PDV Jack Frost:

Un immense froid me force à ouvrir les yeux.

-Où...?
-Je t'amène voir Nord. Il pourra sûrement faire quelque chose pour toi.
-Non...

Je lève difficilement un bras pour attraper l'épaule de la Fée des Dents entre mes doigts.

-Punition...

Mon ami me pose doucement au sol et met ses mains sur son ventre.

-Ça va...?
-Ne t'en fais pas pour moi. Où veux-tu que je t'amène alors?
-M'est égal...

Je me recroqueville sur moi-même pour essayer de me soustraire au froid.
La Fée des Dents me dit quelque chose mais je ne l'entends pas. Je me sens à nouveau partir.

***
Un énorme grain de pollen coincé dans mon nez me fait éternuer. En me redressant, le chiffon humide que j'avais sur le front tombe et mouille le petit short que je porte.
Totalement désorienté, je fixe mon torse nu trempé. Ma peau est rougeâtre, j'ai l'impression de me consumer sur place.
Pris de panique, j'essaie de me lever mais deux mains me recouchent contre le matelas.

-Il est réveillé! crie une voix familière.

Quelques secondes après, une porte s'ouvre avec fracas et deux personnes rentrent dans la pièce. Au-dessus de moi, j'aperçois le visage inquiet d'Aurélien puis deux autres personnes se rajoutent: la Fée des Dents et Bunny.

-Ça fait deux fichus jours que tu dors comme une marmotte ébouillantée, me lance Bunny avec son tact habituel.

Ma tête me tourne tellement que je serai tombé si je n'étais pas couché. J'agrippe les bras d'Aurélien pour tenter de trouver un appui quelque part. Il a l'air de comprendre ma détresse car il se redresse et dit au mur:

-Je crois qu'il faut le laisser au calme. Je m'occupe de lui.
-Merci Aurélien, dit la Fée des Dents malgré le fait qu'Aurélien ne la voit pas donc ne l'entend pas.
-On sera dans le jardin, rajoute Bunny sans que cela soit utile.

Ils vont ouvrir la fenêtre et Aurélien attend quelques instants avant de la fermer derrière eux. Il va s'asseoir sur une chaise près de son lit, prend un chiffon dans une bassine d'eau et m'essuie le torse avec précaution.

-Je pensais ne plus te revoir, tu sais. Quand je t'ai vu à ma fenêtre, j'ai cru rêvé. Je t'ai fait rentrer et ton amie m'a expliqué ce qu'il t'arrivait sur un morceau de papier.

Il remet un torchon humide sur mon front puis prend mes bras pour les rafraîchir aussi méthodiquement.

-Tu crois que l'Homme de la Lune t'a puni?
-Je ne sais pas. Je ne pense pas... Il m'avait dit que je ne serai plus un Gardien hors je le suis toujours. Il ne nous a pas vu Aurélien.

Mon ami soupire de soulagement puis me sourit doucement.

-Tu sais ce qu'il t'arrive alors?
-Pas totalement. Ma température corporelle est juste trop élevée ce qui altère ma glace. Mais je ne sais pas d'où ça vient. Du moins, je n'en suis pas totalement sûr.

La main droite d'Aurélien vient se poser contre ma joue puis remonte sur mon front.

-Tu dois avoir de la fièvre. Mais je ne comprends pas pourquoi tu es aussi rouge...
-Ça fait 400 ans que mon corps est froid. J'ai du perdre l'habitude de la chaleur...

Aurélien s'est totalement arrêté de bouger pour m'observer. Je sens le feu dans mon corps courir dans mes veines. J'ai de nouveau l'impression de suffoquer mais je fais de mon mieux pour résister de peur de briser le lien entre nous.
Je tends la main et Aurélien l'attrape. Nos doigts s'entremêlent comme mus par une habitude inconnue.

-Tu as les mains froides, remarqué-je à voix basse.
-C'est toi qui est brûlant, répondit Aurélien sur le même ton.

Il tire sur mon bras et me force ainsi à me redresser.

-On va aller prendre ta température.
-Pour faire quoi?
-Si tu la prends comme il faut, tu auras droit à une gourmandise.
-Des cookies? demandé-je les yeux brillants.
-Si ça peut te faire plaisir, oui.

Il m'aide à me relever et je m'appuie sur lui pour aller à la salle de bain. Il me sort un thermomètre et me regarde un peu gêné.

-Je suis désolé, mais il va falloir te mettre ça dans les fesses.

Je me pince les lèvres.

-Je ne suis pas sûr que ça vaut le coup de faire ça contre des cookies.
-Même si c'est moi qui les fait?

J'hésite un instant.

-J'ai l'impression de me faire rouler dans la farine comme un gamin de 4 ans.
-Tu es un gamin.

Je lève les yeux au ciel puis finis par tendre le bras.

-Donne-moi ton truc et attend dehors.

Aurélien pose l'objet dans mes mains et sors de la salle de bain. Je baisse mon short, mouille un peu le bout du thermomètre puis fais ce que j'ai à faire.
De l'autre côté de la porte, j'entends des bruits de pas puis une voix :

-Tu attends quoi là?
-Rien du tout, répond Aurélien légèrement tendu.
-Je peux rentrer alors?
-Non!

Je fais des petits pas en arrière comme si ça allait changer quelque chose.
Derrière moi, j'entends un petit bip. J'ai à peine le temps de sortir le thermomètre et de remonter le short qu'Aurélien rentre les yeux fermés.
Je lis les chiffres inscrits sur le petit écran:

-38,5°.

Un œil s'ouvre en face de moi puis un deuxième.

-Tu as un peu de fièvre en effet, chuchote-t-il. Nettoie le bout, je vais le ranger.

Je mets un peu de savon sur le bout de mes doigts et frotte l'objet avec un peu d'eau chaude. Je le sèche avec une serviette et le donne à mon ami qui le range.
Nous revenons dans la chambre. En passant dans le couloir, Mark suit des yeux Aurélien puis va dans la salle de bain.
La Fée des Dents et Bunny sont assis respectivement sur la chaise et le bureau.
Je me mets sur le lit et reprends un tissu humide que je mets autour de mon cou.

-Pourquoi m'avoir amené ici?
-Tu ne voulais pas voir Nord. Et à part lui, personne avait de quoi te soigner un minimum.
-Tu veux parler d'eau et de chiffon?
-Je n'ai pas de linges, Bunny et Sam non plus.

Je soupire.

-Et qu'est-ce qu'il fait là lui? dis-je en faisant un coup de tête vers Bunny.
-Je n'arrivais pas à te porter. Je suis allée le chercher.
-Tu lui as expliqué?
-Non, elle ne m'a rien expliqué. J'ai compris tout seul, me répond Bunny en se levant.

Je ferme les yeux. Si même Bunny a compris, je suis sûr que l'Homme de la Lune va réussir à arriver à une merveilleuse conclusion.
Aurélien s'assoit à côté de moi.

-Du coup, on fait quoi ?
-Comment ça "on"? dis-je en fronçant les sourcils.
-Je veux vous aider!
-Tu sais comment éliminer une plante géante invincible?
-Non mais...
-Et tu sais comment soigner mon problème ?

Ses épaules s'affaissent.

-J'ai vraiment envie de t'aider, tu sais...
-Je le sais. Tu as veillé sur moi ces dernières heures, ça représente déjà beaucoup. Merci.
-J'aimerai faire plus. Depuis la dernière fois, je me suis rendu compte à quel point je tenais à toi.

Je me mets lentement en face de lui et tends la main pour caresser sa joue avec mon pouce. Il ferme les yeux et se laisse aller à mon toucher. Je ne dis rien car aucun mot ne peut exprimer ce que j'ai sur le cœur. Et puis, il y a des choses plus importantes à régler.
Je me redresse et me tourne vers mes compagnons.

-On a une plante à éliminer. Après ça, on reviendra ici.
-Tu crois vraiment que c'est une bonne idée de revenir? me demande Bunny.
-Le mal est déjà fait. Je ne sais pas comment retourner en arrière mais je peux toujours aller de l'avant. Et pour cela, j'aurai besoin d'Aurélien. On trouvera une solution. Ensemble.

Je me tourne vers lui et lui souris. Ses yeux noisettes s'illuminent quelques instants. Un instant plus tard, je suis dehors avec mes acolytes en direction du lac.