Chapitre 37

Duncan se tenait droit, sa présence imposante résonnait dans la grande salle.

Le silence pesant s'installa, seulement brisé par les froissements des robes des femmes et les soupirs discrets des hommes.

Francesca, debout face à lui, prit une grande inspiration.

Elle savait que ce qu'elle allait dire déclencherait une vague d'émotions.

-Je ne vais pas m'étendre sur le sujet, mais vous devez le savoir.

À partir de ce moment, les femmes ne lèveront plus le petit doigt dans ce château pour des tâches qui ne leur reviennent pas.

Nous ne sommes plus des servantes à qui l'on ordonne sans se soucier.

Et nous protégerons Lady Mackenzie , quoi qu'il en coûte !

Sa voix, d'abord ferme, gagna en intensité au fur et à mesure qu'elle parlait, jusqu'à résonner contre les murs de pierre du château.

Ce fut comme si un souffle parcourait la pièce, provoquant un échange de regards entre les hommes présents.

Gwendolyn, un peu à l'écart, sentit un frisson lui parcourir l'échine.

Elle observa Duncan avec attention, guettant sa réaction.

Le laird, toujours impassible, haussa légèrement un sourcil, un geste infime mais lourd de sens.

Ses yeux perçants se posèrent sur Francesca, la dévisageant comme s'il jaugeait l'audace de cette déclaration.

-Vous la protégez ? demanda-t-il, sa voix grave tranchant le silence avec une autorité naturelle.

Francesca acquiesça sans détour, redressant la tête avec détermination.

-Oui, elle viendra avec nous.

Nous refusons qu'elle soit punie pour avoir eu le courage de nous défendre.

Son geste était juste, et nous ne tolérerons pas qu'on la réprimande pour cela.

À la grande surprise de Gwendolyn, Duncan esquissa un sourire.

Pas un sourire bienveillant, mais un sourire énigmatique, presque amusé, comme s'il avait prévu cette réponse.

Ses yeux clairs se plissèrent légèrement.

-Il y a un problème à ce sujet, Francesca, dit-il, son ton à la fois calme et menaçant.

Le cœur de Francesca battit plus vite, mais elle ne montra aucun signe de faiblesse.

Elle fronça les sourcils, incertaine.

-Quel problème ? demanda-t-elle, sa voix vibrante d'une colère contenue.

-C'est moi qui la protège, répliqua Duncan, sa déclaration résonnant comme une sentence inéluctable.

Les murmures dans la salle se firent plus forts, une onde de chuchotements parcourant les rangs.

Les hommes et les femmes, debout ou assis, se penchèrent en avant, avides de connaître la suite.

La tension était palpable, et il était évident que Duncan n'appréciait guère la situation.

-Je ne céderai ni à vos chantages ni à vos exigences, ajouta-t-il avec une froideur tranchante.

Francesca, prête à répliquer, gonfla la poitrine, inspirant profondément pour lancer un autre discours enflammé.

Mais Duncan leva la main, un geste autoritaire qui la fit taire instantanément.

Elle hésita, mais les mots restèrent bloqués dans sa gorge.

-J'écouterai les deux versions avant de prendre une décision.

Une fois cela fait, l'affaire sera close.

Est-ce clair ? dit-il, son regard ne quittant pas Francesca, ses mots pesant comme une promesse.

Francesca serra les poings, mais elle se contenta d'acquiescer.

Elle savait qu'insister davantage risquait de lui coûter cher.

-Seulement si vous prenez la bonne décision, murmura Gwendolyn, sa voix à peine audible, mais assez forte pour que Duncan l'entende.

Il lui lança un regard furieux, ses mâchoires se crispant légèrement.

Ce n'était pas le moment pour des murmures d'insubordination.

Le laird se retourna brusquement, ses yeux se posant sur Hubert et les quatre jeunes hommes qui se tenaient à ses côtés.

Ils avaient tous une attitude provocante, défiant silencieusement l'autorité de Duncan.

Ce dernier se dirigea vers Louis, le plus âgé et sans doute le plus sage d'entre eux.

-Louis, as-tu quelque chose à dire ? demanda Duncan, d'une voix froide et inflexible.

Louis soupira profondément, conscient que son témoignage allait peser lourd.

-Je suis désolé, laird, répondit-il avec une sincérité palpable.

Je n'étais pas là.

J'étais dans la cour avec quelques soldats, loin des événements.

Duncan hocha la tête, son visage demeurant impassible, avant de se tourner vers Frédéric, qui se tenait aux côtés de George et Hubert.

-Frédéric ? poursuivit-il, s'attendant à une réponse plus détaillée.

Le regard de Frédéric était sombre, rempli de colère.

Il fixa ses compagnons, et ils lui rendirent un regard tout aussi impatient.

Duncan attendait une explication claire.

-C'était exactement comme vous l'avez dit, laird, répondit-il finalement, les lèvres serrées.

Tout a commencé lorsque Hubert a fait tomber Gabrielle.

Elle n'a rien fait de mal.

Les hommes l'ont insultée, et quand elle a refusé de se laisser faire, Hubert l'a frappée.

J'aurais pu le tuer moi-même, mais Lady Mackenzie est intervenue avant que je n'aie eu le temps de réagir.

À ce moment-là, mon seul souci était de la protéger.

Duncan hocha lentement la tête, son regard se durcissant à mesure qu'il digérait les informations.

Puis, ses yeux se tournèrent vers George, qui baissa immédiatement la tête, manifestement rempli de remords.

-Et toi, George ? demanda Duncan, sa voix plus douce, mais non moins autoritaire.

George hésita, pesant ses mots avant de répondre.

-Non, laird.

Je n'étais pas présent quand cela s'est produit.

Je suis arrivé après, quand Lady Mackenzie a commencé à donner des ordres aux hommes pour qu'ils accomplissent les tâches des femmes.

C'est tout ce que j'ai vu.

-Et tu es toujours de leur côté ? demanda Duncan, scrutant George de ses yeux perçants.

George marqua une pause, visiblement tiraillé entre sa loyauté envers ses camarades et son sens de la justice.

Finalement, il secoua la tête.

-Non, laird.

J'ai honte d'eux, répondit-il, la voix lourde de regret.

Duncan hocha de nouveau la tête, cette fois avec une satisfaction plus visible.

Il se tourna ensuite vers Francesca.

-Vous pouvez toutes retourner chez vous.

Prenez le reste de la journée pour vous reposer. Ryan, Isaac, Ian et Matheu prendront en charge les tâches restantes.

Un murmure de surprise parcourut la salle, mais Gwendolyn fronça les sourcils, mécontente de voir qu'Hubert n'avait pas été mentionné.

Toutefois, avant qu'elle ne puisse exprimer son désaccord, les femmes éclatèrent en applaudissements joyeux.

Les jeunes hommes, condamnés à prendre en charge les tâches des femmes, protestèrent vivement, mais Duncan ne broncha pas.

Gwendolyn s'apprêtait à quitter la pièce, son cœur battant encore à la suite des événements.

Mais avant qu'elle n'atteigne la porte, elle entendit le raclement distinct de la gorge de Duncan.

Ce son, si familier et pourtant si chargé de sens, la fit s'arrêter net.

Il avait toujours utilisé ce geste pour obtenir son attention sans avoir à élever la voix.

Elle ferma les yeux un instant, prenant une inspiration avant de se retourner lentement pour faire face au laird.

Duncan était toujours là, immobile, les bras croisés sur sa poitrine, son regard dur fixé sur elle.

Gwendolyn sentit une vague d'inquiétude la traverser.

Il ne pouvait pas lui en vouloir, pas après avoir écouté toute l'histoire.

Elle avait agi pour protéger les femmes et leur honneur.

Pourtant, l'expression de son mari restait sévère, froide même.

Son visage était impénétrable, et cela la déstabilisait plus qu'elle ne l'aurait admis.

Il lui fit un signe, un simple geste de la main, mais qui en disait long.

Un soupir échappa à Gwendolyn, tandis qu'elle quittait le côté de Francesca pour s'avancer vers Duncan.

Le poids des regards des autres femmes dans la pièce pesait lourd sur ses épaules.

Elles étaient restées, silencieuses, l'air curieuses et inquiètes à la fois.

Si Duncan avait quelque chose à reprocher à Gwendolyn, elles étaient prêtes à la défendre, à faire front commun contre lui s'il le fallait.

Cela la réconfortait, même si elle espérait sincèrement que cela ne soit pas nécessaire.

Avant de s'approcher davantage, Gwendolyn leur adressa un regard rassurant, levant légèrement la main pour les remercier.

Puis elle fit un signe discret, les invitant à se retirer.

Elles hésitèrent, certaines échangeant des regards, avant de se plier à son souhait et de quitter la pièce une à une, leurs pas résonnant dans le silence tendu.

Une fois seules dans la grande salle, le calme s'étendit autour d'eux, lourd et oppressant.

Duncan croisa les bras devant lui, un geste qui, malgré sa simplicité, dégageait une impression de force brute.

Il la fixait sans un mot, son regard pénétrant cherchant à déchiffrer ce qu'elle ressentait.

Gwendolyn soutint son regard, refusant de montrer la moindre faiblesse.

Elle savait que ce moment arriverait.

Il voulait probablement comprendre, à sa manière, pourquoi elle avait agi ainsi.

- Tu veux quelque chose de moi ? demanda-t-elle d'une voix claire, même si son cœur tambourinait dans sa poitrine.

Duncan ne répondit pas immédiatement.

Il se contenta de pointer du doigt le sol devant lui, lui indiquant ainsi de s'approcher encore davantage.

Elle soupira intérieurement, mais obéit, avançant vers lui à contrecœur, bien qu'elle tente de garder un air de calme.

Une fois qu'elle fut tout près, il tendit la main vers elle, effleurant son menton avec ses doigts.

Son toucher était à la fois doux et ferme, et il la força à lever les yeux pour croiser son regard.

- Un ordre pour moi, laird ? répéta-t-elle, cette fois avec une touche d'ironie dans la voix, consciente du caractère presque théâtral de la situation.

Duncan laissa échapper un léger sourire, mais son expression resta en grande partie sérieuse.

Il y avait toujours cette étincelle de possession dans son regard, ce sentiment qu'il aimait contrôler les choses, et plus particulièrement elle.

Cela l'avait souvent agacée, mais aujourd'hui, après ce qu'elle venait de traverser, cette familiarité apportait une sorte de réconfort étrange.

- Oui, ma chère, j'en ai un, répondit-il d'un ton qui laissa transparaître une once de tendresse, bien dissimulée derrière son autorité habituelle.

Gwendolyn inclina légèrement la tête en arrière, attendant, un brin provocatrice.

Que voulait-il réellement ? Un pardon ? Une justification ? Ou était-ce autre chose ? Sa respiration devint plus lente, plus mesurée, alors qu'elle attendait son verdict.

Duncan tendit à nouveau sa main, cette fois pour effleurer le menton de Gwendolyn, là où Hubert l'avait frappée plus tôt.

Ses doigts glissèrent doucement sur sa peau, comme s'il tentait d'effacer la douleur que ce coup avait pu lui infliger.

Il ne dit rien à ce sujet, mais le geste en disait long.

Puis, avec une délicatesse inattendue, il repoussa une mèche de cheveux derrière son oreille, un mouvement familier et pourtant si intime dans ce moment de tension.

Il lui attrapa alors doucement le visage avec ses deux mains, ses pouces caressant ses joues, un geste de possession autant que de protection.

Le regard de Gwendolyn se fit plus intense, cherchant à comprendre ce qu'il attendait d'elle.

- Embrasse-moi, ordonna-t-il enfin, sa voix basse et rauque, mais emplie d'une émotion qu'il ne laissait que rarement transparaître.

Il la fixait, ses yeux ne la quittant pas, attendant une réponse non verbale, une réponse qui valait plus que toutes les explications.

Un instant de silence passa, comme si le temps s'était suspendu.

Gwendolyn sentit la tension entre eux s'intensifier, non plus marquée par l'autorité du laird, mais par quelque chose de bien plus personnel.

- Est-ce que cela te convient ? ajouta-t-il, adoucissant légèrement son ton, une touche d'hésitation dans sa voix, comme s'il lui offrait un choix, malgré la nature de son ordre.

Gwendolyn hésita, mais seulement un bref instant.

Elle le regarda profondément, cherchant dans ses traits la raison de ce soudain besoin d'affection.

Puis, lentement, elle se pencha vers lui, leurs regards toujours ancrés l'un dans l'autre, et elle posa ses lèvres sur les siennes.

Ce baiser n'avait rien de l'impulsion brutale qu'elle avait pu craindre.

Il était doux, empreint d'une tendresse qui les surprit tous les deux.

Duncan la tenait toujours par le visage, comme s'il voulait s'assurer qu'elle ne s'éloignerait pas trop vite.

Et dans ce moment de fragilité, le laird fort et impassible laissa entrevoir une autre facette de lui-même, celle d'un homme tout aussi vulnérable que puissant.

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