Retour sur Terre.

J'ouvris les yeux avant de les refermer. La lumière était aveuglante et j'avais des difficultés à faire la mise au point. Je me redressai faiblement, tentant de remettre mes idées en place. Je pris appui sur mes mains et sentant de l'humidité sous mes doigts, j'ouvris de nouveau les yeux. Je m'habituai petit à petit à l'éclatante lueur qui émanait du ciel. Je regardai autour de moi et me rendis compte que j'étais dans un parc, allongé dans l'herbe bien verte et surtout bien humide de rosée.

Ma tête me paraissait lourde, et en y réfléchissant, en fait, tout mon corps me semblait lourd, comme lesté d'un poids supplémentaire. J'en éprouvai une certaine gêne, mais rien d'incommodant.

Je décidai de me lever, je ne pouvais décemment pas rester là, étendu dans l'herbe recouverte de son humidité matinale. Une fois debout, je tentai quelques pas, testant avec succès la gravité terrestre. Je m'étirai, détendant tous mes muscles et repensai à la veille.

Mon père avait donc choisi de me punir ainsi. Je comprenais sa position, mais m'envoyer sur Terre ? Il aurait pu trouver autre chose, une punition qui me permettait de rester chez nous.

Je regardai aux alentours, tentant d'apercevoir la sortie du parc. Je la distinguai à peine, derrière les hauts arbres. Les couleurs me paraissaient vives, bien plus vives que ce que je pouvais apercevoir du nuage. Le frémissement du vent dans les feuilles vertes m'offrait un ballet infini, une œuvre éternelle que j'appréciai dans toute sa splendeur, ici, seul, dans ce parc. Je commençai à marcher en direction de la sortie et ce faisant, je fouillai les poches de mon pantalon. J'y trouvai un bout de papier. Je me doutais bien que mon père, Dieu, n'allait pas me laisser sur Terre sans plus de précisions.

Mon Cher Athanios,

Ne prends pas cet exil comme une punition. Prend-le comme une nouvelle mission, mission qui me prouvera ta valeur et ton envie de gouverner dans la paix et le respect. Je sais que tu en es capable. Tu es mon Fils et je suis fier de toi, mais il faut que tu grandisses pour la suite.

Tu te dois te retrouver cette âme esseulée. Elle a investit un corps et elle se trouve dans cette ville. Je peux l'apercevoir d'ici.

Réam t'aidera. Sur Terre, il sera ton père de substitution. Apprends à le connaître, c'est une personne sensée et avisée. Je vous ai inscrit dans l'université de la ville, choisis ta filière, profite un peu de ton passage sur Terre pour (re)découvrir la vie humaine.

Dans la poche de ta veste, tu trouveras la clé de votre maison. Réam connaît l'adresse.

Je te laisse commencer ta mission.

N'oublie pas, tu as un mois.

Je t'embrasse.

D.

J'en lâchai la lettre de frustration et de colère. Je n'avais retenu que le principal : Réam comme père de substitution et l'université. Tout ça à cause d'une malheureuse âme alors qu'il y en avait des milliers en Enfer. Je maudis mon père intérieurement. C'était vraiment une punition, pas une mission comme il voulait me le faire croire.

Je serrai les poings et repris ma route. Dans la poche de ma veste, je trouvai bien évidemment la clé de ma maison. Et de celle de Réam. Mon nouveau père.

Je grimaçai et sortis du parc sans avoir trouvé Réam. J'avais le sentiment que toute cette affaire allait mal tourner.

- Dieu Athanios ?

Je me tournai vers la voix et aperçut Réam dans une vieille voiture blanche ou plutôt grisâtre. Il avait la tête de quelqu'un qui vient de se réveiller après une mauvaise nuit. La fenêtre ouverte, il s'appuyait sur le rebord pour m'interpeller.

- Dieu Athanios ?

- Réam ! Si vous m'appelez encore une fois Dieu, je ne réponds plus de rien ! Bon sang, nous sommes sur Terre, si vous continuez à m'appeler Dieu, que pensez-vous qu'il se passera ? Je vais vous le dire, nous finirons enfermés en clinique psychiatrique jusqu'à Dieu sait quand !

J'étais vraiment énervé à ce moment-là, et cela s'en ressentait dans ma voix qui s'amplifia jusqu'à finir dans un cri.

- Di... Hum ! Athanios, je vous prie de m'excuser pour tout ce qui s'est passé. J'aimerais que nous repartions sur de bonnes bases, si vous êtes d'accord bien sûr.

- Vous ne serez pas mon père, lui répondis-je. Je n'ai qu'un père et c'est Dieu.

- Euh... Oui, bien évidemment.

Réam me considéra d'un air de profonde perplexité. Je soupirai avant d'entrer dans la voiture.

- Mon père m'a laissé un mot. Comme quoi vous serez mon père de substitution pendant cette punition. Mais je ne veux pas. Vous serez mon oncle. Et ne pensez pas que je vous mets à l'égal de Dieu. Vous n'êtes pas son frère. Juste mon oncle.

Je commençai à m'embrouiller dans mes explications et cela me rendit encore plus grognon qu'auparavant.

- Votre père m'a aussi laissé un mot, me dit Réam. Je veux bien être votre oncle, si cela vous arrange. Vous a-t'il parlé de mon poste à l'université ?

- Non, rien d'autre à part que vous connaissez l'adresse de notre maison et que j'en ai les clés, lui répondis-je d'une voix plus calme.

- Permettez-moi Athanios, mais si je suis votre oncle et que vous continuez à me vouvoyer et que je fais de même, notre couverture sera vite grillée. Je propose que nous nous tutoyions. Et pour mon poste à l'université, je serai le nouveau professeur de sciences.

- Très bien. J'éviterai donc soigneusement toutes filières comportant vos cours. Tes cours, rectifiai-je, légèrement irrité.

- Cela me convient. Tu veux qu'on aille jeter un coup d'œil à notre maison ? Nous pourrions aussi aller voir l'université.

Je remarquai, non sans une certaine exaspération, la facilité avec laquelle Réam m'avait tutoyé. Qu'il ne prenne pas cette mauvaise habitude.

- Allons-y, grognai-je.

Réam démarra et après avoir roulé sur plusieurs kilomètres, il se dirigea vers une petite ruelle sombre et étroite.

- C'est là ? Demandai-je d'un ton surpris. Dans ce trou à rats ?

- Apparemment, oui. Bienvenu à la maison, ajouta Réam sarcastique.

Je sortis en trombe de la voiture et ouvris la porte de notre maison. Quelle ne fut pas ma surprise en pénétrant à l'intérieur. Si l'extérieur paraissait assez miséreux et délabré, le foyer dans lequel je venais d'entrer, était incroyable. Le hall d'entrée donnait sur un salon immense et lumineux relié à une cuisine aménagée. Un escalier en bois blanc menait à l'étage et aux deux chambres spacieuses et agréablement décorées. Chaque chambre disposait de sa propre salle d'eau.

Je remerciai mon père d'avoir tout de même songé à mon confort avant de m'affaler sur mon lit. J'avais choisi d'office ma chambre sans en parler à Réam. Justement, celui-ci venait d'apparaître, adossé au chambranle de ma porte.

- Pas mal, hein ? Ton père est très généreux. Je lui suis gré de nous loger dans une maison aussi spacieuse.

- Oui, il n'allait pas laisser son fils vivre dans un taudis, lui répondis-je d'un ton sec.

Réam soupira. Je savais que je devais faire un effort mais c'était difficile pour moi, je ne supportais pas ce dieu mineur. Par sa faute, je me retrouvais dans une situation qui était loin, très loin de me plaire.

- Allons visiter la ville. Nous finirons par l'université afin que tu puisses t'inscrire et que je puisse prendre mon poste. Il doit y avoir des papiers à remplir.

L'université. Retourner sur les bancs de la fac. Je ne savais pas si dans mes autres vies j'étais souvent passé par la case études mais j'étais tout de même curieux. Quitte à être ici, bloqué sur Terre, autant essayer de me souvenir de certains moments de mes anciennes vies. Peut-être serai-je surpris.

Je soupirai (cela allait devenir une habitude) avec la désagréable impression que rien ne se passerait comme prévu. Bien que rien ne soit prévu justement.

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