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~Agathe ~
« Je m'appelle Agathe. J'ai 13 ans et je suis atteinte du don du cauchemar. »
C'est ce que j'aurai dû dire ce jour là. Quand l'armée est venue nous chercher, nous, atteints du don du cauchemar. Nous, les différents, les mis de cotés. Les malades comme diraient les médecins.
Aujourd'hui, quatre ans étaient passées depuis ce jour où j'avais menti sur mon origine. J'avais dû cacher le don du mieux que je pouvais, durant ces dernières années.
L'armée venait chercher les personnes atteintes du don du cauchemar dans leur pré adolescence, pour pouvoir les former à maîtriser leur pouvoir et qu'ils puissent se servir d'eux comme soldats qui nous protégeaient des menaces extérieures.
Si j'avais dit ce que j'étais vraiment, je n'aurai peut-être pas autant peur de moi-même maintenant. Ma petite vie minable aurait pu servir à quelque chose. Mais je n'avais rien dit, et j'attendais que tout change. Mais quoi ? Je ne le savais même pas moi même. Quelque chose qui changerait mon quotidien, mais en quatre ans, ce n'était toujours pas arrivé. J'attendais toujours, en vivant ma petite vie, insignifiante aux yeux des autres et même aux miens.
Je vivais dans un petit village dans la forêt, loin de la ville. Et c'était mieux ainsi. Un petit village qui comptait un peu près deux cents habitants, et tous atteints du cauchemar ordinaire. Enfin, dorénavant ils étaient tous normaux. Avant nous étions plusieurs enfant à posséder ce don, mais ils étaient tous partis avec l'armée quand elle était venue nous chercher. J'étais la seule à l'avoir cachée.
Désormais, je vivais par moi-même. Mon père étant un alcoolique égoïste et violent, avait arrêté de travailler quand j'avais à peine sept ans, quand ma mère nous avait abandonné. Depuis ce jour, je me débrouillais seule, en allant chercher de la nourriture dans la forêt quand je le pouvais et en m'occupant de la petite boutique traditionnelle que mon père tenait. Ou en volant aux autres car je n'avais pas trop le choix. Les revenus de la boutique ne rapportaient jamais assez car mon père prenait le tout pour se bourrer d'avantage avec l'alcool de baies aveuglantes.
Personne ne faisait vraiment attention à moi sauf la voisine, une vielle dame qui savait que je n'avais pas une vie facile à cause de mon père. Elle m'aidais de temps en temps, mais à cause de son âge, elle commença à oublier. C'était peut-être mieux ainsi.
Ce que je faisais le plus clair de mon temps, à part fuir mon destin, c'était de m'aventurer dans la forêt. Je la connaissais par cœur et c'était comme un refuge pour moi. Être toujours seule n'était pas facile donc être dans ce milieu, près de la nature, me faisait le plus grand bien. Enfin, je crois. Ça me faisait peut-être m'isoler encore plus, enfonçant mes craintes plus profondément dans mon âme.
Je m'étais levée tôt comme chaque matin depuis de nombreuses années. Le soleil dormait encore et une fine brume blanche enveloppa le village de Frigussilva. Ces nuages humides nomade, se déplacèrent à la recherche d'un lieu où ils seraient acceptés et non détestés. Nous dîmes qu'ils portaient malheur, qu'ils venaient de la forêt d'Imbres située à l'orée du village. Qu'ils amenaient la menace en lui permettant de se cacher à l'intérieur.
L'humidité entra en contacte avec mes jambes nues quand je sortis de la maison. Être en short et tunique à cette saison de l'année n'est peut-être pas la meilleure des idées, mais je m'en souciais peu. Je me mît à marcher en direction de la forêt, un panier de vannerie à la main. Je réajusta mon foulard blanc jaunît par le temps sur mes long cheveux d'un brun profond, emmêlées par les nombreux jours sans s'en aucuns soins.
Je marchais sur les dalles de pierre brut, humides et glissantes. Silencieuse, je regardais devant moi. Le brouillard se présentait épais ce matin, je ne voyait rien. J'avançais donc prudemment pour ne pas trébucher sur une pierre trop pressée de sortir du chemin ou sur une truffe givrée. C'étaient des sortes de champignons ou en tout cas je les considérais comme tel, en formes de petite boules grises. Elles se fondaient parfaitement entre les rochers. Le problème était que quand on les piétinait, de minuscules aiguilles de glace se plantaient sur la zone touchée et la rendait gelée et glissante. Par quelques expériences dans le passé je m'étais renseignée sur le sujet. Malheureusement ou heureusement, depuis une ou deux années, ces champignons apparaissent que rarement, ce qui désola ma curiosité.
Je finis par vite arriver à la forêt, le brouillard se dissipa gentiment et je pu apercevoir les détails de la nature. La brume humide se faufilait entre les feuilles des arbres et les aiguilles des sapins. La rosée couvrait l'herbe verte et les toiles d'araignées fraîchement tissées. Les fleurs peinaient à arriver, le froid s'étant éternisé un mois de trop.
Je pénétra entre les arbres et mes pieds nus entre en contact avec la nature humides.
Je marchais en évitant les jeunes pousses d'arbres et de plantes. Le soleil pointa gentiment le bout de son nez, au loin dans la prairie. J'avança doucement et regarde le sol, à la recherche de champignons. La saison commençait à peine donc je ne m'attendis pas à trouver grand chose. Ma peau refroidie par l'humidité et le froid de la matinée se faisait gentiment caresser par l'herbe un peu trop haute, me témoignant de mes précédents doutes sur la poussent des champignons.
Après peut-être une heure, le soleil traversait déjà de ses rayons les branches des arbres. Je m'arrêta de marcher et regarda autour de moi. La légère chaleur du soleil réchauffa la nature mouillée et par la même occasion, m'a peau refroidie. Je regarda autour de moi. Je respira l'air frais à plein poumon avant de reprendre ma marche et de m'enfoncer entre les arbres. Je savais que je devais bientôt rentrer mais mon instinct me disait de continuer. Il ne me trompa pas. Sur le sol, entre deux rochers mousseux, je trouva non pas un, mais deux champi trompettes. Ceux que je cherchait. Malgré le froid ils avaient trouvé un nid pour grandir.
Je les ramassa, consciente que je ne pourrais pas les manger car mon père le fera sûrement avant moi. En me relevant je me rendis finalement compte du temps qui avais passé et me pressa de rentrer, passant entre les arbres et le sol mousseux. D'après mes explorations ceci était un raccourci, et il m'avait bien souvent été pratique pour rejoindre le village plus rapidement.
J'arriva enfin dans une ruelle animée de Frigussilva, me révélant que l'heure du réveil était déjà passé. Les stands du marché étaient déjà pour la plupart ouverts, et présentaient leurs produits frais. En me faufilant entre deux personnes, je chipa une groseille Rosa. Elles avaient le goût acides d'une orange, mais la texture ferme d'une pomme. Ceci serait mon repas du jour puisque personne ne m'avait vu le voler.
J'arriva finalement à la maison, éloignée de la place du marché, dans une ruelle large mais dépourvue de maisons. J'ouvris délicatement la porte, évitant de la faire grincer pour ne pas réveiller mon père. N'entendant aucun bruit, je partis du principe qu'il dormait encore d'un sommeil alcoolisé. Je me faufilais dans la petite cuisine, sur la pointe des pieds. Je posa mon panier sur le plan de travail en bois. Je fis attention de ne pas glisser sur le carrelage en pierre jaunit à cause de mes pieds mouillés.
J'alluma un feu dans le mini-four et posa sur son toit plat une poêle noire de fortune. Elle devait dater d'au moins trente ans vu son état malgré les efforts fait pour la rajeunir. Je récupérais des œufs dans la boîte en bois faite à leur effigie et les cassaient dans un bol. Je lava les champignons frais et concocta rapidement une omelette. Pendant sa cuisson, je lava mon fruit volé que je dégusta. Son liquide rose me dégoulina sur le menton tellement il était juteux. Il rempli timidement mon ventre vide.
Après quelques minutes, j'entendis du bruit dans le salon. Alertée, je vérifia de suite le plat et le débarrassa sur une assiette. Je porta des couverts et le petit-déjeuner vers le bruit, cherchant mon père. Je passa le couloir étroit aux murs verts gazon et pénétra dans la pièce. Mes yeux se posèrent d'instinct sur le vieux canapé mais bizarrement il ne s'y trouva pas. La panique m'envahit. Que faire ? Me pressais-je.
Une mains sur mon épaule me fit sursauter, et l'omelette faillit faire un bond au plafond. Je me retourna et aperçu mon tuteur, debout, me surplombant de sa hauteur. Il pue l'alcool. Ce fut la première pensée qui me vint avec un frisson de dégoût. Je lui tendit l'assiette pendant qu'il m'observais de ses yeux bleus vides. J'évita de parler car souvent il se mettait en colère à cet instant précis.
Il étudia le plat et le saisit en me fixant. Je sentis le malaise s'installer en moi pendant que je devais sûrement pâlir. L'homme alla s'asseoir en titubant sur le canapé, manquant de faire s'écraser la crêpe d'œuf sur le sol. Je restais debout, mes mains jointes en avant en écoutant les battements de mon cœur s'accélérer. Il dévora sans pitié et sans manière le plat. Il en mit partout sur le sol et sur la petite table basse ronde en bois foncé. Mais soudainement il s'arrêta et commença à tousser. Dévoré trop vite. Pensais-je en pâlissant et déglutissant à grande peine.
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~extérieur ~
L'homme s'essuya la bouche d'un revers de main et tourna son regard vers la jeune fille qui, figée, resta près de la porte menant au couloir. Son regard vide se changea en un regard fous, révélant ses intentions à sa fille. Il poussa l'assiette sur la table basse, qui glissa jusqu'à se rompre sur le sol en plusieurs morceaux. Agathe sursauta et pâlit de plus belle. Dans ses yeux marrons, la peur se reflétait.
Le grand homme se leva et avança lentement vers la jeune fille, tétanisée. Il commença à lui crier des injures, l'insultant ouvertement. Il mettait à chaque fois la faute sur elle.
- POUR QUI TU T'PRENDS SALE GARCE ?!!!!! T'CROYAIS POUVOIR M'AVOIR COMME ÇA P'TIT PÉTASSE ?!!!
Cracha t'il en insistant bien sur les mots insultants. Il leva son bras et un fort son résonna dans la salle. Le bruit de la gifle qui venait de partir. Agathe avait fait quelques pas en arrière, légèrement sonnée par le choc. Elle ne fit pas la bêtise de lever la tête et fixa bien le sol. Sa joue rouge lui picotait mais elle se retint de la toucher. Son père s'énerva et balbutia encore et encore des insultes, qu'elle n'écoutais plus. Elle se contenta d'encaisser deux trois derniers coups de pieds dans les côtes et de poings sur les bras en se recroquevillant sur le sol. La jeune fille ne put empêcher de faibles larmes d'emplir ses yeux et de couler sur ses joues.
Après peut-être une dizaine de minutes, le grand homme s'en alla, grommelant de mécontentement. Agathe entendit la porte d'entrée claquer et faire vibrer le bois de la maison. Ce ne fut qu'à cet instant qu'elle reprit une respiration, tremblante. Elle attendit plusieurs minutes, pour être sûre qu'il était bien partit. Elle n'osais pas bouger, chacun de ses tremblements la faisaient sursauter.
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