Chapitre 14 - Hope 🪷

Hope

Je ne sais pas comment c'est possible, mais le corps de Sara est toujours bouillant. Peu importe le contexte, d'ailleurs. Elle s'est retournée dans la nuit et nous sommes désormais dos à dos. Je sens le poids de ses fesses appuyer sur moi, un peu trop fort. Je résiste tant que je le peux. Mais c'est sans compter sur son étirement digne d'une prise de catch qui m'envoie littéralement sur le sol de la chambre.

— Aie ! crié-je en sentant mon dos percuter le parquet.

Ma meilleure amie grommelle en rabattant la couette sur son visage, comme si c'est moi qui avais osé la déranger. Quel culot !

Je frotte ma peau endolorie et me poste face au lit, prête à me venger de ce petit démon. Je me laisse tomber sur elle et commence à chatouiller sa nuque en passant mes doigts sous la couverture.

— Hope ! Stop ! Arrête ! hurle-t-elle en se débattant tant bien que mal.

— Tu prends la place d'un ogre quand tu dors !

— Je te rappelle que c'est mon lit ! T'as qu'à aller dans le tien !

Je fais mine d'être vexée et m'allonge à nouveau, sur le dos, à côté d'elle. Je glisse son coussin citrouille entre mes doigts et soupire. Il n'en faut pas plus pour qu'elle se lève d'un bond, s'assoit en tailleur face à moi et plante son regard chocolat dans mes iris bleus.

— Soit tu as passé une très mauvaise soirée, soit c'est le contraire. Raconte-moi.

— Un peu des deux.

— Il baise mal ?

— Sara !

— Quoi ? Faut appeler un chat un chat, j'y peux rien.

Je secoue la tête face à son langage distingué et reprends le cours de mon histoire.

— C'est le meilleur coup de ma vie. Je crois que les mots pour le décrire n'existent pas. Il est juste... Bref, tu vois le topo.

Sara pose deux doigts devant sa bouche et les écartent pour qu'ils réalisent un V, elle glisse sa langue au milieu et je la regarde avec dégoût. Cette fille n'a donc vraiment aucune limite.

— T'aurais dû naître avec une queue. Je vais t'appeler Sami à partir d'aujourd'hui !

— Aller Miss Sainte Nitouche, donne-moi la suite. Un mec, son pote, associé, super sexy, ou je ne sais qui est venu me prévenir que tu restais avec lui parce que t'avais vomi partout.

Et merde. Il était obligé de partager ce détail ?

— Ouais, j'ai abusé des shots de tequila. Et il m'a offert du champagne. Il m'a emmené dans son bureau et je me suis endormie.

— T'as pas fait ça ? s'égosille-t-elle en me secouant par les épaules.

— J'étais bourrée !

— Hope Underwood. T'es irrécupérable. On ne s'endort pas quand un mec tout droit sorti du paradis nous emmène dans son bureau, merde !

— C'est un putain de dealer de drogue. Qui baise comme un dieu. Et qui te ramène chez toi dans sa caisse qui vaut une fortune.

— Et donc ? Le problème ?

Je viens de prononcer dealer de drogue. J'estime que le problème est plus que bien identifié, non ? Un jour, je comprendrai comment fonctionnent les priorités dans le cortex cérébral de Sara. À ce stade, je sais très bien quel est le seul mot qu'elle a retenu.

— En plus de traîner dans la merde des bas quartiers. Il... Je fronce le nez sans réellement réussir à poser des mots sur ma pensée. J'ai l'impression qu'il a regretté. Comme si je n'étais pas assez bien pour lui.

Sara attrape mon menton entre ses deux doigts et pose son index au milieu de mon front. Elle déteste que je me dévalorise, physiquement, professionnellement, qu'importe le domaine. Si j'ai le malheur de ne pas être fière de qui ou de ce que je suis, elle s'occupe de me remettre les idées en place.

— Tu es la personne la plus incroyable que je connaisse depuis presque vingt ans. Si ça se trouve, il pense juste que tu es trop bien pour lui. Revois-le.

— Non.

— Pourquoi ?

— Parce que je ne pense qu'à ses mains sur moi depuis hier.

— Cool ! Ça va te mettre de bonne humeur de repartir sur le somptueux chemin qu'est celui du sexe.

Je souris, encore, bêtement. Sara est mon âme sœur pour la vie.

— Chocolat chaud ? murmuré-je en pinçant sa joue du bout de mes doigts.

Elle sautille sur son lit et se hâte d'aller s'habiller. J'enfile un jean noir troué et un sweat blanc oversize. On se coordonne sur des bottines à lacets qui remontent au-dessus de nos chevilles. Elle a opté pour un legging gris qui met plus qu'en valeur ses courbes et un gros pull en laine de la même couleur. Ses cheveux bouclés tombent en cascade derrière son dos. J'attache les miens dans un chignon décoiffé.

On pousse la porte du café de mon père et il vient à notre rencontre pour me serrer dans ses bras, il fait pareil avec Sara. On s'installe au bar et il nous sert deux chocolats, avec des guimauves et de la chantilly.

— Tu peux nous rajouter deux parts de cheesecake, Gerry ?

— Tout de suite !

Les parents de Sara se sont liés d'amitié avec les miens presque en même temps que nous deux. Mon père et le sien faisaient du golf pendant que nos mamans profitaient de leur temps libre pour naviguer entre le yoga, les groupes de lecture et, de temps en temps, un spa entre copines. Lorsque ma mère est morte, ils ont tous les trois été très présents pour nous. Ils ont fini par déménager à Jacksonville, en Floride quand on est entrées à l'Université. Mon père a toujours gardé un œil sur nous, ce qui a eu l'avantage de les rassurer.
Sara descend en Floride dès qu'elle le peut et je l' accompagne souvent.

— Alors, cette première semaine ? s'enquiert mon père en déposant nos assiettes devant nous.

— Mmh... Disons que... C'est intéressant !

Mon père hausse un sourcil et vient voler une guimauve de ma boisson.

— Michael me fait confiance et me positionne sur des dossiers importants. J'ai beaucoup de liberté pour agir seule. J'ai d'ailleurs mon premier rendez-vous au tribunal la semaine prochaine !

— Te voilà élevée au rang de Reine des Délinquants !

— Je suppose que ce que veut dire Sara, c'est qu'on est ravis pour toi ma puce.

— A quelques mots près, c'était ça ! lance-t-elle à mon père avec un clin d'œil.

Nous passons l'après-midi à discuter de la pluie et du beau temps. Du travail de Sara et de ce qu'elle voit quand elle est au bar. Mon père nous informe qu'il aimerait refaire la décoration pour les fêtes d'Halloween et de Noël histoire d'attirer un peu plus de monde. Sara lui propose de lui ouvrir une page Instagram pour donner plus de visibilité à son établissement. Il trouve bien évidemment l'idée géniale et nous propose d'être les égéries de sa réussite. On prend alors quelques photos de nous deux en train de croquer dans des cookies, avec de la chantilly sur le nez ou encore de mon père en train de préparer un café. En à peine deux heures, Chez Gerry compte déjà 10 publications et 60 nouveaux abonnés. Un petit pas pour l'homme, mais un grand pas pour mon père !

— Tu devrais proposer des biscuits en forme de fantôme, ça ferait un carton !

— Et toi, tu devrais changer de métier.

Sara me regarde sans comprendre instantanément le sens de ma phrase. Je la laisse cogiter un instant. Je suis persuadée que son cerveau fait tic-tac en ce moment-même.

— Pour devenir influenceuse sur Instagram ?

— Non idiote. Les boîtes recherchent du bon contenu et tu as des idées incroyables ! Regarde, encore 3 nouveaux abonnés !

— Hope n'a pas tort. Je suis même prêt à t'engager !

— Moi ?

— Oui, toi ! nous exclamons-nous en cœur avec mon père.

Sara pourrait apporter du renouveau au café de mon père, des nouveaux clients et de nouvelles idées. Je suis certaine que ça pourrait fonctionner. Elle hésite, par peur de se louper sans doute, et finit par accepter de faire quelques missions pour mon père. Je l'embrasse pour le remercier de son offre et nous quittons le café avec un sac rempli de gourmandises toutes plus sucrées les unes que les autres.

— Je vais devenir énorme si je bosse avec ton père !

— Propose-lui de développer une gamme de salade avec des graines. Tu attireras peut-être même des écureuils, qui sait ?

Elle me donne un petit coup dans l'épaule et nous rentrons, bras dessus, bras dessous chez nous. On s'installe devant la télé avec notre plateau repas improvisé et une nouvelle bouteille de vin blanc.

— Moi je vais finir par devenir alcoolique.

— Profite des bouteilles pas chères. Bientôt, tu te noieras dans le champagne hors de prix !

Son allusion me rappelle que je n'ai pas pensé à lui de la journée. Je me blottis sur ses genoux et Sara me caresse les cheveux.

— Tu vas le revoir ton beau dealer, t'inquiètes.

Je me demande à quoi il a pensé quand il est reparti. Au fond, je sais que c'est complètement idiot et que je dois sûrement être une fille de plus sur sa liste de conquêtes. Mais j'ai envie de le revoir. Lui et ses yeux verts. Son corps indécent et son côté torturé.

Kyle Rollins.

Son nom résonne dans mon esprit et je crois que je m'endors sur les genoux de ma meilleure amie. 

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