❦ Chapitre 15. ❦

Kakashi était complètement épuisé. Danzo l'exploitait à son maximum quand il était à la maison. Ajouté à une lourde journée d'école et à la violence gratuite à laquelle il avait droit, son corps ne suivait plus la cadence. Il avait de plus en plus de mal à se lever le matin. Dans la journée, il ne réussissait plus à garder les yeux ouverts et l'esprit concentré sur ce qui l'entourait. La veille, il n'avait rien vu du trajet du lycée à la maison. Il était rentré dans une sorte de transe et n'en était sorti qu'une fois face à l'homme. Le voir en colère lui avait donné envie de pleurer. Les coups qui suivirent l'avaient vivement réveillé de son était robotique.

Il ne comprenait pas tout ce qu'il disait mais le mot "sport" et le nom de son professeur étaient les seuls éléments dont il avait besoin pour savoir pourquoi il était puni à nouveau. Ils n'avaient pas reçu son bulletin, il avait espéré qu'ils ne l'obtiendraient jamais parce qu'il savait pertinemment qu'il serait écrit, dans les commentaires, qu'il séchait les cours. Le ciel n'était pas avec lui apparemment.

Il avait clairement senti la punition. Le coup de grâce avait été la visite des services sociaux. Enfin, s'il pouvait les appeler comme ça. Comme tout le monde, ils avaient été achetés par les amis de Danzo. Ils ne lui avaient même pas adressé la parole, ils s'étaient contentés de rire et d'échanger des anecdotes. Ils avaient apparemment été contactés par un officier de police très affluant dans cette ville.

Bien sûr, Kakashi avait une petite idée de qui était derrière tout cela mais il ne voulait pas y croire. Il lui avait fait confiance même s'ils s'étaient éloignés. Ce serait le pire coup bas que de se mêler de ses affaires alors qu'il avait promis qu'il ne ferait rien. Le garçon soupira et se concentra sur la vaisselle qu'il nettoyait. Le monde autour de lui était flou et bougeait sans arrêt. Il était tellement épuisé que ses yeux n'enregistraient plus grand chose.

Si un mouvement était trop rapide, il ne le verrait même pas. Il n'arrivait même plus à suivre les cours ou à retenir ce qu'il essayait de réviser. Ses dernières notes avaient été plus basses que d'habitude et il avait intérêt à les faire remonter. Danzo était plutôt strict vis-à-vis de la réussite scolaire, que ce soit pour ses garçons ou lui.

Il ne savait pas si c'était pour son estime personnel ou un geste inconscient de bienveillance. Kakashi n'y croyait pas une seconde. L'homme voulait sûrement qu'il ne lui attire pas d'ennui et, au contraire, des compliments par les professeurs pour son éducation irréprochable. Quelle bonne blague.

En tout cas, ce soir, il avait prévu d'aller dormir tôt. S'il ne se reposait pas un peu, il allait s'effondrer à un moment donné et ce ne serait certainement pas une bonne chose, il en était certain.

*

"Encore en train de travailler ?"

Madara grogna simplement. Il était fatigué et un mal de tête ne le quittait plus depuis deux jours. Il n'avait certainement pas envie de bavarder avec son collègue aussi tard, surtout si c'était encore pour se prendre des reproches dans la figure. Il avait besoin de rester concentré et ne pas être distrait de quelque manière que ce soit.

Après quelques minutes de silence, l'autre n'avait toujours pas bougé et ça l'agaçait. Il était pourtant facile de comprendre, avec tous les dossiers qu'ils avaient à traiter en ce moment, qu'ils avaient énormément de travail. C'était donc normal que certains, comme lui, fassent des heures supplémentaires les soirs où ils n'étaient pas de service. Et puis d'abord c'était son problème, pas le sien.

Alors il ne pouvait plus le supporter.

"Hashirama, ta femme t'attend."

Il ne voulait pas être aussi agressif dans sa façon de parler mais... En fait, si. Ce connard le méritait.

"Pas de chance pour toi, elle est de garde à l'hôpital ce soir."

Madara ne supportait pas ce ton léger qu'Hashirama prenait tout le temps. La tension entre eux semblait toujours présente depuis plusieurs années. Le grand Uchiha avait déjà demandé à être muté mais ses supérieurs s'amusaient de leur situation. Le contrat dans une autre ville qu'ils lui promettaient était toujours repoussé et aujourd'hui, il ne s'en préoccupait plus.

Il lui était arrivé d'autres péripéties entre temps et même si sa relation avec le Senju l'avait profondément touchée, il avait su faire face et la supporter.

Peu de temps après leur rupture, sa sœur avait disparu et Obito s'était subitement inséré dans sa vie, lui prenant tout son temps et toute son attention. Il n'avait pas eu le temps de s'apitoyer sur son sort. Il devait rendre hommage à sa sœur et s'occuper de son fils comme il le fallait.

Avoir un enfant était épuisant de tous points de vue. Il réclamait ses parents ou pleurait et Madara ne savait pas comment s'y prendre. Heureusement, sa propre mère était là et l'aidait malgré son âge avancé et son propre chagrin. Leur famille était peu ordinaire mais il ne l'échangerait pour rien au monde. Ils étaient trois âmes blessées qui se réconfortaient entre elles.

Aujourd'hui, il devait aider son neveu, presque son fils de substitution, avec le garçon battu. Il n'avait pas le temps de blablater avec Hashirama.

"J'ai du travail, si cela ne te dérange pas.

-Tu travailles trop, dit l'homme aux longs cheveux lisses, tu devrais vraiment rentrer et passer du temps avec ta famille. Je suis sûr qu'Obito en serait ravi.

-C'est justement pour lui que je suis encore ici," lâcha Madara entre ses dents.

Il ne voyait pas de quoi l'autre se mêlait. C'était son problème, sa famille. Lui-même n'avait toujours pas réussi à engrosser sa femme. Il était donc très mal placé pour parler de ce qui était bon ou non pour une famille. Bien sûr, l'autre homme ne voulait pas lâcher l'affaire. Il se penchait au dessus de son épaule pour lire les documents qu'il tenait dans les mains.

C'était le rapport des services sociaux qu'il lisait encore et encore. Quelque chose clochait mais il n'arrivait pas à mettre la main dessus. Il avait essayé de contacter les agents mais ils lui répondaient toujours la même chose et finissaient par l'envoyer paître. Il cherchait comment il pourrait envoyer une de ses propres équipes pour intervenir. Il ne faisait pas confiance aux services sociaux.

D'après ce qu'Obito lui avait dit, ce n'était pas normal. Les deux témoignages étaient en totale contradiction. Il pourrait se rendre directement sur place pour voir de lui-même mais il n'avait pas le droit sans procédure. Peut-être qu'il pourrait faire semblant de sonner chez les gens du quartier pour demander s'ils avaient vu un animal perdu. Avec de la chance, il verrait le gosse.

Avant que Madara ne puisse dire quoi que ce soit, il tira la chaise du bureau adjacent et s'installa à côté de lui.

"Aller, explique moi. Je vais t'aider."

Le Uchiha borné pouvait très bien l'envoyer bouler mais ne le fit pas. Peu importe ce qu'il disait, il voulait rentrer chez lui et dormir le plus tôt possible.

*

Obito regardait son oncle avec un léger malaise. Depuis qu'il s'était levé ce samedi matin, l'homme ne le lâchait plus et lui expliquait plusieurs fois comment ils pourraient aider Kakashi à s'en sortir. Plus il lui répétait la marche à suivre, plus ses tripes se contractaient désagréablement. La promesse faite au gris était fragile, fissurée comme de la porcelaine sur laquelle on exerçait une certaine pression. Plus le temps passait, plus cette pression augmentait et ce n'était plus qu'une question de temps avant qu'elle ne soit brisée.

Cette idée le révoltait. Il tenait toujours ses promesses, il était un garçon honnête sur lequel on pouvait compter. Cela le blesserait beaucoup s'il devait en rompre une. En même temps, il était tiraillé à l'idée de laisser Kakashi vivre cette vie d'enfer. Même s'il était un idiot trouillard, il ne méritait pas ce qui lui arrivait et le brun s'était bien trop attaché à lui pour supporter l'idée qu'un vieux dégoûtant porte la main sur lui.

Il lui avait toujours assuré qu'il n'y avait rien de plus mais c'était toujours dans ces situations qu'il y avait des abus sexuels. Punaise, si cela devait lui arriver alors qu'Obito était conscient de sa détresse, il ne s'en remettrait jamais.

Ces deux pensées divergentes le rongeaient depuis le mois dernier. Avant, il pensait simplement que ce n'était que quelques coups par-ci, par-là, comme les parents punissaient leurs enfants durant la génération précédente. Cependant, lorsqu'il avait vu la gravité des choses, les images ne le lâchaient plus et le dilemme tournait en boucle dans son esprit. Était-il prêt à perdre toute la sympathie et le respect de Kakashi pour son bien être ?

C'était peut-être évident pour certaines personnes sensées mais pour lui, c'était une réponse impossible à trouver. Bien sûr qu'il ne voulait que son bien-être mais de là à ruiner toute relation entre eux ? Il ne s'en pensait pas capable pour l'instant.

Leur séparation avait été compliquée pour lui, ne pas le voir et ne pas savoir ce qu'il faisait lui rongeait les entrailles. Il avait vu rouge lorsque Hidan et Kakuzu lui avaient parlé de l'agression dans la ruelle. C'était un miracle qu'il ne soit pas sorti pour se défouler. Et maintenant, pour dieu sait quelle raison, il n'avait plus aucune nouvelle. Le gris l'évitait et même son groupe d'amis était ignoré en classe. Au moins, il venait au lycée.

Alors oui, il voulait l'aider. Il voulait même le faire sortir de là par lui-même, lui offrir sa maison comme un lieu de sécurité. Son oncle était prêt à l'aider, peut-être parce qu'il était touché par l'histoire ou parce qu'il voulait montrer à Obito qu'il tenait toujours à lui, peu importe le peu de temps qu'ils passaient ensemble. Quoi qu'il en soit, Madara lui avait exposé ses idées, c'était à lui de décider s'il devait en parler à Kakashi ou non.

Le stress le déchirait tellement qu'il pensait qu'il se séparerait bientôt en deux mentalement.

Il soupira et retourna dans sa chambre. Les cartes étaient entre ses mains, c'était à lui d'agir maintenant. L'un des problèmes était que Kakashi ne répondait plus aux messages. C'était encore plus angoissant parce qu'il ne savait pas s'il l'ignorait, s'il avait été pris avec le téléphone ou s'il n'avait simplement pas l'occasion de s'en servir.

Toute cette histoire allait le tuer, il avait déjà l'impression de voir quelques cheveux blancs parmi la masse noire sur son crâne.

Il s'installa à son bureau et sortit son téléphone portable pour voir son fil d'actualité sur les réseaux sociaux. Il perdait beaucoup de temps avec ça parce qu'il ne le voyait pas passer mais cela lui permettait de se détendre, d'oublier un peu son quotidien. Il s'arrêta devant une publication de Gai. Gai... Ce type était bizarre. Il n'interagissait pas beaucoup avec lui et le fait qu'il lui demande le numéro de Kakashi l'avait dérangé. Maintenant, cependant, il pouvait y voir un intérêt.

Avec un soupir, il lui envoya un message pour lui demander si le gris lui répondait lorsqu'il lui envoyait des messages. Il ne savait pas comment il réagirait si Kakashi répondait à Gai mais pas à lui. Ce serait blessant... Obito n'avait jamais rien fait contre lui, hormis parler de sa situation à son oncle. Il ne pouvait pas savoir que c'était son oncle qui avait envoyer les services sociaux à sa porte, si ?

S'ils étaient aussi louches que Madara le disait, il y avait en effet des chances pour que les complices aient parlé de lui au tuteur. Intelligent comme il l'était, le jeune adolescent aurait facilement fait le lien entre eux.

La vibration du téléphone le sortit de ses pensées : Gai venait de répondre. Apparemment, lui non plus n'avait pas de nouvelles et cela l'inquiétait. Obito sourit. Peut-être qu'il avait trouvé un allié dans cette histoire.

*

Obito savait qu'il pouvait compter sur Gai. Le garçon, toujours à l'affût de tout, semblait avoir un radar à Kakashi dans le cul. Ils avaient à peine mis un quart d'heure à le trouver alors que même son groupe d'amis n'y arrivait pas. Peut-être qu'ils n'y avaient pas mis d'efforts non plus et, dans un sens, il ne pouvait pas leur en vouloir. Il était proche de Kakashi, pas eux. S'ils ne voulaient pas perdre leur temps pour ces broutilles, c'était leur droit.

Revoir le gris lui donnait un sentiment étrange dans le ventre, bien qu'un peu différent des papillons qu'il ressentait habituellement. Il y avait sûrement du soulagement et de l'appréhension. Le garçon leur tournait le dos et il n'eut pas le temps de réagir en entendant Gai approcher. Ce dernier lui avait littéralement sauté dessus en hurlant qu'il ne lui échapperait pas.

Le teint pâle de Kakashi s'embrasa tandis qu'il le laissait l'entourer de ses bras forts. Vu la maigreur de sa taille et les cernes autour de ses yeux, essayait de le faire lâcher ne servirait à rien tant il manquait de force. Il fallait déjà avoir une bonne santé physique pour espérer être du niveau de l'adolescent surexcité mais avec sa faiblesse, il était évident qu'il se blesserait tout seul. Alors il s'était résigné.

C'était presque désolant à voir et le regard que Kakashi lui lança en le remarquant l'était encore plus. Obito avait peur qu'il soit dégoûté, énervé... Mais il ne s'attendait pas à ce qu'il ait peur. Il n'avait pourtant jamais élevé la voix ou porté la main sur lui ! Il sentit une vive douleur au cœur mais décida de l'ignorer pour l'instant. Il avait l'impression que son temps avec le gris serait limité alors il n'avait pas le temps de s'attarder sur des détails qui portaient sur lui-même.

Heureusement qu'il n'y avait presque plus personne dans le couloir.

"Kakashi ! Dit Gai en le tenant à bout de bras. Pourquoi m'ignores-tu ? Est-ce que quelque chose ne va pas ?"

Le regard fuyant de l'adolescent pris au piège exaspérait Obito mais il se retint de faire ce commentaire. Il était sûr que Kakashi se vexerait pour de bon et qu'ils auraient beaucoup de mal à lui adresser la parole ensuite.

"C'est bon, Gai. J'ai seulement cassé le téléphone et je n'ai pas pu en récupérer un."

Le brun trop sportif semblait accepter cette excuse boiteuse mais le Uchiha voyait clair dans son jeu. Le téléphone n'avait rien du tout. Il ne savait pas comment l'expliquer mais il en était sûr. Le gris serait plus mortifié sinon. Gai le relâcha et, avec un hochement de tête vers lui, il s'éloigna. Cela faisait partie de leur petit arrangement. Obito s'occupait de lui parler et, après cela, il irait lui faire un débriefing. Il n'avait pas compris toute l'histoire mais apparemment le proviseur se doutait de quelque chose et leur faisait mener l'enquête. Il était temps.

Quand Gai leur tourna le dos, Kakashi semblait prêt à se sauver en courant. Instinctivement, Obito lui attrapa le poignet pour le garder près de lui. Le sursaut qu'il fit lui fit atrocement mal au cœur. Ses yeux s'adoucirent immédiatement et il s'approcha jusqu'à ce que leurs nez se frôlent. Le plus jeune tremblait mais il avait connu pire.

"Oh Kakashi... Ce connard t'en as fait baver ces derniers temps, n'est-ce pas ?"

Il ne savait même pas pourquoi il posait la question puisque la réponse était évidente. Jamais depuis septembre Kakashi ne s'était éloigné de quelqu'un par crainte. Il était plus faible que jamais et son regard était trop souvent perdu dans le vide. Cela le mit en colère. S'il le pouvait, il irait chez lui pour casser la gueule de ce Danzo.

Lentement, le gris hocha la tête et un malaise inexpliqué s'installa entre eux. Il était décidé à ne pas lui parler mais, à l'inverse, Obito avait beaucoup de choses à dire. Cela ne le dérangeait pas qu'il ne parle pas, à condition qu'il lui donne une réponse claire à la fin. Il se racla la gorge et l'entraîna à travers le couloir vers leur lieu privé : les toilettes du bâtiment B. Le jeune adolescent se laissait docilement conduire et Obito eut soudainement peur qu'il soit en état de choc.

Il ne parlait pas, son regard était trop souvent vide et il se laissait aller comme une poupée de chiffon. Qu'est-ce que ce connard lui avait fait, putain ?

Heureusement, le couloir entourant les toilettes était vide et Obito décida qu'ils pouvaient s'installer ici. Il lâcha la main fragile pour poser son sac et ôter son manteau, qu'il posa sur les épaules frêles. Kakashi réagissait à peine, il se laissait faire et le regardait. C'était déjà une bonne chose. Prenant une profonde inspiration, le brun l'attira contre lui avec l'excuse de le réchauffer. La vérité était qu'il avait besoin de trouver un peu de confiance et de profiter de leur proximité qui lui manquait.

"J'ai besoin de te parler, dit-il enfin. J'ai... Quelque chose à te proposer."

Au niveau de son menton, Kakashi fronça les sourcils. Génial, il avait aussi son attention. Il inspira de nouveau profondément et se lança.

"Mon oncle pense savoir comment te sortir de là."

Immédiatement, l'adolescent essaya de se dégager de lui mais Obito garda sa prise ferme. Ce n'était que la première chose qu'il avait à lui dire, il avait besoin qu'il écoute la suite.

"Il dit qu'il faudrait que tu filmes la scène... Qu'il y ait une preuve vidéo de la violence que tu subis. Je sais que c'est complètement dingue et insensé, moi-même je ne vois pas comment tu pourrais décider de lancer un enregistrement alors que tu es sur le point de souffrir."

Les côtes saillantes sous ses doigts lui donnaient la nausée mais il se concentrait pour garder le fil. Le corps entier de Kakashi s'était tendu, prêt à bondir loin de lui. Obito voulait lui avouer qu'il était la cause de la visite des services sociaux. Il ne restait plus que cela mais la boule dans sa gorge l'empêchait de parler.

Il savait que Kakashi allait broncher loin de lui et qu'il lui en voudrait jusqu'à la fin des temps. Il se sentirait trahi et Obito en serait profondément blessé. Mais il avait besoin de savoir, il devait connaître la vérité, surtout si cela lui avait causé du tort à la maison. Le brun savait qu'il avait merdé dans sa promesse mais, maintenant qu'il y avait réfléchi, il ne le regrettait pas. Il voulait l'aider, le sauver et pour cela, il fallait agir.

Il comprendrait cependant si Kakashi ne voulait plus le revoir après cela. S'il essayait de se dégager de ses bras, Obito le laisserait faire. C'était son choix, au final, pas celui des Uchiha. S'il refusait l'aide, ils pourraient toujours travailler dans l'ombre. Il savait qu'ils finiraient par trouver une solution et coincer tous ces salauds qui lui ont déjà fait du mal.

"D'après Madara, c'est la seule option qu'on ait aujourd'hui. Il sait déjà que les services sociaux qui sont allés chez toi ont été corrompus..."

Il l'informait subtilement mais le message était passé. Il admirait sa perspicacité depuis qu'il le connaissait.

Comme il s'y été attendu, Kakashi recula loin de lui et le regarda avec de grands yeux. Il y avait tellement de sentiments différents qu'Obito se perdait en eux. La douleur, la colère évidemment, mais aussi cette petite pointe d'espoir... C'était pour cela qu'il voulait se battre pour lui. Alors, avant qu'il ne puisse partir en courant ou prononcer un mot, il reprit en parlant rapidement.

"On ne peut pas leur faire confiance mais, s'il y a des preuves, Danzo sera jeté derrière les barreaux. C'est pour ça que mon oncle propose ce plan. Je sais que ça peut paraître dingue, moi-même je n'y croyais pas. Il soupira. Je le trouvais même idiot. Qui voudrait se filmer dans cette position ? D'ailleurs, comment être sûr que cela se passera à un endroit et à un moment précis ? Et comment le faire discrètement dans ta maison de fous ?"

Il baissa les yeux, incapable de le regarder en face. Son train de parole diminua et ce qu'il disait devint plus facilement compréhensible.

"Mais j'ai réfléchis. Tu sais, ce n'est pas si bête au final et à moins que tu n'appelles la police et qu'ils le prennent sur le fait, je ne sais pas comment nous pourrions faire."

Il s'arrêta un instant pour reprendre sa respiration. Son cœur battait tellement fort qu'il avait l'impression d'être secoué. Quand il posa le regard sur Kakashi, il était à peine surpris de voir qu'il n'avait pas bouger d'un pouce et qu'il le regardait avec une véritable horreur. Ça faisait mal d'être celui qui recevait ce regard. Obito se pensait fort mais, à cet instant, quelque chose en lui se déchirait.

"Danzo a tout le monde à sa botte. Je ne sais pas comment te sortir de là à moins de te traîner en sécurité chez moi mais tu ne veux pas. Sans ton consentement, on ne peut rien faire. Alors, s'il te plaît, réfléchis à l'idée. Ça me tue de te savoir constamment en danger."

Il coupa à nouveau le contact visuel et resta muet et immobile. Maintenant, tout reposait sur Kakashi.

"Tu... La voix craquelée traversa le silence. Tu n'as pas fait ça ..?"

Si Obito pensait avoir le cœur brisé, cette voix anéantie le broyait davantage. C'était de la douleur pure avec des larmes qu'il essayait vaillamment de contenir. Dans un autre contexte, il l'aurait pris dans ses bras et l'aurait encouragé à lâcher prise. Malheureusement, aujourd'hui, il en était la cause et il savait pertinemment que Kakashi ne le laisserait plus s'approcher de lui.

"Tu m'avais promis que tu ne dirais rien...

-Je sais, Obito se sentait désemparé, mais j'avais peur pour toi et Madara voulait bien m'écouter et tout est allé vite après ça...

-A cause de toi..."

Kakashi se tut soudainement et ne finit jamais sa phrase. D'un geste brusque, il retira le manteau et le lui rendit avant de s'éloigner en lui demandant de le laisser tranquille. Le brun savait pertinemment ce qu'il allait dire. Danzo avait été plus violent que d'habitude et c'était de sa faute. Obito avait voulu l'aider mais il l'avait fait souffrir et, pire que tout, il avait empiré les choses. C'était de sa faute. Maintenant qu'il était trahi, il ne reviendrait pas vers lui.

Désolé, le Uchiha partit retrouver ses amis d'un pas traînant. S'il avait su que tomber amoureux ferait aussi mal, il aurait fait en sorte de se tenir loin de Kakashi dès le début.

*

Il avait besoin de vite s'éloigner. Il avait l'impression d'étouffer, respirer était devenu un clavaire. Il était tellement pressé qu'il ne faisait pas attention à ce qu'il se passait autour de lui. Il se souvint vaguement de frapper l'épaule de Fû. Le garçon lui avait crié de faire attention, croyait-il. Il s'en fichait, il avait besoin d'air.

Obito... Il faisait confiance à Obito et cet idiot... Il préférait oublier cette histoire pour l'instant. Peu importe à quel point il se sentait énervé et attristé, il devait admettre qu'il n'avait pas tort. Toute personne sensée aiderait un gosse dans le même cas que lui. Il était juste trop égoïste pour l'accepter. Finalement, peut-être qu'il se plaisait dans sa situation, il avait beaucoup d'ouvertures mais les refermait toutes pour ne pas s'en sortir.

Les larmes montaient rapidement. Il avait beau essayé de tout caler dans un coin oublié de son cerveau, tout reviendrait à la charge peu de temps après, ne lui laissant aucun répit. Tout ce qui lui arrivait était sa faute, se répétait-il.

Un choc violent le fit soudain sortir de ses pensées sombres. Il avait été tellement aveuglé par la douleur qu'il n'avait pas remarqué Jiraya juste devant lui. L'homme était une montage, impossible à rater. Pourtant, il avait été assez bête pour se cogner contre son dos.

Il fit quelques pas fébriles en arrière pour se remettre du choc. Son nez été entré en collision avec son épaule et la douleur accentua l'humidité de ses yeux. C'était un miracle qu'aucune larme ne coulait. Les mains puissantes du professeur lui attrapèrent les épaules pour le stabiliser et, en même temps, l'empêcher de s'échapper.

"Kakashi ! Est-ce que ça va ?"

L'homme était vraiment inquiet, l'adolescent savait qu'il ne le laisserait pas partir. Il vérifia la main avec laquelle il tenait son nez et soupira de soulagement en voyant qu'il n'y avait aucune trace de sang. Le battement de douleur diminuait peu à peu. Son corps était assez douloureux, il n'avait pas besoin d'en rajouter.

"Oui... C'est bon."

Maudite soit cette voix tremblante. L'adulte le regardait attentivement pendant une seconde puis le guida dans sa salle de classe vide. Kakashi se tendit. A chaque fois qu'ils venaient ici pour s'isoler, il en ressortait avec des émotions débordantes. Avec l'aveux d'Obito, il ne se sentait pas capable d'en supporter plus. Dieu, ce serait tellement honteux de pleurer devant un professeur ! Il lui désigna un siège et il s'y assit sans commentaire. Au moins, les fenêtres étaient ouvertes et même s'il faisait froid, il pouvait respirer librement.

Jiraya retourna une chaise et s'assit face à lui, une tasse de café dans les mains. La basse température ne semblait pas l'atteindre alors que le gris tremblait déjà. Quand il proposa de fermer les fenêtres pour qu'il se réchauffe, il refusa. Il avait prévu d'aller dehors de toute façon. Il y ferait aussi froid qu'ici.

Le silence les engloba quelques minutes de plus jusqu'à ce que la sonnerie retentisse. Kakashi était sceptique. Il se demandait pourquoi son professeur l'avait fait venir et lui avait demandé de s'asseoir si c'était pour rester muet. Il toussa inconfortablement et commença à se lever quand l'homme secoua la tête.

"Reste, s'il te plaît. Je te ferai un mot d'excuse pour ton retard."

Encore plus intrigué, Kakashi se rassit. Les bruits dans les couloirs diminuaient jusqu'à ce qu'ils n'entendent plus que les professeurs parler à travers les murs. La seule raison pour laquelle il ne gesticulait pas sur sa chaise était parce qu'il préférait économiser ses mouvements pour ne pas tirer sur ses muscles endoloris.

"Je voulais savoir comment tu allais, dit enfin Jiraya, même s'il est assez évident que tu ne vas pas bien."

Kakashi se tendit mais ne dit rien. Cela ne servait à rien de nier les faits. S'il le faisait, Jiraya ne le croirait pas. S'il lui faisait comprendre qu'il avait raison, il ne le lâcherait pas. Il préférait donc le laisser dans le flou.

"Surtout, il reprit, je voulais savoir comment tu digérais la nouvelle."

Le gris fronça les sourcils.

"La nouvelle..?"

Maintenant, c'était au tour de l'homme de le regarder sans comprendre. La situation était devenue tendue et il réfléchissait sérieusement à une meilleure façon de le formuler. Quoi qu'il en soit, quelque chose n'allait pas, il en était certain maintenant. Il s'éclaircit la gorge et bougea sur son siège.

"Tu sais, pour ton père."

Tous ses problèmes avec Obito disparurent soudainement de son esprit. Son père ? Il parlait de son père ! Son corps devint tellement rigide que respirer devenait difficile. Il devait forcer son diaphragme à fonctionner mais avec tous ses muscles contractés, c'était douloureux. Les larmes qui se formaient à nouveau lui brûlaient sévèrement les yeux mais il n'y en avait pas encore assez pour qu'elles coulent.

"Comment ça, mon père ? Qu'est-ce qu'il se passe ?"

A cet instant, Jiraya comprit qu'il avait certainement fait une erreur. Il n'était pas au courant de ce qui arrivait actuellement à l'homme et peut-être que Danzo le lui cachait pour une bonne raison. Il réfléchit rapidement et, finalement, ne regrettait pas de l'avoir fait. Le gamin était en droit de savoir, bon sang ! Il prit une profond inspiration pour se calmer. La situation n'était pas si mal mais la réaction du gamin l'inquiétait beaucoup.

"Danzo ne t'en a pas parlé ? Ton père a été retrouvé et ils l'ont rapatrié dans une clinique à quelques heures d'ici. Ils s'occupent très bien de lui, ils pensent qu'il pourra rapidement recevoir de la visite."

Tout autour de Kakashi disparut, même Jiraya. Il avait l'impression que l'on venait de lui jeter tout un tas de briques sur la tête. Son père, l'homme qui partageait son sang, qui l'avait laissé à Danzo et disparu en mission il y a dix ans, qui avait été déclaré mort depuis plusieurs années était en fait... En vie.

Sans qu'il ne sache pourquoi, la panique le prit et respirer devint juste impossible. Impuissant, il se cramponnait de toutes ses forces au devant de son sweat. Le paysage flou tournait tout autour et se refermait sur lui comme un piège infernal. Jiraya l'avait attrapé par les épaules et le secouait. Il parlait, c'était assez frénétique, mais il ne comprenait rien. Tout ce qu'il pouvait voir distinctement était une image de son père, en tenue de combat, sur le quai de la gare et prêt à partir.

Jiraya le gifla soudainement, assez fort pour le faire revenir dans le présent. Il haletait et ses joues étaient complètement humides. Ses larmes avaient donc fini par couler. Devant lui, le professeur était blanc comme un linge. Kakashi devinait qu'il n'était pas mieux.

"Merde, gamin, je pensais que ça te ferait du bien d'en parler. Je n'imaginais pas que tu m'aurais fait une crise d'angoisse..."

L'homme était clairement inquiet. Lentement, Kakashi essuya les traînées d'eau sur son visage et lui demanda un grand nombre d'explications. Jiraya semblait connaître beaucoup de choses sur son père, il se détestait de ne pas l'avoir approché avec ce sujet plus tôt. Le nom de Danzo clignotait en rouge dans son esprit mais il l'ignorait. Il réglerait des comptes avec lui plus tard.

"Cela fait déjà quelques mois qu'il a été retrouvé à l'étranger. C'était assez loin de l'endroit où il avait disparu. Ils se sont occupés de lui sur place et, maintenant qu'il va mieux, il a été rapatrié... Jiraya se dégagea la gorge et continua. Son régiment nous a envoyé de ses nouvelles régulièrement par mail.

-Je... Je ne savais pas.

-Oh, Kakashi..."

Danzo était vraiment le pire des connards. Kakashi allait visiblement mal et Sakumo avait plus que jamais besoin de son soutien. Il y a quelques jours, il lui avait demandé des nouvelles de son fils à travers un mail qu'il avait lui-même écrit. Il en avait apparemment écrit plusieurs sur l'adresse de Danzo mais les réponses lui semblaient fausses. Jamais ils n'auraient pu deviner que ce bâtard répondait à sa place.

Néanmoins, c'était surprenant mais aussi attendrissant de voir qu'après tout ce temps passé sans se voir et en subissant dix années en tant que prisonnier de guerre, sans avoir la chance de voir son fils grandir, Sakumo connaissait si bien le garçon. Dix longues années sans se parler mais il reconnaissait lorsque quelqu'un se faisait passer pour son fils.

Pour l'heure, Jiraya n'en dirait rien à l'homme. Il avait besoin de repos et de se remettre sur pieds grâce à la thérapie. Il n'avait pas besoin de se faire du sang d'ancre et de culpabiliser pour avoir abandonné Kakashi entre les mains de Danzo. Le professeur s'occuperait de régler cette histoire lui-même.

Il sortit son ordinateur de son sac et laissa l'adolescent lire tous les messages qu'il avait reçus à propos de son père. Plusieurs émotions passaient sur son visage et celles qui ressortaient le plus étaient la colère et la tristesse lorsqu'il fouillait dans la boîte mail. Il était bouleversé de savoir que son père était en fait en vie mais qu'il ne pouvait pas lui parler. Quand il eut terminé, il se leva et attrapa son sac avant de se précipiter à la porte.

Jiraya n'eut pas le temps de bouger ou de parler qu'il avait déjà disparu dans le couloir. Il soupira. Il était très certainement parti voir Danzo. Kakashi était un adolescent plutôt posé, calme mais s'il était si intimement touché, il se doutait qu'il pouvait perdre ses moyens. Il rassembla vite ses affaires pour partir à son tour. La situation pouvait vite déraper, il devait aller s'assurer qu'aucun des deux n'utiliserait la violence. Il espérait aussi secrètement pouvoir rentrer avec Kakashi ce soir.

Il ferma la porte de sa classe et partit pour le bureau du proviseur. Il n'avait pas de cours prévus pour les deux prochaines heures mais il avait une classe de seconde pour la dernière heure de la journée. Il devait prévenir Hiruzen et savoir s'il était d'accord ou non pour qu'il parte. Il comptait rester présent pour Kakashi donc il ne pensait pas revenir au lycée ce soir.

En chemin, il gémit presque en croisant un Obito à l'air maussade sur le sol. Il devait se dépêcher de rejoindre Kakashi mais en tant qu'enseignant et adulte qui se souciait de ces jeunes, il devait s'arrêter. Il resta donc près de lui en attendant qu'il lève les yeux et le regarde enfin. Jiraya ne l'avait jamais vu aussi triste. Qu'est-ce qu'il se passait avec les jeunes en ce moment, sérieusement ?

"J'ai trahi Kakashi," dit enfin Obito sans lever les yeux.

Le professeur était surpris mais comprenait désormais qu'il y avait bien un problème entre les deux. Il regarda le bout du couloir qui menait chez le proviseur et soupira. Kakashi n'était pas le seul à avoir besoin de lui en ce moment. Il posa son sac au sol et s'assit avec lui contre le mur. Il avait perdu l'habitude de faire ça depuis qu'il avait quitté ce lycée. Cela lui rappelait énormément de bons souvenirs mais aussi à quel point il avait vieilli.

"Tu peux m'en parler, tu sais. Cela te ferait du bien."

Le garçon hésitait, il ne voulait pas dire quelque chose qu'il ne fallait pas et reparler de la réaction de Kakashi lui faisait mal. Tout ce qu'il voulait était de se morfondre sur lui-même en se rappelant ses erreurs. Peut-être qu'il comprendrait la leçon et ne recommencerait pas.

"Il m'avait dit de ne parler à personne d'un secret qu'il m'avait confié, dit-il en prenant soin de ne pas le divulguer, et bien sûr, je n'ai pas pu le garder pour moi. Il m'en veut énormément et je le comprends, ça lui a fait mal et il ne me pardonnera jamais."

En parler lui faisait effectivement du bien. Il ne s'en était pas rendu compte avant mais le problème de Kakashi le rongeait profondément depuis plusieurs mois. Au point où il en était maintenant, il pouvait très bien aller voir l'infirmière ou le proviseur pour leur en parler, non ? Il n'aimait pas la position délicate dans laquelle il se trouvait. Si le gris se faisait hospitaliser ou, pire, tuer, il serait immédiatement accusé de non-assistance à personne en danger. Honnêtement, il ne s'en préoccupait pas vraiment. Il le méritait après tout. Il voulait l'aider mais il ne faisait rien pour ça.

"J'allais chez lui, justement... Dit Jiraya. Il y a quelques affaires de familles à régler. Je sais que cela ne te concerne pas mais j'espère que cela vous fera du bien de vous voir un peu."

Obito grimaça parce, effectivement, il ne voulait plus être impliqué dans des affaires qui ne le regardaient pas, surtout après aujourd'hui. Kakashi ferait certainement une crise en le voyant. Cependant, il venait de parler d'affaires de famille. Il avait appris qu'ils étaient lié grâce à l'amitié qu'il entretenait avec son père mais il n'avait jamais bougé pour prendre des nouvelles de Kakashi. Peu importe à quel point il se sentait mal, il avait besoin de s'assurer que le gris allait bien.

Pour la première fois depuis que l'homme l'avait rejoint, il leva les yeux pour le regarder et acquiesça. Jiraya lui sourit doucement, touché par la préoccupation des garçons entre eux. Ensemble, ils se levèrent pour rejoindre le bureau de Hiruzen Sarutobi. Ils avaient perdu assez de temps.

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