Chapitre 18.


Je m'étais immobilisée devant la maison de mon enfance, observant sans vraiment les voir mes enfants jouer dans le jardin de la maison avec Cole. Iris calé confortablement entre ses jambes, découvrant l'herbe tout en buvant son biberon.



Je finis par m'avancer vers la maison, m'allumant un mélange, prenant plusieurs bouffées avant d'entrer dans la maison. Ouvrant grand toutes les fenêtres avant de revenir vers les deux instruments finalement restés dans la maison pour l'instant. Parce que nous n'avions pas pris le temps de les transférer convenablement, parce que nous avions finis par douter avec Diego.



Je tirais sur le drap, le laissant retomber à terre avant que ma main ne vienne caresser les instruments. Mon regard finit pourtant par errer sur les murs, retrouvant les cadres revenus à leurs emplacements et je m'en approchais, redécouvrant des passages de ma vie dont je me rappelais plus. Un bruit à l'étage me fit bondir, et je me précipitais aussi vite, le mélange d'émotion bien trop complexe pour que je comprenne. Je m'arrêtais pourtant au milieu du couloir, la sensation que mon corps était fait de plomb alors que je voyais la porte de la chambre de mes parents ouvertes.



J'eus du mal à faire la distinction entre hier et aujourd'hui, entre ce jour là et aujourd'hui. Je venais défaire ma propre malédiction, apporter la vie dans cette maison en ce jour précis alors qu'il y a bien longtemps tout s'était achevé justement ce jour. Mais voilà...



Je me forçais à avancer, me tenant au mur avant de finalement m'arrêter devant la porte. Le regard dans le vide, les cris plein la tête me donnant envie de hurler. Une sensation étrange me fit me débattre alors que je me tassais contre le mur, pourtant la sensation revint, plus forte, plus pressante.



─ Je suis là Nani. Entendis-je dans la brume de mon esprit.



Et je me raccrochais à cela, cherchant désespérément à accrocher ce regard-là, le trouvant enfin, m'agrippant à lui alors qu'il me prenait dans son immense étreinte. Je finis par tourner le visage, découvrant un Aaron assis dans le coin du couloir, face à la chambre de mes parents, le visage trahissant tous les tourments qui semblaient l'agiter. Et cela me permis étrangement de revenir à moi alors que je quittais les bras d'Angelo, m'approchant d'Aaron avant de me mettre à sa hauteur, caressant son visage avec tendresse avant de l'entourer avec mes mains pour le forcer à détourner le regard, pour qu'il me regarde.



─ Sweetie... Qu'est-ce qu'il y a ?

─ Je... Connais cette histoire. Alex... m'as raconté il y a longtemps un soir où on était juste à deux. Je savais.... J'avais compris le fameux matin après le premier nouvel an au clan... Que ces enfants dont parlait Alex... C'était toi et Luc... Mais...



Je le pris contre moi, lui faisant poser sa tête sur mes cuisses alors que Nino venait s'asseoir à côté de moi, venant caler ma tête contre son torse alors qu'il m'entourait de son bras. Comme un besoin de faire rempart contre ces fantômes.



─ J'ai trente-huit ans aujourd'hui en fait... J'ai remis les pieds dans cette maison pour la première fois avec Luc il y a à peu près un an. On est nés et on a grandit ici. J'étais l'ainé, Luc le cadet puis en dernier Leone... J'avais quatre cinq ans d'écart avec lui... Mes parents étaient tous deux musiciens, et on ressemblait à la famille parfaite... Puis un voisin s'est installé. Marc il s'appelait. Tous le monde m'avait prévenu, mais j'ai pas écouté, et j'ai sympathisé avec lui. Et puis, pour mon dixième anniversaire, alors que Luc était en voyage scolaire avec Arno... Marc est venu ici. J'étais dans le jardin pour nourrir les animaux mais quand je suis rentrée, il était là... Dans le couloir, tenant mon petit frère contre lui. Il m'a expliqué qu'il venait me chercher, qu'il allait me purifier... M'ôter mes chaines... Et pour ce faire... Il a égorgé mon petit frère devant moi. Il est mort dans mes bras alors que j'essayais de stopper tout ce sang... Quand mon cerveau s'est reconnecté... J'étais là-dedans... Mon père était attaché dans le coin là.. Ma mère attachée sur le lit...à côté de moi. Il a d'abord souillé ma mère devant nous... Puis devant eux... Moi. Avant de les tuer devant mes yeux. Je me souviens avoir tant hurlé, m'être tellement débattu qu'il a finit par me cogner sans s'arrêter en me hurlant qu'il allait me dresser... J'ai finis par m'évanouir... Et quand je me suis réveillée... J'étais je ne sais où, entre ses mains... Et il a commencé par me marquer au fer chaud dans le dos pour marquer sa propriété... avant d'honorer, comme il disait, son nouveau jouet... Ça m'a paru durer toute une vie... Ouais... Ça a duré toute une vie ensuite... Il ne restait plus de moi que mon instinct de survie. Uniquement ça pour me guider. Je sais même plus comment j'ai fait pour m'échapper... Je me souviens d'une ruelle où je me sentais en sécurité... D'une ombre qui a tenté de m'approcher... Puis d'une autre ombre qui a chassée la première... Angelo m'as expliqué pendant notre fameuse disparition que c'était Oliver. C'est l'un des mecs de son territoire à l'époque qui m'avait trouvé, et il a appelé aussi vite Oliver. Alors Oliver lui a dit de nous laisser, et il a appelé le seul flic en qui il avait confiance... Le chef de la police de sa ville... Angelo Di Cielo. Et il est venu aussi vite... Pis... il m'a jamais lâché après ça...




Je me rallumais mon mélange, ayant à peine le temps d'en prendre deux bouffées avant de me le faire prendre des mains par Nino qui le garda. Je pouvais sentir sa main sur mon épaule qui me tenait avec force, sentir ses doigts complétement crispés sur moi.



─ Apparemment, c'est les mecs sous les ordres d'Oliver qui ont retournés la ville, et qui ont finis par retomber sur la maison où j'étais détenue... Ils ont prévenu les flics, s'occupant de sortir d'autres gamines de là... Et les flics sont arrivés pile pour attraper Marc qui revenait... Il a été envoyé en prison, et Angelo n'a pus supporter la douceur du traitement... Alors il a démissionné de la police. J'ai changé de nom, de prénom, de vie... Je suis devenue un fantôme introuvable au cas où... Mais lors de mon passage sur New-York... Il m'a retrouvé... Alors il s'est échappé... Et il est venu.

─ Putain je l'ai eu sous la main ! Hurla Nino de rage. Je l'ai eu sous la main !




Je relevais le visage vers lui, posant ma main sur sa joue, croisant son regard malmené par tellement de sentiments douloureux.



─Tu l'as attrapé. Tu m'as permis de me venger. Il a été emmené dans la villa de Logan... Puis les jumeaux et Cole m'ont aidé à le tuer... C'est le plus important non... Qu'il soit mort enfin...

─ Ma matriochka... Ma si belle poupée russe...

─ Je suis là. C'est du passé... Soufflais-je contre ses lèvres. Je suis là Nino.



Je pressais mes lèvres contre les siennes, sa main libre venant glisser sur ma joue alors qu'il me rendait mon baiser avec douceur avant de poser son front contre le mien.



─ Viens Blondinette, on va aller se défouler.



Il m'embrassa le front avant de se lever, regardant Aaron qui me tenait fermement par la taille. Aaron finit pourtant par hocher la tête contre mon ventre. Se redressant, m'embrassant longuement avant de partir avec Nino.



Je me sortis une cigarette, l'allumant et la fumant alors qu'Angelo me disait qu'il allait voir les petits. Lorsque j'entendis des pas quelques minutes plus tard, je ne tournais pas la tête. Pourtant quelqu'un vint se mettre dans mon champ de vision. Il se baissa et je croisais finalement le regard de glace de Cole. Il m'observa en silence, ses mains venant doucement encadrer mon visage alors que ses pouces semblaient essuyer mon visage.



─ C'est complètement con... Commença-t-il dans un murmure, comme pour lui-même. C'est complètement con parce qu'après tous ça, après tout ce temps... Après tout ce qu'on a vécu... Tout ce que je connais de toi... Tout ce qui se passe... Malgré tout ce que je sais. Même après tout ce temps, ce regard là... Il me donne toujours envie de tout brûler comme ce jour-là. Il me donne toujours envie de te garder contre moi, de te faire oublier tes douleurs... C'est vraiment complétement con de ma part....

─ Quoi donc ?

─ De réaliser que je t'aime au-delà de l'imaginable malgré tout ça, malgré moi. Que tu sois tellement essentielle dans ma vie que je sais qu'aucune femme ne pourra te remplacer. Parce que t'es la meilleure chose qui me soit arrivée dans tout ce bordel qu'était ma vie. Parce que t'es la mère de mes enfants. Parce que t'es la meilleure amie que j'aurais pus rêvée, la meilleure alliée dans les conneries ou dans les mauvais moments... Et je me sens con... Parce que pour toi, cette maison c'est une torture, mais pour moi c'est toute ton enfance... C'est tes rires qui raisonnent encore... C'est t'imaginer avec tes frères courir partout... C'est regarder mes enfants faire les cons dans le jardin en me disant que toi et Luc pouviez être pareil... C'est me dire que tes parents vous regardaient sûrement comme moi je les regarde... C'est complétement con, parce que ce mec a réussi à pourrir tous tes souvenirs avec une journée... Pourtant... Je suis sûr que nos enfants, ils veulent entendre parler de vos vies sans ce jour-là... Parce que je meurs d'envie de l'entendre je l'avoue... Parce que je veux le voir ce sourire que tu auras sur tes lèvres... Celui qui me donne envie de te regarder des heures sans me lasser. Alors, c'est complétement con sûrement... Indécent peut-être... Mais moi je veux entendre encore des rires ici... Juste aujourd'hui. Raconte-nous les bêtises d'Angelina... Racontes nous tes parents... Donnes moi des dossiers, de quoi me moquer de Luc...

─ Je te déteste... Articulais-je dans un souffle.

─ Moi aussi... Plus que tout mon dragon. Viens là.



Il m'enveloppa dans son étreinte, se redressant tout en me portant finalement. Nous éloignant de là pour redescendre. Je me mis au piano, jouant l'ode ma mère sans même réfléchir alors que je sentais deux petits bouts venir contre moi. Je respectais la demande de Cole, parlant de mon enfance racontant nos conneries, en taisant d'autres. Parlant de mes parents, répondant encore et encore aux questions de Mila et Aylan.



C'est Maikan qui vint finalement nous interrompre, nous invitant à manger et à dormir chez lui quelques jours.

Aaron et Nino nous rejoignirent devant la maison, et alors que les enfants me suivaient, je fus surprise de voir que Maikan n'était pas venu seul.



─ Vas savoir pourquoi mais étrangement quand mon cher fils a appris que tu étais là... Il a insisté pour venir avec moi.



Le sourire de Neko ne sembla tromper personne vu le grognement d'Angelo. Mais bon en même temps, la dernière fois que je l'avais vu... C'était quand même bien sympa...



─ Je me suis dis qu'une ballade dans la montagne te plairait avant le repas. Lança Neko qui tapota l'encolure de son cheval.



Je n'eus le temps de rien dire qu'un bras me fit faire un demi-tour toute avant que je ne me retrouve dans les bras de Cole. Il croisa mon regard étonné, mais sembla royalement s'en foutre puisqu'il se pencha, caressant ma nuque tout en se saisissant de mes lèvres. Le double effet fut immédiat et j'agrippais sa nuque tout en le laissant faire prendre de la passion à ce baiser. Il provoqua avec beaucoup de talent un beau bordel dans mes hormones. Et je reconnais que j'occultais royalement ce qui pouvait m'entourer à ce moment-là.



Il termina finalement le baiser plus doucement, me permettant de revenir sur terre en douceur avant de m'embrasser sur le front.



─ Pardon mon amour tu m'attendais ? S'excusa t-il d'une voix volontairement plus forte que de raison.



Je me contentais de cligner des yeux, tournant lentement le visage vers Angelo qui s'était retourné mais dont les soubresauts dans ses épaules trahissaient son fou rire. Et je me doutais que les deux autres devaient être pareil. Je me contentais de hocher lentement la tête, tapotant son torse sans parvenir à savoir comment je devais réagir.




─ Mamannnnnnnnnnn ! Pipiiiiiiiiiiiii !



Merci Mila. C'est bien ça.



Cole relâcha son étreinte sans que je n'ai besoin de le demander, et il s'alluma une cigarette tout en allant attraper Aylan au vol.



─ Allez mon trésor, au pipi comme ta sœur. On va aller arroser le jardin pendant que Maman accompagne ta sœur.

─ Pousse pas le bouchon sale chieur. Marmonnais-je tout en passant à côté de lui.



Il partit tout en riant alors que j'amenais ma fille aux toilettes, ressortant quelques minutes plus tard avec la petite dans mes bras pour la mettre dans la voiture.



Je refermais la portière, m'allumant une cigarette alors que Neko s'approchait de moi.




─ C'est ton mec ?

─ C'est compliqué. Éludais-je.



Je sentis quelqu'un se glisser dans mon dos, se collant à moi alors qu'un bras venait entourer ma taille, l'autre main attrapant ma main tenant la cigarette. Je tournais le visage, observant Nino fumer ma cigarette l'air de rien. Il me regarda avec un air innocent.



─ Ça va je te gêne pas ?



Il souffla la fumée tout en secouant la tête avec un sourire d'enfoiré, le perdant alors qu'il se mettait à regarder Neko devant moi.



─ Elle te donne sûrement faim mais soyons limpide mec pour éviter tout souci. Elle a de quoi manger et j'aimerais pas avoir à te le faire comprendre de force avec ma blondinette. Murmura sur un ton glacial Nino.



Je posais ma main sur la joue de Nino, et celui-ci tourna aussi vite son visage vers moi. Son regard me fit comprendre qu'il s'attendait à se faire envoyer paître et pourtant je l'embrassais longuement avant de reposer mon attention sur Neko qui semblait ne plus rien comprendre. Mais bon je pouvais pas lui en vouloir le pauvre.



─ C'est vraiment compliqué... Ricanais-je. Mais pour te faire simple, il est plus viable pour toi de chasser ailleurs. Par parce qu'ils te menacent ouvertement, mais parce qu'en réalité, je n'ai qu'une liste d'amant très défini et je ne déroge plus à celle-ci. Et toute personne n'en faisant pas partie et qui tenterais d'être un peu trop proche de moi... N'aura assurément pas une seule chance de survie. Parce que je les tue sans même le réaliser... Alors on dirait pas... Mais il te sauve la vie en fait. On se connait depuis toujours toi et moi Neko. J'ai un immense respect pour ton père, et c'est pour tout cela que je préfère te dire les choses clairement. Beaucoup de choses ont changés dans ma vie durant cette année qui s'est écoulée... On a tué l'homme que je considérais comme mon âme-sœur, je suis en guerre contre des personnes. Ma vie est une noirceur sans fond où la lumière ne vient s'y perdre que rarement en ce moment alors...



Nino relâcha son étreinte, s'éloignant sous le regard de Neko.



─ Ils tiennent énormément à toi. Lâcha-t-il. Il y a beaucoup de respect et d'amour dans leurs regards quand ils te regardent. Je sais quel est ton monde dragon... L'innocence est restée dans notre enfance pour nous deux. Mais ta vie n'est pas que ténèbres. Le feu d'un dragon embrase la noirceur, tu es le phare de beaucoup de monde. Alors n'oublie pas que même si la nuit te semble durer une éternité, le soleil finit toujours par se lever.



Je hochais la tête tout en continuant de fumer et il me tendit les rennes du cheval avec un sourire en coin.



─ Je vais guider ton conducteur jusqu'à chez mon père... Tu nous rejoins ?



Je me mis à rire, attrapant les rennes tout en finissant ma cigarette avant de monter sur son cheval.



─ On se retrouve chez le vieux les mecs !




Et je partis au galop aussi vite, fermant les yeux en sentant la vitesse. Sentant le vent s'infiltrer sous mes vêtements, dans mes cheveux.


Et cela me revins, enfin.





« ─ Ne jamais abandonner. Toujours rester debout quoi qu'il arrive ma puce. Même si on tente de te mettre dans une cage, tu restes libre. Même si on tente de te faire plier, tu restes toi-même. Parce que notre sang, c'est celui des guerriers. Choisis tes batailles, gagnes les, perds les... Mais quoi qu'il arrive, n'oublie jamais que je ne t'ai pas mis sur cette terre pour mourir... Alors vis. Et si un jour tu te dis que c'est trop dur... Alors écoutes justes nos mots d'amour dans le vent pour toi... »





Oui papa, je sais.


Comment j'ai pus l'oublier.



Même après les nuits les plus longues, le soleil finit toujours par se lever.

Même sans vous voir, vous restez à nos côtés.


Je suis Angelina Naëlle Tchirkoya Gomora Médéüa... Fille de guerrier, femme du diable, Femme au Dragon. Patronne de milliers d'hommes.


C'est vrai... Pour tout cela, je dois continuer de voler.



J'avais oubliée, je le reconnais, tu ne m'as pas donné le droit de mourir papa. Tu m'as toujours enseigné que nous étions des guerriers. Et j'ai tellement de monde à continuer de protéger...


C'est vrai, même après cette très longue nuit, le soleil finira par se lever de nouveau.

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