Chapitre 3

« Nous allons consacrer cette année à étudier l'évolution de l'intégration des Particuliers dans la société du premier siècle à nos jours. Enfin, du premier siècle au vingt-et-unième siècle. Pas du premier siècle au quatorzième siècle, ce serait quelque peu réducteur. Bref. »

Arthur sent un coude lui rentrer dans les côtes. C'est Enzo, assis à côté de lui, qui attire son attention.

« Le vingt-et-unième siècle existe déjà ? » chuchote-t-il avec un sourire en coin.

Arthur acquiesce.

« Tu viens de quand ? demande-t-il à son voisin.

– Avant que j'arrive ici, on était en 1920. Et toi ?

– 1997. »

Enzo siffle d'admiration. Il faut plusieurs secondes aux deux garçons pour se rendre compte que le professeur s'est interrompu et les fixe d'un regard mauvais. Les fautifs baissent les yeux.

« Bien, reprend le professeur. Je suis Archibald Georges, votre professeur d'histoire de la Particularité. J'attends de vous une écoute attentive, du travail personnel, de l'intérêt, de la curiosité intellectuelle, de la rigueur, de... bref. Vous avez compris. En tant que Particuliers, notre héritage est immense et riche, et nous nous devons de le respecter. »

Enzo adresse un nouveau coup de coude à l'intention d'Arthur et lève ostensiblement les yeux au ciel. Arthur sourit, s'empare d'un crayon et griffonne un dessin sur un coin de feuille. Il offre son œuvre à Enzo ; M. Georges y est représenté, la grosseur de sa tête exagérée. Enzo pouffe, ce qui lui vaut un nouveau regard meurtrier de la part du professeur d'histoire.

« Au vingt-et-unième siècle, les Particuliers sont très mal vus. Dans cette société, tout ce qui s'éloigne de la norme est considéré comme inapte à s'intégrer dans la communauté et est rejeté. Les Particuliers sont à l'opposé de la norme ; aussi sont-ils reniés. Ils sont forcés de vivre cachés, dans l'ombre de la société. Les rares Particuliers à être devenus célèbres l'ont fait en cachant leur Particularité : par exemple, l'actrice Emma Watson, le Président des États-Unis Barack Obama ou encore l'écrivain Stephen King. Quelqu'un peut-il citer un facteur qui a renforcé l'exclusion des Particuliers au profit de la norme ? »

Une main se lève. Elle appartient à une jeune fille aux cheveux sombres coupés courts, dont le visage semble habité d'une perpétuelle moue de défi.

« Oui, Miss Guillermo.

– Les réseaux sociaux. »

Le professeur d'histoire hoche la tête. Enzo se tourne vers son voisin, les sourcils froncés.

« Les quoi ?

– Les réseaux sociaux. Ils ont essayé de m'expliquer, mais je n'ai jamais compris. »

Mais Enzo n'a pas écouté la réponse d'Arthur. Ses yeux sont restés scotchés sur la jeune fille qui a répondu à la question de M. Georges.

« C'est qui ? demande-t-il.

– Lucia Guillermo. »

Un sourire se dessine sur le visage d'Enzo.

« Elle est jolie.

– Je ne te conseille pas de l'approcher. Tu sais que les relations amoureuses entre maisons sont interdites ?

– Et alors ? »

Une lueur de défi brille dans les yeux du jeune homme.

« Crois-moi, cette fille est dangereuse. C'est une Raven. Elle n'a pas une once de gentillesse dans le cœur. Et sa Particularité... »

Enzo attend une suite qui ne vient pas.

« Sa Particularité... ? »

Arthur fait craquer ses doigts nerveusement.

« Elle peut te faire faire n'importe quoi, souffle-t-il finalement. Il suffit qu'elle te l'ordonne, et tu le fais.

– Tu blagues... »

Comme si elle avait entendu leurs paroles, la fille se retourne et plante son regard vide de chaleur dans celui d'Enzo.

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