17. Tourner la page
Ambre était toujours sur le même banc lorsque je sortis. Ma détermination chuta brusquement et un sentiment de vide s'empara de moi. Je savais très bien de quoi nous allions parler, mais cette discussion m'angoissait désormais. Je m'assis lentement près d'elle alors qu'elle évitait soigneusement mon regard. En la voyant se tordre nerveusement les mains, ma gorge se serra et je tendis la main pour attraper la sienne dans l'espoir de lui donner du courage. Ou alors m'en donner à moi-même. Dans tous les cas, ça n'eus comme effet que de causer l'inverse. Ma meilleure amie se tourna vers moi, l'air coupable. Elle se lança :
- Momo... Je l'aime. Je veux vivre avec lui.
Je dévisageais Ambre, désorientée. Mais pourquoi n'avais-je pas fais le lien entre les sentiments qu'elle avait pour Rick et ses choix d'avenirs !? C'était pourtant ma meilleure amie, ma seule amie, depuis tellement d'années ! Je parvins à demander :
- Depuis... Combien de temps ?
- C'est tous récent... Je n'ai changé d'avis que pendant l'Examen...
Ce fut comme si on m'avait planté un poignard dans l'estomac. Je détournais la tête et me mordis la lèvre inférieure pour ne pas hurler. Ce n'était pas de ça que je lui parlais, mais la réponse était aussi claire... Je recommençais, essayant de contrôler le tremblement de ma voix :
- Non, pas ça... Depuis combien de temps l'aimes-tu ?
- Je l'aime depuis la première fois où on l'a vu à la rivière.
Si sa voix était calme et posée, ses yeux brillaient de tristesse. Je baissais la tête. Je me souvenais très bien de cet après-midi où nous avions vu Rick. Elle journée m'avait marquée comme elle, mais pas de la même façon.
Flash-Back :
Nous avions 14 ans et on allait à la rivière tous les soirs après l'Ecole. A cette époque, j'étais quelqu'un d'assez sociable et je partageais les passions des autres Elèves de ma classe, c'est à dire : m'amuser et désobéir aux Lois. Ce jour-là ne fit pas exception et on se trouvait sur le bord de la rivière, entourées d'autres. Alors qu'on parlait de tout et de rien, Ambre s'exclama alors :
- Hé, regardez là-bas !
On se tournait tous vers l'endroit indiquée, curieux. Deux garçons se battaient au corps à corps, l'eau leur arrivant à la taille. Je reconnus le brun comme étant un Elève ayant un an de plus que nous. Mais l'autre m'était inconnu. Mais il me marqua par sa carrure et la rage que je percevais dans les coups de poings qu'il assénait à son adversaire. Ce dernier finit par s'effondrer dans l'eau dans un bruit d'éclaboussures. Les Elèves autour de moi applaudirent le vainqueur, Ambre y comprit. Mais moi, je ne bougeais pas. Car il provoquait en moi une peur sourde et injustifiée. Je ne le connaissais pas encore mais, au sourire arrogant et puéril qu'il affichait, je sus que ce n'était pas quelqu'un de bien. Cependant, à partir de ce jour, il devint le garçon le plus populaire de l'Ecole. Tous l'admiraient et voulaient être aussi fort que lui. Moi, je le détestais déjà pour cela...
Je regardais mes pieds, perdue. Je ne cessais de me demander comment j'avais pu manquer ça. Ne faisais-je pas attention à ce que ressentait Ambre ? Etais-je égoïste à ce point ? Ma meilleure amie déclara avec hésitation :
- Tu... Tu n'y es pour rien... Je... Je ne voulais pas te le dire.
- Mais pourquoi !? m'énervais-je en la fusillant du regard.
- Parce que je savais que tu allais m'en vouloir.
Je serrais les poings, prise d'une colère sourde. Je lui en voulais. Elle ne serait pas mon Chaperon et cela me déstabilisait plus que ça ne devrait. Je lui en voulais surtout car elle ne m'avait rien dit. Elle avait tord, je ne lui en aurais pas voulu. Je n'aurais sans doute pas approuvé, mais j'aurais tout de même été là pour elle. Elle m'avait empêché d'être là, voilà ce qui clochait. J'en étais blessée, j'avais l'impression d'avoir été trahie, sans vraiment l'avoir été. Je levais les yeux vers elle sans rien dire. Elle dû voir quelques chose dans mon regard car elle supplia soudain :
- Moïra, pardonnes-moi ! S'il te plait ...
Je fus incapable de répondre. Une autre émotion naissait en moi et je ne faisais rien pour la repousser. Je ressentais le besoin urgent de frapper dans quelque chose, dans quelqu'un. Et je savais que ce quelqu'un en question se trouvait dans l'Arène, à fêter les Résultats des Tests avec les autres élèves ayant eu leur Examen. Ambre fit un pas en avant, la main tendue :
- Momo ? Tu me détestes ?
Je me détendis brusquement. Je la détestais ? Bien sûr que non. Ce n'était pas elle que je détestais. A ma plus grande surprise, même si je voulais le réduire en charpies, je détestais un peu moins Rick maintenant que je savais qu'il comptait pour elle. Non, celle que je détestais, c'était moi-même. Je me maudissais pour n'avoir rien vu. Je fis un pas en arrière et elle se figea.
- Momo ? A quoi tu penses ? Dis-moi, je t'en prie !
A quoi je pensais ? Je pensais que j'avais tous gâché en réagissant comme je l'avais fais. Je savais ce qu'il me restait à faire, même si ça me déchirait le cœur. Je n'avais pas été là pour Ambre alors qu'elle avait toujours été là pour moi. Elle ne serait pas mon Chaperon, je devais l'accepter. Je devais accepter qu'elle aime Rick. Je déclarais, d'une voix qui me parut étrangement froide et détachée :
- Je ne te déteste pas, Ambre. Comment le pourrais-je ? J'accepte ta décision.
- Moïra ? s'étonna-t'elle. Qu'est-ce que tu racontes ? Tu ne m'en veux pas ?
- Tu n'as rien fais de mal, Ambre. C'est moi qui n'ai pas su te comprendre.
- Mais...
Je secouais la tête, la coupant dans son élan. A la détresse qui apparu dans ses yeux je sus qu'elle avait suivit mon raisonnement. Je fermai les yeux un instant avant de reprendre, faisant taire l'ouragan qui me balayait le cœur :
- Je te souhaites de trouver ta voie aux côtés de Rick. Il saura te protéger.
- Et toi ? Que vas-tu faire ?
- Je vais faire ce que j'ai à faire. Ce que j'ai toujours voulu faire.
Ambre hocha lentement la tête et se jeta dans mes bras. Je la serrais avec soulagement. J'allais être perdue si je ne l'avais pas près de moi. Mais je devais m'y faire. Je la repoussais doucement, forçant un sourire. Je déclarai en reculant :
- Que les saisons te soient clémentes.
- Oh. Qu'elles te soient clémentes à toi aussi.
J'avais déjà tourné les talons. Le cœur gros, je l'entendis soupirer. Elle savait comme moi que le temps passerait avant qu'on se revoit. J'avais entendu dire que Rick souhaitait être Chasseur auprès de la Reine d'Angleterre, dans les Landes Arthuriennes de l'Ouest. Ambre l'y suivrait sûrement. Moi, je serais loin. Je pris machinalement la direction de la maison.
Lorsque je poussais la porte, ma Grand-mère vint me serrer dans ses bras sans un mot. Elle savait que j'avais dus m'expliquer avec Ambre et elle se donnait de ce que je lui avais dis, je n'en doutais pas. Ma Grand-mère était comme ça, elle me comprenait sans que j'ai besoin de me justifier. Elle avait comprit que je n'étais pas aller voir Ambre pour me réconcilier avec elle. J'y étais aller pour lui dire au revoir. Etrangement, j'étais soulagée. En la laissant partir, j'épargnais bien des dangers à Ambre. Elle méritait de vivre heureuse auprès de Rick. Pas de mourir comme mes parents. Je refusais qu'elle reste à mes côtés si je risquais de la perdre. Je préférais la savoir loin et en sécurité, que de risquer sa vie en même temps que la mienne.
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