Chapitre 15 - Où est la mallette ?
Jeter ce chat était encore plus facile que je ne me l'imaginais. Et maintenant que cela est fait, plus rien ne va entraver l'avenir du bar. J'ai le sentiment que la soirée d'hier a marqué la mort du Grand Lion, et par la même occasion sa renaissance. Le Grand Lion est mort ! Vive le Grand Lion !
Bon nous savons tous très bien que le titre du petit festival des grands bars ne lui reviendra pas. Peu importe, puisque dorénavant, nous allons d'abord nous faire plaisir avant de penser aux titres et autres récompenses. Qui ne servent d'ailleurs qu'à faire croître l'ego de personnes qui n'ont pas foi en leur projet ! Je sais que c'est un discours qui ne me ressemble pas, mais les gens changent. Et j'essaye de changer. L'Albert d'il y a deux semaines aurait déjà tout plaqué, mais cet Albert blasé n'est plus. Ce soir, c'est renouveau et sauterie dans l'appartement d'Ulysse ! Histoire de se recentrer et de profiter.
Regardez moi ce soleil, ce ciel bleu, ces papillons qui virevoltent, cette pelouse si verte, ces oiseaux chantant : une bonne journée d'été comme on les aime. Moi, mon milkshake de l'auberge de Kaffa, le parc désert... Tout. Est. Parfait ! Qui peut donc s'approcher de moi et me dire...
— Ne vous retournez surtout pas ! me chuchote alors quelqu'un dans mon dos.
— Pardon ? C'est à moi que vous parlez ?
Depuis quand il y a-t-il une personne derrière moi ? J'étais seul en arrivant ici...
— Ne bougez pas vous dis-je ! Continuez à regarder devant vous !
— Euh... D'accord... Et est-ce que je peux au moins savoir ce que vous me voulez ?
— Où est la mallette ?
— La... Mallette ? Je...
— Ne jouez pas au plus con avec moi ! Contentez-vous de répondre à ma question !
À en juger par le timbre de sa voix, cette personne est une femme. C'est étrange... Elle porte un parfum qui ne m'est pas inconnu... Pomme-cannelle ?
— Répondez-moi et arrêtez de marmonner !
— Ecoutez, la mallette, je ne sais pas où elle est ! Je vous le jure !
— Ne me mentez pas, sinon je serai contrainte de vous faire du mal.
Au moment où elle prononce ces mots, une pression étrange se fait ressentir en bas de mon dos. Qu'est-ce que c'est ? De là où je suis, ça va être difficile de savoir... Mais... On dirait qu'elle a plaqué sa main contre moi... Qu'est-ce qu'elle fait celle-là ? Qui c'est encore cette folle ?! Et pourquoi je commence à avoir très chaud là où elle me touche ? Est-ce que je vais mourir ? Ça sera mon épitaphe ! Non ce n'est pas le moment Albert !
— Si vous tentez quoi que ça soit, me dit-elle encore plus menaçante. Je vous neutraliserai avant même que vous ayez eu le temps de prononcer votre nom, Albert.
— Je vous jure sur la tête de mon PÈRE que je ne sais pas où est cette putain de mallette !
Mais merde, comment connait-elle mon nom ? Vais-je lui dire que tata Sylvie était la dernière personne à avoir eu la mallette entre les mains ? Je pense que la vraie question que je dois me poser c'est : de qui ai-je le plus peur... Et la réponse est simple : à l'heure actuelle, cette dame qui se trouve derrière moi est beaucoup plus... Dangereuse... Oui mais je ne vais pas l'envoyer chez tata Sylvie, qui sait de quoi elle serait capable... Ou plutôt, de quoi ELLES SERAIENT capables ! J'ai l'impression qu'elles sont toutes les deux aussi folles l'une que l'autre ! Si ça se trouve elles vont bien s'entendre...
— Je vais vous le demander une dernière fois, et faites très attention à votre réponse. Si jamais je me rends compte que vous m'avez menti, vous pouvez dire adieu à tout ce à quoi vous tenez dans votre misérable petite existence. Quand vous aurez perdu tous les êtres qui vous sont chers, je vous traquerai jusqu'à ce que vous me suppliez de vous tuer, et c'est là, seulement quand vous n'aurez plus aucune seule once d'espoir, que votre véritable descente aux enfers commencera...
— Je... Je vais tout vous avouer ! Comme je vous l'ai dit, je ne sais pas où est la mallette, mais je connais la personne qui l'avait en dernier !
Que Dieu me pardonne , car je suis faible.
— Continuez, vous m'intéressez...
— Je vais vous le dire, mais avant promettez-moi que vous n'allez rien lui faire...
— Pensez-vous vraiment que vous êtes position de pouvoir négocier, Albert ? Dites-moi immédiatement qui est cette personne !
Et merde ! Vite Albert, trouve quelque chose ! Tu ne peux pas balancer tata Sylvie comme ça...
— Je... Je... Je ne connais pas son nom !
— Décrivez-la moi dans ce cas.
— C'est un homme, euh... Il est vieux... Cheveux blancs... Il a une cicatrice sur la joue gauche, c'est tout ce que je sais... Mais il m'a donné sa carte ! C'est dans ma poche, est-ce que vous me permettez de vous la donner ?
— Faite mine de la faire tomber et dans cinq minutes allez vous en et rentrez chez vous.
Je m'exécute et suis à la lettre ses instructions. Plus que quelques minutes et je serai enfin libéré de ma tortionnaire ! Oh mais comment est-ce que ça peut m'arriver sérieusement ?! Est-ce que c'était vraiment une bonne idée de lui donner la carte de J ? Sûrement pas. Le temps qu'elle le trouve, je pense que j'ai un peu de marge... mais de la marge pour quoi ? Je n'ai aucun plan ! Et quand elle va découvrir le pot-aux-roses... Elle va s'en prendre à moi, et peut-être même aux autres ! Il faut absolument que je les prévienne... Si ça se trouve, je viens tout bonnement de les condamner à mort !
— Arrêtez de marmonner, vous allez attirer l'attention sur vous, soupire-t-elle. Si vous vous inquiétez pour vos proches, laissez-moi vous rassurer.
— Me rassurer ?! Vous venez de me menacer moi et toute ma famille d'une chose que je n'ose même pas imaginer ! Comment voulez vous que je vous crois ?! Et puis vous faisiez quoi avec votre main-là, dans mon dos ?!
— Je ne vais rien leur infliger, continue-t-elle. Je n'ai ni le temps ni l'envie. Trop de gens ont déjà assez souffert... Je savais très bien que vous alliez tout me dire sous la menace... Partez maintenant !
En me levant, je ne peux m'empêcher de jeter un œil par dessus mon épaule. Je ne réussis qu'à l'entrevoir très rapidement, de peur qu'elle ne me regarde également. Mais c'est belle et bien une femme, je dirais qu'elle a entre 25 et 30 ans... Son visage a comme un air familier... Étrange... Elle a l'air encore plus exténuée que moi, ses cernes en disent long. Bordel, sa tête me rappelle vraiment quelqu'un mais je n'arrive pas à savoir qui ! Ses yeux... Ce bleu... Mais où est-ce que je les ai vus ? Albert concentre-toi, c'est peut-être une information cruciale...
Bon ça me reviendra sûrement plus tard... Il faut que j'avance. Je n'ai pas le temps de trainer, je dois vite prévenir les autres. Attendez... Si ça se trouve elle est en train de me suivre parce qu'elle a vu clair dans mon jeu ! Retourne-toi juste deux minutes, allez ! Mais... je suis paralysé par la peur... Oh et puis merde ! Si je dois mourir aujourd'hui, alors autant mourir avec dignité ! PUTAIN ! Elle est restée à côté du banc ! Elle... Elle me surveille ? Je sais qu'elle me regarde et je sais qu'elle sait que je le sais. Oh mais c'est pas possible, je rencontre beaucoup trop de gens étranges en ce moment, qui mettrait un accoutrement pareil en plein été ?! À quoi ce long manteau de cuir peut-il bien lui servir ? A se cacher ? Mais de qui ? De quoi ? Me voilà reparti dans la peau de l'inspecteur Albert ! Imbécile, tu crois vraiment que tu as le temps pour ça ?! Sors de ce parc et vite, elle n'a pas l'air décidée à te suivre... Pourtant... J'ai bel et bien l'impression que tout le monde me regarde... Ça y est je deviens paranoïaque... Qu'est-ce qu'ils ont tous à me toiser comme ça ?! Quoi ? Vous n'avez jamais vu une personne marcher vite ?
— Monsieur, vous allez bien ? Me demande un homme aux cheveux poivre-et-sel.
Pas le temps de te répondre mon gars, il est peut-être possible qu'en ce moment même, ma famille se fasse torturer par la veuve noire au yeux cernés, alors NON, je ne vais pas bien ! Mais non pauv' con, ce n'est pas possible, elle ne peut pas se téléporter et ça ne fait même pas cinq minutes que tu as quitté le parc ! Mon coeur bat la chamade, si je cours, je vais avoir un point de côté, mais d'un côté je ne peux pas me permettre de perdre encore plus de temps ! Ok c'est décidé, quand toute cette histoire sera terminé - et si je m'en sors indemne - je jure devant tous les Dieux que je vais me remettre au sport !
Il faut que je me rende chez tata Sylvie. Elle doit savoir ce qu'il se passe ! Après tout, c'est bien elle qui s'est débarrassée de cette PU- fichu mallette ! Pas le temps de la prévenir,, je cours vers chez elle.
Arrivé à son étage, mon cœur est en train de jouer un solo de batterie digne des plus grands batteurs que l'histoire de la percussion ait jamais connu. S'il continue comme ça, je vais me retrouver avec des bleus sur le plexus... Pas le temps de reprendre mon souffle, voilà sa porte, et dire que la dernière fois que je suis venu ici, c'était pour y entrer par effraction... Pas la peine de toquer, elle a intérêt à être là l'autre folle ! J'ouvre la porte sans ménagement et politesse, et mes yeux tombent sur...
— Pa... Papa ?! Mais qu'est-ce que tu fais là ?
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