Chapitre 55
/!\ Ce chapitre est le deuxième chapitre que je poste dans la journée, assurez-vous d'avoir lu celui d'avant histoire de comprendre ce chapitre ! /!\
Parce que oui, j'étais carrément inspirée aujourd'hui ! J'espère que vous aimerez toujours autant ;)
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Ça peut paraître vraiment étonnant, mais je n'avais jamais mis les pieds dans la cabine de Leo. Pas depuis que l'Argo II était en service, en tout cas.
Leo prétendait toujours que c'était trop dangereux, parce qu'il gardait plein de matériel, et qu'il préférait dormir dans la salle des moteurs. Je le croyais sur parole, surtout que j'avais déjà aperçu le bazar mortel jonchant le sol, une fois ou deux.
Pourtant, quand je suis entrée, la chambre n'avait plus rien d'un lieu dangereux. Les différents bouts de métal, les engins explosifs, tout avait disparu. Il ne restait que le lit, le bureau et la commode, les mêmes que ceux qu'on trouvait dans chaque cabine.
Le lit était à moitié défait, l'oreiller pendant mollement sur le côté et les draps repoussés au pied. Le bureau, beaucoup trop organisé et propre pour un fils d'Héphaïstos, servait de support à la sphère d'Archimède de Leo. C'était le seul objet potentiellement dangereux dans la pièce.
– Qu'est-ce qui s'est passé ici ?, ai-je demandé, interloquée.
– J'ai fait un peu de ménage, a répondu le brun en haussant les épaules. Je t'en prie, assieds-toi.
Il m'a désigné le lit, et pendant un instant, j'ai été gênée de me trouver là, dans sa chambre, assise sur son lit défait. Et puis un détail a attiré mon regard.
Sur le bureau, posé à plat comme des tapis de souris, se trouvaient diverses photos. Il y en avait une de Leo, âgé de quatre ou cinq ans, en compagnie d'une jeune femme aux longues boucles brunes, le regard pétillant. Sans l'avoir jamais vue, je savais qu'il s'agissait d'Espéranza Valdez, la mère de mon meilleur ami.
À côté, une autre photo le montrait en compagnie de Jason et Piper, assis sur un tronc d'arbre couché, à la Colonie des Sang-Mêlés.
Une troisième photo nous montrait tous les deux, couverts de suie, dans le Bunker 9. Je me souvenais de ce jour, le jour où nous avions terminé la construction de l'Argo II. Cela me semblait tellement loin, nous semblions tellement insouciants sur cette photo ! Rien à voir avec aujourd'hui, où nous voguions vers une mort quasi certaine, prévue pour le lendemain.
La dernière photo est celle qui m'a le plus perturbée. Il n'y avait pas Leo dessus, il n'y avait que moi. Visiblement, je ne devais pas savoir qu'on me prenait en photo sur le moment, car j'étais de dos, mes longs cheveux fins et blonds retombant mollement sur mes reins.
La photo en elle-même n'avait rien de beau, c'était un simple moment banal capturé par un appareil anonyme. Alors que faisait-elle au milieu de tous ces souvenirs ?
Je l'ai attrapée et l'ai examinée de plus près. Décidément, elle n'avait vraiment rien qui puisse justifier son placement.
– Qu'est-ce que c'est que cette photo ?
Leo a eu la bonne idée de prendre l'air gêné et m'a retiré la photo des mains. Il l'a glissée dans le tiroir du bureau sans un mot, puis s'est tourné vers moi.
– Tu voulais qu'on parle ?
Les mots sont restés coincés dans ma gorge. Je suis restée figée, face à Leo, et j'ai senti ma détermination faiblir. C'était une chose de vouloir tirer les choses au clair, c'en était une autre de le faire pour de bon. Je prenais le risque de déballer mes sentiments à Leo, et je prenais le risque d'être rejetée. Je n'avais aucune chance face à Calypso.
Soudain, la fin du monde m'a semblé une piètre chose face à la scène dans laquelle j'étais piégée.
– Mila, ça ne va pas ?
Leo a écrasé une larme du pouce et s'est assis à côté de moi. Je ne m'étais même pas aperçue que je pleurais.
– Je... je... Leo, pourquoi tu m'as pas dit que t'avais embrassé Calypso ?
C'était sorti tout seul, et je le regrettais déjà.
Leo a eu un mouvement de recul, l'air choqué.
– Quoi ? Comment tu sais ça ? Et d'abord, c'est elle qui m'a embrassé.
– J'ai... j'ai fait un rêve, ai-je bafouillé. Mais ça ne répond pas à ma question. Pourquoi tu ne m'en as pas parlé ? Tu trouvais que ça aurait fait tâche, alors que tu passais ton temps à me laisser espérer que... à... à me..
– Quoi ? Mila, qu'est-ce que tu racontes ? Si je ne t'en ai pas parlé, c'est parce que...
Je l'ai coupé avec violence, le repoussant brusquement d'une main :
– Tu préférais m'embrasser comme si de rien n'était, c'est ça ? Comme si je n'étais qu'une bouche de substitution ?
Leo a eu l'air encore plus choqué.
– Tu crois vraiment que j'ai si peu de respect pour toi, pour moi-même ?, a-t-il demandé d'une voix pleine de douleur et de déception. Tu crois vraiment que je t'embrasserais si ça ne voulait pas dire quelque chose pour moi ? Tu crois vraiment que je suis un tel connard ?
Je me suis écartée vivement du garçon. C'était la première fois de toute ma vie que je le voyais hausser le ton, surtout contre moi. Nous nous étions toujours si bien entendu, sans jamais s'engueuler, c'était tout sauf naturel pour moi.
– Je ne pourrais pas expliquer pourquoi je ne t'ai pas parlé de ce qui s'est passé avec Calypso. Sur le moment... J'ai pas réussi à te le dire, ne me demande pas pourquoi, je ne sais pas ! Mais s'il te plaît, ne rends pas les choses plus dures qu'elles ne le sont.
Sa voix s'est brisée en même temps que mon cœur. Peut-être, je dis bien peut-être, y avait-il une chance qu'il ne ressente rien pour Calypso. Peut-être même qu'il était juste perdu. Après tout, j'avais été plongée dans le coma pendant longtemps, et il avait rencontré Calypso pendant ce temps. Peut-être qu'il hésitait, peut-être que...
Non. Je devais arrêter de faire des suppositions toutes plus tirées par les cheveux les unes que les autres, je ne risquais que de me faire encore plus mal.
– Je veux que tu me dises si, oui ou non, tu as joué avec moi. Est-ce que tu es amoureux de Calypso ?
– Mila, c'est compliqué, d'accord ? Mais sache que je n'ai jamais joué avec toi. J'ai toujours été sincère, avec toi plus qu'avec n'importe qui d'autre. Ça me blesse que tu penses le contraire.
Je m'en suis voulu, puis je m'en suis voulu de m'en vouloir. Peut-être que je le faisais culpabiliser, d'un autre côté il fallait bien que je tire les choses au clair. Notre relation était devenue trop ambiguë pour y comprendre quelque chose.
– Je suis désolée, ai-je dit. Mais il fallait vraiment que je pose la question, parce que j'allais en devenir folle. Tu dis que les choses sont compliquées, mais comment on est censés les rendre plus simples ? Tu m'embrasses, puis plus rien, puis tu te tournes vers Calypso, puis tu m'embrasses à nouveau ! Bien sûr que les choses sont compliquées, Leo Valdez ! Mais elles ne sont pas plus simples de mon côté, tu vois !
Les larmes dévalaient mes joues comme des torrents, mouillant mont-shirt.
– Mila...
– Je suis désolée d'avoir pensé que tu jouais avec moi, ai-je lancé avec sincérité. Mais pour ma défense, j'avais des raisons. Maintenant, si tu me dis que ce n'était pas le cas, alors je te crois. Tu es mon meilleur ami, j'ai confiance en toi. Et si tu as besoin de moi pour t'aider avec Calypso, je serai là. Si tu dois finir ta vie et être heureux avec elle, alors c'est tout ce que je veux.
Leo s'est approché doucement de moi et m'a serrée dans ses bras.
– Oh, Mila...
Il a embrassé le sommet de mon crâne comme Percy l'aurait fait, et mes sanglots ont redoublé. Je détestais officiellement Aphrodite, et si un jour je la croisais, je n'hésiterais pas une seconde à lui ficher une bonne claque.
Je savais que c'était loin d'être une bonne idée, que si Percy nous trouvait il nous lyncherait tous les deux, pourtant j'ai demandé :
– Je... je peux dormir avec toi ?
Ça m'a rappelé lorsqu'Annabeth et Percy étaient tombés dans le Tartare, juste avant qu'Héra ne me plonge dans un coma forcé. J'avais dormi avec Leo, parce que sa présence me rassurait. Mon frère et sa petite amie avaient chuté dans un gouffre sombre et mortel, aujourd'hui nous étions à la veille d'une grande bataille au cours de laquelle se jouerait le sort du monde.
– Bien sûr, a répondu Leo.
J'étais consciente que mes problèmes n'étaient pas résolus, que nous n'avions pas mis le doigt sur le point important de la discussion. Mais si nous devions mourir demain, je ne voulais pas me disputer avec mon meilleur ami juste avant. Nous aurions tout le temps de discuter calmement après, si nous survivions. Cependant, un point m'embêtait encore.
– Pourquoi Asclépios a eu l'air de te diagnostiquer quelque chose dont tu n'as pas voulu parler ? Et ne me dis pas que c'est à cause de demain, je sais que ce n'est pas vrai. Tu peux berner les autres si tu veux, mais moi tu ne m'auras pas.
Je me suis légèrement écartée du garçon et j'ai planté mon regard dans le sien. Le feu a rencontré l'océan et les deux se sont contemplés sans rien dire. Puis Leo a baissé les yeux.
– Je... je ne peux pas t'en parler, Mila.
Mon cœur s'est serré.
– Dis-moi que tu ne prévois pas de te sacrifier pour sauver le monde. Dis-moi que ce n'est pas ça !
– Mila, je... Tout se passera bien, d'accord ? Piper a le remède du médecin au cas où. Tu sais à quel point c'est dangereux de s'opposer aux prophéties, n'est-ce pas ? Mais quand on réunit les deux prophéties, la Grande et celle de la Huitième... Tout s'éclaire.
– Tu ne peux pas faire ça !, ai-je crié en lui assénant un coup de poing dans le torse. T'as pas le droit ! Il y a sûrement un autre moyen !
– Mila, s'il te plaît. Tout se passera bien, je ne peux pas t'en dire plus. Fais-moi confiance, d'accord ? Tu as confiance en moi, oui ou non ?
J'ai hoché la tête et ravalé les hurlements qui me montaient aux lèvres. Si Leo avait pris une décision, il ne changerait pas d'avis. Mais j'étais décidée à ne pas le laisser se sacrifier, décision ou pas. Et dès demain, je prendrais Piper et Jason à parti pour qu'ils le surveillent. En attendant, je devais dormir.
– Si on meut demain, je veux passer ma dernière nuit avec toi, ai-je dit d'une petite voix.
– Moi aussi, a murmuré Leo en posant sa tête sur la mienne.
Je l'ai entendu respirer fort, comme s'il essayait de s'empêcher de pleurer ou qu'il reniflait mes cheveux. Puis nous nous sommes allongés, l'un contre l'autre, ses bras refermés autour des mes épaules, une de ses mains pile sur la cicatrice de mon dos.
Peut-être que demain nous mourrions tous. Peut-être que Gaia règnerait sur le monde. Mais au moins aurais-je eu la chance de profiter de Leo encore un peu, et au fond de moi, même si je devais finir ma vie avec quelqu'un d'autre et lui avec Calypso, j'étais heureuse des quelques moments que nous avions partagé.
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