Apophtègme IV - Ne pas se suicider
"La petite équipe se trouve toujours dans le village, après avoir promis à l'aubergiste de retrouver son fils perdu. Ils se retrouvent alors chacun avec leur démon personnel et font la rencontre d'un personnage qui ne présage rien de bon: le commandant Hugo Hugues..."
La cloche de l'Eglise sonna midi.
Tandis qu'un chaton se pelotonnait contre la jambe du plus jeune, des carrioles en toutes genres fusaient dans les rues, chargées à ras-bord, prédisant une livraison certaine de produits - pour la plupart - comestibles.
Deux de celles- ci, face à face, avançaient à toute allure et se percutèrent de plein fouet: la première, plus lourde, se coucha simplement mais la seconde fit au moins cinq ou six tonneaux avant de se déverser entièrement sur la route; pile devant les jeunes gens.
Le vieil homme qui conduisait cette dernière charrette se retrouva écrasé sous celle-ci mais parvint, en s'aidant de ses coudes, à s'extirper de cette position délicate.
Démuni devant ce désolant spectacle, il se tourna vers le jeune homme aux cheveux de neige - qu'il trouvait assez bien taillé pour lui venir en aide - et lui demanda de lui prêter main forte pour soulever la carriole:
- Je ne suis pas intéressé. Répondit-il
- Voyons... Je ne te demande pas grand chose, tu pourrais m'aider, ça devrait être facile pour toi!
- Écoute, j'ai dit "non" c'est "non". Je ne suis vraiment pas d'humeur alors ne me les brise pas, Papi!
- Espèce d'insolent! Ce n'est pas ainsi qu'on doit s'adresser à un aîné, petit fils de catin!
- Pardon?!
Fou de rage, le jeune homme s'avança vers le vieillard et l'empoigna par le col:
- Je ne laisse personne m'insulter de la sorte, sache-le, Papi. J'ai un minimum de respect pour les croulants dans ton genre, sinon je t'aurais déjà arraché les doigts. Maintenant, si tu veux éviter les ennuies, tu dégage en vitesse de ma vue et tu fais en sorte que nos routes ne se croisent plus jamais. Ai-je été assez clair?!
- Es-tu fou?! Lâche ce vieil homme! Intervint la demoiselle
- Ne te mêle pas à ça, la poufiasse!
- Espèce d'idiot. Susurra-t-elle en serrant les dents.
Elle écarta l'homme du garçon et colla violemment sa main sur la joue de celui-ci dans un bruit sonore avant de partir en courant, emportant avec elle son dit petit-frère.
Resté seul, abandonné, vide encore une fois. C'était de sa faute, il le savait, il était le seul à blâmer. Alors qu'il venait juste de commencer à les apprécier...
Quelle merde...
Il connaissait son caractère et il savait qu'il devrait faire des efforts.... Mais dans quel but?
Quel était son rêve? Ses objectifs à accomplir?
Il n'en avait pas. Finalement, il n'avait absolument aucun but dans la vie. Il était comme une plante fanée, tentant vainement de rester en vie pour espérer grappiller encore quelques minutes de soleil. Il n'avait rien à faire ici, il était déjà mort à l'intérieur, il se contentait de traîner sa carcasse encore et toujours, se voilant la face, pensant naïvement que demain serait un jour meilleur.
Seulement "demain" n'existe que pour ceux qui ont la force de faire bouger les choses. Il ne l'avait plus.
Il commença à avancer aléatoirement, ayant pour unique intérêt de chasser ses idées noires quand il crut apercevoir quelque chose qui attisa son attention. Il s'approcha pour mieux voir et fut pris d'un violent haut-le-cœur lorsqu'il comprit ce qui se passait réellement.
Il fit demi-tour, courant, volant presque, obnubilé par une seule et même pensée: prévenir ses acolytes avant qu'il ne soit trop tard!
Enfin, il les aperçut:
" - SHAÏ'! SHAÏ', ATTEND C'EST IMPORTANT!"
Elle s'arrêta exaspérée, entraînant avec elle le petit brun ce qui permit au plus âgé de les rejoindre:
- Qu'est ce que tu veux, Break?
- Des gars de l'armée... Ils sont là... Ils vérifient les manches de tout le monde... Il faut partir! Expliqua-t-il en tentant de reprendre sa respiration
- Mais s'ils sont là ça veut dire que... Oh mon D., le village!
Ils entrèrent dans la première coche qu'ils trouvèrent, abandonnant la redingote du garçon au chauffeur à la place de quelques sous. Voyant que la jeune fille n'était pas très à l'aise, l'adolescent décida de détendre un peu l'atmosphère - chose qu'il ne faisait jamais- :
- Tu sais comment est-ce qu'on appelle ce type de voiture?
- Non, comment?
- Un break...
- C'est donc pour ça qu'on y sent tant de secousses? Ironisa-t-elle en ne pouvant réprimer une esquisse de sourire
- Peut-être est-ce parce que tu n'y es pas bien accrochée, ma chère...?
- Sûrement...
- Je n'ai pas l'habitude de le dire mais... Je m'excuse pour tout à l'heure...
- Tu es tout pardonné.
Ils arrivèrent à destination. A peine descendus du véhicule, ils accoururent vers le village et s'y engouffrèrent sans une once d'hésitation: personne à l'horizon. Ils avancèrent dans les ruelles, méfiants. Une fois sur la place du bourg, ils comprirent que l'endroit était vraiment désert; seul un détail n'échappa pas au plus jeune: la boussole était toujours là, au même endroit où il l'avait laissée. Personne n'y avait touchée:
- Si personne ne l'a rangée c'est qu'ils ont dû partir précipitamment. Déduit le garçon tatoué "F".
Soudain, la jeune fille vit une caisse bouger. Elle s'approcha doucement, sans faire de bruit. Arrivée à une certaine hauteur, elle souleva le couvercle de la caisse. Qu'elle ne fut pas sa surprise lorsqu'elle vit à l'intérieur un petit garçon tout blond, grelotant:
- Kylion! Seigneur, que fais tu ici?! Où sont passés les autres?!
- I-Ils les ont tous emmenés... Se mit-il à pleurer. Moi, j-je. Me suis caché là, i-ils ne m'ont pas trouvé...
Cette fois il éclata littéralement en sanglots. La jeune fille le prit dans ses bras pour le consoler. Il était gelé.
- Hé gamin! Lança l'adolescent. Tu sais à quoi ressemblait la personne qui les a emmenés?
- Euh... Ils étaient plusieurs mais il y en avait un qui semblait être leur chef... Je ne sais plus trop à quoi il ressemblait... Ah! Je me souviens qu'il avait une grande cicatrice sur le visage.
- J'en étais sûr! Le salopard....
- De quoi tu parles? Demanda la fille.
- Ce type, le commandant machin-bidule, je savais qu'il n'était pas net ce type!
Tandis que la jeune fille tentait tant bien que mal de consoler les deux petits, l'adolescent aux cheveux blancs partit faire le tour du village afin de vérifier qu'il n'y restait plus personne. S'il essayait de rester humble et fort, ses pensées, elles, divaguaient sur tout autre chose.
Meurs, meurs, meurs, vis tant que tu en meurs! Étouffe-toi, noies-toi, meurs!
Une après l'autre, il fouilla chaque maison - si l'on pouvait les appeler ainsi - mais ne trouva rien.
Venge tous ceux à qui tu as pris la vie! Meurs! Tu ne sers à rien sur cette Terre! Bâtard! Fils de catin!
Il se tourna finalement devant le dernier lieu qu'il n'avait pas visité, c'était un grand bâtiment en briques brunes avec pour fenêtres des vitraux colorés qui donnaient un aspect religieux à l'ensemble. Il entra. L'intérieur était plutôt sombre et seul le centre de l'endroit bénéficiait d'une source de lumière. Il s'approcha doucement, sur un pied d'escale se trouvait un livre...
MEURS! NE COMPRENDS-TU PAS TOUTES CES SOUFFRANCES QUE TU AS CAUSÉES?! TU ES RÉPUGNANT! ABJECT! DÉCÈDE!
Il prit le livre entre ses mains: il avait une couverture entièrement noire et ses pages n'étaient plus tout à fait blanches... Il inspirait légèrement de l'appréhension et de la crainte... Il était épais et lourd en plus de cela.
Le jeune homme ouvrit une page au hasard; il ne savait pas lire de toute façon. Seulement, lorsqu'il posa ses yeux sur une des lignes de la page, et bien qu'il ne sache la déchiffrer, il en comprit le sens. Parce qu'il l'avait déjà vu, parce qu'on lui avait déjà dit:
Ne te suicide pas...
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Merci d'avoir lu!
Voilà donc, je remets ce chapitre en ligne après l'avoir décalé donc voilà, j'espère qu'il vous plaira ou vous replaira!
Sur ce, merci et à plus<3
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