Chapitre 62
– Mila, tu ne crains rien ici, d'accord ? Je te le promets.
Je regardais la Colonie sans dire un mot, mais je tremblais comme une feuille. Tous ces gens... Ça ressemblait tellement aux armées de Cronos, j'avais tellement peur !
Percy a posé sa main sur mon épaule et j'ai tressailli. Les plaies étaient encore douloureuses, un peu partout sur mon corps, mais la pire restait tout de même celle qui s'étalait sur mon dos. Je pouvais encore sentir les barreaux s'incrustant dans ma chair.
– Mila, regarde-moi.
Je me suis concentrée sur les yeux bleu océan de mon sauveur, ces yeux qui me semblaient tellement familiers. Pour cause, je voyais ces mêmes yeux couleur d'eau chaque fois que je me regardais dans un miroir.
– Je te jure que personne ne te fera de mal ici.
– Je... je suis content d'avoir une sœur.
C'était la première fois que Percy disait une chose pareille. Bien sûr, il ne m'avait jamais exclue, il m'avait beaucoup aidée. Grâce à lui, j'avais recommencé à manger normalement, j'avais repris des forces et de la confiance en moi. Je m'étais adaptée à la vie de la Colonie, y compris aux nombreux pensionnaires qui s'y trouvaient.
Ça faisait plus d'un an qu'il m'avait sortie de ma prison, et aujourd'hui il avait vaincu Cronos. Mon cauchemar était fini, même si je faisais toujours de mauvais rêves la nuit.
– Et je suis contente d'avoir un frère, ai-je répondu en souriant.
– Tu sais que si quiconque te fait du mal, je l'assassine, hein ?
J'ai ri et mon frère aussi. Quelque part, je m'en voulais d'être auprès de ce demi-frère que je ne connaissais que depuis un an, alors que mon petit frère et ma petite sœur avaient été tués par Cronos. Mais j'avais vite appris qu'il ne servait à rien de se tourner vers le passé. Benoît et Elina étaient sûrement aux Enfers, aujourd'hui, dans les Champs d'Asphodèle. Je devais honorer leur mémoire.
– Poséidon...
J'ai soupiré. Comment étais-je censée commencer une prière à mon père ? Je contemplais l'océan, mais que pouvais-je bien dire ?
– Écoute, papa... Je ne sais pas si tu m'écoutes, mais j'ai besoin d'aide. J'étais faible, et Percy m'a aidée. Mais aujourd'hui, il a disparu, et tout redevient comme avant. J'ai peur, papa. J'ai besoin d'aide.
J'ai continué de regarder la surface de l'eau, mais elle était immobile. Si mon père m'avait entendue, il n'en montrait rien.
– Bon... C'est pas grave. Merci quand même, papa.
Je me suis levée et je suis rentrée au bungalow trois, que j'occupais désormais seule.
– Valdez ? Valdez, t'es là ?
L'Argo II, face à moi, était à moitié terminé. Leo avait accroché la figure de proue, ancienne tête de son dragon Festus, à l'avant du pont, mais il restait encore toute la partie supérieure à construire.
Évidemment, comme j'aurais pu m'y attendre, le fils d'Héphaïstos se trouvait au poste de commande. Seules ses jambes dépassaient des monticules de câbles qui pendaient.
Je me suis accroupie non loin de Leo, occupé à relier les différents câbles entre eux.
– Besoin d'aide ?, ai-je demandé.
Mon ami a sorti la tête des fils, donnant l'impression qu'il avait enfilé une perruque de spaghettis de toutes les couleurs.
– Si tu peux m'aider à relier les câbles par code couleur, a-t-il répondu avec un sourire narquois.
Je me suis allongée à côté de lui, passant moi-même sous les fils pendouillant, et je me suis attelée à la tâche.
– J'aime pas chanter.
Je me suis tournée vers Leo, assis à côté de moi sur le tronc d'arbre couché.
– Tout le monde chante, Valdez. C'est la tradition du feu de camp.
Il a haussé les épaules et répété :
– J'aime pas chanter.
Je lui ai donné un léger coup de poing dans l'épaule.
– Tout le monde s'en fiche, ai-je répondu en lui tendant un marshmallow fondu au bout d'une pique en bois.
– Par contre, ça, j'aime, a-t-il ri.
Il a englouti son marshmallow d'une traite et jeté sa pique dans le feu.
– Percy me manque.
Leo a serré mon épaule de sa main.
– Je sais. Mais dis toi que tu vas bientôt le revoir. On devrait avoir fini l'Argo II dans quelques jours. C'est la dernière ligne droite !
J'ai souri faiblement. Leo avait toujours été là pour moi, depuis son arrivée à la Colonie. Peut-être que construire l'Argo II ensemble nous avait encore plus rapprochés qu'avant, mais il était vraiment attentionné envers moi. Nous formions vraiment une sacré paire, mais le plus important, c'est qu'on savait qu'on pouvait compter l'un sur l'autre. Après tout, nous étions meilleurs amis.
– Tu sais que je t'aime, hein ?, ai-je ri en martelant son bras de petits coups de poing.
C'était bien de pouvoir parler avec quelqu'un sans avoir à se cacher, sans avoir à se justifier, mais surtout, sans avoir à préciser le fond de sa pensée. Je pouvais parler à Leo sans ambiguïté, et quelque part, j'avais peur que plus tard, notre amitié se ternisse. Que deviendrait-elle lorsqu'on aurait chacun trouvé quelqu'un pour partager notre vie ? Est-ce que notre moitié accepterait-elle notre amitié fusionnelle ?
– Eh !, a ri le brun en jouant des sourcils. Toutes les filles kiffent Leo Valdez !
Je me suis écartée de lui.
– Espèce de crétin !
– Nous sommes prêts à partir.
Debout derrière le tableau de commande, Leo regardait l'horizon, souriant de toutes ses dents. Comme moi, il était très fier de l'Argo II, et encore plus de pouvoir annoncer que nous étions fin prêts à débarquer au Camp Jupiter. Après tous ces mois, j'étais impatiente de revoir mon frère.
Annabeth avait l'air encore plus impatiente que moi. Elle marchait en rond sur le pont, l'air angoissée, le visage pâle. Quant à Jason et Piper, ils étaient debout à l'avant du bateau, la main de la Cherokee dans celle du romain.
Ils avaient fini par se mettre en couple, eux dont la relation avait été de toute pièce montée par Héra et la Brume. Comme quoi la déesse pouvait faire au moins une chose de bien, dans son éternelle existence. Entendons-nous, c'était la seule chose qu'elle ferait sans doute qui ne soit pas négative.
– Brow, tu vas m'aider à faire décoller ce navire ou tu vas rester à contempler le néant comme si tu n'avais que trois neurones ?
J'ai soupiré. Leo Valdez était un pur crétin, comment avais-je fini par en faire mon meilleur ami ?
Je me suis placée à côté du fils d'Héphaïstos, empoignant les manettes de wii destinées à mouvoir le bateau. En même temps, Leo appuyait sur les boutons des réacteurs, des rames, pour mettre le tout en marche. L'Argo II a fait une embardée vers l'avant.
– Et c'est moi qui ai trois neurones, hein ?, l'ai-je raillé.
– Ah, Brown, commence pas !, a-t-il répliqué en appuyant cette fois sur le bon bouton.
Le bateau s'est élevé avec un craquement, et la Colonie s'est lentement éloignée derrière nous.
– Nous reviendrons, a dit Leo en souriant. Après tout, on va juste chercher ton frère et les deux romains de la prophétie, puis on va voyager jusqu'en Grèce pour battre les géants ! Absolument rien ne pourrait tourner mal.
– Tu es un idiot, Leo Valdez.
Il a ri.
– Oui, mais je suis un idiot sexy.
J'ai ri à mon tour. Au fond, je trouvais qu'il n'avait pas tort. Il était plutôt sexy, comme imbécile.
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