Chapitre 3

En sortant de là j'eut une très étrange impression. La femme avait parlé d'accidents, de vols, et d'une fille rendue à moitié folle, mais jamais elle n'évoqua très clairement la culpabilité du petit Ligheton. C'était plutôt un sentiment de forte suspicion. Il m'apparut assez clairement que j'avais envie de croire en tout cela, parce que ça faisait une histoire formidable, naturellement.

Mais plus j'y réfléchissais, plus il devenait difficile de crier à sa culpabilité dans un cas, l'accident avec la mendiante, comme dans l'autre, ces accidents à l'orphelinat. Il était impossible que je fasse le lien entre tout ça sur de simples histoires qui semblaient être tout juste bonne à effrayer les enfants.

Néanmoins, il y avait un fait assez clair. Ligheton avait changé de prénom, de Edward il était passé à Godric un nom moins commun, et il semblait bel et bien qu'il ne soit jamais allé à Harvard. En y réfléchissant, je me dit que c'était là mon autre piste.

Si Ligheton n'était pas allé à Harvard comme je le soupçonnais, où était-il donc allé faire ses études ? La vieille femme de l'orphelinat m'avait dit qu'il avait disparu après qu'un professeur l'eut emmené. Elle peinait à se souvenir du nom de l'école, mais elle me décrivit le personnage avec tant de détails que je décidais de chercher cette piste là.

Après avoir fouillé les archives des écoles privées d'Angleterre, et n'avoir eut aucun résultat, je cherchais cet homme dont elle m'avait parlé. J'avais une vague description et des indications sur un accent étrange, un nom à consonance étrangère. La piste semblait s'arrêter là.

Je repartis en Louisiane. Un journal m'offrait une somme rondelette pour un dossier sur un musicien de jazz d'origine japonaise qui venait de s'installer à la Nouvelle Orléans. Pendant plusieurs mois je me concentrais sur mon musicien et oubliait ce cher Godric jusqu'à ce que soudainement tout rejaillisse.

C'était à une soirée de bienfaisance que je tombais sur un homme durant une soirée qui évoqua le nom d'un ami à lui, et aussitôt que j'entendis ce nom je su que c'était lui. La description collait à la perfection. Cet homme étant l'ancien directeur d'une école privée.

Retrouver la piste du professeur Barrow ne fut pas si évident que cela. L'ennuis est que l'homme s'était retiré dans une île en Irlande. Bien sûr, il n'y avait aucun moyen de le contacter, du moins, moderne. Aussi je lui envoyais une lettre. Et au cours de mon attente de sa réponse.

Mon contact qui m'avait mis sur la piste avait semble-t-il apprécié ma conversation car il m'invita chez lui, pensant sans doute que je ferais un article sur lui, qui était un collectionneur et amateur d'objets d'arts. Naturellement, j'en profitais pour tenter de le faire parler. J'évoquais le nom du professeur Barrow à nouveau, et n'obtient que de vagues souvenirs, en revanche en prononçant le nom de Godric le résultat fut stupéfiant.

Il me prit le bras, de ses vieux doigts usés, et me regarda avec des étincelles jaillissant de ses prunelles.

« Bien sûr que je m'en souviens ! fit-il avec sa voix chevrotante de vieil homme. Godric était l'un de mes meilleurs élèves.

Il m'expliqua rapidement qu'il avait été professeur durant dix ans au sein de cette fameuse école, et qu'il était très fier d'avoir aidé ces jeunes en difficultés. Il ne s'étendit guère sur son travail ou encore l'organisme dont il évoqua simplement le nom, mais en revanche au sujet de Godric, il s'avéra intarissable.

— Godric a toujours été convaincu d'avoir un destin extraordinaire. Je me souviens de la première fois que je l'ai rencontré. Il n'était qu'un enfant à l'époque. Mais son intelligence était bien supérieure à la normale. Il avait un véritable sens de l'observation, et c'était extraordinaire de le voir à l'œuvre. Mais son intelligence le mettait à l'écart. Je pense qu'il a toujours eut cette volonté d'être différent. Tout ce qui lui rappelait qu'il était un être humain comme les autres, ça le rendait en quelque sorte furieux. Je crois qu'il détestait son nom de famille parce qu'il était trop commun. Tout comme...

« Vous savez il n'avait aucuns amis à l'orphelinat. Je veux dire, il aurait pu se faire des amis, j'ai remarqué plus tard, son talent pour éblouir les autres, il aurait pu se faire pleins d'amis mais il ne le voulait pas. C'est là tout l'importance. Il a toujours su qu'il était hors du commun, et quelque part voulait qu'on le reconnaisse mais de manière assez contradictoire, il ne supportait pas les autres.

« Etre entouré de gens banaux l'insupportait je crois. Mais au fond, je pense qu'il est également très indépendant. Peut-être est-ce de la méfiance ou autre chose, c'est difficile à affirmer de manière certaine mais je, enfin, il me semble qu'il n'a jamais pu faire suffisamment confiance à qui que ce soit. »

Le plus étonnant est que je reçu la lettre de Barrow le lendemain de cette fameuse soirée. J'étais encore troublé de tous ces éléments flatteurs dont m'avait abreuvé ce vieil homme au sujet de Ligheton alors que jusqu'à présent tout portait à croire qu'il n'était qu'un horrible personnage.

Je me demandais quelle était la part de vérité dans tout cela.

Soit cet homme souffrait d'une terrible dualité, soit les témoins exagéreraient. Il me semblait impossible qu'on puisse avoir des opinions aussi différentes à propos d'une seule et même personne. Comme Ligheton pouvait-il avoir fasciné ainsi de la sorte son vieux professeur et avoir eut une influence si néfaste sur la directrice de son orphelinat ?

Aux yeux de l'un il semblait être un ange tombé du ciel, un fils prodigue, et de l'autre, une créature tout droit sortie de l'enfer. Je me disais que l'un des deux avaient forcément tord, mais peut-être que la situation était plus complexe que je me l'imaginais.

En tout cas, la lettre que je reçut fut des plus agréables. Barrow m'affirmait qu'il était étonné par mon enquête et qu'en premier lieu, il avait eut envie de me refuser poliment cette entrevue, que remuer le passé n'était guère une bonne chose. Et cependant, il mourrait d'envie d'avoir des nouvelles de Ligheton, et il ajouta que la vérité lui avait toujours semblé quelque chose d'important. En somme il acceptait de me rencontré selon certaines conditions.

Il ne voulait pas que la conversation soit enregistré ni que j'évoque son nom dans l'éventualité d'un article. Je lui répondit que j'acceptais naturellement toutes ses conditions et qu'il pouvait convenir de l'heure du rendez-vous et du jour comme il le souhaitait.

J'attendis sa réponse avec une impatience et une fébrilité qui m'étonna. Jamais je n'avais été aussi impatient de rencontrer quelqu'un, mais j'avais le sentiment intime qu'il allait m'offrir la clé de toute l'histoire.

C'était sans doute absurde, mais il était la seule personne à l'avoir connu enfant, et l'avoir vu grandir, de plus d'après les différents témoignages et les lettres de lui, Barrow me semblait être quelqu'un avec la tête sur les épaules comme on dit. Car je ne pouvais me défaire de l'impression que Miss Veidt, la directrice de l'orphelinat, était une vieille femme aigri et après tout, il semblait normal qu'elle ai un ressentiment envers les enfants qui avaient pu lui mener la vie dure.

Et puis le professeur que j'avais croisé à la soirée, et dont le nom m'échappait, semblait totalement fasciné par Ligheton, de sortes que, je n'étais pas vraiment sûr de la foi que je pouvais accordé à leur témoignage. Celui de Barrow pourrait trancher le vrai du faux, et peut-être que je me faisait de faux espoirs, mais néanmoins je me rendis chez lui plein d'espoir.

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