Chapitre 9 - La vie secrète de Maxime

Deux jours se sont écoulés depuis que nous sommes entrés en effraction chez tata Sylvie, et nous n'avons toujours pas de signes de vie d'elle ou de Maxime. La bonne nouvelle - ou pas d'ailleurs - c'est que celui-ci ne se trouve dans aucun hôpital ou clinique de la ville. La mauvaise, c'est que tout porte à croire que Sylvie se doute de quelque chose, voire qu'elle SAIT. Mais Ulysse, l'imperturbable Ulysse, nous rabâche tous les jours que ce n'est rien. Bien trop optimiste ce garçon.

Pour ma part, je n'ai pas eu de nouvelles de "la voix", et je préfère que les choses restent ainsi. J'en ai marre de me questionner sur une femme qui s'immisce dans mes pensées sans autorisation et qui m'incite à rendre visite à un arbre terrorisant toute la ville ! Dès que j'entends ses mots, les branches de l'olivier semblent se dérouler dans mon esprit et m'attirer à lui comme s'il avait un... OH. Il faut vraiment que je m'inquiète davantage pour ma santé mentale. Déjà à cause de la voix en elle-même, mais surtout de la façon dont je l'accepte ! Comme si c'était une évidence pour moi de devenir Jeanne d'Arc !

— À trois je donne un grand coup dans la mallette, prévient Ulysse, m'extirpant de mes pensées. Allez, j'y vais. Un... De-

— T'es sûr que c'est une bonne idée de faire ça ici ? demande Nina.

— On est au milieu d'une forêt, personne ne viendra nous déranger.

— Bon tu vas la frapper cette mallette ou on se touche ? dis-je, impatient.

— Allez, reculez vous, attention à ne pas tomber de la falaise, un... Deux... Tro-

— Attends !

— Qu'est-ce qu'il y a encore ? soupire Ulysse.

— Je ne suis plus trop sûre de vouloir savoir ce qu'il y a dedans à vrai dire...

— Bon... ok... Soupire Ulysse, si c'est comme ça... TROIS ! finit-il en donnant un grand coup sur la mallette.

ET.... Rien ne se passe. La mallette résiste au poing d'Ulysse. Après une dizaine de tentatives les unes plus violentes que les autres, il finit par baisser les bras. Certes la mallette a maintenant quelques rayures, mais elle est toujours impeccablement scellée. Impassible, elle nous nargue et nous met au défi de l'ouvrir. Je ne sais pas pourquoi, mais voir Ulysse se défouler sur cette mallette réveille en nous quelque chose d'animal, même Nina, si peu enthousiaste tout à l'heure, a essayé de l'ouvrir.

— J'ai déjà essayé ça Albert, ça ne marchera pas !

— Oui mais peut-être que si je la jète assez fort contre les cailloux là...

— La jeter contre les cailloux... murmure Nina.

— Tu crois vraiment que tu as plus de force que moi ?!

— Je ne le crois pas... Je le pense !

— La... Jeter... continue Nina tout en se dirigeant vers la mallette.

— Hé Nina, tu vas faire quoi ?

— La jeter...

— La jeter ?

— Comment ça la jeter ?

— Attention où tu mets les pieds, non pas par là tu vas tomb-

— MAIS ELLE VIENT DE JETER LA MALLETTE DE LA FALAISE !

— NINA !

— Regardez plutôt, au lieu de crier ! nous ordonne-t-elle.

— Oh mon dieu...

— Oui... Elle s'est ouverte...

De notre point de vue, on n'aperçoit pas très bien ce qu'il y avait dans la mallette. Ça ressemble à des petits bouts de papier, de l'argent peut-être... Le problème c'est qu'elle s'est ouverte pendant sa chute en se cognant sur les paroies, répandant ainsi son contenu un peu partout au pied de la falaise. Bon il ne reste plus qu'à tout récupérer...

— Alors, à votre avis c'est quoi ces petits bouts de papiers colorés ?

— Ça va faire au moins cinq fois que tu nous poses cette questions et comme les quartes autres fois, on est au même point Ulysse...

— Rah je sais, mais vous êtes pas drôles ! Rien que d'imaginer ce qu'il y a dedans...

— En sachant que c'était à Maxime, je m'attends au pire...

— Non mais tu vas voir que ça va être des trucs tout pétés... Genre des faux jeux à gratter...

— Oh ! C'est là ! J'y vais, dit Ulysse en courant.

— Alors c'est quoi ?!

— Je sais pas... Venez voir par vous même !

— Mais c'est quoi ce bordel ?

— C'est... Un jeu de carte...

— TOUT ÇA POUR ÇA ?! s'indigne Nina, pour un foutu jeu de carte ?

— Regardez, le motif derrière... Ça ne vous dit rien ?

Le sigle ! C'est le sigle ! Le même que sur la porte ! Le même que sur le pendentif ! C'est le même j'en suis quasiment sûr à 100% !

Les cartes Albert... Détruis les cartes...

Hein ?! Encore cette voix ?! Rohh, est-ce que mon cerveau pourrait arrêter ses conneries maintenant ?!

— Si je me fie à internet, nous dit Nina, son téléphone à la main, ces cartes peuvent nous rapporter un sacré pactole ! Et surtout s'il y en a des rares !

Non Albert ! Ne les laisse pas prendre les cartes ! Laisse-moi tranquille, je ne me ferai pas avoir cette fois ! Tu n'existes pas !

— Ouah, apparemment celle là est très très rare, on peut en tirer au moins 300€ !

— Regardez celle-là ! D'après le site il n'y en a que 15 exemplaires dans le monde ! T'entends ça Albert, on va être riche ! RICHE ! Albert... Albert ça va ? ALBERT ! NON !


AaaAaaah... J'ai un de ces mal de crâne...Où suis-je ? Dans un lit...? Dans une chambre d'hôpital ? J'ai rêvé ou... Ouah... J'ai vraiment mal partout... Il vaut mieux que je referme les yeux... Mais bordel, qu'est-ce qu'il m'est encore arrivé ? Snif snif... Tiens, je reconnais cette odeur... Hibiscus... Jacinthe... Mais oui c'est...

— Bonjour Albert.

— AaaAaaah... Euh... Bonjour tata Sylvie...

— Ta tête va mieux ?

— Mais qu'est-ce que tu fais ici ?!

— C'est très malpoli de répondre à une question par une autre.

— Han. Oui oui ça va, merci.

— Bien, dit-elle en croisant ses mains sur ses genoux.

— Alors, qu'est-ce que tu fais ici ? Et surtout qu'est-ce que moi je fais ici ?!

— Albert, c'est moi qui pose les questions. Suis-je claire ?

— Euh... Très bien...

— Premièrement, tu vas me rendre cette photo que tu m'as volée.

— Hein ? Quelle photo ? Je ne vois pas du-

— Albert. Cesse tes enfantillages.

— Euh... Elle est dans ma veste.

— Merci. Et maintenant tu vas me dire comment tu t'es infiltré chez moi.

— Avec... Avec la clé que tu avais donné à papa...

— Hum, sais-tu qui sont ces personnes ? me demande-t-elle en me montrant la photo.

— Non, je n'en ai pas la moindre idée...

— Et ça, sais-tu ce que c'est ? me dit-elle en me déposant dans la main...

— Une carte ?

— Retourne-la. Est-ce que tu as déjà vu ce sigle ?

— Non.

Il ne faut pas montrer le moindre signe de défaillance. De faiblesse. Mais elle me scrute. Me sonde. Me transperce pour me transférer un sentiment de honte.

— Pourquoi me mens-tu, Albert ?

Et merde...

— Je l'ai vu deux trois fois, mais c'est tout, je ne sais pas ce que ça représente. Et pourquoi toutes ces questions ?! Tu ne fais pas partie de la police à ce que je sache ! Je ne vois pas pourquoi je devrais me plier à tes désirs et faire tout ce que tu-

Aïe, est-ce que je viens réellement de me prendre une claque de tata Sylvie ?

— Je croyais être claire ! T'ai-je autorisé à me poser des questions ?! Tu ne sais pas ce que Maxime a dû risquer pour récupérer ces cartes... Et bien évidemment toi, le GRAND Albert, toujours meilleur que les autres, tu t'es senti obligé de fouiner dans des affaires qui ne te concernaient pas ! Est-ce que tu étais vraiment obligé de reprendre cette mallette ?! Est-ce que c'était si difficile pour toi de fermer les yeux pour une fois ? Regarde moi quand je te parle !

— Tu préfères pas que je ferme les yeux alo-

Je rêve où je viens de recevoir une deuxième claque ?!

— Albert, tu ferais mieux de te calmer si tu veux des réponses ! Tu ne te questionnes pas sur ce qu'il se cache derrière ces cartes ?

— C'est... C'est la mafia chinoise... C'est ça ?

— Tsss... Ces cartes ont une valeur qui dépasse ton imagination, ton frère - qui est bien plus malin qu'il n'y paraît - les a gagnées à la loyal face à la famille Yang. Vois-tu, la famille Yang organise chaque année un tournoi clandestin de scrabble, avec des mises plus ou moins exotiques. Je savais grâce à un contact dont tu n'as pas besoin de connaître l'identité, que ces cartes allaient être jouées. Et quand Maxime les a remportées... Haha ! Ils n'ont pas très bien apprécié, c'est pour cela qu'il a dû fuir ce soir-là. Mais grâce à ces cartes, nous aurions pu négocier l'abandon de la famille Yang pour le concours. C'est pour cela que ton frère est retourné dans leur bar. Alors quand il m'a dit que quelqu'un l'avait agressé pour voler les cartes... J'étais folle de rage. J'ai menacé la famille Yang, et maintenant... nous sommes en guerre.

— En... Guerre ?

— Oui en guerre ! À cause de toi ! Et nous devons absolument gagner ce concours maintenant que j'ai mis notre honneur en jeu !

— Notre... Honneur ? Carrément ?

— Oui, tu m'as très bien comprise !

— Mais... Et les cartes dans tout ça ?

— Ce n'est plus un problème, j'ai trouvé une personne pour me les acheter et avec l'argent gagné, nous pourrons investir dans le bar.

— Et Maxime, comment il va ?

— Je ne sais pas ce que tu lui as fait mais il a une petite commotion cérébrale, d'après le médecin, il a pris plusieurs coup sur le haut du crâne. Il va s'en sortir bien évidemment, cet enfant à la tête dur, mais il faut avouer que tu n'y es pas allé de main morte. D'après le médecin, un coup de plus et tu lui aurais ouvert le crâne.

— Pardon ?!

— Je plaisante. Mais que cela te serve de leçon !


Si elle savait que c'était Nina qui l'avait assommé... Je ne sais pas de quoi elle serait capable. Je ferais mieux de ne pas lui communiquer cette information.

— D'autres questions ?

— Si ce n'est pas trop indiscret, qui sont ces personnes sur la photo ?

— De vieilles... Connaissances... C'est tout ce que tu dois savoir.

— D'accord... Et comment t'as su que c'était nous qui avions les cartes ?

— Ce sont Ulysse et Nina qui me les ont rendues. Si tu veux tout savoir, aussi étonnant que cela puisse le paraître... Je suis la première personne qu'ils ont contacté quand tu as perdu connaissance. Ces deux imbéciles n'ont même pas eu le bon sens de prévenir les secours... Il a fallu que ce soit moi qui le fasse... Ils ont tellement paniqué qu'ils m'ont immédiatement rendu la mallette avec les cartes. Bien sûr c'était déjà trop tard pour revenir sur mes menaces envers la famille Yang.

— Très bien... Je... Je peux te demander une dernière chose ?

— Je t'écoute.

Je meurs d'envie d'en savoir plus sur ce fameux sigle. Mais elle le sait. Son sourire en coin trahit l'orgueil à cause duquel elle ne me dira rien sans que je ne le demande avant. J'ai peut-être une idée.

— Hum... Non rien... Merci de ta visite tata Sylvie, tu peux y aller maintenant.

— Très bien mon cher. Le médecin passera te voir ce soir, il m'a dit que tu pourrais sûrement sortir demain matin.

Merde ! Elle n'a pas réagi une seule seconde ! Putain de psychologie inversée... Mais quelle idée à la con de ne pas lui avoir demander ce que c'était ! Maintenant je vais avoir l'air de quoi si je lui demande alors qu'elle est sur le point de franchir la porte de sortie ?

Peut-être que je ne devrais pas me prendre la tête pour ça. Il faut se concentrer sur ce fichu concours ! Maintenant qu'on a la mafia chinoise contre nous... Quand je vais dire aux autres que Maxime est un petit génie du scrabble clandestin... Ils vont jamais me croire !

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