Chapitre 1

- Vous allez voir, vous vous y sentirez comme chez-vous !

Combien de fois les agents immobiliers pouvaient prononcer cette phrase à des personnes qui n'avaient clairement pas l'argent pour s'offrir certains de leurs biens ou tout simplement qu'ils n'avaient pas le feeling qu'ils pourraient bien se sentir dans cette maison ? Le professionnalisme ne tuait pas, mais escroquait assez bien. Une chose était certaine, c'est qu'ils vivraient longtemps comme ça.

Pénétrant dans l'allée boisée de cette forêt dense, une grosse voiture, remorquant une caravane remplit de cartons, s'avança vers une grille en fer rouillée, mais dont l'aspect ancien donnait une allure très moyen-âge au lieu et l'on pouvait se croire partir dans un de ces romans d'histoires où bon nombre d'intrigues romanesques pouvaient encore s'y dérouler. Le 4X4 couleur sable déboula, après une bonne vingtaine de minute à rouler dans les bois, dans une grande cour, devant l'entrée du manoir. La voiture s'immobilisa, mais personne ne quitta la voiture.

À l'intérieur, il semblait y régner un calme presque assourdissant. Cela prit un bon moment avant qu'une portière ne s'ouvre, puis une autre et enfin deux autres. Un homme assez grand, cheveux noirs, des lunettes de soleil sur le nez, un long trench recouvrait son corps. Une femme, grande, mais un peu plus petite que l'homme, arborant un chapeau marron glacé, un trench et une paire de lunette de soleil, une cascade de cheveux miel tombant dans son dos. Une silhouaite presque aussi grande que la femme sortie de la voiture, habillée d'un blouson en cuir vieillit, une grosse écharpe autour du cou, des lunettes de soleil, ses cheveux ondulés, aux reflets caramel, glissant sur ses épaules et dans son dos, puis un garçon d'à peine 14 ans et une plus petite d'environ 10 ou 11 ans apparurent à leur tour. Tous, levèrent la tête pour regarder le manoir.

Qui pouvait se douter que derrière ces lunettes fumées, se cachait un regard bien particulier qui étudiait avec attention son environnement, repérant sans doute la moindre anomalie sur la maison, comme des experts ?

- Allez ! s'exclama l'homme d'une voix grave. Commençons par faire sortir Guadian.
- Ce pauvre chien doit en avoir ras les pattes, sourit la femme en se tournant vers l'homme.

Ce dernier se plia en deux pour aller appuyer sur un bouton dans le véhicule pour actionner le coffre qui se débloqua et l'on pouvait entendre un chien aboyer.

- Oui, mon chien. Tu dois avoir sacrément envie de sortir ! s'exclama l'homme en allant lui ouvrir en grand le coffre, laissant s'échapper un berger allemand qui alla renifler un peu partout, grognant sur ce qu'il voulait pour enfin aller apposer son odeur sur chacun des arbres qu'il trouvait à son goût.

- Ceci étant fait, il est temps de sortir les cartons de la caravane, fit la femme. Leanna, tu veux bien aider ton père ? Gabby et Manon, vous me suivez, on va trier ce qu'on récupère pour savoir où ça va aller.
- Oui, maman ! s'exclamèrent les deux plus jeunes et l'aînée qui se dirigea, avec l'homme, vers l'entrée de la caravane pour en sortir, un à un, les cartons qui s'y trouvaient pour tous les porter vers le grand hall du manoir que les deux plus jeunes admiraient avec des yeux grands ouverts.
- Les ouvriers ont laissés tous leurs outils, se plaignit la mère en découvrant un véritable chantier. 

Le manoir avait été restauré, grâce à une équipe d'expert qui avait réussit à ne pas trop dégrader certains traits fragilisés de leur nouvelle maison. Mais ce n'était pas la seule chose qui avait attiré la famille Gayle dans cette bâtisse vieille du XIVe siècle. Non, ce qui les avait attiré vivait encore dans les murs du bâtiment. Mais bien entendu, jamais ils n'iraient le dire à l'agent immobilier qui leur avait vendu le bien comme étant "totalement pour vous". 

Laenna, l'aînée de 23 ans travaillait avec ses parents tout en continuant un cursus spécifique à l'université. Quant aux deux plus jeunes, ils allaient à l'école comme des pré-ados totalement normaux. Pourtant, dans cette famille, rien ne pouvait coller avec la définition de "normalité".

Mais pour le découvrir, avançons dans notre histoire, voulez-vous ?

Laenna était donc l'aînée de trois enfants, Gabriel, 14 ans, que tous surnommait Gabby ou Gab et Manon, 11 ans. Dana la mère, 48 ans, et Oriel, le père, 52 ans. Bien sûr, n'oublions pas Guardian, un berger allemand de 8 ans qui vivait avec eux depuis sa naissance. Ils avaient vécus dans une petite maison d'abord, puis un appartement, voyageant souvent, ils ne restaient jamais très longtemps au même endroit, mais quand Dana tomba sur l'annonce de ce manoir à vendre, elle avait prit la décision qu'ils devaient définitivement s'y installer. Il était temps pour eux de poser, enfin, leurs valises et de ne plus y bouger. Mais quel genre de travail leur avait permit de s'offrir un tel habitat, en plus des travaux et de tout ce qui s'ajoutait sur un dossier en agence immobilière ? Oh, ça...

Guardian revint en aboyant comme un fou, très peu content.

- Qu'est-ce qu'il ce passe mon chien ? demanda le mari en posant sa main sur la tête du berger allemand qui se mit à grogner, regardant l'extérieur.

Du bruit se fit entendre au dehors. Comme si on bougeait dans les buissons ou entre les arbres. Le vent ? Non, c'était un bruit plus spécifique.

La famille suspendit son geste, les sens en alertes, Dana rassembla ses deux plus jeunes, près d'elle, tandis que l'aînée et le mari se tenaient proches du chien, prêt à donner l'ordre d'attaquer l'intru.

- Guardian, murmura Oriel, le tenant par le collier, avec peu de poigne. Grogne.

Le chien s'exécuta, bavant même sur le tapis de l'entrée.

Le bruit se fit plus précis encore et Leanna remarqua le flash d'un appareil photo, Oriel lâcha le chien qui partit comme une fusée pour sauter sur l'intru qui se mit à hurler, se débattant, les mâchoires du molosse accrochées à son bras.

- Lean', prends la lampe, ordonna son père qui sortit pour aller débusquer un pauvre garçon bien chargé.

Caméra hors de prix, sac à dos, probablement remplis d'autres machines technologiques, un bonnet vissé sur la tête, il criait comme si le chien était en train de le dévorer. Oriel comprit que ce n'était autre qu'un de ces débiles de youtubers adeptes de sensations fortes, venu empiéter sur leur propriété, afin de faire un repérage de son prochain lieu d'exploration pour sa nouvelle vidéo à sensation.

- Au pied ! s'exclama la voix forte du père.

Guardian lâcha sa prise et s'approcha de son maître qui lui caressa la tête. Le berger allemand resta en position de chasse, la queue touffue pointant vers l'arrière, la tête allongée, prêt à se jeter de nouveau sur l'importun qui eut du mal à se relever.

- Je peux savoir ce que vous foutez chez moi ? gronda le père.
- Je... Je savais pas que le manoir était habité ! s'exclama le jeune homme, tentant de se relever avec sa grosse caméra dans les bras.
- Vous vous foutez de moi ? Y a des panneaux partout qui disent que c'est une propriété privée !
- P'pa ! entendirent-ils s'écrier derrière eux. 

L'aînée arriva au pas de course, une longue lampe torche à la main et une corde tressée qui allait sans doute leur servir.

- Les flics sont prévenu, dit-elle. À peine arrivés et on se fait déjà emmerder.
- Qu-Quoi ? Mais, je-
- Silence. ! tonna la voix du père. Putain d'influenceurs à la con ! Pas foutu d'aligner leurs deux neurones pour lire un putain de panneau... 

L'humain pouvait paraître intelligent, mais face à l'aventure, au désir de se donner du frisson, il était complètement détaché de la réalité. Aujourd'hui, les influenceurs d'internet se pensent être autorisés à entrer partout, car la ville ou les mairies leur disent oui, mais qu'en est-il de celui qui habite dans le bâtiment ou de ceux qui ne désirent pas voir des intrus piétiner leurs roses ? Oriel était habitué à rencontrer ce genre de personne, il les côtoyait un peu trop souvent dans son travail pour réellement les apprécier. Ignorant les bases fondamentales, oubliant qu'ils n'étaient que spectateurs et non maîtres, il ne les supportait pas. Alors en avoir un chez lui... Autant dire que la relation n'allait pas être au beau fix, surtout quand les policiers de la ville la plus proche arrivèrent, visiblement pas spécialement ravi de recevoir ce genre d'appel.

Oriel attrapa une dernière fois le jeune homme, tenu par un flic, et lui dit :

- C'est une propriété privée. Si toi ou tes petits camarades revenaient ici, ça ne se finira pas juste avec une garde à vue. Compris ?

Oriel enfonça son regard dans celui du jeune homme qui sentit une sorte de pression étrange qui affola son cœur et lui fit peur.

- Ou... Ou... Oui, Monsieur.
- Allez, fit le policier en tirant le jeune homme pour le faire embarquer, lui et son matos d'explorateur du paranormal, à l'arrière de la voiture.

Ils prirent la déposition du père de famille et quittèrent les lieux, assez précipitamment.

- Guardian, suis les jusqu'à la sortit de la forêt, ordonna le père.

Le chien jappa et partit à travers les arbres, suivant la voiture jusqu'à ce que celle-ci ne quitte définitivement la forêt et attendit de les voir disparaître sur la route. Il resta là, assis entre les arbres, bien caché, mais où il avait un bon visuel. Il aboya, comme s'il ordonnait à la nature je garder un œil sur quelque chose, avant de retourner au galop, vers ses maîtres qui l'accueillir avec caresses et biscuits.

Cette première journée avait été riche en émotions pour tous le monde. Après avoir découvert un intrus chez eux, avoir eut la visite des policiers pour l'embarquer et l'agent immobilier qui s'amuse à les appeler toutes les heures pour savoir comment ils se sentent dans leur nouvelle maison.

En fin de journée, leur plaisir fut d'éteindre les téléphones et de dîner dans le calme, avant de se coucher dans la chambre la plus grande, qui était, pour le moment, la seule à posséder un mobilier fraichement déballé.

[...]

Ils étaient là depuis quelques jours, déballant les innombrables cartons, montant ou descendant ces derniers pour placer et ranger leurs affaires dans les chambres et autres pièces du grand manoir. Ils dormaient encore tous dans la chambre des parents, durant l'emménagement c'était bien plus pratique, avant de partir à la conquête de leurs nouveaux quartiers. Au bout d'une semaine, l'installation fut complète. Leanna monta son dernier carton dans la chambre qu'elle occupait, seule, au deuxième étage. Une chambre qui donnait sur la cour ainsi que sur la forêt qui ressemblait à une douve large et infranchissable, protégeant un château difficile d'accès.  Dans des couleurs ocres oranges qui donnaient à la pièce des allures un peu plus masculine. Elle n'avait pas encore recherché à qui avait appartenu cet endroit. Laissait à l'abandon durant des siècles et des siècles, le manoir avait un peu perdu de son charme d'antan, jusqu'à ce que le nouvel ère ne voit arriver les vautours de l'immobilier et qu'ils décident qu'ils devaient le vendre pour se faire un max d'argent dessus. Mais la rénovation coûtait cher et ceux qui avaient tenté d'y vivre avaient très vite abandonné l'affaire, prétextant qu'ils ne se sentaient pas à l'aise dans cet endroit pourtant chargé d'histoire. 

Jusqu'à ce que la famille Gayle ne tombe sur l'annonce et qu'elle ne décide d'y poser bagages. Leanna n'avait pas spécialement visiter l'endroit, ses parents avaient eu un coup de cœur pour cette vieille bâtisse datant du moyen-âge classique.

Dans l'escalier en pierre recouvert d'un large tapis, la jeune femme montait tranquillement quand elle entendit un rire non loin d'elle. Elle n'y prêta pas attention jusqu'à ce que le rire ne se rapproche et la tire en arrière.
Leanna se rattrapa de justesse, gardant son équilibre avec le carton dans les bras et s'exclama, furieuse :

- Non, mais vous pourriez pas faire gaffe ?! J'aurai pu me faire mal !

Sa colère se bien sentir et le rire se tut immédiatement.

- Vous... murmura une voix choquée. Vous me voyez ?
- Si ça vous amuse tant de vouloir tuer des gens, allez faire ça ailleurs ! gronda Leanna, reprenant son chemin sans se retourner. 

La porte de sa chambre claqua violement, avertissant les habitants du manoir qu'elle était vraiment de mauvaise humeur.

- À peine arrivé et on essaye déjà de nous tuer... putain ! grommela-t-elle en déposant son carton sur son grand lit. 

Guardian leva la tête et fixa la porte de chambre.

- Si jamais ils sont là, chasse les, ordonna la jeune femme.

Guardian aboya, allongé en sphynx sur le lit, il gardait son regard fixé sur l'entrée de la chambre.

Décidément, cette nouvelle vie allait être... sportive.

***

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top