe son bras autour de mes épaules pour m'accompagner jusqu'à la salle de réunion.
— Aller Trésor, c'est l'heure de parler performances, murmure-t-il d'un ton à demi sadique.
Je vise le poste d'associée, c'est l'une de mes plus grandes ambitions professionnelles et à cause de tout ce qui m'arrive en ce moment, j'ai complètement oublié ce rendez-vous dans mon agenda ! Je dois me ressaisir rapidement si je ne veux pas me laisser dépasser par les événements. Kyle Rollins ne peut pas être le grain de sable qui se coince dans les rouages de ma vie et qui fait merder ma carrière professionnelle.
J'ai une vie et un parcours auxquels je tiens et tout le monde n'a pas la chance d'être né sur une montagne de billets.
— Tu vas vite redescendre de ton nuage quand tu verras le montant de mes honoraires, rétorqué-je à destination de celui qui prend toujours mon épaule comme accoudoir.
— Underwood, t'as beaucoup trop confiance en tes capacités. C'est bien hein, t'as raison. Mais tu pourras jamais faire mieux que moi.
— Je pourrais te rappeler quelques moments où mes capacités ont fait en sorte que je sois meilleure que toi.
Il comprend mon sous-entendu et lève les yeux au ciel. Touché, coulé. Il se détache de moi en arrivant devant la porte vitrée qui donne accès à la salle. Plusieurs de nos collègues sont déjà assis et discutent autour d'un plateau de douceurs sucrées. L'odeur du café titille mes narines et je m'empresse d'attraper une tasse en allant m'installer à côté d'Emma. Elle m'offre son sourire habituel et me chuchote qu'elle commençait à s'inquiéter de mon léger retard.
Une minute après, Michael Taylor et Matthew Brown entrent dans la pièce et font taire toute l'assemblée.
La réunion a duré près d'une heure. Nous avons tous été remerciés pour notre dévouement et notre engagement au sein du cabinet. Notre sens moral et j'en passe. Pour la morale, je repasserais, pas sûre que coucher avec un client soit réellement bien vu. Il suffirait d'ailleurs que ça se sache pour que je sois mise à la porte. Zach et moi sommes les deux meilleurs de notre promotion. Je n'aime pas vraiment ce terme, mais je présume que c'est le plus approprié pour décrire les chiffres qui sont associés à notre travail. Nous avons, au dollar près, facturés le même montant d'honoraires à nos différents clients. J'aurais préféré faire plus que lui, mais je n'ai pas fait moins.
— À la prochaine réunion, je serais tellement loin devant toi que tu auras besoin de travailler la nuit pour espérer me rattraper.
Je laisse Zach s'emporter dans ses délires de victoire et retourne à mon bureau, un autre café à la main.
Je quitte le cabinet tardivement ce soir. J'ai avancé sur pas mal de dossiers et je commence à en savoir plus sur les effets indésirables de l'ecstasy et de la cocaïne. Non pas que je croyais en leurs vertus médicinales, mais je comprends au fil des cas que je traite que beaucoup finissent par se laisser emporter par un cercle vicieux qui ne finit jamais.
Et quand ils trouvent finalement une porte de sortie, il est déjà trop tard.
— Je te ramène chez toi ?
La voix de Zach fait écho au silence des bureaux à cette heure-ci. La lumière est éteinte presque partout, Emma est partie il y a plus de deux heures déjà. Je n'arrive pas à mettre un mot sur la relation que j'entretiens avec lui. Relation n'est d'ailleurs pas le terme adéquat, disons qu'on a appris à s'apprécier à notre manière. La rancune a disparu, de son côté comme du mien, c'est ce que je suppose en tout cas.
— Pourquoi pas. Ça fait tellement longtemps que je ne suis pas montée dans une Aston Martin !
— J'oubliais à quel point tu étais vénale, me nargue-t-il en faisant rouler ses yeux.
Je suis tout le contraire de ce genre de filles, et il le sait parfaitement. Le moteur de la sportive rugit avec puissance et se fait plus discret lorsque nous traversons le cœur de la ville.
— Alors, rien de trépidant à raconter sur ta vie ? T'as pu obtenir du champagne avec tes millionnaires ?
— Et toi, des places pour tous les matchs au premier rang ?
— En loge Trésor, ne me sous-estime pas, c'est vexant !
— Je suis certaine que tu as fait un milliard de selfies avec ton Brandon Scofield.
— Cameron. C'est Cameron. N'écorche pas un nom aussi important que le sien !
— Excusez-moi Mlle Scofield, loin de moi l'idée de vous blesser... murmuré-je en lui envoyant un léger coup de coude dans les côtes.
Ce qui est bien quand on connaît Zach, c'est qu'il est simple de faire dériver une conversation sur le chemin que l'on souhaite. Je n'avais pas du tout envie d'évoquer le sujet de la famille Rollins. Un peu d'intérêt pour lui et ses clients, et le tour est joué. Mon ex est beaucoup trop intéressé par sa personne et pour une fois, c'est en ma faveur. Il passe le reste du trajet à me faire les éloges du joueur des Giants et de la façon incroyable qu'il a de tenir un ballon de football. La seule chose qui pourrait m'intéresser, ce serait de voir Usher chanter à la mi-temps du Superbowl de l'an prochain.
— Merci d'avoir fait le taxi, Zach.
Je souris de façon réellement sincère.
— Avec plaisir H.
Je ferme la portière et regarde la voiture s'éloigner. J'ai tellement l'habitude qu'il m'appelle par mon nom de famille que j'en viens à me demander ce qui le rend de si bonne humeur. Je ne le saurais sans doute jamais !
Je monte les escaliers jusqu'à chez moi quatre à quatre, pressée de retrouver Sara. Et mon verre de vin. Elle est déjà installée sur le canapé, un saladier de pop-corn posé sur les genoux et deux verres remplis posés sur la table basse du salon.
— Viens t'asseoir Madame mâle Alpha.
Je dépose mes affaires et me hâte de prendre place à ses côtés.
— Son odeur d'homme riche a embaumé notre appart ! J'ai l'impression de respirer des dollars tellement ça sent fort, me charrie-t-elle d'un clin d'œil.
— Très marrant. Et toi, le super blondinet et son sourire ravageur. Raconte !
— Il vit dans les quartiers chics. Un loft immense, vue imprenable sur la ville, bref, le truc tiré d'un film ! On a passé notre soirée à...
Elle marque volontairement une pause, faisant mine de réfléchir au discours qui résumerait le mieux sa folle partie de jambes en l'air.
— Tu as passé ta soirée à te faire sauter par le bras droit d'un dealer de drogue.
— C'est un détail ça ! Le principal, c'est qu'il fait ça comme un dieu. C'était incroyable. À chaque fois !
Elle compte sur ses doigts avant d'allonger sa tête sur mes genoux, son regard fixé sur le mien.
— Je commence à comprendre ton engouement pour les mauvais garçons. Liam est un délice. Le seul faux pas, c'est que je me suis réveillée toute seule dans son grand lit ce matin. Il avait laissé un mot dans la cuisine en me disant de claquer la porte en partant, avec son numéro de téléphone.
— Kyle n'était plus là ce matin non plus.
— Mignons le jour, gangsters la nuit ! C'est encore plus excitant !
Un large sourire dévoile une rangée de dents blanches et ses yeux se plissent. Elle est attirée par le côté bad boy de Liam. Il n'a pas dû prendre le temps de lui faire comprendre que sa vie à lui est semée de cachets et de cadavres. Il ne faut pas avoir un QI supérieur à la moyenne pour savoir ce que ces mecs font une fois la nuit tombée. Je suis persuadée que le bras blessé de Kyle en est l'exemple même.
— Mes parents m'invitent à Jacksonville ce week-end. Je pense y rester une quinzaine de jours. Tu viens avec moi ?
Je soupire en entortillant l'une de ses tresses entre mes doigts. J'ai tellement de boulot... Comme à son habitude, elle sait interpréter mes silences à la perfection.
— Tu n'as pas envie de quitter la ville au cas où il donnerait à nouveau signe de vie. Je comprends. En tout cas, il te suffit de prendre l'avion si tu veux te changer les idées Bébé.
Elle relève son buste et dépose un baiser sur le bout de mon nez. Je meurs d'envie de le revoir. Mais je ne peux pas m'interdire de vivre pour quelqu'un qui ne me donne même pas son numéro en disparaissant de chez moi comme une ombre !
— Je vais y réfléchir, promis.
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