Chapitre 10

                  

Cali Wolfe contemple le corps allongé à ses pieds. Celui-ci, tordu dans une étrange position, semble celui d'un pantin désarticulé. Sans vie. Cali s'agenouille et attrape la main glacée du garçon. Prise de terreur, elle se met à secouer le corps, passant ses doigts sur le visage immobile.

Enfin, après plusieurs secondes, elle sent un mouvement. Doucement, le garçon tourne la tête et laisse échapper un gémissement. Puis il ouvre les paupières.

Horrifiée, Cali a un mouvement de recul et ouvre la bouche pour laisser échapper un cri de terreur. Les yeux du garçon sont complètement noirs.

*

Miss Hawk laisse sa phrase en suspens pour se précipiter vers l'origine du cri. Elle atteint la nef de la cathédrale, déserte à cette heure-ci ; dans le chœur, elle distingue deux formes humaines.

Après un instant d'immobilité, elle s'élance vers eux. Et se fige en découvrant ce qui a causé le cri.

Elle reconnait la jeune Cali Wolfe, penchée au-dessus d'un garçon de classe 5 allongé par terre. Son visage ne trahit aucune émotion quand elle remarque les yeux du garçon. Le blanc de l'œil et l'iris semblent avoir été entièrement avalés par les pupilles, immenses, noires, sans fond.

« Qu'avez-vous fait, Miss Wolfe ? », demande-t-elle d'un ton froid.

La fille secoue la tête, des larmes dans les yeux.

« Qu'avez-vous fait ?

– Rien, souffle-t-elle. Je... je viens de le trouver, comme ça. »

Miss Hawk réfléchit à toute vitesse. Sa première idée est de dissimuler cet événement aux élèves. Déplacer l'enfant, passer un pacte de confidentialité avec la jeune Cali Wolfe, faire croire à une maladie. Mais il faudra trouver une explication pour le cri...

Elle doit abandonner l'idée en se rendant compte qu'un attroupement d'enfants s'est déjà formé autour du garçon. Cali Wolfe en a profité pour disparaître, comme à son habitude. Miss Hawk écarte les élèves sans ménagement, se saisit du garçon et l'entraîne vers l'infirmerie.

*

Isaac ne peut détourner son regard des yeux noirs comme l'onyx du garçon. De lointaines paroles d'un cours de défense contre les forces du mal lui reviennent. Lorsqu'un détraqueur aspire l'âme d'un Particulier, celui-ci est réduit à l'état de légume, incapable de parler, de réfléchir, encore moins d'employer sa Particularité. L'œuvre du détraqueur est visible physiquement chez le Particulier, dont les yeux deviennent complètement noirs.

Et d'autres, beaucoup plus récentes. Vous êtes parfaitement en sécurité entre ces murs. Quatre des plus puissantes Ombrunes du monde réunissent leurs forces pour vous protéger. Nos chers détraqueurs ne peuvent pas entrer dans l'école.

Isaac frissonne et sent de grosses gouttes de sueur couler dans son dos. Sa vision devient floue ; il cligne deux fois des yeux. Ainsi qu'il s'y attendait, le monde commence à ralentir autour de lui tandis que sa fréquence cardiaque s'accélère. Il sent toute la chaleur de son corps remonter vers sa tête, de grosses crampes lui tordent l'estomac. Il s'assoit par terre – ou il tombe, il ne sait pas vraiment – et ferme les yeux.

« Un... deux... trois... quatre... cinq... six... sept... huit... neuf... dix. »

Si même l'école ne peut lui apporter de protection, comment continuer ?

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